Les paysans du Denguélé pointent un doigt accusateur vers les pisteurs qu'ils présentent comme les principaux responsables de la détérioration de leur pouvoir d'achat. Les mis en cause, qui s'insurgent d'ailleurs contre cette appellation de «pisteurs», soutiennent que leur action consistant à se rendre dans les villages les plus éloignés pour acheter les produits, épargne aux producteurs des déplacements onéreux et physiquement risqués. Parlant desdits risques, Doumbia Djina, un jeune acheteur de 29 ans, soutient que ses collègues et lui les prennent constamment dans leur entreprise. Il relate sa mésaventure récente. «Je suis arrivé dans un village où j'ai rencontré un jeune homme répondant au nom de Coulibaly Lacina. Il m'a présenté une production dans un magasin, et me propose de l'acheter. Nous nous sommes entendus sur la valeur de cette production qui devait revenir à envion six millions de Fcfa. Ayant sous les yeux la marchandise, je lui donne la totalité de l'argent. Le lendemain, le magasin était vide quand j'ai envoyé un camion pour chercher le produit. Depuis, je suis encore ici pour cette affaire. Celui qui m'a donné l'argent pour faire les achats ne croit pas que je me suis fait duper. J'ai fait lancer des avis de recherche dans toutes les brigades», se lamente le jeune Doumbia qui fait ses premiers pas dans cette activité. Les paysans conscients que leur salut se trouve dans leur unité ont engagé des concertations durant la campagne de commercialisation pour «mettre un terme à la spéculation abusive des acheteurs véreux». Ils ont décidé de s'investir dans l'achat de leur production. «Nous allons nous organiser pour qu'aucune production ne soit livrée à un pisteur. A travers nos coopératives, nous allons barrer la route à ces gens qui viennent nous prendre nos produit à vil prix », martèle Diarrasouba, premier responsable de la coordination des Opa du Denguélé. Il convient toutefois de révéler que certaines Opa (coopératives) qui ont réussi à s'établir des agréments d'achat bord-champ durant la crise qui n'existent que de nom. Le directeur départemental, lors d'une réunion organisée par les producteurs, le 21 mars dernier, évoquait le problème. « Sur les trente-six coopératives, une trentaine s'est fait délivrer des agréments provisoires à Abidjan. Ces agréments ne sont plus valables. Je vous invite donc à venir régulariser vos coopératives à la direction départementale», indiquait M. Coulibaly qui n'a pas manqué de dénoncer le fait que certaines de ces coopératives qui n'ont pas de siège, s'érigent abusivement en acheteur de produit. Pour le directeur départemental de l'Agriculture, les agréments établis à Abidjan sont désormais nuls. «Il est inacceptable que des commerçants détiennent des agréments de coopératives agricoles. Il faut que les autorités nous aident à assainir notre milieu», a souhaité Barry Amed de l'Union des producteurs d'anacarde (Upa). Pour barrer la route aux «acheteurs véreux», la direction régionale de l'agriculture entend organiser des tournées de contrôle auprès des coopératives. «Nous allons faire des visites-surprises dans les villages pour vérifier l'existence réelle de ces structures», a annoncé M. Boua Bi.
Tenin Bè Ousmane à Odienné
Tenin Bè Ousmane à Odienné