Dakar (APS) – Le comédien et acteur burkinabé Sotigui Kouyaté, une des grandes figures du théâtre et du cinéma africain depuis le milieu des années 1960, est décédé samedi à Paris (France) à l’âge de 73 ans, des suites d’une maladie, a appris l’APS de bonne source.
D’abord joueur de football – capitaine de l’équipe nationale de Haute Volta (actuel Burkina Faso), chanteur, danseur, conteur, musicien et compositeur, Sotigui Kouyaté, né 19 juillet 1936 à Bamako, s’est ensuite consacré à l’enseignement avant de s’orienter vers la comédie. Autodidacte, il monde sa propre compagnie de théâtre en 1966.
Tout au long de sa carrière, il s’est forgé l’image d’un comédien talentueux devenu au fil des apparitions et des interprétations le sage griot de la scène, passeur de mots, de proverbes et symbole du dialogue des peuples et de cultures.
En citoyen africain voulant symboliser l’intégration, il se définissait lui-même ainsi : ‘’Je suis guinéen d’origine, malien de naissance et burkinabé d’adoption. Je ne suis passé par aucune école de théâtre, si ce n’est la grande école de la rue, de la vie.’’
C’est au début des années 1970 que Sotigui Kouyaté fait ses premières apparitions au cinéma. Le cinéaste nigérien Moustapha Alassane le fait jouer dans ‘’FVVA : Femme, villa, voiture, argent’’ (1972) et ‘’Toula ou le génie des eaux’’ (1973).
En 1983, il est le personnage principal du film ‘’Le Médecin de Gafiré’’ de Moustapha Diop. Trois ans plus tard, en 1986, Kouyaté joue aux côtés de l’Ivoirien Isaac de Bankolé, du Guinéen Cheik Doucouré et du Français Jacques Villeret, entre autres, dans ‘’Black Mic Mac’’ réalisé par Thomas Gilou.
Un an avant de se faire remarquer dans ce film, Sotigui Kouyaté avait joué au théâtre dans ‘’Mahabharata’’, mis en scène par le Britannique Peter Brook. Dès lors, il devient le comédien fétiche de ce dernier qui le fait jouer dans ‘’La Tempête’’ (1990), ‘’L’Homme qui prenait sa femme pour un chapeau’’ (1993, d’après l’œuvre d’Olivier Sacks), ‘’Qui est là’’ (1996).
En 1997, il s’associe à Alioune Ifra Ndiaye, Habib Dembélé et Jean-Louis Sagot-Duvauroux, pour monter Mandeka Théâtre de Bamako, une structure de promotion et de création littéraire et artistique. C’est avec cette compagnie qu’il intervient en 1999 dans ‘’Antigone’’ de Sophocle (joué au Théâtre national Daniel Sorano à Dakar).
Puis, viennent ‘’Le Costume’’ de Can Themba, adapté par Mothobi Muloaste (2000), ‘’La Tragédie d’Hamlet’’, de William Shakespeare, traduit par Marie-Hélène Estienne et Jean-Claude Carrière (2003), En octobre 2004, Sotigui Kouyaté est dans la pièce ‘’Tierno Bokar’’, d’après ‘’Vie et l’Enseignement de Tierno Bokar’’, roman du Malien Amadou Hampathé Bâ. Toutes ces pièces ont été mises en scène par Peter Brook.
Au cinéma, il a joué dans de nombreux films : ‘’IP5 - L’île aux pachydermes’’ de Jean-Jacques Beineix, avec Yves Montand (1991), ‘’Golem, l’esprit de l’ exil’’ d’Amos Gitai (1992), ‘’Tombés du ciel’’ de Philippe Lioret (1994), ‘’Le Maître des éléphants’’ de Patrick Grandperret (1995), ‘’La Genèse’’ de Cheick Oumar Sissoko (1995) avec Salif Keïta, Balla Moussa Keïta, Habib Dembélé, ‘’Little Senegal’’ de Rachid Bouchareb (2002), l’histoire d’un Dakarois qui s’embarque sur les traces de ses ancêtres américains.
Sotigui Kouyaté a été admirable dans ‘’Keïta, l’héritage du griot’’ (1995) et ‘’Sia, le rêve du python’’, tous des longs métrages de son fils Dani Kouyaté (2001). Ce film a obtenu 6 distinctions au Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco).
