Présent à Abidjan pour deux concerts, le bassiste-chanteur camerounais, Richard Bona, s’est prêté aux questions des journalistes. Il revient dans cet entretien sur l’Afrique, mais et surtout, sur sa passion : la musique.
Est-ce la première fois que vous venez en Côte d’Ivoire ?
C’est mon troisième voyage ici. Le premier, date de 1991. C’était avec mon groupe.
Quel a été votre parcours avant de devenir la sommité que vous êtes aujourd’hui ?
Je suis né à l’est du Cameroun. Déjà gamin, je tapais sur tout. Mon grand-père qui connaissait ma passion pour la musique, m’a offert un balafon. Un instrument traditionnel. C’était mon premier instrument. Ensuite, j’ai joué l’orgue à l’église. Mon grand-père et mon père étaient des musiciens d’église. Ensuite, je suis allé à Paris où j’ai passé cinq ans. Cela fait 15 ans, aujourd’hui, que je vis aux Etats Unis, à New York. J’ai six albums. Deux chez Sony et quatre chez Universel. Ce qui m’a toujours éclairé, c’est mon amour et ma passion de la musique. Surtout l’apprentissage de la musique. J’enseigne aussi la musique à New York. Mais, je suis plus un étudiant de la musique. Nous sommes tous des étudiants de la musique jusqu’à la mort. Parce que, j’ai toujours une manière particulière d’aborder le sujet : je sais que je ne sais pas. Cela me laisse toujours une marge avec toujours une envie d’apprendre, une envie de me surpasser.
Le déclic est-il venu de la guitare basse ?
C’est ma passion pour la musique qui a toujours allumé cette flamme dévorante. J’ai rencontré une grande tante à moi que je n’avais pas vu depuis très longtemps. Elle m’a dit que quand j’étais gamin, elle ne se souvient pas m’avoir vu, un jour, ne pas être en train de jouer. Chaque fois qu’elle me voyait, je jouais de la musique. Au fil des années, j’ai appris une chose très importante. L’excellence vient des mouvements répétés. Après, comme je suis quelqu’un de curieux, j’ai fréquenté beaucoup de groupes. J’aime aller vers les autres, à la rencontre d’autres cultures. Ce qui m’a apporté beaucoup.
Pourquoi avoir choisi de jouer la guitare basse ?
Personnellement, je n’avais pas de préférence. J’ai toujours joué de la guitare. Jusqu’à ce qu’un jour, je tombe sur un album de Jacob Scories. Quand j’ai entendu le son de la guitare basse, je me suis tout de suite dit, il faut que je joue à cet instrument.
Votre père était pourtant contre le fait que vous deveniez musicien…
Effectivement. Mais, s’il m’arrivait de revivre cet épisode de ma vie, je ne changerai rien à cela. J’ai eu un parcours parsemé d’embûches. Le plus important, c’est d’avoir ce ‘’focus’’. Mais, ma chance, c’est que mon grand-père était musicien. Donc, il me comprenait. Je pense que je n’étais pas fait pour autre chose que la musique.
Que voulez-vous qu’on retienne de votre musique ?
Pas grand’ chose. Je veux simplement que quand des gens m’écouteront dans 30 et 40 ans, qu’ils aient de bons souvenirs, de bons moments de musique. C’est ce qui est important pour moi. Ce sont des moments simples qu’on néglige, qui restent. Si des gens peuvent vivre ces moments avec ma musique, avoir un petit élan de bonheur au cœur, c’est que mon contrat est rempli.
Qu’est-ce qui fait un grand artiste selon vous ?
Je pense que je suis mal placé pour apprécier la dimension d’un grand artiste. Ce n’est pas à moi de dire si je suis grand ou non et même d’apprécier ce que je fais. A dire vrai, je n’écoute pas ma musique. Je compose des choses que je n’écoute jamais. Lorsqu’il m’arrive de le faire, je n’entends que des erreurs. Je ne suis pas un bon auditeur de ma propre musique. Par contre, je joue de la musique tous les jours. Je ne passe pas une journée sans le faire.
Est-ce que vous intervenez dans le social ?
