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Société Publié le mercredi 27 avril 2011 | Nord-Sud

Monseigneur Antoine Koné, évêque du diocèse d’Odienné : «Que les bourreaux se confessent pour obtenir le pardon ...»

Après Mgr Maurice Kouassi et Mgr Jean Salomon Lesoutié, Mgr Antoine Koné est le troisième évêque du diocèse d’Odienné. A l’occasion de la fête de pâques. Il s’est confié à Nord-Sud Quotidien sur la crise post-électorale,
la sortie de crise, la réconciliation et l’avenir de la société ivoirienne.

Monseigneur, quelle signification donnez-vous à la pâques de cette année, année qui a commencé dans la douleur pour la Côte d’Ivoire ?
La pâques que nous célébrons chaque année n’est pas une simple répétition du passé. La pâques chrétienne n’est pas un pur souvenir à l’image de la fête de l’indépendance, la fête de notre liberté recouvrée. Elle est un rappel et une actualisation d’un évènement qui s’est produit il y a deux mille ans et par lequel Dieu nous obtient le salut en son fils mort et ressuscité.
Vue comme telle, la pâques que nous célébrons est un mémorial, c'est-à-dire une actualisation du mystère pascal en lequel l’humanité est réconciliée avec Dieu.
C’est aujourd’hui le jour du salut, le jour favorable offert par Dieu pour notre rédemption.
C’est pourquoi les chrétiens sont appelés à entrer dans cette dynamique de transformation-transfiguration, de renouvellement total de notre être. Aussi l’homme devenu un être nouveau est appelé avec la force de l’Esprit Saint à renouveler la face de la terre. Tel est ce que je souhaite aux Ivoiriens dont le pays est défiguré par cette crise post-électorale. En effet, il leur appartient d’ouvrir de nouveaux sentiers pour une réconciliation vraie, gage de paix durable. Des hommes nouveaux pour bâtir une cité nouvelle où Dieu occupe le centre et, l’homme perçu comme une valeur unique, image de Dieu, créé un peu moindre qu’un dieu, couronné d’honneur et de gloire, sauvé par Jésus Christ.

A cette occasion, le président de la République a adressé un message à la nation. Quelles sont vos impressions face à ce message?
C’est la première fois que nous assistons à un tel message donné à l’occasion d’une fête religieuse en Côte d’Ivoire. Nous saluons cette première et nous souhaitons qu’il en soit ainsi pour toutes les fêtes qui seront célébrées dans le futur. Le président de la République a tenu un grand discours hautement empreint de la signification liée à la pâques que nous commémorons. En effet, la pâques telle que perçue par le président de la République et en conformité avec l’enseignement de l’Eglise est à la fois commémoration de la mort et de la résurrection du Christ. Il y a vu l’image de la Côte d’Ivoire blessée, d’une grande blessure, abandonnée au bord de la route que le Christ, comme le bon Samaritain de l’Evangile, vient secourir. Puisqu’à travers pâques, nous faisons mémoire de la mort et de la venue à la vie de Jésus, fils de Dieu, le chef de l’Etat a souhaité que la Côte d’Ivoire, qui a connu de nombreux morts engendrés par notre refus obstiné à tenir le discours de vérité, retrouve une santé nouvelle, une renaissance, une régénération.

Que pensez-vous du contentieux électoral qui était à l’origine de la crise dont nous sortons, notamment sur les accusations de fraudes formulées par le camp du président sortant dans les zones CNO ?
Nous avons été offusqués d’apprendre par la voix de certains médias aux ordres, des médias hyper-caporalisés que nos zones ont péché en s’illustrant négativement par des fraudes massives de nature à entacher la régularité des élections. A ces allégations, nous répondons que c’est une insulte grave à nos populations reconnues pour leur sens élevé du devoir et du respect de la personne humaine. Il ne faudrait pas, par volonté délibérée, oublier l’esprit pacifique qui caractérise les populations du Nord, esprit forgé et formé au travers de leur culture multi- séculaire. Nous attestons, après avoir requis les informations venant de toutes les paroisses de notre diocèse qui couvre les régions du Denguélé, du Bafing et du Worodougou ainsi que celles des diocèses frères de Korhogo et de Katiola, que les élections se sont bien déroulées sur nos terres.
Ce témoignage nous le tenons avec l’accord de tous nos frères chrétiens, musulmans et adeptes de la religion traditionnelle qui vivent en parfaite harmonie dans nos villes, villages et campements.

