Le miracle n’a pas eu lieu. Philippe-Henri Dacoury-Tabley, Gouverneur de la Bceao (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest) a démissionné de ce poste, contraint par les chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest africaine), lors du 15ème sommet de Bamako, au Mali, le samedi dernier. Le Gouverneur, un peu amaigri, n’a pu résister à la bourrasque de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union. Malgré son sourire habituel, Dacoury-Tabley, lorsqu’il se rend au Centre international de conférence de Bamako sait pertinemment que ce ne sera pas une partie de plaisir pour lui. Après la cérémonie d’ouverture et la séance photo des Chefs d’Etat et de Gouvernement, ces derniers s’enferment dans une salle aux environs de 13h. Vient de commencer alors le huis clos qui doit sceller ou non le sort du Gouverneur. Le Premier ministre ivoirien, Guillaume Soro, représentant le président Alassane Ouattara est dans la salle avec une pile de documents, un dossier en béton, un vrai, et non celui que l’on a l’habitude de voir. « Il s’agit des flux de décaissements ordonnés par Dacoury-Tabley alors que le Conseil extraordinaire des ministres tenu à Bissau le 23 décembre 2010 lui avait intimé l’ordre de n’effectuer des virements pour le compte du Trésor ivoirien qu’aux personnes accréditées par Alassane Ouattara », nous souffle à l’oreille un des experts. Le Gouverneur prend également part à la rencontre. Quoi de plus normal puisqu’il doit s’expliquer. Il essaie tant bien que mal de se justifier devant ‘‘ses patrons’’. Selon une source, il tente même de convaincre les Chefs d’Etat et de Gouvernement qu’il a commencé à exécuter les décisions et que le retard dans la mise en œuvre des injonctions du Conseil des ministres de l’Uemoa est dû à des ‘‘raisons très techniques’’. Mais est-ce pour autant qu’il a fait tous ces décaissements qui se chiffrent à près de 100 milliards de FCFA ? La réponse ne convainc pas les chefs d’Etat et de Gouvernement qui continuent de cuisiner le Gouverneur. Ils ne manquent pas de lui dire que la décision du Conseil des ministres était exécutoire puisque ce sont bel et bien les Chefs d’Etat, par la voix de Amadou Toumani Touré, le président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etats, qui avait ordonné les évaluations.
Chaudes explications
Il s’est agi, selon le président malien, de ‘‘ procéder à une évaluation des implications financières de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire, notamment sur le système bancaire de l’Uemoa et le fonctionnement des comptes du Trésor ivoirien dans les livres de la Banque centrale et d’analyser les perspectives d’évolution du conflit sur le système bancaire et d’examiner les réponses’’.
Malgré les explications, la mayonnaise ne prend pas, car les Chefs d’Etat et de Gouvernement restent dubitatifs mais ne l’expriment pas immédiatement. Ils savent bien que les réponses ne tiennent pas la route car persuadés que Dacoury n’a pu résister aux pressions de Gbagbo. Chose qui l’a enfoncé puisque le Gouverneur devait avoir à l’idée qu’il s’agissait d’une décision communautaire qu’il devait exécuter. L’homme finit par prendre congé de ses chefs pour attendre la sentence. Soumaïla Cissé et Bio-Tchané sont ensuite autorisés à entrer dans la salle. Les heures s’égrènent, la salle où se sont enfermés les présidents reste fermée. La suspension des travaux qui doit intervenir pour permettre le déjeuner des hôtes de marque n’a pas lieu. Il est 15h passée. Personne ne sort. Les hauts responsables des pays de l’Uemoa sont toujours enfermés.
Certains journalistes partent se restaurer quand d’autres font le guet. Ils se relaient pour ne pas se laisser surprendre. L’attente est longue, voire harassante. Le huis clos semble interminable.
Soudain, la porte s’ouvre. Il est 16h40 mn. Les journalistes accourent mais sont stoppés net par le service de sécurité. « Ils n’ont pas encore fini. Retournez de l’autre côté et attendez qu’on vous fasse appel », nous indique le Chef de la sécurité. Fausse alerte ! Il va falloir prendre son mal en patience.
A 16h45mn, un des Chefs d’Etat sort de la salle. Il s’agit du président Blaise Compaoré qui prend congé de ses hôtes. A la question de savoir ce qu’il en est, l’homme fort du Faso indique : « Faites preuve de patience. Je rentre au Pays accueillir les Etalons cadets qui viennent de remporter la coupe des Nations ». Une réponse qui ne convainc guère la presse. Les commentaires vont bon train. « Je pense que ses décisions n’ont pas été prises en compte. Sinon l’argument selon lequel il va accueillir ses joueurs est trop léger », relève un journaliste. Et un autre de rétorquer : « Je ne crois pas. Moi je pense que c’est parce que tout est réglé comme il l’entendait qu’il part ». Quelques temps après, Dacoury et Bio-Tchané sont happés par le président Toumani Touré et s’enferment dans une autre salle pour en ressortir un peu plus tard et regagner la salle des discussions. Une source nous révèle qu’il a été demandé à Dacoury de rendre le tablier pour faute lourde au risque de se voir limoger par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Uemoa. Après quelques hésitations, il finit par l’accepter à son corps défendant, estimant avoir fait son travail.