Ces dernières années, en dépit d’un état de santé fragile lié des problèmes pulmonaires, il joue successivement dans ‘’Dirty Pretty Things’’ de Stephen Frears (2003), ‘’Génésis’’ de Marie Perennou et Claude Nuridsany (2004), ‘’L’Annulaire’’ de Diane Bertrand (2005).
Pour son rôle dans ‘’London River’’ de Rachid Bouchareb (2008), il est récompensé par l’Ours d’argent du meilleur acteur au Festival de Berlin (février). Dans ce film, il joue le rôle d’Ousmane, un musulman qui va à la recherche de son enfant, qui n’a pas donné signe de vie depuis les attentats qui ont endeuillé la capitale britannique.
Il a marqué le deuxième Festival culturel panafricain d’Alger (juillet 2009) au cours duquel il a été honoré en même temps qu’une quinzaine d’autres hommes de théâtre du continent. Il avait fait le déplacement de la capitale algérienne où il a reçu sa distinction des mains du ministre algérien de la Culture, Khalida Toumi.
C’est lui, le griot, qui fait le scénario du film présenté par le Tunisien Nouri Bouzid, ‘’Errance’’, dans le cadre du projet ‘’L’Afrique vue par…’’. Le comédien burkinabé y transmet à de jeunes enfants tunisiens les leçons de sagesse héritées des anciens, sur la mémoire, le savoir, l’histoire, l’identité, entre autres enjeux.
Cette figure du théâtre et du cinéma africain, devenue, au fil des années et des interprétations, universelle, a occupé le poste de directeur artistique de la compagnie théâtrale de la Haute Volta, des Ballets du Burkina Faso. Il est le père du réalisateur Dani Kouyaté et du conteur Hassane Kassi Kouyaté.
Lors de la 21-ème édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision (FESPACO), Sotigui Kouyaté a été élevé au rang d’officier de l’Ordre de mérite des arts, des lettres et de la communication avec agrafe "cinéma". A cette occasion, il avait soutenu que “le FESPACO n’appartient pas au Burkina Faso, mais à toute l’Afrique”, estimant que ‘’Chaque Africain porte en lui l’honorabilité et la dignité de l’Afrique”.
‘’Chaque matin, chaque Africain doit se demander : que puis-je faire pour l’Afrique ? C’est seulement par cette volonté de bien faire et de se battre pour une Afrique prospère que l’on se fait utile”, a soutenu Sotigui Kouyaté. Belle leçon, beau viatique.
ADC
D’abord joueur de football – capitaine de l’équipe nationale de Haute Volta (actuel Burkina Faso), chanteur, danseur, conteur, musicien et compositeur, Sotigui Kouyaté, né 19 juillet 1936 à Bamako, s’est ensuite consacré à l’enseignement avant de s’orienter vers la comédie. Autodidacte, il monde sa propre compagnie de théâtre en 1966.
Tout au long de sa carrière, il s’est forgé l’image d’un comédien talentueux devenu au fil des apparitions et des interprétations le sage griot de la scène, passeur de mots, de proverbes et symbole du dialogue des peuples et de cultures.
En citoyen africain voulant symboliser l’intégration, il se définissait lui-même ainsi : ‘’Je suis guinéen d’origine, malien de naissance et burkinabé d’adoption. Je ne suis passé par aucune école de théâtre, si ce n’est la grande école de la rue, de la vie.’’
C’est au début des années 1970 que Sotigui Kouyaté fait ses premières apparitions au cinéma. Le cinéaste nigérien Moustapha Alassane le fait jouer dans ‘’FVVA : Femme, villa, voiture, argent’’ (1972) et ‘’Toula ou le génie des eaux’’ (1973).
En 1983, il est le personnage principal du film ‘’Le Médecin de Gafiré’’ de Moustapha Diop. Trois ans plus tard, en 1986, Kouyaté joue aux côtés de l’Ivoirien Isaac de Bankolé, du Guinéen Cheik Doucouré et du Français Jacques Villeret, entre autres, dans ‘’Black Mic Mac’’ réalisé par Thomas Gilou.
Un an avant de se faire remarquer dans ce film, Sotigui Kouyaté avait joué au théâtre dans ‘’Mahabharata’’, mis en scène par le Britannique Peter Brook. Dès lors, il devient le comédien fétiche de ce dernier qui le fait jouer dans ‘’La Tempête’’ (1990), ‘’L’Homme qui prenait sa femme pour un chapeau’’ (1993, d’après l’œuvre d’Olivier Sacks), ‘’Qui est là’’ (1996).