Excellence, d’où leur vient selon vous cet esprit de paix ?
L’ensemble des populations du Nord se caractérise par leur attachement au Bois Sacré posé autrefois par les ancêtres pour servir de lieu où se forge la personnalité de l’individu.
C’est là que le Poro, institution multiséculaire, a pour but de protéger d’éduquer et de cultiver tous les membres de l’ethnie Senoufo.
En effet, selon la cosmogonie Senoufo, l’homme naît inachevé. Et pour conduire l’homme à son achèvement ou sa complétude ontologique, koulotyêlê où Dieu lui a donné les rites initiatiques du Poro. Aussi, tout homme soumis à ces rites bienfaisants, accède à des valeurs cardinales de pondération, d’endurance, de maîtrise de soi, de discrétion, de respect de la parole donnée, du respect des aînés comme repères de vie, d’amour, du silence et de la paix, d’entrée en fraternité.
Toutes ces richesses sont appelées à être assumées par le christianisme et l’islam pour une cohésion sociale plus approfondie, pour un vivre-ensemble au-delà de la religion, de l’ethnie, de la tribu, du clan, de la race et de la nation. Telle est la fraternité ouverte à laquelle nous appelons toutes les filles et tous les fils de ce pays, pour une Côte d’Ivoire décentrée d’elle-même, déprise d’elle-même pour s’accueillir de Dieu source de paix profonde, source de vie en faveur de tous.

Le président du Conseil constitutionnel qui a annulé des votes des zones CNO a rencontré le président de la République récemment. Dans son discours, il estime que chacun a fait des erreurs. Que pensez-vous de son discours?
L’attitude du président du Conseil constitutionnel ressemble fort bien à celle de Ponce Pilate reconnu pour sa lâcheté et son irresponsabilité.
En effet, devant les chefs des prêtres réunis, les dirigeants et le peuple, Pilate déclare : « vous m’avez amené cet homme en me disant qu’il égare le peuple. Eh bien, je l’ai interrogé devant vous et je ne l’ai trouvé coupable d’aucune des mauvaises actions dont vous l’accusez. Hérode ne l’a pas non plus trouvé coupable, car il nous l’a renvoyé. Ainsi, cet homme n’a commis aucune faute pour laquelle il mériterait de mourir. » Luc 23,13-15.
Et pourtant, Pilate va se laver les mains et livrer l’innocent aux mains du peuple juif ingrat et furieux qui réclamait la mort du Christ. Ainsi, Jésus l’innocent fut livré pour crucifixion par Pilate qui a refusé de prendre ses responsabilités.
Revenant au président du Conseil constitutionnel, nous estimons qu’il a manqué de courage pour rendre témoignage à la vérité. Ainsi, il peut être accusé de haute trahison, eu égard à la confiance en lui placée par le peuple souverain de Côte d’Ivoire.
En notre sens, il gagnerait à entrer en lui- même pour découvrir sa forfaiture et demander pardon au peuple ivoirien qui n’a pas encore fini de compter ses morts. Peut-être serait-il pardonné après cette reconnaissance du refus de tenir le discours de vérité.

Les religieux aussi, notamment le clergé catholique, n’ont pas eu une seule position sur cette crise. Qu’en dites-vous ?
Je tiens à préciser qu’il n’y a pas de divisions au sein du clergé catholique. Il n’appartient pas à l’Eglise de donner les résultats d’une élection, mais elle doit être capable de témoigner en faveur de la vérité comme nous avons eu à le faire durant cette crise. L’Eglise doit rester à sa mission prophétique. Elle doit être capable de dénoncer, d’avertir, de conseiller toutes les parties. Elle est certes toujours tentée de compromission, mais elle doit rester libre ; elle doit toujours s’affranchir des positions partisanes. Le religieux se doit de savoir que sa mission n’est pas une mission politique, aussi se doit-il de se tenir au-dessus de la mêlée et agir comme pasteur de tous. Le parti de l’Eglise, se doit d’être la vérité, celle du Christ le témoin fidèle, venu en ce monde pour rendre témoignage à la Vérité. (cf Jn 18,35).
L’Eglise est investie par l’esprit pour annoncer la parole de Dieu. C’est dire que cette parole dont nous sommes porteurs ne nous appartient pas. Aussi devons-nous la dire même à nos dépens humains ! Dieu nous interpelle et nous enjoint de dire sa vérité pour le salut de tous les hommes.
Il est bon pour nous d’écouter ici le prophète Ezéchiel : « Fils d’homme, je t’établis guetteur pour la maison d’Israël ; quand tu entendras une parole venant de ma bouche, tu les avertiras de ma part. Si je dis au méchant : tu vas mourir, et tu ne l’avertis pas, si tu ne parles pas au méchant pour le mettre en garde contre sa mauvaise conduite, afin qu’il vive, il mourra de son péché mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang… Si un juste se détourne de sa justice et commet l’injustice, je le ferai trébucher, il mourra. C’est parce que tu ne l’auras pas averti qu’il mourra de son péché ; mais c’est à toi que je demanderai compte de son sang… » La parole de Dieu peut- elle être plus claire pour nous les pasteurs et ceux qui commettent l’iniquité en foulant au pied les droits de leurs frères et sœurs ?

