Malgré la réparation de la Centrale d’Azito, les Ivoiriens continuent de souffrir du délestage. Car, le secteur électrique ivoirien est véritablement sinistré. Ce document exclusif édifiant explique comment la population demeurera encore durant de longs mois dans le noir.
Une seule hirondelle ne saurait faire le printemps. Depuis hier, l’avarie de la Centrale thermique d’Azito est réparée. Les populations peuvent sortir un peu des ténèbres mais les difficultés du secteur électrique demeurent toujours. Et le délestage n’a pas totalement disparu. Il convient de savoir que la fourniture de l’électricité en Côte d’Ivoire est de plus en plus perturbée et les performances du système électrique ivoirien se dégradent chaque année depuis 1998. Le temps moyen de coupure (Tmc) est passé de 50h en 1990, à 13h en 1997 puis à 38h en 2008. La tendance du Tmc de l’année 2009 est évaluée à plus de 40h. Le rendement global du système, tenant compte des pertes techniques et non techniques, a chuté de 9 points depuis 2002. Le nombre d’abonnés est passé de 646 000 à plus de 1 000 000. La puissance moyenne appelée est passée de 400 Mw à 580 Mw, soit une augmentation de 45% pendant que la puissance appelée à la pointe est passée de 542 Mw à 815Mw.
Beaucoup à faire
Soit une augmentation de 50%. La consommation nationale d’électricité est passée de 3 443 GWh à 5072 Gwh. Soit une hausse de 47%. Face à cette forte croissance de la demande, le dimensionnement des infrastructures de base du système électrique n’a pas sensiblement évolué. Ainsi, depuis 2000, le parc de production d’une puissance installée de 1210 Mw n’a enregistré aucun ouvrage nouveau. Les créations et renforcements d’ouvrages sur les réseaux de transport et de distribution ont été très insuffisants par rapport à l’évolution des charges. Personne ne saurait passer sous silence l’inadéquation du système électrique ivoirien par rapport à la demande croissante d’électricité qui est aujourd’hui importante. Il faut des actions urgentes et la réparation d’Azito est une goutte d’eau dans la mer quand on sait ce qui attend la Côte d’Ivoire, un pays où les dirigeants qui ont en charge ce pays ne planifient rien. Et le déficit de production pour l’année 2009 est évalué à 300 Mw. Selon un document en notre possession, la mise en œuvre des recommandations du plan directeur des équipements de Production-Transport élaboré en 2001 par le groupement Hqi/Snc-Lavalin accuse un important retard. Le réseau de transport d’énergie de référence ayant constitué le réseau initial de l’étude du plan directeur n’est pas encore entièrement réalisé. Certains projets de renforcement du réseau prévus en 2001 ne sont pas encore réalisés. Notamment la création du poste Htb/Hta d’Anoumabo, l’entrée en coupure de ligne 225 Kv Abobo/Prestea au poste de la Riviera, la réalisation de la boucle 90 Kv du réseau Est (Serebou, Bondoukou et Agnibilékro). Le document nous situe sur les principaux problèmes techniques d’exploitation et les limites de capacité du système électrique ivoirien. Il nous révèle les dangers qui guettent toujours le pays et qui démontre que les délestages ne sont pas encore terminés. Il apparaît en effet une inadéquation structurelle du réseau électrique par rapport à l’évolution de la demande. Celle-ci est caractérisée par l’absence de réserves de production qui conduit à des délestages de la clientèle à la pointe de consommation entre 19h et minuit afin de maintenir l’équilibre entre la production et la consommation. Il y a aussi le dépassement de capacité des ouvrages de transport et de distribution qui nécessite l’interruption de la fourniture d’électricité pour ramener les transits et les tensions d’exploitation dans les plages de valeurs admissibles et protéger ainsi les ouvrages tiers. L’on enregistre également le vieillissement des équipements du réseau qui entraîne une récurrence des pannes et des avaries de matériel, dégradant encore plus les conditions d’exploitation. A ces difficultés, il faudrait aussi ajouter l’obsolescence des systèmes de contrôle-commande et de téléconduite du réseau qui ne permet plus de rendre disponible les éléments d’information indispensables pour réaliser une bonne surveillance des installations et garantir une bonne réactivité d‘exploitation. L’on