Un chef d’Etat en titre qui se rend au domicile de son prédécesseur, et un des chefs de l’opposition. La scène a de quoi émouvoir les sentimentaux. Et surtout indiqué aux autres que la démocratie dans ce pays est civilisé et courtois. Laurent Gbagbo à la manœuvre vient une fois de plus de faire preuve de son talent de grand politicien. Pour amadouer son opposition au créneau pour exiger des élections ici et maintenant, le locataire du palais n’a pas hésité à se rendre hier au domicile d’Henri Konan Bédié. Avec le président du Pdci, Gbagbo a continué sa démarche aux fins d’obtenir l’annulation de la marche du rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix, le Rhdp. Quand c’est nécessaire, l’ancien opposant historique joue le bâton. Il pousse ce plaisir jusqu’à l’extrême. Personne n’oublie qu’il a unilatéralement pris la décision de dissoudre le gouvernement et la commission électorale indépendante. Les conséquences pour le pays et la paix sociale ne l’ont pas dissuadé un seul instant. Les résultats de la mesure impopulaire et inutile de dissolution, des morts et un retard considérable dans le processus électoral. Quand il se sent fragilisé, le même Gbagbo opte pour les enfants de cœur. C’est cette posture qui l’a amené à l’époque à démarcher Blaise Compaoré, celui-là même qui était présenté comme l’ennemi juré, le numéro un du Faso le lui rendait bien, pour aboutir au dialogue direct et à l’Accord politique de Ouagadougou. Passé l’orage redouté, cet Accord est aujourd’hui au cimetière des bonnes intentions. La marche du 15 mai prochain donne l’insomnie au patron de la Refondation. Il lui faut, coûte que coûte, la désamorcer. Le crochet chez l’ancien président va dans ce sens. Il s’agit, juste, de gagner quelque chose, un moment. Le prix à payer importe peu. Et puis une visite, ça n’a jamais fait du mal à celui qui se déplace. Il devient même sympathique. Séduisant joueur, ce Gbagbo !
D. Al Seni
D. Al Seni