Courrier d'Afrique - La Libye a célébré avec faste les 40 ans de pouvoir du guide de la révolution. Au-delà de l’anniversaire d’un homme, d’une nation, c’était plutôt de celui d’un rêve continental voire planétaire qu’il s’agit. Retour sur le parcours atypique d’un homme hors du commun avec en toile de fond ses ombres et ses lumières.
1er septembre 1969. Le roi Idriss est déposé et un guide est annoncé. Les chaînes de radiodiffusion et télévision internationales de leur côté annoncent sans trop se convaincre l’avènement d’un révolutionnaire. Au finish, le « Guide de la révolution » est apparu. Cet homme dirige de main de maître son pays, la Libye depuis 40 ans. Des succès nettement reconnus de tous. Des échecs aussi. Mais le Guide semble tout prévoir, il transforme chaque échec en une victoire personnelle. Avec son chapelet de ré incrimination contre une communauté internationale qui semble n’exister que pour suivre les actes de Kadhafi. Pendant 40 ans donc, le temps s’est écoulé au rythme de la révolution libyenne. L’Amérique de Ronald Reagan, des Bush père et fils l’a appris à ses dépens. L’embargo de l’Onu de même que les millions de dollars dépensés pour abattre un homme et sa vision n’ont rien pu à l’ascension fulgurante de Mouammar Kadhafi.
Retour sur l’histoire, 1988, l’affaire de Lockerbie jette du discrédit sur Kadhafi. L’homme est accusé d’avoir financé et commandité cet attentat dans lequel 270 personnes périrent. Le Guide libyen confie à ses proches « C’est ce jour-là, que j’ai surpris des larmes coulées de mes yeux. » Ces larmes n’ont pas suffi pour l’innocenter, ainsi pendant près de 20 ans, l’homme devient le paria de la planète entière. Mais paradoxe, c’est pendant ces 20 ans que le guide libyen a fait le plus parler de lui.
Kadhafi sait ce qu’il veut
Le Guide s’invite dans tous les débats, il est sur tous les grands évènements internationaux, donnant ça et là son avis. Comment ne pas l’entendre ? Les médias internationaux à l’affût des faits et gestes de Mouammar Kadhafi sont prêts à relayer l’info. Il est même l’objet des meilleures ventes pour certains titres. Il suscite toujours la réplique. Reagan, Bush père et fils, François Mitterrand, Jacques Chirac, Marguerite Thatcher, Tony Blair, chacun doit réagir parce que Kadhafi a lâché un petit mot. L’homme lui a son objectif. Donner son avis sur tout malgré l’embargo de l’Onu, cet autre "machin" des occidentaux pour recoloniser l’Afrique, dira Kadhafi. Le Fmi propose des millions de dollars à un pays d’Afrique ? Kadhafi y voit l’intention malsaine de garder ce pays dans l’assistanat, il propose alors au pays en question de lui fournir des pétrodollars. A chaque coup des colons, c’est comme cela qu’il les appelle, Kadhafi réagit et envoie de l’argent frais, du pétrole, des vivres. Il initie un vaste projet de construction à travers l’Afrique de mosquées, de structures hôtelières, sanitaires et éducatives, la création d’une banque panafricaine. En tout cas, Kadhafi sait ce qu’il veut : bouter les occidentaux hors de l’Afrique qu’il considère comme un et un seul pays qui devra avoir un gouvernement unique. A-t-il réussi ?
L’Union africaine sur les cendres de l’Oua
L’Organisation de l’union africaine (Oua) a fini de montrer ses limites. Les tensions entre le Tchad et le Soudan sont restées sans solution ou pire sans initiative de solution. L’ancien Zaïre du maréchal Mobutu se meure, déchiré par une guerre civile télécommandée depuis l’Ouganda et le Rwanda. L’Erythrée et l’Ethiopie se livrent une guerre sans merci. L’Oua est impuissante et moribonde. Voici l’Union africaine. Une création du Guide pour faire renaitre le rêve si cher au ghanéen Kwame Nkrumah d’une Afrique unie et forte dans une fédération. Reconnaissance ou volonté de laisser le géniteur prendre soin de la croissance du bébé ? Les chefs d’Etat réunis à Syrte décident de laisser la présidence de l’Union à son humble serviteur. Kadhafi est le premier président de l’Union africaine.