ne saurait occulter par ailleurs l’absence d’infrastructures de secours qui impose une interruption systématique de la fourniture d’électricité à la clientèle pendant les travaux de maintenance. Les populations ivoiriennes ne sont donc pas encore sorties de l’auberge. Aujourd’hui, le tableau n’est vraiment pas reluisant. Ces problèmes constituent un ensemble de contraintes qui placent le système électrique en permanence dans une situation d’exploitation dégradée. Une exploitation conforme aux règles normales d’exploitation devrait se traduire à minima par le respect des valeurs limites contractuelles assignées à la qualité de la fourniture de l’électricité. Même si Azito a redémarré, il importe de savoir que la puissance totale installée du parc de production existant est de 1210 Mw dont 604 Mw pour la production hydraulique et 606 Mw pour la production thermique. Ce parc de production n’a pas évolué depuis la mise en service de la phase 2 du projet Azito en 2000. Aujourd’hui, la puissance mobilisable à la pointe de consommation pour satisfaire la demande d’électricité est d’environ 800 Mw à cause des conditions d’exploitation sur site et de variation du niveau des lacs dans les barrages hydroélectriques. En effet, en situation normale d’exploitation, il n’y a pas de réserve de production à la pointe pour faire face aux aléas. En 2009, la pointe de consommation des jours ouvrables était supérieure à 800 Mw et avait atteint un niveau de 833 Mw en mai et devait s’établir à 872 Mw en décembre 2009. Le plan de défense du système (délestage automatique) qui constitue un moyen exceptionnel de rétablissement de l’équilibre production-consommation est régulièrement activé depuis 2007 et le plan de délestage manuel est mis en œuvre périodiquement pour pallier les situations de déficit prévisibles. Les mesures palliatives en termes de disposition d’exploitation arrivent à épuisement et il est urgent selon le rapport dont les conclusions font suite au travail effectué récemment par la CIE (Compagnie ivoirienne d’électricité), Sopie (Société d’opération ivoirienne d’électricité) et Sogepe (Société de gestion du patrimoine du secteur de l’électricité) d’entamer les travaux recensés dans le plan triennal (2010-2012). Tout doit se faire dans un cadre cohérent et ordonné afin de s’assurer de leur efficacité et ce, dans le respect de l’équilibre financier du secteur de l’électricité. La viabilité du secteur de l’électricité en Côte d’Ivoire dans les années à venir dépendra, à n’en point douter, de l’importance des efforts qui seront consentis pour la maîtrise du développement du système électrique et la mise en œuvre des programmes d’investissement dans les délais requis. Ce document qui se veut une boussole et qui est entre les mains de nos dirigeants et des acteurs du secteur électrique doit aider à ramener progressivement le système électrique dans des conditions d’exploitation normales. Comme on a pu le constater, la dégradation de la qualité de service est structurelle, les parades en termes de disposition d’exploitation arrivent à épuisement. Pour viser des solutions durables de long terme, une attention particulière devra être portée sur la planification à moyen et long terme du système électrique appuyée par une volonté de mise en œuvre effective des programmes d’investissements établis. Selon le document, l’évolution rapide du contexte, technologique, économique et financier, ainsi que le caractère très dynamique des problèmes d’exploitation l’exigent. La qualité du service, la sécurité de l’alimentation en énergie électrique et l’économie nationale dépendent fortement de cet engagement. Et le document souligne que pour viser les solutions durables de long terme, une attention particulière doit être portée sur la planification à moyen et long terme du système électrique. Cette planification devra aboutir à l’élaboration des documents de référence. A savoir, prévision de la demande à long terme, plan directeur des équipements de production et de transport, plan directeur des automatismes et des systèmes de téléconduite, plan directeurs des réseaux de distribution et plans directeurs d’électrification rurale. Il devient donc impératif de dégager des ressources financières pour la mise en œuvre d’un plan d’urgence.
