Quelle analyse peut-on faire de l’adresse radiotélévisée du président de la République, Laurent Gbagbo, aux Ivoiriens, le samedi 13 mars 2010 ? Une réalité fondamentale a retenu notre attention. Il s’agit de l’option prise par le chef de l’Etat de ne pas exposer ses prédécesseurs face à l’opinion publique, de couvrir leurs mauvais choix et leurs échecs en matière de politique d’électricité au nom du principe de la continuité de l’Etat. “Ici même en Côte d’Ivoire, nous avons connu une situation analogue en 1984. Les délestages ont duré au moins trois (03) mois. Vingt six ans plus tard, la consommation d’énergie a fortement augmenté. La demande est passée de 1 794 giga watts heures (GWH) en 1984 à 5 315 giga watts heures (GWH) en 2010. Le nombre des abonnés à la CIE est passé de moins de 350 000 à plus d’un million aujourd’hui. Cette évolution a des conséquences sur l’exploitation des équipements. Depuis cette époque déjà, on devrait avoir construit de nouveaux barrages hydroélectriques. Mais, comme aujourd’hui, la conjoncture économique n’avait pas permis au gouvernement d’alors de faire les investissements nécessaires, la politique des barrages hydroélectriques produisant de l’électricité à bon marché a été abandonnée au profit de centrales thermiques. Ces infrastructures nous ont certes permis de combler le déficit de production, mais elles ont contribué à creuser le déficit financier structurel du secteur. Il est avéré que l’électricité produite par les centrales thermiques est plus chère que celle produite par les centrales hydroélectriques”.
Ces propos du président Gbagbo démontrent, entre les lignes, le manque de lucidité dont ont fait preuve ses prédécesseurs, notamment Félix Houphouet-Boigny (et son Premier ministre, Alassane Dramane Ouattara), ainsi que Henri Konan Bédié en matière d’approvisionnement du pays en électricité. Ces personnalités ont dirigé ce pays en temps de paix. Houphouet durant 33 ans, Bédié pendant 6 ans. Ils n’étaient pas confrontés à des tentatives répétées de coup d’Etat, à des insurrections ou à une rébellion armée. Avant qu’un coup d’Etat emporte son régime en décembre 1999, Henri Konan Bédié a dirigé sans partage et avec totalitarisme la Côte d’Ivoire de 1993 à 1999. C’est d’ailleurs son gouvernement qui a choisi l’option des centrales thermiques en créant AZITO et CIPREL. Se gardant de poursuivre la voie des centrales hydroélectriques ouverte par Houphouet à travers la construction des barrages d’Ayamé 1 et 2, de Kossou et de Buyo. Alors que le choix de l’électricité produite par les centrales hydroélectriques était plus profitable et que le climat de la Côte d’Ivoire avec ses saisons de pluies apparaissait favorable, le régime Bédié a pris le chemin de l’électricité provenant des centrales thermiques. Une électricité onéreuse qui nécessite un accompagnement financier régulier sans discontinuité. Pour l’approvisionnement des centrales en gaz et fuel, mais également pour l’entretien des turbines. Bédié a choisi l’électricité produite par les centrales thermiques sans véritablement se projeter dans l’avenir. Même si elle ne dépend pas, contrairement à l’électricité provenant des centrales hydroélectriques, aux aléas de la nature, l’électricité des centrales thermiques n’est pas toujours sans surprise. A preuve, plusieurs années après la création d’AZITO et CIPREL, des inquiétudes ont surgi. Des inquiétudes que le ministère des Mines et Energies sous le régime Gbagbo avait révélées dans un rapport d’études approfondies du secteur de l’électricité. Au nombre des solutions proposées, la construction de nouvelles centrales thermiques pour soutenir celles existantes. Puisque la Côte d’Ivoire sous Bédié ayant déjà mis le pied dans le plat, il fallait prévenir toute surprise. Malheureusement, les bailleurs de fonds ont refusé de financer la construction de nouvelles centrales thermiques au motif que l’argent devrait plutôt servir aux secteurs de l’éducation et de la santé. Le gouvernement s’est donc tourné vers le privé. Trois sociétés ont été choisies pour mobiliser les fonds nécessaires à la construction des nouvelles centrales thermiques. Depuis quelques années, ces entreprises peinent à réunir les fonds. Certains de leurs partenaires, a-t-on appris, évoquent le risque-pays concernant la Côte d’Ivoire pour monter les enchères en termes de remboursement. Autre obstacle, une entreprise française, dont nous taisons volontairement le nom, serait très active au plan international pour empêcher que l’argent soit trouvé pour la construction des centrales. Les inquiétudes qui visiblement n’avaient pas été prévues, à la fin des années 90, lors de la création d’AZITO et CIPREL, apparaissent au grand jour aujourd’hui. “Le délestage se prolonge et ses conséquences pèsent de plus en plus sur la vie des populations et les activités industrielles. La cause essentielle de cette situation, c’est un accident survenu le 22 décembre 2009 sur les installations de la centrale d’AZITO. Cet accident a provoqué l’arrêt d’une turbine, entraînant une chute brutale de la production d’électricité”, a soutenu, samedi, le président Gbagbo face aux Ivoiriens.