Un anniversaire qui auréole une suite de succès diplomatiques
Alors que jusqu’en 2003 la Libye est toujours sous embargo de l’Onu, Kadhafi annonce à la face du monde que la Libye renonce définitivement à la course à l’arme nucléaire militaire. Pour les uns, c’est un grand coup médiatique. Une poudre aux yeux des capitales occidentales, pour d’autres. Mais l’homme quant à lui, montre une autre face au monde entier. Le Guide engage son pays à rembourser des millions de dollars aux parents des victimes de l’attentat de Lockerbie. A la suite de ces gestes d’apaisement, le Guide redevient fréquentable, La France puis l’Italie sont les premiers à annoncer leur volonté de rétablir leurs relations avec la Libye. Une visite d’Etat en Italie vient couronner cette reconnaissance internationale, les occidentaux se ruent sur le pétrole libyen et Kadhafi passe commande chez airbus, le constructeur français.
20 Août 2009, le monde apprend que l’Ecosse décide de libérer pour raison de santé, Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi, le seul condamné à la prison à vie dans le dossier de l’attentat de Lockerbie. Coup de théâtre. Tripoli accueille en héros national le frère Abdelbaset al-Megrahi. Kadhafi a finalement tout gagné. Sa plus grande victoire est sans aucun doute le "traité d'amitié" que le guide de la Révolution libyenne a signé avec l'Italie le 31 août 2008. Rome avait, en termes bien clairs, reconnu sa "responsabilité historique" dans les 31 ans qu’a duré la période coloniale (1911-1942). Berlusconi promet en compensation le versement de cinq milliards de dollars "d'indemnités" sur 25 ans au pays, et la construction d'une autoroute traversant le pays d'est en ouest. Silvio Berlusconi posa la première pierre de ce vaste chantier lors d’une visite en Libye. Une autre victoire est l’excuse publique de la Suisse à Kadhafi dans le différend qui l’oppose ce pays.
Bravo, le roi des rois de l’Afrique! En tout cas c’est le nouveau titre que les rois d’Afrique réunis sous l’égide du Guide libyen ont décidé de lui donner.
Une fête empreinte de solennité
Plusieurs dirigeants arabes, africains et latino-américains ont répondu présents à Tripoli pour le grand anniversaire. Avant la fête, le Guide convie ses pairs d’Afrique à un sommet de l’Union africaine. Les grandes artères sont ornées de milliers d'ampoules multicolores. Les murs sont placardés de centaines de photos et de slogans à la gloire du Guide libyen. Un peuple à l’écoute. Un continent très attentif. Kadhafi a fêté ses quarante ans de pouvoir en faste et le monde l’a suivi. Gloire au Guide de la révolution de la grande Jamahiriya arabe Libyenne, populaire et socialiste.
Claude ALOFA
1er septembre 1969. Le roi Idriss est déposé et un guide est annoncé. Les chaînes de radiodiffusion et télévision internationales de leur côté annoncent sans trop se convaincre l’avènement d’un révolutionnaire. Au finish, le « Guide de la révolution » est apparu. Cet homme dirige de main de maître son pays, la Libye depuis 40 ans. Des succès nettement reconnus de tous. Des échecs aussi. Mais le Guide semble tout prévoir, il transforme chaque échec en une victoire personnelle. Avec son chapelet de ré incrimination contre une communauté internationale qui semble n’exister que pour suivre les actes de Kadhafi. Pendant 40 ans donc, le temps s’est écoulé au rythme de la révolution libyenne. L’Amérique de Ronald Reagan, des Bush père et fils l’a appris à ses dépens. L’embargo de l’Onu de même que les millions de dollars dépensés pour abattre un homme et sa vision n’ont rien pu à l’ascension fulgurante de Mouammar Kadhafi.
Retour sur l’histoire, 1988, l’affaire de Lockerbie jette du discrédit sur Kadhafi. L’homme est accusé d’avoir financé et commandité cet attentat dans lequel 270 personnes périrent. Le Guide libyen confie à ses proches « C’est ce jour-là, que j’ai surpris des larmes coulées de mes yeux. » Ces larmes n’ont pas suffi pour l’innocenter, ainsi pendant près de 20 ans, l’homme devient le paria de la planète entière. Mais paradoxe, c’est pendant ces 20 ans que le guide libyen a fait le plus parler de lui.
