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Showbizz Publié le jeudi 11 février 2010 |

Reportage / La fondation Rose Marie Guiraud - Le cri de coeur des Guirivoires

Source: Viepe.ci

Pionnière et première chorégraphe de Côte d’Ivoire, Marie Rose Guiraud est anthropologue des danses africaines, directrice de la troupe ‘’Les Guirivoires’’ et fondatrice de l’Ecole de Danse et d’Echanges culturels (Edec). Depuis avril 1998, cela fait exactement 12 ans que cette grande dame de la culture est partie au pays de l’oncle Sam pour problèmes de santé.

Que devient son école ? Comment les pensionnaires arrivent-ils à survivre sans elle ?

Pour avoir la réponse à ces questions, nous avons rendu visite aux pensionnaires de cette Fondation.

Il était 10h30 quand nous arrivions dans les locaux de la dite école. Nous avions pensé qu’à cette heure de la matinée, nous allions entendre à l’entrée de l’école, des crépitements de tam-tams, des chants suivis de danse. Que non ! Nous rentrions dans un grand bâtiment peint en vert où se trouvaient plusieurs portes fermées. Nous ne rencontrions personne. Revenus sur nos pas dans la cour, nous croisions M.Téhé Lazare, assistant au directeur de l’Edec, M. Guéi Kayor Alphonse (en voyage) qui nous a livré quelques secrets.

De la création de l’école

La Fondation Rose Marie Guiraud comprend une Ecole de danse et d’échanges culturels (Edec), un département d’insertion sociale, un département d’actions sociales, une structure d’éducation de base, des salles de spectacles, une troupe artistique : ‘’Les Guirivoires’’, un département d’art monumental. L’Edec est un établissement à but non lucratif, fondé en 1981 par Rose Marie Guiraud, pour l’enseignement de la danse africaine, du théâtre, du chant, de la percussion et de la musique traditionnelle.

L’école a pour vocation de former des danseurs chorégraphes professionnels, des professeurs de danse traditionnelle africaine, classique, moderne, contemporaine, des encadreurs artistiques, des percussionnistes professionnels, des comédiens du théâtre et du cinéma. Comme vous le voyez, elle a beaucoup d’ambition pour la culture ivoirienne.

Un seul bâtiment réhabilité

M. Téhé nous confie que depuis le départ de leur ‘’mère’’, aucune autorité de ce pays n’est passée leur rendre visite ou leur venir en aide. Pourtant, il existe belle et bien des hommes et des femmes amoureux de l’art africain en Côte d’Ivoire. Avant son départ pour les Etats-Unis, Marie Rose Guiraud a suscité la mise sur pied d’un comité de réhabilitation à cause de l’état de délabrement avancé de toutes les installations de l’école. Mais ses efforts sont restés vains.

C’est la société de téléphonie mobile, Orange qui a réhabilité le bâtiment vert parce que sa fille Marie Lyne avait remporté un jeu dénommé ‘’Passionariat’’ organisé par cette société. Depuis lors, les responsables de l’école attendent un financement de personnes de bonne volonté pour achever les travaux. En 2008, ils ont reçu de l’argent des âmes de bonne volonté pour achever les case que Marie Rose Guiraud a baptisées ‘’N’klouéta’’ en wobé, qui signifie ‘’habiter ici’’, ‘’durer ici’’.

Concernant le bâtiment occupé par les chrétiens pour les moments de prière, M. Téhé Lazare confie que les travaux ont été achevés par les chrétiens eux-mêmes. Et la somme qu’ils donnent par mois pour participer au règlement des factures de la Cie et de la Sodeci est leur contribution. Un autre bâtiment, l’auditorium avec un sous-sol est resté jusqu’aujourd’hui en chantier.


Les élèves livrés à eux-mêmes

Lorsque Marie Rose Guiraud créait cette fondation, elle visait le social. Donc tous ceux qu’elle a recueillis, sont pour la plupart, des orphelins. Cela pour dire qu’elle est la mère de tous les enfants pensionnaires de sa Fondation et depuis son départ, l’école est devenue une jungle où chacun lutte pour sa survie. L’argent qu’elle fait parvenir à la Fondation ne peut pas couvrir toutes les dépenses.

Il faut aussi rappeler que l’école n’a pas un fonds propre, compte tenu de la gratuité de l’inscription. Oulaï Bamba Noël, danseur qui a fait son entrée dans cette école depuis 1991, après avoir remporté le 1er prix du concours ‘’Varietoscope’’, nous apprend que pour survivre, ils organisent à la Fondation, des spectacles chaque vendredi soir. Mais avant, ils distribuent des cartes d’invitation en faisant le porte-à-porte dans le quartier.

