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Art et Culture Publié le samedi 23 octobre 2010 | Nord-Sud

Portrait : Téïsson, le spécialiste de l’imitation

Kpan Albert. Ce nom vous dit-il quelque chose ? Pas vraiment… Avouez-le. Eh bien, il s’agit de celui que toute la Côte d’Ivoire (re)connaît comme Téïsson (le village qui l’a vu naître dans la sous-préfecture de Facobly). Malgré ses 54 ans, aujourd’hui, le majordome d’Akissi Delta dans la série télévisée Ma Famille refuse de prendre sa retraite. Au contraire...

On était sans nouvelles de lui depuis l’arrêt du Téléfilm Ma Famille. L’autre soir, nous l’avons retrouvé à Port-Bouet, la commune où il vit avec sa concubine, Georgette Adi et ses cinq enfants. Il était d’ailleurs au Lycée moderne de cette commune avec sa fille pour régler un problème d’affectation. Kpan Albert alias Téïsson a juste pris quelques rides mais son visage reste replet. Il ne passe d’ailleurs pas inaperçu malgré le grand chapeau qu’il arbore. A la question de savoir si ses fans le reverront un jour sur le petit écran, il répond sans ambages : « Chaque artiste se prépare dans son coin. Le jour où les chaînes de télévision seront libéralisées, nous allons cartonner. Je ne peux pas déballer ma batterie mais sachez que je prépare de grandes choses ». Ouf ! Le contraire aurait attristé bon nombre de personnes qui apprécient le jeu scénique mais aussi et surtout ses imitations qui sont devenues sa marque de fabrique.

Téïsson veut une voiture…

«Au départ, c’était l’imitation qui me fascinait. J’ai vraiment aimé le président Houphouet-Boigny. Je me souviens qu’en 1983, alors que j’étais en classe de 3è, une mémorable grève des professeurs avait été déclenchée. Houphouet-Boigny n’avait pas toléré cela. Chaque fois qu’il parlait, il donnait des proverbes. Cela m’a marqué et c’est depuis lors que j’ai commencé à l’imiter », nous a-t-il expliqué. Et lequel des proverbes du père de la nation n’oubliera-t-il jamais ? « On ne reste pas dans les magnans pour se débarrasser des magnans… », confie-t-il avant de poursuivre. « Imiter les gens est un don pour moi. Le génie ne s’explique pas. Je rends gloire à Dieu pour cela. Le travail qu’on fait et où nous nous sentons à l’aise est la clef de notre vie. J’imite volontier Houphouet-Boigny, Bébé Gâté mais je peux imiter aussi Kanté Boubacar, Niangoran Porquet et plein d’autres ».

Sympathique, Téïsson n’est toutefois pas très heureux. Et cet après-midi, il a le regard dans le vide malgré les interpellations de quelques fans dans les rues. Il s’épanche : « Etre populaire ne me déplaît pas. Mon seul regret est que je n’ai pas encore ma voiture. Je me déplace donc dans les taxis communaux et les gens me reconnaissent. Ma simple démarche fait qu’on me reconnaît. Même les chapeaux que je porte n’empêchent pas les gens de me reconnaître. Mais Dieu seul connaît le jour de chaque personne… et m’aidera à avoir ma voiture ». Cette prière, Dieu l’exaucera. C’est sûr. En attendant, Téïsson ne se laisse pas griser par sa petite popularité. Au fait, parvient-il à vivre de son art ? « L’art nourrit son homme à condition d’être dans un environnement sain. Ici, l’art ne peut pas nourrir son homme car il y a une seule chaîne de télévision. Lorsqu’on a le malheur de proposer un projet, les gens vous le piquent », révèle-t-il. Quel jugement sa concubine, Georgette, porte-t-elle sur lui : « j’aime tout chez lui. Mais il mange trop et il dort trop tôt (19h-20h)… », a-t-elle signalé.

