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Politique Publié le jeudi 8 juillet 2010 | Nuit & Jour

‘’Affaire Tagro’’ - Pourquoi l’enquête doit aller jusqu’au bout

Dans une sortie désormais célèbre, le Pr. Mamadou Koulibaly, président de l’Assemblée Nationale et N°3 du FPI a accusé le ministre de l’Intérieur Désiré Tagro de tribalisme avant de lui demander de démissionner. Prenant la balle au bond, le Chef de l’Etat Laurent Gbagbo a instruit le Procureur de la République Raymond Tchnimou à l’effet de diligenter une enquête afin de situer l’opinion sur la réalité des accusations proférées par le N°2 de l’Etat à l’encontre du premier policer de Côte d’Ivoire.


« … à la suite d’un concours d’entrée à l’Ecole de Police d’Abidjan, dix des 1358 admis sont du même village que le chef de Cabinet du ministre de l’Intérieur. Comment expliquer qu’aucun candidat, par le hasard du concours, n’ait été admis dans la sous-préfecture de Saïoua alors que le village de Digbam enregistre à lui seul dix réussites ? On peut certes s’interroger sur la véracité des faits mais, quoi qu’il en soit, le climat de suspicion devrait être l’occasion d’ouvrir une enquête parlementaire pour tirer au clair le trafic d’influence et la corruption qui entourent les concours d’entrée dans les grands écoles de la police, de la gendarmerie et de l’administration. J’y suis favorable et j’invite les groupes parlementaires à s’y investir » a déclaré le professeur Mamadou Koulibaly dans sa communication lors du colloque organisé par la convention de la société civile en Côte d’Ivoire (CSCI) le mercredi 02 juin dernier, à la Rotonde de l’Assemblée Nationale sur le thème ‘’Responsabilité de la classe politique devant l’opinion publique’’.
Poursuivant, l’intervenant a pointé la responsabilité du ministre Désiré Tagro dans ce qu’il a appelé ‘’l’échec de l’Accord politique de Ouagadougou (APO)’’. Morceau choisi. ‘’L’APO s’est embourbé dans ses contradictions congénitales. La responsabilité du ministre Tagro est engagée car c’est lui qui a négocié, discuté, approuvé et conseillé l’APO. L'échec patent de cet accord devrait amener le ministre Tagro à en tirer les conséquences et à démissionner. Un homme politique responsable démissionnerait’’ a lâché le président de l’Assemblée Nationale.

Il n’a pas mâché se mots

Le moins que l’on puisse dire c’est que le N°2 de l’Etat s’est montré très offensif et comme à son habitude, il n’a pas mâché ses mots. Connu pour son courage et son refus des compromis, cet homme qui ne fait rien comme personne et qui cultive sa différence au sein de sa famille politique a, sans aucun doute, pour cette fois, franchi un palier. Mais sa sortie pourrait marquer le point zéro de la moralisation de la vie publique. Car, l’enquête diligentée par le Procureur de la République sur instruction du Chef de l’Etat aux fins de ‘’tirer au clair le trafic d’influence et la corruption qui entourent les concours d’entrée à la Police, à la Gendarmerie, à la Fonction publique etc.’’ constitue une grande première en Côte d’Ivoire.
C’est, en effet, la première fois qu’une haute personnalité de l’Etat, en l’occurrence le président de l’Assemblée Nationale, accuse publiquement un ministre de la République de tribalisme, de favoritisme et de trafic d’influence. C’est aussi la première fois qu’un membre d’un gouvernement en exercice fait l’objet d’une enquête. A l’évidence, la moralisation de la vie publique vient de franchir un pas. C’est pourquoi, il ne serait pas anodin que cette affaire connaisse un dénouement dans les meilleurs délais. Cette enquête ne saurait donc suivre indéfiniment son cours, comme il est de coutume, pour au moins une raison. Le rang et la stature de l’accusateur. De fait, le Pr. Mamadou Koulibaly n’est pas n’importe qui. Il est le N°2 de l’Etat de Côte d’Ivoire et le N°3 du parti au pouvoir, le FPI. Au plan professionnel, il est un professeur D’Université émérite, connu pour la rigueur de son travail. Intellectuellement, il est certainement l’un des esprits les plus brillants de ce pays.
Pour toutes ces raisons, ce qu’il dit et fait est de la plus grande importance. Dès lors, il est évident que le Procureur de la République est tenu d’aller jusqu’au bout de son enquête. La qualité des protagonistes de cette affaire l’exige, la morale le commande.
Les Ivoiriens qui sont habitués à voir les enquêtes suivre leurs cours de manière indéfinie ont, cette fois, le droit de savoir ce qu’il en est des accusations du Pr. Mamadou Koulibaly

C’est le lieu de saluer et d’encourager le Chef de l’Etat

C’est le lieu de saluer et d’encourager le Chef de l’Etat Laurent Gbagbo dont la réaction marque assurément un tournant dans la lutte contre la fraude et la corruption. Pour le coup, il a manifesté un sens de la responsabilité et de l’Etat qui l’honore. Car, il aurait pu adopter une attitude de quiète indifférence face aux accusations de Mamadou Koulibaly d’autant que l’accusateur et l’accusé sont de son bord politique. Chacun aurait compris et l’affaire aurait été close. Ce ne serait d’ailleurs pas la première fois qu’une affaire mettant gravement en cause un ministre ou une personnalité politique de premier ordre serait restée sans suite. « L’affaire Tagro », comme il est désormais convenu d’appeler cette autre affaire qui secoue la République aurait donc connu un enterrement de première classe et personne n’aurait trouvé à redire. Mais, justement, parce qu’il est engagé dans une lutte sans concession contre la fraude, la corruption et autres pratiques dolosives, le Chef de l’Etat ne veut point être pris à défaut sur le chapitre de son impartialité. En mettant donc en branle le Procureur de la République pour que celui-ci connaisse de cette affaire mais aussi d’autres affaires liées au ministre Désiré Tagro, l’un de ses proches, il est patent que Laurent Gbagbo a voulu faire un exemple. Il envoie ainsi un signal fort aux Ivoiriens mais aussi à son opposition si encline à l’incriminer pour tout et pour rien. « Si le bois vert n’est pas épargné, qu’en sera-t-il du bois sec ? » disent les Saintes Ecritures.
Si donc Désiré Tagro qui est un fidèle parmi les fidèles du Chef de l’Etat est ainsi appelé à répondre de ses actes, il est évident que personne ne pourra échapper à la nasse de la lutte contre la corruption de la société ivoirienne dont Laurent Gbagbo se veut désormais le héraut. L’enquête contre Désiré Tagro sonne, à l’évidence la fin de l’impunité qui a pendant longtemps nourri la pieuvre de la corruption dont les tentacules enserrent si tragiquement toutes les couches de la société ivoirienne. Et l’affaire ‘’des 2/3 des admis de l’Ecole Nationale de Police réservés au FPI’’ est si grave qu’il est important que l’enquête diligentée à cet effet aille jusqu’à son terme et que les conséquences, toutes les conséquences soient tirées. Pour que non seulement cessent de telles pratiques mais que des mesures draconiennes soient prises pour que plus jamais l’on ne connaisse de tels cas. C’est une exigence de la cohésion et de l’unité nationales. Car des frustrations et des injustices naissent les révoltes et les rébellions qui font, hélas, le lit de la pauvreté et du sous-développement.

Jean Henri Kwahulé
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