A 17h45mn, c’est au tour du président Abdoulaye Wade de quitter ses homologues. Aucune déclaration de sa part. 10 minutes plus tard, les ministres Diby, Mabri et Kandia sont autorisés à entrer dans la salle. Finalement à 18h45 mn, l’on nous annonce la lecture du communiqué final.
Constat : Dacoury n’a pu sauver sa tête. Il est demandé au président Alassane Dramane Ouattara de proposer pour le premier trimestre 2011, à la prochaine conférence des chefs d’Etat et de gouvernement qui doit se tenir à Lomé, au Togo, un nouveau Gouverneur. Le huis clos aura duré de 13h à 19h, soit 06h d’horloge.
Jean Eric ADINGRA
(Envoyé spécial à Bamako)
Chaudes explications
Il s’est agi, selon le président malien, de ‘‘ procéder à une évaluation des implications financières de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire, notamment sur le système bancaire de l’Uemoa et le fonctionnement des comptes du Trésor ivoirien dans les livres de la Banque centrale et d’analyser les perspectives d’évolution du conflit sur le système bancaire et d’examiner les réponses’’.
Malgré les explications, la mayonnaise ne prend pas, car les Chefs d’Etat et de Gouvernement restent dubitatifs mais ne l’expriment pas immédiatement. Ils savent bien que les réponses ne tiennent pas la route car persuadés que Dacoury n’a pu résister aux pressions de Gbagbo. Chose qui l’a enfoncé puisque le Gouverneur devait avoir à l’idée qu’il s’agissait d’une décision communautaire qu’il devait exécuter. L’homme finit par prendre congé de ses chefs pour attendre la sentence. Soumaïla Cissé et Bio-Tchané sont ensuite autorisés à entrer dans la salle. Les heures s’égrènent, la salle où se sont enfermés les présidents reste fermée. La suspension des travaux qui doit intervenir pour permettre le déjeuner des hôtes de marque n’a pas lieu. Il est 15h passée. Personne ne sort. Les hauts responsables des pays de l’Uemoa sont toujours enfermés.
Certains journalistes partent se restaurer quand d’autres font le guet. Ils se relaient pour ne pas se laisser surprendre. L’attente est longue, voire harassante. Le huis clos semble interminable.
Soudain, la porte s’ouvre. Il est 16h40 mn. Les journalistes accourent mais sont stoppés net par le service de sécurité. « Ils n’ont pas encore fini. Retournez de l’autre côté et attendez qu’on vous fasse appel », nous indique le Chef de la sécurité. Fausse alerte ! Il va falloir prendre son mal en patience.
A 16h45mn, un des Chefs d’Etat sort de la salle. Il s’agit du président Blaise Compaoré qui prend congé de ses hôtes. A la question de savoir ce qu’il en est, l’homme fort du Faso indique : « Faites preuve de patience. Je rentre au Pays accueillir les Etalons cadets qui viennent de remporter la coupe des Nations ». Une réponse qui ne convainc guère la presse. Les commentaires vont bon train. « Je pense que ses décisions n’ont pas été prises en compte. Sinon l’argument selon lequel il va accueillir ses joueurs est trop léger », relève un journaliste. Et un autre de rétorquer : « Je ne crois pas. Moi je pense que c’est parce que tout est réglé comme il l’entendait qu’il part ». Quelques temps après, Dacoury et Bio-Tchané sont happés par le président Toumani Touré et s’enferment dans une autre salle pour en ressortir un peu plus tard et regagner la salle des discussions. Une source nous révèle qu’il a été demandé à Dacoury de rendre le tablier pour faute lourde au risque de se voir limoger par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Uemoa. Après quelques hésitations, il finit par l’accepter à son corps défendant, estimant avoir fait son travail.
A 17h45mn, c’est au tour du président Abdoulaye Wade de quitter ses homologues. Aucune déclaration de sa part. 10 minutes plus tard, les ministres Diby, Mabri et Kandia sont autorisés à entrer dans la salle. Finalement à 18h45 mn, l’on nous annonce la lecture du communiqué final.
Constat : Dacoury n’a pu sauver sa tête. Il est demandé au président Alassane Dramane Ouattara de proposer pour le premier trimestre 2011, à la prochaine conférence des chefs d’Etat et de gouvernement qui doit se tenir à Lomé, au Togo, un nouveau Gouverneur. Le huis clos aura duré de 13h à 19h, soit 06h d’horloge.
Jean Eric ADINGRA
(Envoyé spécial à Bamako)