Est-ce que vous ne vous reprochez pas d’avoir été trop passif, ou de n’avoir pas vite agi ?
L’inhumain qui est en train de sévir en Eburnie nous interpelle tous. La situation de la terre brûlée qui a enveloppé toute la cité ivoirienne interpelle davantage l’Eglise, puisque nombre de ses fidèles ont participé à ces massacres dignes d’une autre époque : vie de populations détruite, vie d’hommes religieux (imams) enlevée froidement, vie de tant de jeunes, espoirs de nos peuples estompée dans la fleur de l’âge. Cela nous rappelle le Rwanda et le Burundi dont le pourcentage de chrétiens était l’un des plus élevés au monde ; et pourtant l’on y a assisté à un génocide dont on parlera encore longtemps.
En son temps, nous avions déjà averti : « dans chaque pays, il y a un Rwanda et un Burundi cachés. » (Homélie prononcée au grand séminaire d’Anyama en novembre 2000).
Nous pensions avoir été entendus. Mais hélas, le démon « menteur et père du mensonge » Jn 8,44, a eu raison d’une bonne partie de notre peuple. A cela il faut ajouter l’alcool de la haine tribale et de l’exclusion dont se sont abreuvés à grandes gorgées nos jeunes. Ainsi enivrée de cette boisson mortifère, une partie de notre jeunesse est devenue un monstre effroyable qui dévore et détruit tout sur son passage.
Nous parlons de cette jeunesse aveuglée par les brouillards des mensonges et devenue sourde aux cris de leurs propres parents et de toute personne tenue pour responsable d’ une situation volontairement préparée pour assouvir un dessein machiavélique.
Devant cet état de fait, l’Eglise ne gagnerait-elle pas à revoir sa manière d’annoncer le Christ mort et ressuscité, vainqueur de la mort et toute situation de mort ? Quel type de chrétiens obtenons-nous après nos années de catéchèse ? Le baptême chrétien a-t-il été bien compris pour être le sacrement du renouveau dans tous les sens pour l’émergence de chrétiens porteurs de Dieu, qui reconnaissent Dieu à travers leurs frères et sœurs, des chrétiens célébrants de la vie et dispensateurs de la vie autour d’eux ?

Qu’en est-il de la pratique sacramentelle dans le diocèse d’Odienné ?
La pratique sacramentelle dans le diocèse d’Odienné est une pratique inculturée, c'est-à-dire pensée à partir de la culture du milieu. Aussi ceux qui doivent accéder aux sacrements subissent le témoignage de la communauté chrétienne, de la communauté musulmane et celle de la communauté de la religion traditionnelle. Nous interrogeons les uns et les autres pour voir s’il s’est opéré un véritable changement dans le comportement de celui qu’on présente au sacrement. Il convient que l’on constate que ce que nous lui avons enseigné, il l’a véritablement compris, assimilé et traduit dans sa vie de tous les jours.

Les agressions contre les musulmans a certainement fait craindre une guerre religieuse. Cela est-il possible en Côte d’Ivoire?
Certaines personnes ont été prises en flagrant délit de tentative d’opposer chrétiens et musulmans. Malheureusement, elles ont échoué et continueront d’échouer quant à cette entreprise diabolique. Les musulmans et les chrétiens ont toujours vécu ensemble dans le respect mutuel et la fraternité partagée. Mieux, dans la plupart des familles, l’on trouve des musulmans et des chrétiens. Mon grand-frère est musulman. Mais cela ne change en rien nos relations fraternelles. Donc, je pense que ceux qui veulent tirer sur la fibre religieuse et ethniciste, dans le noir dessein d’aboutir à une guerre religieuse ont frappé à la mauvaise porte. Moi, j’ai vécu dans une famille musulmane. Sans risque de me tromper, je peux affirmer que la tolérance religieuse est un acquis en Côte d’Ivoire. Regardons par exemple Odienné, où la grande partie de la population est musulmane. Ces populations ne manquent pas à mes cérémonies. J’ai fait partir un imam à la Mecque cette année. Et j’envisage de renouveler cette expérience. J’ai réhabilité la mosquée du village dont est originaire l’imam en question.
De nombreux jeunes musulmans étaient à mon domicile le jour de l’an. Je leur parle et ils m’écoutent. Le terrain pour mes différents investissements a été donné par les musulmans. Et c’est encore eux qui ont fait le défrichage de la parcelle et ce gratuitement. Je suis très ami à mon grand-frère le Cheick Boikary Fofana. Je prends souvent conseil chez les imams disséminés dans mon diocèse. Notons au passage qu’à Marandala, dans le département de Mankono, l’argent pour la construction de la mosquée est conservé à l’église chez les prêtres qui ont pris soin de le mettre à la banque. Ce qui nous unit ici, c‘est l‘amour. Alors, que ceux qui veulent assouvir leur sinistre dessein cherchent ailleurs. Je ne crois pas qu‘on puisse opposer les musulmans aux chrétiens en Côte d‘Ivoire.

