Dans ce mois de miséricorde, plusieurs vendeurs de garba (semoule de manioc) ont choisi de faire des affaires, quelle que soit l’heure. L’un d’entre eux sort du lot.
«Allons chez Bilo». C’est ce que disent les nombreux musulmans d’Abobo-BC (derrière la pharmacie ‘‘Belle cité’’) qui font du garba leur nourriture du début du jeûne, lorsqu’ils se lèvent autour de 4 heures du matin. Bilo, c’est le vendeur de garba du coin, le seul qui ose vendre à cette heure. Sa réputation le précède.
Dès les premiers chants du coq, il suffit de regarder les ruelles obscures et parsemées de flaques d’eau qui mènent chez Bilo pour comprendre à quel point ce garbadrôme de 4 heures du matin attire les riverains. Dans le noir et le froid matinal, des enfants et des adultes, quelquefois, des assiettes en main, marchent silencieusement vers un vieux hangar en planche. La maisonnette est élevée entre de vieux tabliers abandonnés. Des enfants mal vêtus grelottent presque, leurs assiettes soigneusement serrées entre les mains. Un étranger pourrait se méprendre devant ce spectacle insolite, et penser à autre chose. Mais il n’y a rien d’étrange à ce défilé. Ces personnes vont simplement chercher à manger.
L’odeur attirant du thon frit chatouille les narines au fur et à mesure que l’on s’approche du hangar de Bilo, éclairé par deux ampoules, l’une sur la façade et l’autre à l’intérieur. Devant, il y a un petit monde. Un garçon, dans la vingtaine, est occupé à faire frire le poisson sur un fourneau à gaz. Autour de lui, des clients, fourchette en main, choisissent dans l’huile bouillante, des morceaux de thon, avant même la cuisson. Et ils veillent sur leurs tranches de poisson jusqu’à ce que celles-ci soient cuites. Dans le hangar, un homme, la quarantaine, sert dans des feuilles vertes ou dans des assiettes, du garba à quelques personnes qui ont passé leurs commandes. L’ambiance est chaude malgré l’heure qu’il fait. « Bilo, sers-moi de l’attiéké pour 100 Fcfa, j’ai pris deux poissons de 200 Fcfa ; allez, Bilo, ajoute encore un peu d’attiéké, j’ai dit de me servir pour 75 Fcfa, ce que tu m’as servi-là ne rassasierait même pas un bébé. Tu oublies que je vais passer toute la journée sans manger…» Sur des vieux bancs, d’autres personnes qui ont déjà été servis, mangent avec gourmandise, un verre d’eau à côté. La plupart sont des célibataires endurcis. Ils préfèrent manger dehors et rentrer se coucher. Parmi ceux qui partent avec leurs commandes, beaucoup ont été envoyés. C’est souvent toute la famille qui attend l’arrivée du garba pour la nourriture du début du jeûne. Ce choix de la semoule de manioc accompagné de thon bien doré, paraît tout simple pour eux. « Le garba est une nourriture solide, vous avez moins faim avant la rupture du jeûne quand vous l’a consommez comme aliment de début du jeûne», justifient la plupart d’entre eux. Beaucoup se cachent derrière ce prétexte pour fréquenter le garbadrôme de Bilo.
Mais qui est Bilo, lui-même ? Venu dans la vente du garba, depuis environ une dizaine d’années, l’aventurier prend son métier très au sérieux. Il reconnaît n’être pas le seul garbaman à vendre à 4 heures du matin pendant ce temps de jeûne. Mais il faut être un passionné comme lui, pour se lever à 2h30 du matin, commencer à découper le poisson, le nettoyer, avant de débuter la cuisson. Il faut être fort pour vendre de 2h30 du matin à 19 h. « C’est ce que je fais », raconte-t-il. Ça marche et cela en vaut la peine. Au début, c’était un vendeur de garba comme tout autre. Jusqu’à ce qu’un jour, l’un de ses frères lui souffle que vendre du garba à 4 heures du matin pour les jeûneurs, est très bien et pour Dieu et pour les affaires. « Depuis que le jeûne a commencé, j’écoule en moyenne six paniers d’attiéké, par jour. Avec une commande de poisson thon qui avoisine 75.000 Fcfa », affirme-t-il sans se vanter. Là où certains voient leurs ventes chuter à cause de ce mois de pénitence, il arrive à écouler un ou deux paniers de plus que les mois ordinaires. Quand on lui demande tout son nom, il se contente de dire : «appelez-moi Bilo»
Raphaël Tanoh
«Allons chez Bilo». C’est ce que disent les nombreux musulmans d’Abobo-BC (derrière la pharmacie ‘‘Belle cité’’) qui font du garba leur nourriture du début du jeûne, lorsqu’ils se lèvent autour de 4 heures du matin. Bilo, c’est le vendeur de garba du coin, le seul qui ose vendre à cette heure. Sa réputation le précède.