En 1997, il s’associe à Alioune Ifra Ndiaye, Habib Dembélé et Jean-Louis Sagot-Duvauroux, pour monter Mandeka Théâtre de Bamako, une structure de promotion et de création littéraire et artistique. C’est avec cette compagnie qu’il intervient en 1999 dans ‘’Antigone’’ de Sophocle (joué au Théâtre national Daniel Sorano à Dakar).
Puis, viennent ‘’Le Costume’’ de Can Themba, adapté par Mothobi Muloaste (2000), ‘’La Tragédie d’Hamlet’’, de William Shakespeare, traduit par Marie-Hélène Estienne et Jean-Claude Carrière (2003), En octobre 2004, Sotigui Kouyaté est dans la pièce ‘’Tierno Bokar’’, d’après ‘’Vie et l’Enseignement de Tierno Bokar’’, roman du Malien Amadou Hampathé Bâ. Toutes ces pièces ont été mises en scène par Peter Brook.
Au cinéma, il a joué dans de nombreux films : ‘’IP5 - L’île aux pachydermes’’ de Jean-Jacques Beineix, avec Yves Montand (1991), ‘’Golem, l’esprit de l’ exil’’ d’Amos Gitai (1992), ‘’Tombés du ciel’’ de Philippe Lioret (1994), ‘’Le Maître des éléphants’’ de Patrick Grandperret (1995), ‘’La Genèse’’ de Cheick Oumar Sissoko (1995) avec Salif Keïta, Balla Moussa Keïta, Habib Dembélé, ‘’Little Senegal’’ de Rachid Bouchareb (2002), l’histoire d’un Dakarois qui s’embarque sur les traces de ses ancêtres américains.
Sotigui Kouyaté a été admirable dans ‘’Keïta, l’héritage du griot’’ (1995) et ‘’Sia, le rêve du python’’, tous des longs métrages de son fils Dani Kouyaté (2001). Ce film a obtenu 6 distinctions au Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco).
Ces dernières années, en dépit d’un état de santé fragile lié des problèmes pulmonaires, il joue successivement dans ‘’Dirty Pretty Things’’ de Stephen Frears (2003), ‘’Génésis’’ de Marie Perennou et Claude Nuridsany (2004), ‘’L’Annulaire’’ de Diane Bertrand (2005).
Pour son rôle dans ‘’London River’’ de Rachid Bouchareb (2008), il est récompensé par l’Ours d’argent du meilleur acteur au Festival de Berlin (février). Dans ce film, il joue le rôle d’Ousmane, un musulman qui va à la recherche de son enfant, qui n’a pas donné signe de vie depuis les attentats qui ont endeuillé la capitale britannique.
Il a marqué le deuxième Festival culturel panafricain d’Alger (juillet 2009) au cours duquel il a été honoré en même temps qu’une quinzaine d’autres hommes de théâtre du continent. Il avait fait le déplacement de la capitale algérienne où il a reçu sa distinction des mains du ministre algérien de la Culture, Khalida Toumi.
C’est lui, le griot, qui fait le scénario du film présenté par le Tunisien Nouri Bouzid, ‘’Errance’’, dans le cadre du projet ‘’L’Afrique vue par…’’. Le comédien burkinabé y transmet à de jeunes enfants tunisiens les leçons de sagesse héritées des anciens, sur la mémoire, le savoir, l’histoire, l’identité, entre autres enjeux.
Cette figure du théâtre et du cinéma africain, devenue, au fil des années et des interprétations, universelle, a occupé le poste de directeur artistique de la compagnie théâtrale de la Haute Volta, des Ballets du Burkina Faso. Il est le père du réalisateur Dani Kouyaté et du conteur Hassane Kassi Kouyaté.
Lors de la 21-ème édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision (FESPACO), Sotigui Kouyaté a été élevé au rang d’officier de l’Ordre de mérite des arts, des lettres et de la communication avec agrafe "cinéma". A cette occasion, il avait soutenu que “le FESPACO n’appartient pas au Burkina Faso, mais à toute l’Afrique”, estimant que ‘’Chaque Africain porte en lui l’honorabilité et la dignité de l’Afrique”.
‘’Chaque matin, chaque Africain doit se demander : que puis-je faire pour l’Afrique ? C’est seulement par cette volonté de bien faire et de se battre pour une Afrique prospère que l’on se fait utile”, a soutenu Sotigui Kouyaté. Belle leçon, beau viatique.
ADC