Jean Eric ADINGRA
Une seule hirondelle ne saurait faire le printemps. Depuis hier, l’avarie de la Centrale thermique d’Azito est réparée. Les populations peuvent sortir un peu des ténèbres mais les difficultés du secteur électrique demeurent toujours. Et le délestage n’a pas totalement disparu. Il convient de savoir que la fourniture de l’électricité en Côte d’Ivoire est de plus en plus perturbée et les performances du système électrique ivoirien se dégradent chaque année depuis 1998. Le temps moyen de coupure (Tmc) est passé de 50h en 1990, à 13h en 1997 puis à 38h en 2008. La tendance du Tmc de l’année 2009 est évaluée à plus de 40h. Le rendement global du système, tenant compte des pertes techniques et non techniques, a chuté de 9 points depuis 2002. Le nombre d’abonnés est passé de 646 000 à plus de 1 000 000. La puissance moyenne appelée est passée de 400 Mw à 580 Mw, soit une augmentation de 45% pendant que la puissance appelée à la pointe est passée de 542 Mw à 815Mw.
Beaucoup à faire
Soit une augmentation de 50%. La consommation nationale d’électricité est passée de 3 443 GWh à 5072 Gwh. Soit une hausse de 47%. Face à cette forte croissance de la demande, le dimensionnement des infrastructures de base du système électrique n’a pas sensiblement évolué. Ainsi, depuis 2000, le parc de production d’une puissance installée de 1210 Mw n’a enregistré aucun ouvrage nouveau. Les créations et renforcements d’ouvrages sur les réseaux de transport et de distribution ont été très insuffisants par rapport à l’évolution des charges. Personne ne saurait passer sous silence l’inadéquation du système électrique ivoirien par rapport à la demande croissante d’électricité qui est aujourd’hui importante. Il faut des actions urgentes et la réparation d’Azito est une goutte d’eau dans la mer quand on sait ce qui attend la Côte d’Ivoire, un pays où les dirigeants qui ont en charge ce pays ne planifient rien. Et le déficit de production pour l’année 2009 est évalué à 300 Mw. Selon un document en notre possession, la mise en œuvre des recommandations du plan directeur des équipements de Production-Transport élaboré en 2001 par le groupement Hqi/Snc-Lavalin accuse un important retard. Le réseau de transport d’énergie de référence ayant constitué le réseau initial de l’étude du plan directeur n’est pas encore entièrement réalisé. Certains projets de renforcement du réseau prévus en 2001 ne sont pas encore réalisés. Notamment la création du poste Htb/Hta d’Anoumabo, l’entrée en coupure de ligne 225 Kv Abobo/Prestea au poste de la Riviera, la réalisation de la boucle 90 Kv du réseau Est (Serebou, Bondoukou et Agnibilékro). Le document nous situe sur les principaux problèmes techniques d’exploitation et les limites de capacité du système électrique ivoirien. Il nous révèle les dangers qui guettent toujours le pays et qui démontre que les délestages ne sont pas encore terminés. Il apparaît en effet une inadéquation structurelle du réseau électrique par rapport à l’évolution de la demande. Celle-ci est caractérisée par l’absence de réserves de production qui conduit à des délestages de la clientèle à la pointe de consommation entre 19h et minuit afin de maintenir l’équilibre entre la production et la consommation. Il y a aussi le dépassement de capacité des ouvrages de transport et de distribution qui nécessite l’interruption de la fourniture d’électricité pour ramener les transits et les tensions d’exploitation dans les plages de valeurs admissibles et protéger ainsi les ouvrages tiers. L’on enregistre également le vieillissement des équipements du réseau qui entraîne une récurrence des pannes et des avaries de matériel, dégradant encore plus les conditions d’exploitation. A ces difficultés, il faudrait aussi ajouter l’obsolescence des systèmes de contrôle-commande et de téléconduite du réseau qui ne permet plus de rendre disponible les éléments d’information indispensables pour réaliser une bonne surveillance des installations et garantir une bonne réactivité d‘exploitation. L’on ne saurait occulter par ailleurs l’absence d’infrastructures de secours qui impose une interruption systématique de la fourniture