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Économie Publié le samedi 23 avril 2011 | Le Patriote

Jean Louis Billon : « Il faudrait que l`Union africaine soit un véritable outil de développement économique et social”

© Le Patriote Par Serges T
Cinquantenaire : La Convention de la Société Civile Ivoirienne apporte sa contribution.
Mardi 03 Août 2010 - Chambre de commerce et d`industrie : La Convention de la Société Civile Ivoirienne organise une conférence publique autour du thème : "Le cinquantenaire de la Côte d`ivoire vu par la société civile, conditions et éléments d`un contrat social pour la renaissance ivoirienne". Photo: Jean-Louis Billon
A quoi sert l’Union Africaine ? C’est le thème du débat africain le dimanche dernier sur RFI. Le président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Côte d’Ivoire, Jean Louis Billon était l’un des invités.
RFI : Pensez-vous que l`Union africaine est viable ?
Jean-Louis Billon : On se demande, parfois, à quoi sert véritablement l`Union africaine. Je pense qu`elle pourrait servir à faire avancer l`ensemble des nations africaines. Mais, pour y parvenir, il faut arrêter, déjà, des positions de principes. On ne peut vouloir promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité et voir cohabiter au sein de cette union des démocraties en construction, c`est à dire naissantes et des dictatures de plein exercice ou des dirigeants qui font du blanchiment politique. À l`instar du dealer de drogue qui fait du blanchiment d`argent, le blanchiment politique c`est le président qui arrive au pouvoir par un coup d`État et qui, au fil des années, se transforme en démocrate par des élections!

RFI : On se refait une virginité politique par des élections…
JLB : C`est exactement ça! On refait le jeu, mais on se maintient. On ne peut pas avoir la paix, la sécurité et la stabilité avec des pays dirigés par des dictateurs qui restent plusieurs décennies au pouvoir. Forcément, il y aura instabilité! Heureusement, les dictatures sont vouées à disparaître.

RFI : Mais, pour vous est-ce là l`une des raisons qui ne permettent pas à l`Union africaine d`être efficace?
JLB : Forcément, ce sont des forces centrifuges qui cohabitent! Il y en a qui voudraient la paix et la démocratie et pour cela, il va falloir parler d`infrastructures communes, de développement économique, de commerce, de rentrer de plain-pied dans la mondialisation. Pour d`autres, il faut protéger leur position, protéger leur dictature. Ce sera, donc, beaucoup plus difficile. L`Union européenne, qu`a-t-elle fait? Elle a, certes, connu des guerres. Mais, depuis sa création, elle a retrouvé la paix, elle connait la croissance. Il faut arrêter des positions de principe. Cela nous amène à nous poser un certain nombre de questions : que veut-on au sein de l`Union africaine? Dire que nous ne voulons, en son sein, que des démocrates et accepter les démocraties serait un bon début. On ne peut pas continuer ainsi! Quant aux moyens pour arrêter les positions de principe, il n`en faut pas beaucoup. Par contre, si l`on veut, ensuite, avoir des forces d`intervention pour régler nos propres conflits, là il faut des moyens et ces moyens-là, il y a des pays qui sont immensément riches sur le continent africain pour les apporter.

RFI : Mais ces pays qui sont immensément riches est-ce qu`ils ont envie de participer à un instrument auquel ils ne croient pas?
JLB : Ça aussi, c`est la grande question. Concernant les principes, prenons l`exemple de la crise ivoirienne. De nombreux Africains ont été choqués de voir l`ONU et la France intervenir. Même interrogation pour la Libye : pourquoi ce sont les Européens qui interviennent? Mais les Tunisiens, dernièrement, quand ils veulent fuir leur instabilité, où vont-ils? En Europe! Ils ne vont pas vers d`autres pays africains.

RFI : Pour vous leur intervention se justifie alors ?
JLB : Les Européens doivent se protéger vu que ce n`est pas vers les Africains que les Tunisiens et les Égyptiens se tournent. Ils essaient de partir en Europe. D`autre part, est-ce que nous avons au sein de l`Union africaine une Cour pénale africaine pour traiter des problèmes de crime contre l`humanité qui ont lieu sur notre propre continent? Il faudrait y penser au lieu de toujours nous plaindre d`être obligés de nous rendre à La Haye!

RFI : N`est-ce pas la preuve qu`il faut déjà avoir envie d`appartenir à un ensemble et partager ses valeurs ? N`est-ce pas ce qui manque à l`Union africaine, monsieur Billon ?
JLB : Oui, je pense que les propos de monsieur Camara sont justes. Poser des principes, dire par exemple : nous cotisons, nous faisons partie. Nous ne cotisons pas, nous ne faisons pas partie. Nous sommes des démocrates, nous faisons partie, nous ne sommes pas des démocrates, nous ne faisons pas partie. C`est en acceptant ces principes, dès le départ, que l`on pourra avoir une union réelle. Comme je l`ai dit tantôt, il y a trop de forces centrifuges. Chacun tire de son côté avec des intérêts divergents. Soit l`on se pose des principes et on les accepte soit l`on en sort. On aurait pu éviter la crise au Niger. Voilà, un président qui arrive au pouvoir à la suite d`une crise importante et qui modifie les textes pour se maintenir à la tête du pays, se croyant plus intelligent que tout le monde. Ça a mené à quoi? À une crise, forcément. Il faut aujourd`hui, faire la prévention de crise. Quand vous vous maintenez au pouvoir trop longtemps, vous savez que la seule façon d`obtenir une alternance, ce sera par la force, d`où violence et instabilité. On peut éviter tout cela en posant les principes dès le départ.

RFI : Qui faut-il associer à la renaissance de l`Union africaine et à son nouveau départ?
JLB : Il ne faut pas oublier d`associer les hommes d`économie, les hommes de commerce, les hommes d`entreprises parce que je pense que l`Union africaine peut avoir une belle mission. Il faut qu`elle se pose des principes et qu`elle s`y tienne. Il faudrait que l`Union africaine soit un véritable outil de développement économique et social. Et cela passe par le respect des libertés, de la justice, des démocraties.
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