Monseigneur, au vu de tant de fautes et d’erreurs, quelles sont, selon vous, les conditions de la réconciliation?
Il faut d’abord que les coupables se repentissent en toute sincérité. Que tous ceux qui ont été responsables de cette crise reconnaissent humblement leurs torts. Je pense à une sorte de confession publique. Quand il y a une véritable contrition, on ne peut refuser le pardon. Sans cette contrition, la réconciliation est vouée à l’échec. Si la réconciliation doit s’opérer sur la base du mensonge, autant surseoir à cette réconciliation. Ce serait une vaste comédie orchestrée au mépris des victimes. Les parents des victimes ne seront satisfaits et n’auront la force de pardonner que lorsque les bourreaux des leurs auront mis à la place de leur cœur de pierre un cœur de chair. Chez nous les catholiques, quand vous venez vous confesser, le plus important, c’est le regret. On entre en soi-même, on reconnaît qu’on a mal fait, avant de venir demander pardon devant le prêtre. C’est dire que la matière indispensable pour être pardonné, c’est bien une contrition parfaite. Il faut donc savoir que la réconciliation repose sur la vérité et la reconnaissance des torts infligés les uns aux autres. Dans le cas de notre crise, les faits sont encore très présents. Ils sont encore sous nos yeux. Les bourreaux ne peuvent prétendre avoir oublié les torts dont ils sont coupables. Les plaies sont encore béantes. Il faut l’advenue d’une véritable conversion en Côte d’Ivoire, pour un changement profond dans la manière de penser et de vivre ; bref, une lutte contre soi- même s’impose. Nous devons accepter de mourir à une manière d’être et d’agir non-conforme aux valeurs positives capables d’aider le pays à devenir une vraie nation. Il s’avère aussi important de former les Ivoiriens à l’esprit critique. Car, force est de constater que les Ivoiriens ont été trop crédules. Ils ont été vulnérables à toutes sortes de mensonges.
Pour ce qui est des poches de résistance que l’on note ici et là, il convient que les nouvelles autorités privilégient le dialogue et la négociation. Car vouloir évacuer la violence par la violence conduit à une infinitisation de la violence. A la violence, il faut opposer la vertu de la non-violence. Nous devons tenir avec le Christ que celui qui règne par l’épée périra par l’épée. Le politique doit éviter de se séparer de l’éthique, sinon il devient dictature. Ainsi il importe d’ouvrir le dialogue avec ceux de nos frères qui tiennent encore les armes. Surtout, il faut éviter de les rabrouer. Tout homme qui meurt est un mort de trop. Le discours de l’amour tenu à leur égard nous semble être la voie la plus indiquée pour obtenir leur engagement en faveur de la paix.
En conséquence toute promesse à leur endroit devra être tenue. Cela contribuerait à mettre fin définitivement aux souffrances des Ivoiriens.

On a coutume de dire de la Côte d’Ivoire qu’elle est un pays béni de Dieu. Et on continue d’entendre cette affirmation, bien que nous ayons connu une crise qui nous fait perdre beaucoup de nos concitoyens. Doit-on continuer de croire en cette assertion?
Je pense qu’il faut remettre cette phrase dans son contexte. En effet, le cardinal Poupard venu de Rome pour la célébration du centenaire de l’évangélisation de Côte d’Ivoire en 1995 a dit à son arrivée que l’Afrique est la nouvelle patrie du Christ. Ainsi, comme la Côte d’Ivoire fait partie de ce continent, il a indiqué que ce pays est la nouvelle patrie du Christ, bénie de Dieu. Mais on ne peut pas simplifier et édulcorer son propos pour faire
croire que la Côte d’Ivoire est la préférée de Dieu. Dieu n’aime pas la Côte d’Ivoire plus que le Burkina, le Mali, le Ghana et quelque autre pays. Et nous sommes restés effectivement à nous tromper les uns les autres. Certains de nos frères mal intentionnés ont récupéré cette phrase à des fins politico-politiciennes, alléguant qu’une sorte de paratonnerre divin mettait le pays à l’abri des conséquences de leurs dérapages. Malheureusement, le pays a connu le désastre que l’on sait. Vous ne pouvez pas continuer à frustrer vos frères et sœurs et, penser que rien ne saurait vous inquiéter. Que celui qui a des oreilles entende ce que l’Esprit dit aux églises.


Interview réalisée par Tenin Bè Ousmane à Odienné
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