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Économie Publié le jeudi 18 mars 2010 |

Communiqué de presse Banque mondiale: La "corruption discrète" entrave le développement de l’Afrique

WASHINGTON — La « corruption discrète » est profonde et très répandue en Afrique et a des effets disproportionnés sur les pauvres, donc des conséquences à long terme sur le développement, selon un nouveau rapport de la Banque mondiale, qui définit le phénomène comme le manquement des fonctionnaires au devoir de fournir les biens ou services financés par les administrations publiques.

Les auteurs du rapport, intitulé Indicateurs du développement en Afrique 2010, notent que la plupart des études sur la corruption se concentrent sur les types de corruption caractérisés par des échanges d’argent sous la forme de pots-de-vin versés aux personnalités politiques influentes et aux fonctionnaires. Le rapport en question se concentre plutôt sur la façon dont la « corruption discrète » conduit les populations à compter de moins en moins sur les systèmes de prestation de services, ce qui incite les familles à s’en détourner. La corruption discrète, bien qu’elle soit d’une ampleur monétaire moindre que celle d’autres formes de corruption, a néanmoins des conséquences particulièrement préjudiciables sur les pauvres, qui sont singulièrement vulnérables et très dépendants des services publics pour satisfaire leurs besoins les plus élémentaires.

« La corruption discrète ne fait pas autant les grands titres des journaux que les scandales de pots-de-vin, mais elle a des effets aussi corrosifs sur la société », selon Shanta Devarajan, économiste en chef de la Banque mondiale pour la Région Afrique. « La lutte contre la corruption discrète exige de la détermination et de l’engagement de la part des dirigeants et des institutions, comme en matière de politiques, au niveau sectoriel, et — surtout — une responsabilisation accrue et la participation des citoyens ».

Le rapport rassemble des données et des études sur la corruption discrète dans les secteurs de la santé, de l’éducation et de l’agriculture. Par exemple :

Une étude de 2004 a montré qu’il était impossible de rencontrer 20 % des enseignants des écoles primaires des zones rurales de l’ouest du Kenya durant les heures de classe, tandis qu’en Ouganda deux enquêtes ont établi des taux d’absentéisme de 27 % en 2002 et de 20 % en 2007 parmi les enseignants.

En raison de la faiblesse des contrôles exercés au niveau de la production et de la vente en gros, 43 % des engrais analysés vendus en Afrique de l’Ouest dans les années 90 ne contenaient pas les substances nutritives escomptées, ce qui les privait quasiment de toute efficacité.

Durant les années 90, selon certaines études, plus de 50 % des médicaments vendus dans les pharmacies du Nigeria étaient des contrefaçons.

Une enquête d’observation directe réalisée au sujet des prestataires de services de santé en Ouganda a enregistré un taux d’absentéisme de 37 % en 2002 et de 33 % en 2003.

Un des aspects les plus préjudiciables de la corruption discrète est que cette pratique peut avoir des conséquences à long terme. Un enfant qui ne reçoit pas d’éducation adéquate en raison de l’absentéisme des enseignants souffrira d’un manque de capacités cognitives et d’une mauvaise santé à l’âge adulte. L’absence de médicaments et de médecins peut entraîner des décès dus au paludisme et à d’autres maladies. Les agriculteurs à qui l’on a vendu des engrais adultérés peuvent décider de renoncer complètement à l’utilisation d’engrais et se contenter d’une agriculture à faible rendement.

Les Indicateurs du développement en Afrique 2010 comprennent aussi des indicateurs économiques, des tableaux et une analyse expliquant pourquoi la corruption discrète entrave à ce point la réalisation d’objectifs de développement à long et à court terme. Des solutions sont proposées, mais on espère surtout que le fait de braquer les projecteurs sur le problème de la corruption discrète amorcera un débat plus vaste et accélérera la recherche de solutions.

Outre l’étude sur la corruption discrète, les Indicateurs du développement en Afrique contiennent le recueil de données sur l’Afrique le plus détaillé qui soit disponible en un seul volume. Le rapport comprend plus de 450 indicateurs macroéconomiques, sectoriels et sociaux portant sur 53 pays africains. Quelques statistiques en ressortent :

Seuls 37 % des enfants présents en première année du primaire atteignent la cinquième année au Tchad, alors que le pourcentage est de 99 % en Île Maurice;
En Somalie, 29 % de la population ont accès à une source d’eau potable, tandis que la proportion est de 100 % à Maurice;
L’Afrique du Sud est le pays dont le niveau de consommation d’électricité par habitant est le plus élevé (4 809 kWh), alors que l’Éthiopie est celui dont le niveau est le plus bas (38,4 kWh);
À Maurice, on compte en moyenne 22 enfants pour un enseignant du niveau primaire, alors que le ratio est de 91 pour 1 en République centrafricaine.

Le rapport utilise de nouveaux outils de recherche tels que l’Enquête de suivi des dépenses publiques et l’Enquête quantitative sur les prestations de services, qui ont permis aux chercheurs de suivre les ressources et de contrôler l’assiduité des prestataires de services de première ligne. Les résultats de ces recherches et de ces enquêtes permettent de mieux comprendre un vaste éventail d’abus et ont contribué à redéfinir le débat en matière de corruption
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