Ce que les Ivoiriens doivent aussi savoir, c’est que CIPREL va arrêter, dès la fin de ce mois, l’une de ses turbines pour cause de visite technique. Cette opération pourrait prendre un mois. Il s’agit, disent les techniciens, d’un contrôle impératif. Qui, s’il n’est pas fait, exposera la CIPREL à la non-couverture de l’assurance en cas d’accident de la turbine en panne. L’une des deux centrales thermiques présente aussi une turbine qui est actuellement fissurée. La surveillance y est de mise pour parer à toute éventualité. Comme on le constate, opter pour l’électricité produite par les centrales thermiques exige une lucidité accrue. Comparable à la ménagère qui a laissé son poulet cuire au four. Toute déconcentration entraîne la perte du poulet. La situation est moins contraignante avec l’électricité provenant des centrales hydroélectriques. Voilà pourquoi on s’explique mal que ni Houphouet ni Bédié n’ont construit le barrage de Soubré. Alors que toutes les études avaient été faites et les techniciens disponibles. Mieux, Houphouet pouvait consacrer l’argent qui a été mis dans des réalisations non fondamentales pour le peuple au début des années 80 dans celle du barrage de Soubré. Même son de cloche pour Bédié dont la gouvernance avait bénéficié de “pluies de milliards” en 1994-1995 du fait de la dévaluation du franc CFA. M. Bédié a préféré engloutir ces milliards dans des constructions pharaoniques pour “sa gloire”.
Selon une source crédible, le projet du barrage de Soubré a été sacrifié sur l’hôtel des querelles ethniques propres au PDCI-RDA. Vrai ou faux? La vérité finira par triompher dans cette affaire. Comme elle a triomphé dans la privation du secteur de l’électricité par Alassane Dramane Ouattara, alors Premier ministre, en 1991. On sait, aujourd’hui, que l’EECI (Energie électrique de Côte d’Ivoire) n’était pas une entreprise irrécupérable. Certes, elle était en difficulté, mais ne nécessitait pas d’être obligatoirement privatisée. “L’EECI avait un problème de gestion. Il fallait tout simplement changer les hommes. Nommé un manager à la tête de la société, la restructurer et relancer la machine. On pouvait se passer de la privatisation qui, on s’en rend compte aujourd’hui, était une mauvaise option”, confie une source crédible du secteur de l’électricité.Samedi face aux Ivoiriens, Gbagbo a rassuré
Didier Depry didierdepri@yahoo.fr
Ces propos du président Gbagbo démontrent, entre les lignes, le manque de lucidité dont ont fait preuve ses prédécesseurs, notamment Félix Houphouet-Boigny (et son Premier ministre, Alassane Dramane Ouattara), ainsi que Henri Konan Bédié en matière d’approvisionnement du pays en électricité. Ces personnalités ont dirigé ce pays en temps de paix. Houphouet durant 33 ans, Bédié pendant 6 ans. Ils n’étaient pas confrontés à des tentatives répétées de coup d’Etat, à des insurrections ou à une rébellion armée. Avant qu’un coup d’Etat emporte son régime en décembre 1999, Henri Konan Bédié a dirigé sans partage et avec totalitarisme la Côte d’Ivoire de 1993 à 1999. C’est d’ailleurs son gouvernement qui a choisi l’option des centrales thermiques en créant AZITO et CIPREL. Se gardant de poursuivre la voie des centrales hydroélectriques ouverte par Houphouet à travers la construction des barrages d’Ayamé 1 et 2, de Kossou et de Buyo. Alors que le choix de l’électricité produite par les centrales hydroélectriques était plus profitable et que le climat de la Côte d’Ivoire avec ses saisons de pluies apparaissait favorable, le régime Bédié a pris le chemin de l’électricité provenant des centrales thermiques. Une électricité onéreuse qui nécessite un accompagnement financier régulier sans discontinuité. Pour l’approvisionnement des centrales en gaz et fuel, mais également pour l’entretien des turbines. Bédié a choisi l’électricité produite par les centrales thermiques sans véritablement se projeter dans l’avenir. Même si elle ne dépend pas, contrairement à l’électricité provenant des centrales hydroélectriques, aux aléas de la nature, l’électricité des centrales thermiques n’est pas toujours sans surprise. A preuve, plusieurs années après la création d’AZITO et CIPREL, des