Blaise Compaoré et Laurent Gbagbo se sont rencontrés le 1er avril à Bobo Dioulasso. Le médiateur dans la crise ivoirienne et son homologue ivoirien sont tombés d’accord pour ouvrir le contentieux sur la liste dite «blanche». Une vraie boîte de Pandore que Compaoré vient d’ouvrir sans certainement le savoir.
« Après l’établissement de la liste électorale, il y a eu un croisement informatique. Maintenant, il reste à faire un croisement humain et à faire en même temps ce qu’on appelle la réunification du pays qui comprend les déploiements de la douane, de l’administration protectorat, des militaires, etc. » Le médiateur dans la crise ivoirienne, Blaise Compaoré, a fini par céder aux desiderata du camp présidentiel en acceptant l’ouverture du contentieux sur la liste dite «blanche», c`est-à-dire, celle des 5 millions 300.000 personnes déjà validées par l’Onu et les différentes parties. Même si les deux présidents essaient de baliser le champ du contentieux en précisant que « ce contentieux devrait se faire selon le mode opératoire déjà prévu, à savoir que c’est celui qui conteste la nationalité d’un électeur sur cette liste, qui doit en apporter la preuve », personne n’est dupe. En ouvrant la boîte de Pandore, Blaise Compaoré repousse aux calendes ivoiriennes les élections attendues depuis la fin du mandat présidentiel en 2005. Le facilitateur qui reconnaît que les « Ivoiriens ont perdu beaucoup de temps », souhaite cependant que « toutes ces questions (contentieux sur la liste électorale et la réunification du pays) soient réglées au plus tard fin mai, c`est-à-dire dans deux mois. Le bon sens nous autorise à douter de ce chronogramme. De quelles preuves dispose le camp présidentiel pour dire que plus de deux millions de personnes se sont inscrites de façon frauduleuse sur la liste électorale ? Même en dix ans, Gbagbo et ses partisans n’auront pas fini de justifier que ‘X’’ ou ‘‘Y’’ ne sont pas Ivoiriens. Souvenons-nous du Forum national de la réconciliation initié par le numéro un ivoirien. L’occasion était belle pour les ivoiritaires qui déniaient la nationalité ivoirienne à Alassane Ouattara d’apporter des éléments de preuve. Pendant trente jours, on attendu en vain. Le « dossier en béton » promis par le député Ben Soumahoro a été un flop. Y a-t-il eu un contentieux sur la liste électorale de 2000 ? Pourquoi après un croisement informatique, Gbagbo et ses partisans réclament désormais un « croisement humain ou populaire » ? On n’a pas besoin de sortir de Science-Po pour saisir tout le contour de cette exigence. Lisons l’explication du ministre de la Défense, Michel Amani N’Guessan, le 14 mars à Korhogo, devant les militants Fpi. « (…) Gbagbo dit que sur les 5 millions 300.000 personnes, nous allons faire un croisement populaire. C’est-à-dire, les gens sont réunis et puis, on lit les noms dans les quartiers, dans les villages. Et on dit : non, non ! Celui-là n’est pas Ivoirien. A toi de démontrer que tu es Ivoirien. Mais il n’y a pas palabre dans ça ! » Fidèle à sa logique, le Fpi ne voudra, pour tout l’or du monde, changer de stratégie. Il appartiendra donc aux prétendus fraudeurs ou voleurs de venir à la barre pour dire par quel miracle ils sont devenus Ivoiriens, la race aérienne. Amani N’Guessan, très sûr de son fait, poursuit : « (…) En Côte d’Ivoire, on finit par savoir que tu es étranger. Dans mon village, on s’est réuni et on a demandé à celui qui s’est inscrit : c’est quel nom ça ? On ne connaît pas ça ici ! On lui a dit : toi, tu viens d’où ? Il a voulu s’expliquer, on a compris qu’il n’était pas ivoirien, on l’a attrapé et on l’a mis en prison. C’est dans le village du ministre de la Défense qu’il a voulu faire ça. Je suis venu, au nom de Pascal Affi N’Guessan (président du Fpi, ndlr), vous dire que ce combat-là, nous allons le mener. » Le président du Faso a-t-il décidé de cautionner cette dérive identitaire ? C’est en tout cas un chèque en blanc qu’il a signé le 1er avril à Bobo Dioulasso à son homologue ivoirien pour parachever sa longue guerre contre les prétendus « étrangers », usurpateurs de la nationalité ivoirienne. Cette boîte de Pandore qu’il a ouverte provoquera, à coup sûr, des dégâts.