d’électricité à la clientèle pendant les travaux de maintenance. Les populations ivoiriennes ne sont donc pas encore sorties de l’auberge. Aujourd’hui, le tableau n’est vraiment pas reluisant. Ces problèmes constituent un ensemble de contraintes qui placent le système électrique en permanence dans une situation d’exploitation dégradée. Une exploitation conforme aux règles normales d’exploitation devrait se traduire à minima par le respect des valeurs limites contractuelles assignées à la qualité de la fourniture de l’électricité. Même si Azito a redémarré, il importe de savoir que la puissance totale installée du parc de production existant est de 1210 Mw dont 604 Mw pour la production hydraulique et 606 Mw pour la production thermique. Ce parc de production n’a pas évolué depuis la mise en service de la phase 2 du projet Azito en 2000. Aujourd’hui, la puissance mobilisable à la pointe de consommation pour satisfaire la demande d’électricité est d’environ 800 Mw à cause des conditions d’exploitation sur site et de variation du niveau des lacs dans les barrages hydroélectriques. En effet, en situation normale d’exploitation, il n’y a pas de réserve de production à la pointe pour faire face aux aléas. En 2009, la pointe de consommation des jours ouvrables était supérieure à 800 Mw et avait atteint un niveau de 833 Mw en mai et devait s’établir à 872 Mw en décembre 2009. Le plan de défense du système (délestage automatique) qui constitue un moyen exceptionnel de rétablissement de l’équilibre production-consommation est régulièrement activé depuis 2007 et le plan de délestage manuel est mis en œuvre périodiquement pour pallier les situations de déficit prévisibles. Les mesures palliatives en termes de disposition d’exploitation arrivent à épuisement et il est urgent selon le rapport dont les conclusions font suite au travail effectué récemment par la CIE (Compagnie ivoirienne d’électricité), Sopie (Société d’opération ivoirienne d’électricité) et Sogepe (Société de gestion du patrimoine du secteur de l’électricité) d’entamer les travaux recensés dans le plan triennal (2010-2012). Tout doit se faire dans un cadre cohérent et ordonné afin de s’assurer de leur efficacité et ce, dans le respect de l’équilibre financier du secteur de l’électricité. La viabilité du secteur de l’électricité en Côte d’Ivoire dans les années à venir dépendra, à n’en point douter, de l’importance des efforts qui seront consentis pour la maîtrise du développement du système électrique et la mise en œuvre des programmes d’investissement dans les délais requis. Ce document qui se veut une boussole et qui est entre les mains de nos dirigeants et des acteurs du secteur électrique doit aider à ramener progressivement le système électrique dans des conditions d’exploitation normales. Comme on a pu le constater, la dégradation de la qualité de service est structurelle, les parades en termes de disposition d’exploitation arrivent à épuisement. Pour viser des solutions durables de long terme, une attention particulière devra être portée sur la planification à moyen et long terme du système électrique appuyée par une volonté de mise en œuvre effective des programmes d’investissements établis. Selon le document, l’évolution rapide du contexte, technologique, économique et financier, ainsi que le caractère très dynamique des problèmes d’exploitation l’exigent. La qualité du service, la sécurité de l’alimentation en énergie électrique et l’économie nationale dépendent fortement de cet engagement. Et le document souligne que pour viser les solutions durables de long terme, une attention particulière doit être portée sur la planification à moyen et long terme du système électrique. Cette planification devra aboutir à l’élaboration des documents de référence. A savoir, prévision de la demande à long terme, plan directeur des équipements de production et de transport, plan directeur des automatismes et des systèmes de téléconduite, plan directeurs des réseaux de distribution et plans directeurs d’électrification rurale. Il devient donc impératif de dégager des ressources financières pour la mise en œuvre d’un plan d’urgence.
Jean Eric ADINGRA