Il ne se passe plus de jour sans que la question de la démission de Mamadou Koulibaly ne soit abordée dans certains cercles frontistes. Mais, il y a plus à perdre qu’à gagner pour la refondation.
Et si Koulibaly démissionnait du Fpi ?
Le Fpi joue gros actuellement. Par des allusions à peine voilées, des faucons frontistes militent pour que Koulibaly Mamadou quitte le parti d’Affi N’Guessan. De façon récurrente, des hagiographes s’en prennent ouvertement au président de l’Assemblée nationale. Samedi, au parlement de Yopougon Wakouboué, on a proprement insulté Mamadou Koulibaly. Un des orateurs bien connu a invité les militants du Fpi à considérer Koulibaly Mamadou comme un partant, une personnalité en rupture de ban avec sa chapelle politique. Hier, dans un éditorial de haut vol dans Fraternité Matin, Jean baptiste Akrou, dont les affinités avec le chef de l’Etat ne sont un secret pour personne, a chargé le président du Parlement qui desservirait les siens à travers sa demande de moralisation de la vie publique. Son coup de gueule : «Il est des vérités qu’un homme politique garde enfouies en lui. Il en évoque dans ses mémoires et non quand il est en activité. Même si l’objectif n’est pas d’affaiblir son propre camp, les dernières déclarations du président Koulibaly y contribuent ». Le disant, le patron de Frat-Mat met de l’eau au moulin des détracteurs de Koulibaly. Dans une interview accordée à l’Intelligent d’Abidjan, le 12 juin, Jean Yves Dibopieu avait donné le ton en réclamant la démission de Koulibaly Mamadou. « Je pense que ce serait plus courageux, mais je ne pense pas que cette démission puisse m’ébranler ou agir sur ma personne », a-t-il lâché.
Pour notre confrère l’Inter, le président du Parlement a déjà un pied dehors. Il analyse : « Moi, j’ai envie de sortir de la saleté pour aller dans la propreté. Ceux qui disent, nous sommes sales mais c’est bon restons dedans comme ça, parce que ce n’est pas nous qui allons changer le monde, je ne suis pas sûr que ceux-là aient raison si l’on veut que la Côte d’Ivoire change, si l’on veut que l’Afrique change », dixit Mamadou Koulibaly. Le président de l’Assemblée nationale a prononcé ces mots révélateurs de son état d’esprit actuel, le mardi 29 juin dernier, à l’issue d’une réunion des députés membres de la Conférence des présidents. Le N° 2 du régime, à y voir de près, n’a plus toute sa tête au Fpi ».
Et ce confrère de révéler : « Un député proche de Mamadou Koulibaly, bien au fait des manœuvres politiques du président du parlement, nous disait, il y a quelques jours, que l’homme envisagerait de créer son parti politique, le Fpi ne faisant véritablement plus son affaire. Koulibaly ne parle pas au hasard. Quand il dit vouloir quitter la saleté pour aller dans la propreté, c’est une façon de vous dire qu’il a envie de partir du Fpi ». Le mot est lâché. Que risque le Fpi dans le départ de son 3ème vice-président?
Ce que perd le Fpi en cas de démission
Le Fpi peut-il se payer le luxe de voir Mamadou Koulibaly démissionner en cet instant précis? La réponse coule de source : c’est non. Ce serait même la catastrophe pour Affi N’Guessan et les siens puisque Koulibaly s’est posé comme le véritable symbole de la lutte contre les magouilles dans les concours administratifs. Et cela crée forcément un élan de sympathie au sein de la population. Exit les considérations politiques, clanique et tribales. Dieu sait combien ils sont nombreux les jeunes qui sont floués chaque année dans les concours. Rien que pour la police, ce sont 15.000 candidats qui se bousculent pour 1.300 places dont les 2/3 postes confisqués par la tutelle. Un appel au sursaut émanant de Koulibaly peut donc faire très mal.
Sur le plan purement politique, Si Koulibaly claque la porte, ce serait une très grosse perte pour Laurent Gbagbo qui n’a de cesse de brandir le numéro II de son régime comme un Malinké afin de confondre ceux qui l’accusent d’être un ivoiritaire endurci qui ne faisait la part belle qu’aux membres de sa tribu et associés.