C’est normal de faire du social. Avec les recettes de mes concerts, je fais des choses. Mais, c’est rien pour moi. Car, je dois faire davantage. J’ai arrêté de blâmer les gouvernements. A dire qu’ils n’ont pas fait ceci ou cela. Tous les jours quand je me lève, je me demande qu’est-ce que j’ai fait moi ? Depuis quatre à cinq ans déjà, je me pose cette question. Nous avons construit dans une banlieue de Douala, un centre de dépistage du Sida. Chaque année, je me pose la question de savoir qu’ai-je fait de bien ? Et j’aime à répondre à cette question.
Vous est-il arrivé de vouloir privilégier le chant à la guitare et vice-versa ?
C’est une vision purement occidentale, ce que vous dites. Dans mon village, quand mon grand-père et moi allions en animation, nous n’étions que deux. Nous jouions la musique et faisions le chant. On a une conception globale de l’artiste en Afrique. La conception d’instrumentiste n’est pas africaine. Nous avons une conception de divertissement. Je ne peux pas changer mon background. Je peux l’améliorer mais pas le changer.
Vous chantez dans une langue que de nombreuses personnes ne comprennent pas. Qu’est-ce qui les attirent chez vous ?
Il y a beaucoup de choses au-delà de la langue. Je fais un genre musical qui m’est particulier. Il y a des gens qui disent que c’est du jazz parce qu’ils y retrouvent des sonorités jazz. Le plus important, c’est la mélodie. J’appelle ma musique la Bonatology.
Que conseillerez-vous aux jeunes qui veulent faire une carrière musicale ?
On ne choisit pas la musique. C’est la musique qui vous choisit. Mon père m’avait frappé un jour. Il m’a emmené au commissariat où on m’a fouetté pour m’empêcher d’aller jouer en boîte de nuit. Ce même soir, j’y suis allé jouer. Quand je suis revenu à 3h du matin, il s’est dit qu’il n’y avait plus rien à faire pour moi. On ne choisit pas un art.
Pensez-vous que la musique africaine doit aller au contact des autres musiques pour avoir du succès au plan international ?
La beauté d’une musique ne tient à rien. Il y a des choses qu’on fait de façon timide et ça marche. Je milite plus pour le savoir. C’est important. Je pense qu’il est nécessaire d’écouter ce qui se fait à l’extérieur. Mais, je ne dis pas que si quelqu’un reste en Afrique, ça ne va pas forcément marcher. Il faut élargir sa vision.
Propos recueillis par Sanou A.
Est-ce la première fois que vous venez en Côte d’Ivoire ?
C’est mon troisième voyage ici. Le premier, date de 1991. C’était avec mon groupe.
Quel a été votre parcours avant de devenir la sommité que vous êtes aujourd’hui ?
Je suis né à l’est du Cameroun. Déjà gamin, je tapais sur tout. Mon grand-père qui connaissait ma passion pour la musique, m’a offert un balafon. Un instrument traditionnel. C’était mon premier instrument. Ensuite, j’ai joué l’orgue à l’église. Mon grand-père et mon père étaient des musiciens d’église. Ensuite, je suis allé à Paris où j’ai passé cinq ans. Cela fait 15 ans, aujourd’hui, que je vis aux Etats Unis, à New York. J’ai six albums. Deux chez Sony et quatre chez Universel. Ce qui m’a toujours éclairé, c’est mon amour et ma passion de la musique. Surtout l’apprentissage de la musique. J’enseigne aussi la musique à New York. Mais, je suis plus un étudiant de la musique. Nous sommes tous des étudiants de la musique jusqu’à la mort. Parce que, j’ai toujours une manière particulière d’aborder le sujet : je sais que je ne sais pas. Cela me laisse toujours une marge avec toujours une envie d’apprendre, une envie de me surpasser.
Le déclic est-il venu de la guitare basse ?
C’est ma passion pour la musique qui a toujours allumé cette flamme dévorante. J’ai rencontré une grande tante à moi que je n’avais pas vu depuis très longtemps. Elle m’a dit que quand j’étais gamin, elle ne se souvient pas m’avoir vu, un jour, ne pas être en train de jouer. Chaque fois qu’elle me voyait, je jouais de la musique. Au fil des années, j’ai appris une chose très importante. L’excellence vient des mouvements répétés. Après, comme je suis quelqu’un de curieux, j’ai fréquenté beaucoup de groupes. J’aime aller vers les autres, à la rencontre d’autres cultures. Ce qui m’a apporté beaucoup.
Pourquoi avoir choisi de jouer la guitare basse ?
