Le nouveau chef d’Etat «otage» des faiseurs de roi
Voilà seulement 10 jours qu’Alassane Ouattara a pris les rênes du pays. Dix jours qu’il a commencé à «exercer l’effectivité du pouvoir». Mais, déjà, que de soucis pour le successeur de Laurent Gbagbo! Alassane Ouattara hérite en effet d’un Etat balafré, déglingué, désintégré même, après quatre mois d’une crise post-électorale absurde. Pour se hisser au sommet de l’Etat, il a dû croiser le fer avec le président sortant, une rude bataille qui aura fortement affecté les solides acquis du pays. Au moment où se referme lentement la douloureuse parenthèse, il lui faut commencer à reconstruire la maison. Et la tâche s’annonce herculéenne. Un inextricable puzzle qu’il aura bien des soucis à reconstituer. Entre autres soucis, le partage du ''gibier''. L’éléphant (Laurent Gbagbo et son régime) abattu, on assiste depuis quelques jours à une ronde des «hyènes», des «vautours» à l’hôtel du Golf, actuel siège du nouveau pouvoir. Ils sont nombreux à défiler avec leurs CV sous l’aisselle, tous ceux qui estiment avoir légitimement droit au ''gibier'', pour avoir pris part à la ''chasse''. «Les gens viennent réclamer des postes», s’agaçait avant-hier à la Primature, un membre influent du gouvernement, au sortir du premier conseil de gouvernement. La course aux postes est donc une réalité. Comment alors procéder au partage du gâteau sans donner le sentiment d’avoir fait un partage léonin et donc susceptible de faire des mécontents dans ses rangs? Ecartelés entre tous les faiseurs de rois à qui il doit son accession au pouvoir, comment Ouattara va-t-il manœuvrer pour que cette redistribution des cartes et des rôles ne fasse pas le lit des frustrations et autres mauvais sentiments qui pourraient lui être préjudiciables ?
LES CAS BEDIE, SORO, IB ET SARKOZY
Le nouvel homme fort d’Abidjan, on le sait, reste redevable à son aîné Henri Konan Bédié du Pdci et plus généralement à la coalition des formations politiques grâce auxquelles il a remporté la bataille des urnes. Mais aussi au leader de l’ex-rébellion, Guillaume Soro, dont l’armée a grandement contribué au succès militaire ayant abouti à son installation effective au pouvoir. Et il y a aussi Nicolas Sarkozy, le président français, dont le coup de pouce militaire aura été décisif dans la chute de Gbagbo. On n’occultera pas non plus le précieux appui diplomatique du président de la première puissance mondiale, Barack Obama. Tout comme l’apport non négligeable du commando invisible d’Abobo emmené par le désormais « général » Ibrahim Coulibaly dit IB, dont les hommes auront somme toute contribué à saper le moral des troupes de Gbagbo. Comment prendre en compte les intérêts de cet ensemble disparate sans pour autant être otage des faiseurs de roi ? Une autre préoccupation de Ouattara, c’est de gagner le pari de faire travailler les soldats venus du Nord avec ceux du Sud, vestiges d’une armée encore vue comme comptable des péchés du président sortant. Comment remettre en marche, de toute urgence, l’appareil sécuritaire en faisant cohabiter ceux qui ont gagné la guerre avec ceux qui l’ont perdue ou ont renoncé à la faire, après avoir longtemps porté à bout de bras le défunt régime de Laurent Gbagbo ? Qui doit faire quoi ? Et surtout sous les ordres de qui ?
L’EQUATION DES CHEFS DE GUERRE
L’équation est d’autant plus difficile à résoudre que les légendaires chefs de guerre de l’ex-Forces nouvelles que sont Chérif Ousmane, Koné Zackaria, Wattao, Hervé Touré dit ''Vetcho'', Morou et autres ne voudraient pas se contenter de jouer les seconds rôles après avoir mouillé le maillot, au péril de leur vie, pour installer Ouattara au pouvoir. Il y a également le cas IB. Comment l’intégrer à ce groupe hétéroclite sans réveiller les vieux démons de la division au sein de l’ex-rébellion? Il faudra donc jouer serré pour trouver la bonne formule, et ce ne sera pas une sinécure. Par ailleurs, le successeur de Laurent Gbagbo est attendu sur le terrain mouvant de la lutte contre l’impunité. Au lendemain du battage médiatique autour des tueries de Duékoué, il a promis de faire la lumière sur tous les crimes, quels qu’en soient les auteurs. Il est clair cependant qu’il n’aura pas les coudées franches pour s’attaquer à ce dossier, qui apparaît comme une boîte de Pandore. Ira-t-il jusqu’à livrer à la justice certains de ses officiers contre qui pèseraient des accusations de crimes de guerre ? Bien malin qui pourra le dire. A tous ces soucis s’ajoute l’énorme défi de la relance économique et de la reconstruction. Vu l'état du pays, tombé plus bas que terre, dure s'annonce la relève. Ouattara doit donc être en train de s'arracher les cheveux, préoccupé qu'il est en ce moment de savoir par quoi commencer. Dur, dur pour un nouveau régime acquis de haute lutte.