« A la fin du spectacle, nous faisons passer un panier afin que chacun dépose la somme qu’il peut donner », dira-t-il avant d’ajouter : « C’est avec cet argent que nous payons la nourriture, le savon et bien d’autres besoins». A côté de cela, « chacun à ses propres ‘’gombos’’ qui lui permettent d’obtenir de l’argent. Pour y arriver, il faut se servir de ses propres relations ». C’est pourquoi, les répétitions, « nous les mettons du lundi au jeudi, de 9h à 12h pour les anciens et les après-midis, de 14h à 17h pour les débutants.

De sorte que chacun puisse vaquer à ses occupations ». Aujourd’hui, beaucoup ont abandonné parce qu’ils vivent dans des conditions très difficiles. Ceux qui ont des parents quelque part, ont préféré les rejoindre, ceux qui n’ont nulle part où aller, ou qui aiment la chose culturelle, résistent aux intempéries auxquelles ils sont confrontés. Bien avant le départ de l’artiste chorégraphe aux Etats-Unis, la troupe ‘’Les Guirivoires’’ était sollicitée pour des spectacles à travers différentes villes de la Côte d’Ivoire, des pays d’Europe et d’Amérique.

« Lorsqu’elle était là, il y avait beaucoup d’ouverture pour nous. Nous étions sollicités pour des spectacles ; mais depuis son absence, personne ne s’intéresse à nous. Personne ne songe à nous inviter pour un spectacle. C’est l’Onuci seule qui a pensé à faire quelques tournées avec nous. Notre ‘’mère’’ nous manque énormément », explique Oulaï d’un ton nostalgique.

« Il y a une année où, elle nous a annoncé son retour. Nous avons tout organisé pour l’accueillir, malheureusement, elle n’est pas arrivée. Je vous avoue que la fondation était attristée comme dans un deuil », a-t-il ajouté. Cela pour nous dire qu’ils ont hâte de la revoir à leur côté, afin qu’elle prenne les choses en main pour que tout redeviennent comme avant.


Le retour de Marie Rose Guiraud prévu pour fin août

La mère des lieux a décidé de rentrer définitivement en Côte d’Ivoire et retrouver ses enfants qui la réclament, en août 2010 prochain. Pour cela, une convention a été initiée par la Fondation pour préparer son retour. Cette convention qui débute le 1er août, s’articulera autour de la vie de l’artiste chorégraphe, à travers des débats sur ses œuvres, des colloques, des spectacles. Des courriers ont déjà été adressés au chef de l’Etat, aux ministres et à certaines autorités de ce pays.

Son retour dépend donc de « la réussite de cette convention ». De la même manière qu’elle s’est sacrifiée en se mettant à la disposition des orphelins de ce pays, Seka Levis, peintre, abondant dans la même veine qu’Oulaï Noël et Téhé, souhaite que les autorités fassent ce même sacrifice pour la réussite de la convention afin de permettre à la fondatrice de l’Edec de rentrer définitivement chez elle et continuer son œuvre.

Par ailleurs, il demande à l’Etat de venir en aide à l’école en attendant le retour de la fondatrice. Parce qu’il ne serait pas juste que Marie Rose Guiraud soit en Côte d’Ivoire pour montrer son amour pour cette école.

L’Etat ivoirien s’en fout-il de l’art?

Pour ceux qui ne le savent pas, Rose Marie Guiraud est danseuse, chanteuse et actrice de théâtre. Elle a été professeur de danse à l’Institut Supérieur des Arts et d’Actions Culturelles d’Abidjan (Insaac). Officier de l’ordre du mérite culturel de Côte d’Ivoire, elle participe depuis 1973 activement à la vie culturelle et artistique de la Côte d’Ivoire. Elle a plusieurs fois représenté l’Afrique en général et son pays en particulier, à travers le monde.

Elle a à son actif, des compositions phonographiques dont la dernière à succès est ‘’Welcome Mandela’’ et plusieurs œuvres chorégraphiques théâtrales et des comédies musicales dont la dernière à succès comme les précédentes est ‘’A chacun son oignon’’. Elle enseigne, depuis sa guérison, l’art ivoirien aux américains. Avec cette potentialité que possède la culture ivoirienne, la Fondation de Marie Rose Guiraud ne devrait pas être laissée pour compte. Les champs de manioc et les herbes rivalisent avec les pensionnaires.

Mais chacun ferme les yeux là-dessus. Les autorités ivoiriennes investissent des milliards pour le football ou dans d’autres secteurs d’activités mais ne sont pas prêtes à apporter de l’assistance à l’école de celle qui a été au début des danses traditionnelles et surtout de l’art africain en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, ‘’Les Guirivoires’’ cohabitent avec les serpents sous le regard coupable de l’Etat.

Parmi ‘’Les Guirivoires’’, certains par leur talent, évoluent en hexagone comme professeurs de danse ou de théâtre. Ceux-là ont aussi oublié l’école qui leur a donné ces compétences. C’est le lieu de rappeler au peuple ivoirien qu’il n’est pas encore tard pour mieux faire, ‘’Les Guirivoires’’ ont laissé leurs portes ouvertes pour attendre leur soutien.
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