Gagnoa : Les radiés racontent leur calvaire

A l'instar de certaines villes du pays, Gagnoa a elle aussi connu son épisode de radiation sur la liste électorale. Ils se chiffrent en milliers ceux qui auraient fait entorse au code de la nationalité. Curieusement, ils restent muets quand il s'agit de se prononcer sur le calvaire qu'ils vivent. Dans une famille qui nous a été indiquée, le concerné n'a pas voulu se présenter à nous. On nous a fait croire que nous nous sommes trompés de porte. A la vérité, les mis en cause ont une peur bleue de se faire voir, pis de parler à la presse. Cependant ceux qui ont accepté de nous parler, sont ceux qui ont gagné leur procès face à la partie plaignante. Cela après avoir apporté la preuve qu'ils font partie des nationaux. Parmi eux, se trouve Sanogo Mamadou." Quand j'ai appris ma radiation du listing électoral, je n'arrivais pas à manger au point que j'ai perdu des kilogrammes. Mon inquiétude était surtout au niveau de mes enfants. Que deviendront-ils si le père est spolié de son droit?", s'interroge Sanogo. Pour lui, en le radiant de la liste cela allait agir sur ses enfants qui en seront traumatisés. Ses accusateurs lui reprochent d'être Malien pour la simple raison que sa sœur aînée dispose d'une carte de séjour et est mariée à un Malien." le choc que j'ai vécu était si grand que je n'arrivais pas à réaliser ce qui m'arrivait" raconte-t-il. A la demande du tribunal, il a justifié sa nationalité. " J'ai produit un acte d'individualité pour couper court à tout ragot". C'est un homme plein d'énergie que nous avons vu nous parler et qui se dit satisfait. Il nous a confié que, dans les tout premiers jours, il n'aurait pas accepté de nous recevoir parce que sous l'effet de la révolte. Un autre radié puis réintégré se nomme Diallo Moussa. « J'étais dans mon champ lorsque mon voisin m'a donné l'information de ma radiation. C'est comme si le ciel venait de tomber sur ma tête. Selon celui qui me dénonce, mon père né en 1960 détient une carte de séjour et moi je serais né en 1974. Quelle incohérence? Ce qui signifie que mon père m'a mis au monde à l'âge de 14 ans », dénonce M. Diallo. Puis d'ajouter : « J'ai été plus que choqué. J'ai fait 5 jours sans aller au travail. Je me demandais ce qui arrivait à mon pays". Comme preuve, Diallo a produit à la fois les cartes d'identité jaune et verte de son père. En conséquence de quoi il a été réhabilité dans ses droits.

Alain Kpapo à Gagnoa

Nord Sud Quotidien