Assane NIADA
Voilà seulement 10 jours qu’Alassane Ouattara a pris les rênes du pays. Dix jours qu’il a commencé à «exercer l’effectivité du pouvoir». Mais, déjà, que de soucis pour le successeur de Laurent Gbagbo! Alassane Ouattara hérite en effet d’un Etat balafré, déglingué, désintégré même, après quatre mois d’une crise post-électorale absurde. Pour se hisser au sommet de l’Etat, il a dû croiser le fer avec le président sortant, une rude bataille qui aura fortement affecté les solides acquis du pays. Au moment où se referme lentement la douloureuse parenthèse, il lui faut commencer à reconstruire la maison. Et la tâche s’annonce herculéenne. Un inextricable puzzle qu’il aura bien des soucis à reconstituer. Entre autres soucis, le partage du ''gibier''. L’éléphant (Laurent Gbagbo et son régime) abattu, on assiste depuis quelques jours à une ronde des «hyènes», des «vautours» à l’hôtel du Golf, actuel siège du nouveau pouvoir. Ils sont nombreux à défiler avec leurs CV sous l’aisselle, tous ceux qui estiment avoir légitimement droit au ''gibier'', pour avoir pris part à la ''chasse''. «Les gens viennent réclamer des postes», s’agaçait avant-hier à la Primature, un membre influent du gouvernement, au sortir du premier conseil de gouvernement. La course aux postes est donc une réalité. Comment alors procéder au partage du gâteau sans donner le sentiment d’avoir fait un partage léonin et donc susceptible de faire des mécontents dans ses rangs? Ecartelés entre tous les faiseurs de rois à qui il doit son accession au pouvoir, comment Ouattara va-t-il manœuvrer pour que cette redistribution des cartes et des rôles ne fasse pas le lit des frustrations et autres mauvais sentiments qui pourraient lui être préjudiciables ?
LES CAS BEDIE, SORO, IB ET SARKOZY
Le nouvel homme fort d’Abidjan, on le sait, reste redevable à son aîné Henri Konan Bédié du Pdci et plus généralement à la coalition des formations politiques grâce auxquelles il a remporté la bataille des urnes. Mais aussi au leader de l’ex-rébellion, Guillaume Soro, dont l’armée a grandement contribué au succès militaire ayant abouti à son installation effective au pouvoir. Et il y a aussi Nicolas Sarkozy, le président français, dont le coup de pouce militaire aura été décisif dans la chute de Gbagbo. On n’occultera pas non plus le précieux appui diplomatique du président de la première puissance mondiale, Barack Obama. Tout comme l’apport non négligeable du commando invisible d’Abobo emmené par le désormais « général » Ibrahim Coulibaly dit IB, dont les hommes auront somme toute contribué à saper le moral des troupes de Gbagbo. Comment prendre en compte les intérêts de cet ensemble disparate sans pour autant être otage des faiseurs de roi ? Une autre préoccupation de Ouattara, c’est de gagner le pari de faire travailler les soldats venus du Nord avec ceux du Sud, vestiges d’une armée encore vue comme comptable des péchés du président sortant. Comment remettre en marche, de toute urgence, l’appareil sécuritaire en faisant cohabiter ceux qui ont gagné la guerre avec ceux qui l’ont perdue ou ont renoncé à la faire, après avoir longtemps porté à bout de bras le défunt régime de Laurent Gbagbo ? Qui doit faire quoi ? Et surtout sous les ordres de qui ?
L’EQUATION DES CHEFS DE GUERRE
L’équation est d’autant plus difficile à résoudre que les légendaires chefs de guerre de l’ex-Forces nouvelles que sont Chérif Ousmane, Koné Zackaria, Wattao, Hervé Touré dit ''Vetcho'', Morou et autres ne voudraient pas se contenter de jouer les seconds rôles après avoir mouillé le maillot, au péril de leur vie, pour installer Ouattara au pouvoir. Il y a également le cas IB. Comment l’intégrer à ce groupe hétéroclite sans réveiller les vieux démons de la division au sein de l’ex-rébellion? Il faudra donc jouer serré pour trouver la bonne formule, et ce ne sera pas une sinécure. Par ailleurs, le successeur de Laurent Gbagbo est attendu sur le terrain mouvant de la lutte contre l’impunité. Au lendemain du battage médiatique autour des tueries de Duékoué, il a promis de faire la lumière sur tous les crimes, quels qu’en soient les auteurs. Il est clair cependant qu’il n’aura pas les coudées franches pour s’attaquer à ce dossier, qui apparaît comme une boîte de Pandore. Ira-t-il jusqu’à livrer à la justice certains de ses officiers contre qui pèseraient des accusations de crimes de guerre ? Bien malin qui pourra le dire. A tous ces soucis s’ajoute l’énorme défi de la relance économique et de la reconstruction. Vu l'état du pays, tombé plus bas que terre, dure s'annonce la relève. Ouattara doit donc être en train de s'arracher les cheveux, préoccupé qu'il est en ce moment de savoir par quoi commencer. Dur, dur pour un nouveau régime acquis de haute lutte.
Assane NIADA