Mais là où ça va faire très mal, c’est au sein de la communauté malinké et nordiste favorable au camp présidentiel.
C’est connu, Koulibaly a mené une croisade dans les milieux traditionnellement acquis au Rdr pour recruter pour Laurent Gbagbo. C’est grâce à ce travail que dans certains quartiers « dioulabougou » les gens osent aujourd’hui afficher leur appartenance au Fpi. A Koumassi, Anyama, Abobo, à Port Bouet II, il a abattu un travail de titan pour détruire les préjugés qui posaient Gbagbo l’ennemi des Malinkés. Une démission de Koulibaly remettrait à plat cette campagne rondement menée pendant des années.
L’autre vérité que personne n’a le courage de dire est que presque tous les Malinkés du Fpi se retrouvent dans le nouveau combat de Koulibaly. Y compris ceux qui siègent au sein des instances du parti d’Affi. En aparté, tous soutiennent le président du parlement. Mais ils n’ont pas le courage d’afficher leur opinion, pour le moment, disent-ils. Ils ont particulièrement été choqués par les pancartes tribalistes brandies par les hommes de Tagro devant le Parlement.
En définitive, le Fpi a tout intérêt à avoir Koulibaly avec lui que contre soi. Mieux que quiconque, Gbagbo le sait.
Traoré M. Ahmed
legende / Les thuriféraires Fpi prennent de gros risques en essayant de pousser Mamadou Koulibaly vers la porte de sortie.
Encadré
Koulibaly : « Je ne démissionne pas »
Lors de ses échanges avec Venance Konan en mars, le député de Koumassi avait répondu à la question de sa démission du Fpi. Un extrait de ce texte qui est plus que d’actualité. « En ce qui me concerne, je n’aime pas les attitudes masquées et préfère vivre ouvertement mon engagement, tout en restant objectif et en osant critiquer les dérives de mon propre groupe si nécessaire. L’engagement n’est pas forcément synonyme de comportement moutonnier que je ne confonds d'ailleurs pas avec la discipline du parti. C’est pour cela que je continue à réfléchir et à publier régulièrement des réflexions personnelles tout en militant au sein du Fpi. Je me considérais comme un intellectuel avant d'entrer en politique. Je crois encore que je le demeure. J'estime que lorsque l'intellect se met au service de la politique, c'est pour élever le débat démocratique et contribuer à la sortie de la société magique, de l'obscurantisme. Pour moi, la politique ne signifie ni terrorisme intellectuel ni barbarie de la pensée unique. Faire de la politique n'est pas une bataille pour des postes de gouvernement, c'est contribuer au bien-être de la population par un plaidoyer en faveur de la liberté de parole et de pensée.
Ma conception de la politique et de l'action publique pour améliorer la condition humaine est qu’il faut être avec et parmi les hommes. Certes, je côtoie au sein de mon parti des hommes qui ont défendu et qui continuent, hélas, à défendre comme vous, les idées ivoiritaires. Sachant qu’ils m'écoutent encore, demeurer au sein du Fpi est le meilleur moyen pour moi de partager ma foi en l'homme, mes croyances en la tolérance et la confiance en l'avenir, de prévenir les conflits et de tenter d’inscrire de toutes mes forces, mes idées dans cette période tortueuse de notre histoire pour nous éviter, autant que faire se peut, le chaos, la peur et le désespoir que vous et vos amis ne cessez de distiller par jeu dans les esprits.
(…)
Démissionner et se tenir loin de la lutte sous prétexte que l’on n’est pas écouté et suivi par ses camarades du parti, au moment où ce qui se joue dépasse les partis et les destinées individuelles, est le propre de politiciens irresponsables. Je me suis battu pour les droits et les libertés individuelles avant d'être militant du Fpi. Je suis refondateur. Mon combat pour la dignité des peuples et pour la fin du pacte colonial continue dans ce parti. Je poursuis ma croisade contre tout ce qui peut être un frein à la consolidation de la Nation, de la République et de la Démocratie que nous voulons construire. Je consacre toute mon énergie à la recherche des libertés à conquérir pour chaque Africain. »
Et si Koulibaly démissionnait du Fpi ?