Jean Roche Kouamé
« Après l’établissement de la liste électorale, il y a eu un croisement informatique. Maintenant, il reste à faire un croisement humain et à faire en même temps ce qu’on appelle la réunification du pays qui comprend les déploiements de la douane, de l’administration protectorat, des militaires, etc. » Le médiateur dans la crise ivoirienne, Blaise Compaoré, a fini par céder aux desiderata du camp présidentiel en acceptant l’ouverture du contentieux sur la liste dite «blanche», c`est-à-dire, celle des 5 millions 300.000 personnes déjà validées par l’Onu et les différentes parties. Même si les deux présidents essaient de baliser le champ du contentieux en précisant que « ce contentieux devrait se faire selon le mode opératoire déjà prévu, à savoir que c’est celui qui conteste la nationalité d’un électeur sur cette liste, qui doit en apporter la preuve », personne n’est dupe. En ouvrant la boîte de Pandore, Blaise Compaoré repousse aux calendes ivoiriennes les élections attendues depuis la fin du mandat présidentiel en 2005. Le facilitateur qui reconnaît que les « Ivoiriens ont perdu beaucoup de temps », souhaite cependant que « toutes ces questions (contentieux sur la liste électorale et la réunification du pays) soient réglées au plus tard fin mai, c`est-à-dire dans deux mois. Le bon sens nous autorise à douter de ce chronogramme. De quelles preuves dispose le camp présidentiel pour dire que plus de deux millions de personnes se sont inscrites de façon frauduleuse sur la liste électorale ? Même en dix ans, Gbagbo et ses partisans n’auront pas fini de justifier que ‘X’’ ou ‘‘Y’’ ne sont pas Ivoiriens. Souvenons-nous du Forum national de la réconciliation initié par le numéro un ivoirien. L’occasion était belle pour les ivoiritaires qui déniaient la nationalité ivoirienne à Alassane Ouattara d’apporter des éléments de preuve. Pendant trente jours, on attendu en vain. Le « dossier en béton » promis par le député Ben Soumahoro a été un flop. Y a-t-il eu un contentieux sur la liste électorale de 2000 ? Pourquoi après un croisement informatique, Gbagbo et ses partisans réclament désormais un « croisement humain ou populaire » ? On n’a pas besoin de sortir de Science-Po pour saisir tout le contour de cette exigence. Lisons l’explication du ministre de la Défense, Michel Amani N’Guessan, le 14 mars à Korhogo, devant les militants Fpi. « (…) Gbagbo dit que sur les 5 millions 300.000 personnes, nous allons faire un croisement populaire. C’est-à-dire, les gens sont réunis et puis, on lit les noms dans les quartiers, dans les villages. Et on dit : non, non ! Celui-là n’est pas Ivoirien. A toi de démontrer que tu es Ivoirien. Mais il n’y a pas palabre dans ça ! » Fidèle à sa logique, le Fpi ne voudra, pour tout l’or du monde, changer de stratégie. Il appartiendra donc aux prétendus fraudeurs ou voleurs de venir à la barre pour dire par quel miracle ils sont devenus Ivoiriens, la race aérienne. Amani N’Guessan, très sûr de son fait, poursuit : « (…) En Côte d’Ivoire, on finit par savoir que tu es étranger. Dans mon village, on s’est réuni et on a demandé à celui qui s’est inscrit : c’est quel nom ça ? On ne connaît pas ça ici ! On lui a dit : toi, tu viens d’où ? Il a voulu s’expliquer, on a compris qu’il n’était pas ivoirien, on l’a attrapé et on l’a mis en prison. C’est dans le village du ministre de la Défense qu’il a voulu faire ça. Je suis venu, au nom de Pascal Affi N’Guessan (président du Fpi, ndlr), vous dire que ce combat-là, nous allons le mener. » Le président du Faso a-t-il décidé de cautionner cette dérive identitaire ? C’est en tout cas un chèque en blanc qu’il a signé le 1er avril à Bobo Dioulasso à son homologue ivoirien pour parachever sa longue guerre contre les prétendus « étrangers », usurpateurs de la nationalité ivoirienne. Cette boîte de Pandore qu’il a ouverte provoquera, à coup sûr, des dégâts.
Jean Roche Kouamé