Personnellement, je n’avais pas de préférence. J’ai toujours joué de la guitare. Jusqu’à ce qu’un jour, je tombe sur un album de Jacob Scories. Quand j’ai entendu le son de la guitare basse, je me suis tout de suite dit, il faut que je joue à cet instrument.
Votre père était pourtant contre le fait que vous deveniez musicien…
Effectivement. Mais, s’il m’arrivait de revivre cet épisode de ma vie, je ne changerai rien à cela. J’ai eu un parcours parsemé d’embûches. Le plus important, c’est d’avoir ce ‘’focus’’. Mais, ma chance, c’est que mon grand-père était musicien. Donc, il me comprenait. Je pense que je n’étais pas fait pour autre chose que la musique.
Que voulez-vous qu’on retienne de votre musique ?
Pas grand’ chose. Je veux simplement que quand des gens m’écouteront dans 30 et 40 ans, qu’ils aient de bons souvenirs, de bons moments de musique. C’est ce qui est important pour moi. Ce sont des moments simples qu’on néglige, qui restent. Si des gens peuvent vivre ces moments avec ma musique, avoir un petit élan de bonheur au cœur, c’est que mon contrat est rempli.
Qu’est-ce qui fait un grand artiste selon vous ?
Je pense que je suis mal placé pour apprécier la dimension d’un grand artiste. Ce n’est pas à moi de dire si je suis grand ou non et même d’apprécier ce que je fais. A dire vrai, je n’écoute pas ma musique. Je compose des choses que je n’écoute jamais. Lorsqu’il m’arrive de le faire, je n’entends que des erreurs. Je ne suis pas un bon auditeur de ma propre musique. Par contre, je joue de la musique tous les jours. Je ne passe pas une journée sans le faire.
Est-ce que vous intervenez dans le social ?
C’est normal de faire du social. Avec les recettes de mes concerts, je fais des choses. Mais, c’est rien pour moi. Car, je dois faire davantage. J’ai arrêté de blâmer les gouvernements. A dire qu’ils n’ont pas fait ceci ou cela. Tous les jours quand je me lève, je me demande qu’est-ce que j’ai fait moi ? Depuis quatre à cinq ans déjà, je me pose cette question. Nous avons construit dans une banlieue de Douala, un centre de dépistage du Sida. Chaque année, je me pose la question de savoir qu’ai-je fait de bien ? Et j’aime à répondre à cette question.
Vous est-il arrivé de vouloir privilégier le chant à la guitare et vice-versa ?
C’est une vision purement occidentale, ce que vous dites. Dans mon village, quand mon grand-père et moi allions en animation, nous n’étions que deux. Nous jouions la musique et faisions le chant. On a une conception globale de l’artiste en Afrique. La conception d’instrumentiste n’est pas africaine. Nous avons une conception de divertissement. Je ne peux pas changer mon background. Je peux l’améliorer mais pas le changer.
Vous chantez dans une langue que de nombreuses personnes ne comprennent pas. Qu’est-ce qui les attirent chez vous ?
Il y a beaucoup de choses au-delà de la langue. Je fais un genre musical qui m’est particulier. Il y a des gens qui disent que c’est du jazz parce qu’ils y retrouvent des sonorités jazz. Le plus important, c’est la mélodie. J’appelle ma musique la Bonatology.
Que conseillerez-vous aux jeunes qui veulent faire une carrière musicale ?
On ne choisit pas la musique. C’est la musique qui vous choisit. Mon père m’avait frappé un jour. Il m’a emmené au commissariat où on m’a fouetté pour m’empêcher d’aller jouer en boîte de nuit. Ce même soir, j’y suis allé jouer. Quand je suis revenu à 3h du matin, il s’est dit qu’il n’y avait plus rien à faire pour moi. On ne choisit pas un art.
Pensez-vous que la musique africaine doit aller au contact des autres musiques pour avoir du succès au plan international ?
La beauté d’une musique ne tient à rien. Il y a des choses qu’on fait de façon timide et ça marche. Je milite plus pour le savoir. C’est important. Je pense qu’il est nécessaire d’écouter ce qui se fait à l’extérieur. Mais, je ne dis pas que si quelqu’un reste en Afrique, ça ne va pas forcément marcher. Il faut élargir sa vision.
Propos recueillis par Sanou A.