Le Fpi joue gros actuellement. Par des allusions à peine voilées, des faucons frontistes militent pour que Koulibaly Mamadou quitte le parti d’Affi N’Guessan. De façon récurrente, des hagiographes s’en prennent ouvertement au président de l’Assemblée nationale. Samedi, au parlement de Yopougon Wakouboué, on a proprement insulté Mamadou Koulibaly. Un des orateurs bien connu a invité les militants du Fpi à considérer Koulibaly Mamadou comme un partant, une personnalité en rupture de ban avec sa chapelle politique. Hier, dans un éditorial de haut vol dans Fraternité Matin, Jean baptiste Akrou, dont les affinités avec le chef de l’Etat ne sont un secret pour personne, a chargé le président du Parlement qui desservirait les siens à travers sa demande de moralisation de la vie publique. Son coup de gueule : «Il est des vérités qu’un homme politique garde enfouies en lui. Il en évoque dans ses mémoires et non quand il est en activité. Même si l’objectif n’est pas d’affaiblir son propre camp, les dernières déclarations du président Koulibaly y contribuent ». Le disant, le patron de Frat-Mat met de l’eau au moulin des détracteurs de Koulibaly. Dans une interview accordée à l’Intelligent d’Abidjan, le 12 juin, Jean Yves Dibopieu avait donné le ton en réclamant la démission de Koulibaly Mamadou. « Je pense que ce serait plus courageux, mais je ne pense pas que cette démission puisse m’ébranler ou agir sur ma personne », a-t-il lâché.
Pour notre confrère l’Inter, le président du Parlement a déjà un pied dehors. Il analyse : « Moi, j’ai envie de sortir de la saleté pour aller dans la propreté. Ceux qui disent, nous sommes sales mais c’est bon restons dedans comme ça, parce que ce n’est pas nous qui allons changer le monde, je ne suis pas sûr que ceux-là aient raison si l’on veut que la Côte d’Ivoire change, si l’on veut que l’Afrique change », dixit Mamadou Koulibaly. Le président de l’Assemblée nationale a prononcé ces mots révélateurs de son état d’esprit actuel, le mardi 29 juin dernier, à l’issue d’une réunion des députés membres de la Conférence des présidents. Le N° 2 du régime, à y voir de près, n’a plus toute sa tête au Fpi ».
Et ce confrère de révéler : « Un député proche de Mamadou Koulibaly, bien au fait des manœuvres politiques du président du parlement, nous disait, il y a quelques jours, que l’homme envisagerait de créer son parti politique, le Fpi ne faisant véritablement plus son affaire. Koulibaly ne parle pas au hasard. Quand il dit vouloir quitter la saleté pour aller dans la propreté, c’est une façon de vous dire qu’il a envie de partir du Fpi ». Le mot est lâché. Que risque le Fpi dans le départ de son 3ème vice-président?
Ce que perd le Fpi en cas de démission
Le Fpi peut-il se payer le luxe de voir Mamadou Koulibaly démissionner en cet instant précis? La réponse coule de source : c’est non. Ce serait même la catastrophe pour Affi N’Guessan et les siens puisque Koulibaly s’est posé comme le véritable symbole de la lutte contre les magouilles dans les concours administratifs. Et cela crée forcément un élan de sympathie au sein de la population. Exit les considérations politiques, clanique et tribales. Dieu sait combien ils sont nombreux les jeunes qui sont floués chaque année dans les concours. Rien que pour la police, ce sont 15.000 candidats qui se bousculent pour 1.300 places dont les 2/3 postes confisqués par la tutelle. Un appel au sursaut émanant de Koulibaly peut donc faire très mal.
Sur le plan purement politique, Si Koulibaly claque la porte, ce serait une très grosse perte pour Laurent Gbagbo qui n’a de cesse de brandir le numéro II de son régime comme un Malinké afin de confondre ceux qui l’accusent d’être un ivoiritaire endurci qui ne faisait la part belle qu’aux membres de sa tribu et associés.
