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Politique Publié le lundi 10 mai 2010 | Nord-Sud

Blocage du processus, découverte d`armes : Comment l`opposition veut tuer la transition

© Nord-Sud Par Gendarmerie nationale
Sécurité - Un arsenal de guerre saisi par la gendarmerie nationale à Anyama
Mercredi 5 mai 2010. Abidjan, Anyama
La découverte, mercredi, d`une cache d`armes à Anyama vient assombrir davantage le ciel des relations entre Laurent Gbagbo et son opposition.

Avis de tempête. Le processus de paix semble encore entré dans la zone rouge. Au plan politique, le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) a remis en cause, jeudi dernier, la reprise du contentieux, telle que définie par la Commission électorale indépendante (Cei) et la Primature. Une mauvaise nouvelle. D`autant que mercredi, la gendarmerie a affirmé avoir découvert des armes de guerre à Anyama, dans la banlieue d`Abidjan.

Deux facteurs de crispation de la vie politique qui augurent de jours incertains, avec en toile de fond le face-à-face entre le Camp présidentiel et l`opposition, autour de la marche du 15 mai. En attendant l`issue de l`enquête sur la cache d`armes d`Anyama, il convient de noter que la nouvelle crispation arrive dans une atmosphère chargée de mauvaises vibrations.

La marche projetée au 15 mai par les jeunes du Rhdp cristallisait jusque-là la ligne de fracture entre le camp présidentiel et l`opposition houphouétiste. Certes, le parti présidentiel et ses alliés n`avaient pas officiellement pris position sur cette marche qui coïncide avec les Assemblées annuelles du Groupe de la Bad (Banque africaine de développement). Mais, la pression du ministre de l`Intérieur sur les jeunes du Rhdp, pour un report de la manifestation, indiquait clairement que l`initiative était mal perçue du côté du Palais.

Et, le camp présidentiel s`en méfiait d`autant plus que les déclarations de mobilisation de l`opposition étaient très offensives, mais peu explicites sur les objectifs poursuivis. Certaines personnalités appelant ouvertement à rester dans la rue jusqu`au départ de Gbagbo. Selon des sources bien informées, des membres du Rhdp, surtout proches du Parti démocratique de Côte d`Ivoire (Pdci), entendaient faire pression pour obtenir un calendrier électoral. Pour d`autres, par contre, la rue doit permettre d`arrêter le processus en cours et mettre fin à l`ère Gbagbo. Les sécurocrates du palais soupçonnent des pontes du Rassemblement des républicains (Rdr) d`être sur cette deuxième ligne. Ils notent ainsi qu`à ce jour, aucune instance officielle du Rhdp (Directoire ou autre) n`a encore endossé le mot d`ordre de la marche.

La riposte est prête

Ce qui traduit des divergences de vues au sommet de l`alliance. Derrière le silence du Front populaire ivoirien (Fpi) et de ses pontes sur le sujet, se cache une stratégie de riposte bien huilée. Faut-il le rappeler, les milices sont toujours actives au Sud. Et, rien n`indique que les sinistres escadrons de la mort qui ont endeuillé l`opposition au plus fort de la crise armée, née en septembre 2002, ont été démantelés. Si la marche devait dégénérer, tous ces moyens seront activés en ciblant directement les leaders de l`opposition, selon les confidences d`un agent de renseignement. Le scénario du pire, en quelque sorte.

Soro préoccupé

Laurent Gbagbo prend très au sérieux tout ce remue-ménage. Selon un de ses conseillers, le président de la République envisage de « jouer cartes sur table ». Il a prévu d`envoyer Désiré Tagro en mission auprès des deux leaders de l`opposition, Alassane Ouattara (Rdr) et Henri Konan Bédié (Pdci). Le ministre de l`Intérieur sera chargé de leur demander de se déterminer par rapport au rendez-vous du 15 mai, présenté comme une future tentative de déstabilisation du régime. Soit ils l`assument clairement et en donnent l`objectif, soit ils s`en désolidarisent. Dans les deux cas, il se dit prêt à en tirer toutes les conséquences. Le chef de l`Etat a-t-il finalement décidé d`aller lui-même poser la question à ses deux concurrents ? L`on est tenté de répondre par l`affirmative. Car, il est difficile d`imaginer que la question ne soit pas au menu de son rendez-vous avec M. Bédié, aujourd`hui. Et, pourquoi pas avec M. Ouattara qui à écourté son séjour français.

Cette démarche, à l`évidence, vise à prendre l`opinion internationale à témoin quant aux dérapages à venir. De ce point de vue, la découverte de la cache d`armes d`Anyama apporte de l`eau au moulin de Laurent Gbagbo, mais est très embarrassante pour l`opposition. Celle-ci a d`ailleurs commencé à se défendre, par journaux interposés (Le Nouveau Réveil et Le Patriote), dès le lendemain de l`opération des gendarmes, en criant au faux-complot.

Du côté de la Primature, c`est l`incompréhension qui domine. Car, la nouvelle posture de l`opposition semble remettre en cause le rôle d`arbitre de Guillaume Soro. Cela transparaît clairement de la déclaration du Directoire du Rhdp, datée du 6 mai. Et l`utilisation du mot « dictature », ainsi que l`allusion à la remise en cause de l`indépendance de la Cei vis-à-vis de l`exécutif, sont perçues comme la traduction d`une volonté de remise en cause de la transition issue de l`Accord politique de Ouagadougou (Apo). Le Premier ministre, faut-il le rappeler, a appris avec surprise, le revirement de position de la Cei, vendredi. En l`absence de Youssouf Bakayoko, co-signataire du communiqué de relance du contentieux de la liste électorale, la commission a suspendu sa participation à l`opération qui devait débuter ce matin. La conséquence immédiate étant un nouveau blocage du processus. De là, à déduire que l`opposition se sert de la Cei qu`elle domine pour faire durer le blocage, il n`y a qu`un pas vite franchi par certains analystes.

Kesy B. Jacob
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