Dès les premiers chants du coq, il suffit de regarder les ruelles obscures et parsemées de flaques d’eau qui mènent chez Bilo pour comprendre à quel point ce garbadrôme de 4 heures du matin attire les riverains. Dans le noir et le froid matinal, des enfants et des adultes, quelquefois, des assiettes en main, marchent silencieusement vers un vieux hangar en planche. La maisonnette est élevée entre de vieux tabliers abandonnés. Des enfants mal vêtus grelottent presque, leurs assiettes soigneusement serrées entre les mains. Un étranger pourrait se méprendre devant ce spectacle insolite, et penser à autre chose. Mais il n’y a rien d’étrange à ce défilé. Ces personnes vont simplement chercher à manger.
L’odeur attirant du thon frit chatouille les narines au fur et à mesure que l’on s’approche du hangar de Bilo, éclairé par deux ampoules, l’une sur la façade et l’autre à l’intérieur. Devant, il y a un petit monde. Un garçon, dans la vingtaine, est occupé à faire frire le poisson sur un fourneau à gaz. Autour de lui, des clients, fourchette en main, choisissent dans l’huile bouillante, des morceaux de thon, avant même la cuisson. Et ils veillent sur leurs tranches de poisson jusqu’à ce que celles-ci soient cuites. Dans le hangar, un homme, la quarantaine, sert dans des feuilles vertes ou dans des assiettes, du garba à quelques personnes qui ont passé leurs commandes. L’ambiance est chaude malgré l’heure qu’il fait. « Bilo, sers-moi de l’attiéké pour 100 Fcfa, j’ai pris deux poissons de 200 Fcfa ; allez, Bilo, ajoute encore un peu d’attiéké, j’ai dit de me servir pour 75 Fcfa, ce que tu m’as servi-là ne rassasierait même pas un bébé. Tu oublies que je vais passer toute la journée sans manger…» Sur des vieux bancs, d’autres personnes qui ont déjà été servis, mangent avec gourmandise, un verre d’eau à côté. La plupart sont des célibataires endurcis. Ils préfèrent manger dehors et rentrer se coucher. Parmi ceux qui partent avec leurs commandes, beaucoup ont été envoyés. C’est souvent toute la famille qui attend l’arrivée du garba pour la nourriture du début du jeûne. Ce choix de la semoule de manioc accompagné de thon bien doré, paraît tout simple pour eux. « Le garba est une nourriture solide, vous avez moins faim avant la rupture du jeûne quand vous l’a consommez comme aliment de début du jeûne», justifient la plupart d’entre eux. Beaucoup se cachent derrière ce prétexte pour fréquenter le garbadrôme de Bilo.
Mais qui est Bilo, lui-même ? Venu dans la vente du garba, depuis environ une dizaine d’années, l’aventurier prend son métier très au sérieux. Il reconnaît n’être pas le seul garbaman à vendre à 4 heures du matin pendant ce temps de jeûne. Mais il faut être un passionné comme lui, pour se lever à 2h30 du matin, commencer à découper le poisson, le nettoyer, avant de débuter la cuisson. Il faut être fort pour vendre de 2h30 du matin à 19 h. « C’est ce que je fais », raconte-t-il. Ça marche et cela en vaut la peine. Au début, c’était un vendeur de garba comme tout autre. Jusqu’à ce qu’un jour, l’un de ses frères lui souffle que vendre du garba à 4 heures du matin pour les jeûneurs, est très bien et pour Dieu et pour les affaires. « Depuis que le jeûne a commencé, j’écoule en moyenne six paniers d’attiéké, par jour. Avec une commande de poisson thon qui avoisine 75.000 Fcfa », affirme-t-il sans se vanter. Là où certains voient leurs ventes chuter à cause de ce mois de pénitence, il arrive à écouler un ou deux paniers de plus que les mois ordinaires. Quand on lui demande tout son nom, il se contente de dire : «appelez-moi Bilo»
Raphaël Tanoh