Kadhafi sait ce qu’il veut
Le Guide s’invite dans tous les débats, il est sur tous les grands évènements internationaux, donnant ça et là son avis. Comment ne pas l’entendre ? Les médias internationaux à l’affût des faits et gestes de Mouammar Kadhafi sont prêts à relayer l’info. Il est même l’objet des meilleures ventes pour certains titres. Il suscite toujours la réplique. Reagan, Bush père et fils, François Mitterrand, Jacques Chirac, Marguerite Thatcher, Tony Blair, chacun doit réagir parce que Kadhafi a lâché un petit mot. L’homme lui a son objectif. Donner son avis sur tout malgré l’embargo de l’Onu, cet autre "machin" des occidentaux pour recoloniser l’Afrique, dira Kadhafi. Le Fmi propose des millions de dollars à un pays d’Afrique ? Kadhafi y voit l’intention malsaine de garder ce pays dans l’assistanat, il propose alors au pays en question de lui fournir des pétrodollars. A chaque coup des colons, c’est comme cela qu’il les appelle, Kadhafi réagit et envoie de l’argent frais, du pétrole, des vivres. Il initie un vaste projet de construction à travers l’Afrique de mosquées, de structures hôtelières, sanitaires et éducatives, la création d’une banque panafricaine. En tout cas, Kadhafi sait ce qu’il veut : bouter les occidentaux hors de l’Afrique qu’il considère comme un et un seul pays qui devra avoir un gouvernement unique. A-t-il réussi ?
L’Union africaine sur les cendres de l’Oua
L’Organisation de l’union africaine (Oua) a fini de montrer ses limites. Les tensions entre le Tchad et le Soudan sont restées sans solution ou pire sans initiative de solution. L’ancien Zaïre du maréchal Mobutu se meure, déchiré par une guerre civile télécommandée depuis l’Ouganda et le Rwanda. L’Erythrée et l’Ethiopie se livrent une guerre sans merci. L’Oua est impuissante et moribonde. Voici l’Union africaine. Une création du Guide pour faire renaitre le rêve si cher au ghanéen Kwame Nkrumah d’une Afrique unie et forte dans une fédération. Reconnaissance ou volonté de laisser le géniteur prendre soin de la croissance du bébé ? Les chefs d’Etat réunis à Syrte décident de laisser la présidence de l’Union à son humble serviteur. Kadhafi est le premier président de l’Union africaine.
Un anniversaire qui auréole une suite de succès diplomatiques
Alors que jusqu’en 2003 la Libye est toujours sous embargo de l’Onu, Kadhafi annonce à la face du monde que la Libye renonce définitivement à la course à l’arme nucléaire militaire. Pour les uns, c’est un grand coup médiatique. Une poudre aux yeux des capitales occidentales, pour d’autres. Mais l’homme quant à lui, montre une autre face au monde entier. Le Guide engage son pays à rembourser des millions de dollars aux parents des victimes de l’attentat de Lockerbie. A la suite de ces gestes d’apaisement, le Guide redevient fréquentable, La France puis l’Italie sont les premiers à annoncer leur volonté de rétablir leurs relations avec la Libye. Une visite d’Etat en Italie vient couronner cette reconnaissance internationale, les occidentaux se ruent sur le pétrole libyen et Kadhafi passe commande chez airbus, le constructeur français.
20 Août 2009, le monde apprend que l’Ecosse décide de libérer pour raison de santé, Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi, le seul condamné à la prison à vie dans le dossier de l’attentat de Lockerbie. Coup de théâtre. Tripoli accueille en héros national le frère Abdelbaset al-Megrahi. Kadhafi a finalement tout gagné. Sa plus grande victoire est sans aucun doute le "traité d'amitié" que le guide de la Révolution libyenne a signé avec l'Italie le 31 août 2008. Rome avait, en termes bien clairs, reconnu sa "responsabilité historique" dans les 31 ans qu’a duré la période coloniale (1911-1942). Berlusconi promet en compensation le versement de cinq milliards de dollars "d'indemnités" sur 25 ans au pays, et la construction d'une autoroute traversant le pays d'est en ouest. Silvio Berlusconi posa la première pierre de ce vaste chantier lors d’une visite en Libye. Une autre victoire est l’excuse publique de la Suisse à Kadhafi dans le différend qui l’oppose ce pays.
Bravo, le roi des rois de l’Afrique! En tout cas c’est le nouveau titre que les rois d’Afrique réunis sous l’égide du Guide libyen ont décidé de lui donner.
Une fête empreinte de solennité
Plusieurs dirigeants arabes, africains et latino-américains ont répondu présents à Tripoli pour le grand anniversaire. Avant la fête, le Guide convie ses pairs d’Afrique à un sommet de l’Union africaine. Les grandes artères sont ornées de milliers d'ampoules multicolores. Les murs sont placardés de centaines de photos et de slogans à la gloire du Guide libyen. Un peuple à l’écoute. Un continent très attentif. Kadhafi a fêté ses quarante ans de pouvoir en faste et le monde l’a suivi. Gloire au Guide de la révolution de la grande Jamahiriya arabe Libyenne, populaire et socialiste.
Claude ALOFA