« Il n’y a pas de petits rôles au cinéma »

Pour beaucoup, Téïsson manque d’ambition car se contentant des petits rôles. Vrai ou faux ? « Les petits rôles, au théâtre ou au cinéma, sont les meilleurs à condition de bien les jouer. Dans l’art, il n’y a pas de petits rôles. C’est celui qui joue un rôle qui le met en valeur. Aujourd’hui, je ne peux plus marcher dans les rues car tout le monde me reconnaît et m’interpelle », assure-t-il. L’histoire de Téïsson avec l’art remonte à bien longtemps. Il raconte : «Je n’ai qu’un seul métier. J’ai commencé à l’école de théâtre à l’INA, devenue INSAAC, pendant trois ans. Après, j’ai traîné ma bosse dans des troupes de théâtre. Depuis 1983, je suis dans le théâtre ». Et de poursuivre : « C’est en 1992 que je suis passé à la télévision pour la première fois, en imitant Houphouet-Boigny. Mon seul regret est que je ne l’ai pas vu de son vivant car il était déjà malade. Plus tard, j’ai démarré avec le personnage de Bébé gâté… ».

Qui dit wobê dit Africa

Et même si son parcours n’est pas extraordinaire, Téïsson veut rester positif. « Ce sont essentiellement à travers les émissions de la télé et de la radio que je me suis exprimé jusqu’ici. Dans les années 95-96, nous étions à l’émission Dimanche Passion avec Barthélémy Inabo. Plus tard, j’ai fait trois ans avec Doh Ouattara à Radio Côte d’Ivoire. L’émission avait pour nom Dimanche-Détente. Le téléfilm Ma Famille a été lancé en 2002. Sincèrement, tout cela n’est que du menu frétin et je suis sûr que le meilleur est à venir », croit-il. L’arrêt du téléfilm Ma Famille a-t-il un handicap sur lui ? « Dès le départ, nous étions partis pour 53 épisodes et cela a été fait. Je ne pense donc pas qu’il y a eu un arrêt de Ma Famille », révèle-t-il. A propos de son célèbre rôle de majordome, il donne quelques détails : « Delta a fait son casting. Il faut dire que depuis 1992, elle m’avait vu imiter Houphouet-Boigny. Elle me répétait que j’étais élégant en veste et qu’elle travaillerait un jour avec moi. C’est finalement en 2002 qu’elle m’a confié ce rôle dans Ma famille. Delta m’a dit que je serais le majordome dans le film car c’est quelqu’un qui est toujours bien habillé. Elle a ajouté que je n’aurais pas à parler beaucoup mais a tenu à me dire que le travail bien fait m’ouvrirait des portes. Et, elle n’a pas eu tort… ».

Fervent supporter de l’Africa Sports, le comédien avoue : « Je suis Africa. Qui dit wobê dit Africa. Quand je jouais avant, on me surnommait Gnankouri Joseph ». Pour rester en forme, Téïsson a son petit secret : « Je bois deux litres d’eau par jour et je fais plusieurs abdominaux pour éviter d’avoir un gros ventre ». Son plat préféré ? : « J’adore la sauce feuille avec du gombo. Je ne mange jamais la sauce graine avec le riz comme mes frères bété. La sauce graine se mange avec du foutou… », précise-t-il, le sourire aux lèvres. Côté musique, Téïsson adore le zouglou. « J’aime le zouglou particulièrement Petit Yodé. J’aime aussi Soum Bill. Il paraît que Paulin des Garagistes me ressemble. Espoir 2000 et les Patrons sont des espoirs de la musique ivoirienne. Leurs textes font réfléchir », confirme-t-il. A quelques jours des élections présidentielles, le célèbre imitateur de Félix Houphouet-Boigny a son candidat. Il justifie d’ailleurs ce choix. « Je suis artiste mais avant tout un citoyen. D’Houphouet-Boigny à Soro Guillaume en passant par Guéi Robert, Bédié ou Alassane Ouattara, je connais tous les politiciens ivoiriens. Un adage dit qu’ « on ne détruit pas la maison du menteur. On lui enlève simplement sa paille ». C’est le cas de Laurent Gbagbo qui annonçait beaucoup de choses. Mais à peine est-il arrivé au pouvoir en 2000, qu’il y a eu la guerre. Allait-il honorer toutes ses promesses ? Nous ne savons rien. C’est pourquoi je pense qu’il faut lui permettre, même en cinq ans, de diriger le pays ».


Guy-Florentin Yaméogo
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