inquiétudes ont surgi. Des inquiétudes que le ministère des Mines et Energies sous le régime Gbagbo avait révélées dans un rapport d’études approfondies du secteur de l’électricité. Au nombre des solutions proposées, la construction de nouvelles centrales thermiques pour soutenir celles existantes. Puisque la Côte d’Ivoire sous Bédié ayant déjà mis le pied dans le plat, il fallait prévenir toute surprise. Malheureusement, les bailleurs de fonds ont refusé de financer la construction de nouvelles centrales thermiques au motif que l’argent devrait plutôt servir aux secteurs de l’éducation et de la santé. Le gouvernement s’est donc tourné vers le privé. Trois sociétés ont été choisies pour mobiliser les fonds nécessaires à la construction des nouvelles centrales thermiques. Depuis quelques années, ces entreprises peinent à réunir les fonds. Certains de leurs partenaires, a-t-on appris, évoquent le risque-pays concernant la Côte d’Ivoire pour monter les enchères en termes de remboursement. Autre obstacle, une entreprise française, dont nous taisons volontairement le nom, serait très active au plan international pour empêcher que l’argent soit trouvé pour la construction des centrales. Les inquiétudes qui visiblement n’avaient pas été prévues, à la fin des années 90, lors de la création d’AZITO et CIPREL, apparaissent au grand jour aujourd’hui. “Le délestage se prolonge et ses conséquences pèsent de plus en plus sur la vie des populations et les activités industrielles. La cause essentielle de cette situation, c’est un accident survenu le 22 décembre 2009 sur les installations de la centrale d’AZITO. Cet accident a provoqué l’arrêt d’une turbine, entraînant une chute brutale de la production d’électricité”, a soutenu, samedi, le président Gbagbo face aux Ivoiriens.
Ce que les Ivoiriens doivent aussi savoir, c’est que CIPREL va arrêter, dès la fin de ce mois, l’une de ses turbines pour cause de visite technique. Cette opération pourrait prendre un mois. Il s’agit, disent les techniciens, d’un contrôle impératif. Qui, s’il n’est pas fait, exposera la CIPREL à la non-couverture de l’assurance en cas d’accident de la turbine en panne. L’une des deux centrales thermiques présente aussi une turbine qui est actuellement fissurée. La surveillance y est de mise pour parer à toute éventualité. Comme on le constate, opter pour l’électricité produite par les centrales thermiques exige une lucidité accrue. Comparable à la ménagère qui a laissé son poulet cuire au four. Toute déconcentration entraîne la perte du poulet. La situation est moins contraignante avec l’électricité provenant des centrales hydroélectriques. Voilà pourquoi on s’explique mal que ni Houphouet ni Bédié n’ont construit le barrage de Soubré. Alors que toutes les études avaient été faites et les techniciens disponibles. Mieux, Houphouet pouvait consacrer l’argent qui a été mis dans des réalisations non fondamentales pour le peuple au début des années 80 dans celle du barrage de Soubré. Même son de cloche pour Bédié dont la gouvernance avait bénéficié de “pluies de milliards” en 1994-1995 du fait de la dévaluation du franc CFA. M. Bédié a préféré engloutir ces milliards dans des constructions pharaoniques pour “sa gloire”.
Selon une source crédible, le projet du barrage de Soubré a été sacrifié sur l’hôtel des querelles ethniques propres au PDCI-RDA. Vrai ou faux? La vérité finira par triompher dans cette affaire. Comme elle a triomphé dans la privation du secteur de l’électricité par Alassane Dramane Ouattara, alors Premier ministre, en 1991. On sait, aujourd’hui, que l’EECI (Energie électrique de Côte d’Ivoire) n’était pas une entreprise irrécupérable. Certes, elle était en difficulté, mais ne nécessitait pas d’être obligatoirement privatisée. “L’EECI avait un problème de gestion. Il fallait tout simplement changer les hommes. Nommé un manager à la tête de la société, la restructurer et relancer la machine. On pouvait se passer de la privatisation qui, on s’en rend compte aujourd’hui, était une mauvaise option”, confie une source crédible du secteur de l’électricité.Samedi face aux Ivoiriens, Gbagbo a rassuré
Didier Depry didierdepri@yahoo.fr