Mais là où ça va faire très mal, c’est au sein de la communauté malinké et nordiste favorable au camp présidentiel.
C’est connu, Koulibaly a mené une croisade dans les milieux traditionnellement acquis au Rdr pour recruter pour Laurent Gbagbo. C’est grâce à ce travail que dans certains quartiers « dioulabougou » les gens osent aujourd’hui afficher leur appartenance au Fpi. A Koumassi, Anyama, Abobo, à Port Bouet II, il a abattu un travail de titan pour détruire les préjugés qui posaient Gbagbo l’ennemi des Malinkés. Une démission de Koulibaly remettrait à plat cette campagne rondement menée pendant des années.
L’autre vérité que personne n’a le courage de dire est que presque tous les Malinkés du Fpi se retrouvent dans le nouveau combat de Koulibaly. Y compris ceux qui siègent au sein des instances du parti d’Affi. En aparté, tous soutiennent le président du parlement. Mais ils n’ont pas le courage d’afficher leur opinion, pour le moment, disent-ils. Ils ont particulièrement été choqués par les pancartes tribalistes brandies par les hommes de Tagro devant le Parlement.
En définitive, le Fpi a tout intérêt à avoir Koulibaly avec lui que contre soi. Mieux que quiconque, Gbagbo le sait.
Traoré M. Ahmed
legende / Les thuriféraires Fpi prennent de gros risques en essayant de pousser Mamadou Koulibaly vers la porte de sortie.
Encadré
Koulibaly : « Je ne démissionne pas »
Lors de ses échanges avec Venance Konan en mars, le député de Koumassi avait répondu à la question de sa démission du Fpi. Un extrait de ce texte qui est plus que d’actualité. « En ce qui me concerne, je n’aime pas les attitudes masquées et préfère vivre ouvertement mon engagement, tout en restant objectif et en osant critiquer les dérives de mon propre groupe si nécessaire. L’engagement n’est pas forcément synonyme de comportement moutonnier que je ne confonds d'ailleurs pas avec la discipline du parti. C’est pour cela que je continue à réfléchir et à publier régulièrement des réflexions personnelles tout en militant au sein du Fpi. Je me considérais comme un intellectuel avant d'entrer en politique. Je crois encore que je le demeure. J'estime que lorsque l'intellect se met au service de la politique, c'est pour élever le débat démocratique et contribuer à la sortie de la société magique, de l'obscurantisme. Pour moi, la politique ne signifie ni terrorisme intellectuel ni barbarie de la pensée unique. Faire de la politique n'est pas une bataille pour des postes de gouvernement, c'est contribuer au bien-être de la population par un plaidoyer en faveur de la liberté de parole et de pensée.
Ma conception de la politique et de l'action publique pour améliorer la condition humaine est qu’il faut être avec et parmi les hommes. Certes, je côtoie au sein de mon parti des hommes qui ont défendu et qui continuent, hélas, à défendre comme vous, les idées ivoiritaires. Sachant qu’ils m'écoutent encore, demeurer au sein du Fpi est le meilleur moyen pour moi de partager ma foi en l'homme, mes croyances en la tolérance et la confiance en l'avenir, de prévenir les conflits et de tenter d’inscrire de toutes mes forces, mes idées dans cette période tortueuse de notre histoire pour nous éviter, autant que faire se peut, le chaos, la peur et le désespoir que vous et vos amis ne cessez de distiller par jeu dans les esprits.
(…)
Démissionner et se tenir loin de la lutte sous prétexte que l’on n’est pas écouté et suivi par ses camarades du parti, au moment où ce qui se joue dépasse les partis et les destinées individuelles, est le propre de politiciens irresponsables. Je me suis battu pour les droits et les libertés individuelles avant d'être militant du Fpi. Je suis refondateur. Mon combat pour la dignité des peuples et pour la fin du pacte colonial continue dans ce parti. Je poursuis ma croisade contre tout ce qui peut être un frein à la consolidation de la Nation, de la République et de la Démocratie que nous voulons construire. Je consacre toute mon énergie à la recherche des libertés à conquérir pour chaque Africain. »