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Politique Publié le lundi 28 juin 2010 | Le Nouveau Réveil

Lu dans “Le Repère” du 11 janvier 2008 /Modernisation du passeport ivoirien : Tagro cité dans une affaire de 25 milliards

Le groupe "Le Réveil" est toujours à une longueur d'avance. Déjà début janvier 2008 dans son quatrième numéro, l'hebdomadaire "Le Repère", donnait avec force détails le contenu du " deal " des passeports. Nous vous reproposons l'article.

L'affaire est sérieuse. Même très sérieuse. Car elle touche directement à l'identité des Ivoiriens, pour ne pas dire à l'identification des Ivoiriens sur le plan international. Il s'agit du dossier de la conception, de la fabrication et de la mise en circulation du passeport CEDEAO en Côte d'Ivoire. Un important marché autour duquel un véritable ballet politico financier a été organisé et mené de bout en bout par l'actuel ministre ivoirien de l'Intérieur, Désiré Tagro et l'ex-conseiller du Premier ministre, Adama Bictogo. Du moins, selon les informations et documents en notre possession. Une affaire de gros sous sur fond d'intrigues et de trafic d'influence.

C'est par une correspondance officielle datée du 27 octobre 2004 et adressée au ministre d'Etat, ministre ivoirien des Affaires étrangères (en son temps, M. Bamba Mamadou) que le Secrétaire exécutif de la CEDEAO, le Dr Mohamed Ibn Chambas a rappelé à l'Etat ivoirien, contrairement à la décision A/DEC.1/5/2000 de la 23ème Session de la conférence des Chefs d'Etat et de gouvernements tenue à Abuja les 28 et 29 mai 2000, que le passeport CEDEAO "qui doit consacrer la citoyenneté communautaire et faciliter la circulation des ressortissants à l'intérieur et hors de la Communauté n'a pas encore été imprimé et mis en circulation par la Côte d'Ivoire". La date butoir pour le retrait des passeports nationaux est fixée au 31 décembre 2005. A partir d'octobre 2005, chacun sait les tiraillements politiques qui ont eu lieu. Le gouvernement a changé et le ministère des Affaires Etrangères a changé de mains. Ainsi que le ministère de l'Intérieur… Mais Gbagbo est demeuré au pouvoir. On arrive donc en 2007 dans le contexte de l'Accord politique de Ouagadougou, signé le 04 mars, qui initie un nouveau gouvernement dont Soro Guillaume est le Premier ministre. La question de la modernisation du passeport ivoirien et du passeport CEDEAO à mettre en circulation était jusque-là en suspension, en dépit du fait que le marché aurait déjà été accordé de gré à gré à la SITEL (cf la lettre N° 192/MS/CAB-1/C du 06 mars 2007) et autorisé par lettre du ministère de l'Economie et des Finances, datée du 04 juin 2007.

Soro forme une nouvelle équipe gouvernementale dans le même mois de mars. Sur proposition du président Gbagbo, Désiré Tagro est nommé ministre de l'Intérieur, en charge également de la Sécurité. Le dossier de la mise en circulation du passeport CEDEAO est remis au goût du jour. Cette fois, sur le bureau du ministre de l'Intérieur, Désiré Tagro. Il s'agit de trouver un opérateur pour la confection de ce précieux document. Or, selon nos sources, c'est la SITEL qui avait ce marché d'une valeur de 25 milliards de francs CFA. Le 03 octobre 2007, le ministre de l'Intérieur, Désiré Tagro, écrit à son homologue de l'Economie et des Finances, Charles Koffi Diby. L'objet de cette correspondance N° 1408, marquée du sceau de la confidentialité, est "La substitution de la SNEDAI à la SITEL. La SNEDAI est la Société Nationale d'Edition de Documents Administratifs et d'Identification. Elle est une filiale du groupe belge ZETES qui est, a-t-on appris, spécialisée dans la confection et l'édition des passeports et documents électoraux. Selon nos sources, la SNEDAI aurait pour un des gros actionnaires ou propriétaires, Adama Bictogo, alors conseiller à la Primature. Voici ce que dit la lettre de Tagro à Diby : " (…) En raison du caractère sensible du projet et des graves réserves formulées à l'encontre de ladite (NDLR, la SITEL) société qui s'est vu confier, sans succès, par le passé, une convention de concession pour la modernisation de l'état-civil, il m'apparaît opportun, dans le cadre de la modernisation du passeport ivoirien, de confier à une autre société présentant des garanties plus sérieuses tant financières que techniques (…) Aussi, ai-je l'honneur de solliciter par la présente, la substitution de la Société Nationale d'Edition de Documents Administratifs et d'Identification dite "SNEDAI" à la SITEL (…) "

Le 08 octobre 2007, soit seulement 05 jours après, le ministre Diby répond favorablement et avec des réserves au ministre Tagro par courrier N° 4801. Voici ce que dit cette réponse implicitement révélatrice : " (…) A l'appui de votre requête de substitution, vous relevez d'une part, le caractère sensible du projet et d'autre part, de graves réserves formulées contre la SITEL relativement au projet de modernisation de l'état-civil ivoirien à lui confié par ledit ministère. Vous précisez de plus que la SNEDAI présente non seulement des garanties financière et technique, mais également est une filiale de la Société Belge ZETES Industries qui est une entreprise paneuropéenne de premier plan dans la production de documents de voyage sécurisés, depuis plus de trente ans…Après examen et compte tenu des arguments développés, je vous marque mon accord pour la substitution de SDENAI à SITEL conformément à la lettre d'autorisation sus indiquée. ".

Le 10 octobre 2007, soit deux jours plus tard, le ministre de l'Intérieur Tagro crée par arrêté N° 338 un comité ad hoc chargé de conduire les négociations et d'assurer le suivi du respect des termes de la convention de délégation de service public à la Société Nationale d'Editions de Documents Administratifs et d'Identification pour la modernisation du passeport ivoirien. " Le comité est chargé, en outre, de donner, à la demande de l'autorité compétente, son avis sur toute question intéressant ladite convention. " L'autorité compétente ici c'est Tagro Désiré. Le comité ainsi créé par l'arrêté de Tagro est présidé par le Ministre de l'Intérieur ou son représentant. Il a pour membres : -3 représentants du ministère de l'Intérieur ayant, respectivement, des compétences en matière juridique, en matière de télécommunication et système d'information et en matière de police de l'air et des frontières ; 2 représentants du ministère de l'Economie et des Finances ; -1 représentant du ministère des Affaires Etrangères ; -1 représentant du ministère de la Coopération et de l'Intégration Africaine. On le constate, les ministères de l'Intérieur et de l'Economie et des Finances ont au total 05 représentants sur les sept membres du comité. En cas de vote pour délibérer, Tagro l'emportera toujours. Ce qui revient à dire que le comité est juste là pour crédibiliser ce que décidera le ministère de l'Intérieur qui préside les délibérations. Voilà pour les méandres techniques de l'affaire. Apparemment, il n'y a pas grand-chose à redire. Mais en réalité, c'est une véritable montagne politico financière. Et quiconque la contrôle tient l'identification ivoirienne. Et qui tient l'identification tient les élections à venir.

Eddy PEHE
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