«95% du travail a été déjà fait. Il reste 5%». Voici les mots utilisés par l’ancien président de la Commission électorale indépendante (CEI) pour résumer le travail titanesque qu’il a abattu au cours de son passage à la tête de l’institution. Ces propos, Robert Mambé Beugré les a tenus le vendredi 5 mars dernier, lors de la passation des charges entre lui et son successeur le ministre Youssouf Bakayoko. Mais lorsque Mambé le disait, ce n’était pas pour donner dans la surenchère. Mais, plutôt pour traduire la réalité. Effectivement, les Ivoiriens n’ont jamais été aussi proches des élections depuis octobre 2005. Les audiences foraines ont été achevées en juin 2008. Les opérations d’identification et d’enrôlement ont pris fin en décembre 2009. Mieux, une liste provisoire électorale fiable et consensuelle a été produite en janvier 2010. L’affichage de la liste provisoire a permis d’ouvrir le contentieux électoral. A côté de cette liste, figurait une autre dite «grise» qui traitait des cas litigieux pour les personnes qui devaient venir justifier leur appartenance à la nation ivoirienne. L’élection présidentielle dans la foulée, a été programmée pour au plus tard début mars. On en était à ce stade lorsque la crise sur une prétendue fraude des 429 033 personnes a éclaté. Le Facilitateur a été obligé de faire le déplacement sur Abidjan pour éteindre le feu. Un compromis a été finalement trouvé. Et les différentes parties ont convenu d’une nouvelle date pour l’élection présidentielle fixée maintenant à ‘’fin avril-début mai’’. La crise fabriquée de toutes pièces par Laurent Gbagbo a certes emporté le président Beugré Mambé, mais les Ivoiriens, après la mise en place de la nouvelle équipe de la CEI, avaient bon espoir que le scrutin présidentiel se tiendrait à la nouvelle date indiquée. Le début du contentieux portant sur la liste électorale qui avait été interrompu, a été repoussé au 1er mars 2010. Il devait prendre fin le 22 mars dernier. Mais ce contentieux électoral sous l’ère Youssouf Bakayoko n’a jamais démarré. Le nouveau président de la CEI ne semble pas pressé. Après un séminaire, c’est un audit du personnel qu’il initie en lieu et place du démarrage du contentieux électoral. Aujourd’hui, cela fait presque deux mois que l’institution chargée d’organiser les élections fait du surplace. Les Ivoiriens commencent à s’inquiéter et à douter de la sincérité du successeur de Robert Beugré Mambé de vouloir leur donner des élections. De l’espoir, au début de cette année 2010, on est en train de passer à l’amertume et à une colère sourde qui risque, si l’on n’y prend garde, d’exploser à la face de tous ceux qui jouent à abuser de la patience du peuple. Par la faute des dirigeants actuels de la Commission électorale indépendante, la Côte d’Ivoire risque encore de connaître des moments sombres. Car c’est connu, le désespoir conduit toujours à l’extrême. Il faut donc rectifier le tir pendant qu’il est encore temps.
Jean-Claude Coulibaly
Jean-Claude Coulibaly