Certains serviteurs de Dieu ont été cités dans des "deals" d'achats d'armes pour le régime Gbagbo. Leurs temples ont été identifiés comme des caches d'armes. D'autres ont même fait des prophéties qui ont contribué à désaxer la cohésion nationale. Au nombre des Hommes de Dieu qui se sont insurgés contre ce fait, se trouve le Révérend Melchisédek, Président de la Mission Israël. Dans cette interview, il indique comment l'Eglise peut redorer son blason et être aux avant-postes de la réconciliation.
Le Patriote: Après la crise post-électorale pendant laquelle les agissements de certains pasteurs et hommes de Dieu ont été décriés, comment se porte aujourd'hui l'Eglise en général en Côte d'Ivoire ?
Révérend Melchisédek : Je ne peux m'adresser aux Ivoiriens et à vos lecteurs sans, d'entrée, m'incliner sur la mémoire de toutes les personnes qui ont perdu la vie pendant la crise post-électorale et bien même au-delà. Ma pensée va également à l'endroit de toutes les familles éplorées, des dignitaires religieux bafoués dans leur dignité et qui ont perdu la vie. Une pensée également pour tous ces lieux de culte: Mosquées, Eglises, Temples profanés. Je crois et je suis convaincu que Dieu permettra que toutes ces plaies se cicatrisent pour la gloire de son nom. En vérité, le corps du Christ se porte très mal en ce moment en Côte d'Ivoire. Parlant du corps du Christ, je fais allusion à l'Eglise catholique romaine, l'Eglise protestante évangélique, à toutes les églises. Et je suis fondé à dire que le Corps de Christ est meurtri et blessé. Vous avez dû le constater, sur le terrain. Des prophéties, des paroles de connaissance ont été tenues par des Serviteurs de Dieu, qui ont été réutilisées par une partie de l'opinion publique et qui ont surtout cristallisé certaines positions. Ce qui fait que l'Eglise est aujourd'hui pointée du doigt comme ayant contribué à envenimer les positions figées d'une partie de la classe politique ivoirienne.
LP : Le serviteur de Dieu est supposé être un visionnaire, avez- vous vu cette crise poindre à l'horizon, qu'avez- vous fait pour la juguler ?
RM : La Bible, elle-même, est une prophétie. Il y a des signes qui ne trompent pas. Sans entrer dans le prophétique, on voyait les choses venir. Les germes du conflit avaient déjà été semés. Nous étions dans l'impasse sur tous les plans, mais on faisait confiance à Dieu. On se disait que tôt ou tard tout le monde se ressaisirait. Mais, l'être humain est ce qu'il est. Quelqu'un peut porter une charge ecclésiastique, mais dominé par son côté humain qui prend le dessus. Comme toute la nation ivoirienne, en tant que serviteur de Dieu, nous avons vu venir la crise. Dans le cadre de certains regroupements, nous avons donné de la voix, tiré la sonnette d'alarme. Mais, si vous êtes l'une des seules voix qui prêche dans le désert, à un certain moment, on commence à vous prendre pour un illuminé. Face à toutes les déviations qu'on observait, sur le plan spirituel, culturel, social, politique, on savait qu'on allait arriver à une impasse qui conduirait, inévitablement, à une implosion.
LP : Certains de vos pairs ont été clairement cités dans des cas d'achat d'armes pour le régime Gbagbo, d'autres en ont dissimulé dans leurs lieux de culte, d'autres encore ont fait des prophéties qui ont conforté Laurent Gbagbo dans son entêtement à confisquer le pouvoir, alors qu'il a perdu les élections. N'est-ce pas un aveu d'échec de l'Eglise et de ses serviteurs que vous êtes ?
RM : Je voudrais partager cette interrogation avec vous. Est-ce à dire que parce qu'un chirurgien a raté une intervention qu'il est un mauvais chirurgien ? Cela signifie-t-il aussi que tous les chirurgiens ne sont pas bons ? Non ! Ce n'est pas un postulat. Il y a eu des serviteurs de Dieu qui ont donné des prophéties. Une partie de l'opinion a adhéré à ces prophéties. Ce qui n'est pas le cas d'une autre partie d'Ivoiriens. Au nombre de cette frange de l'opinion, moi, en toute responsabilité, j'ai demandé aux serviteurs de Dieu de faire attention, car la Bible recommande d'éprouver toutes les prophéties. L'Eglise est dans son essence apostolique et catholique, c'est-à-dire universelle. Donc l'Eglise doit être dans une position non partisane et apolitique. Même si une prophétie s'avère vraie, avant que l'Eglise ne l'autorise, elle doit être éprouvée. L'Eglise ne doit pas faire d'elle un sujet d'allégeance à qui que ce soit. J'ai aussi fait savoir que l'Eglise ne doit pas s'engager, elle ne doit pas être partisane. Ce qui a été la fausse note, c'est que le régime qui vient de perdre le pouvoir, dans sa grande majorité était d'obédience protestante évangélique. Pour eux, puisque leur communauté regroupait près de quatre millions de fidèles, les serviteurs de Dieu, au sein de celle- ci pensaient qu'il fallait soutenir leurs frères engagés politiquement. Il revenait à l'Eglise de dire que cela ne devrait pas se passer ainsi.
LP : L'opinion pense que l'Eglise a fermé les yeux sur les dérives de certains Pasteurs ?
RM : Le Livre de Jérémie (chapitre 29- Verset 7) dit que « l'un des rôles de l'Eglise est de rechercher le bien de la ville, de la nation où je vous ai menés ». Ces textes expliquent que s'il y a du bien dans la nation, notre bonheur en dépend, puisque nous sommes membres de cette nation. Au-delà de cela, si de manière individuelle, certains serviteurs de Dieu se sont engagés dans les actes que vous avez énumérés : achats d'armes, prophéties, ce n'est pas l'Eglise de Côte d'Ivoire qui en est comptable. Mais Je suis chrétien, et ma Bible me dit que « je ne dois point juger les autres ». Je dois plutôt me mettre dans la position de celui qui constate une erreur et qui dois ramener les frères à la raison. C'est ce qui a été fait à plusieurs niveaux. Dans le Corps de Christ, des actions ont été menées pour faire savoir à des serviteurs de Dieu que leurs actions risquent de ternir l'image de l'Eglise. Maintenant, est-ce vrai ou faux que certains serviteurs de Dieu ont eu mandat d'acheter des armes, nous ne saurons affirmer avec exactitude cela, puisque nous avons lu cela seulement dans la presse. Mais, même si on avait la preuve, ce n'est pas l'Eglise, qui les a mandatés. Ils l'ont fait en leur nom personnel et en celui de leurs mandants. En tout cas, pour moi, le rôle d'un serviteur de Dieu est de prêcher l'Evangile, d'être Ministre du Culte.
LP : Il y a eu des élections transparentes qui ont consacré la victoire d'Alassane Ouattara. Mon Révérend, pourquoi l'Eglise sachant que Laurent Gbagbo a perdu ne lui a pas ouvertement demandé de passer la main de manière pacifique ?
RM : A cette équation, de manière individuelle, les positions étaient partagées et on a assisté à une fragilisation au niveau du corps de Christ. On ne voyait plus des chrétiens engagés, mais plutôt des militants chrétiens. C'est dû au fait que l'Eglise, dans son ensemble, traversait une période de confusion. Si vous observez le paysage chrétien évangélique en Côte d'Ivoire, il y a une floraison d'églises, d'organisations para- ecclésiastiques. Et chacun a eu sa position dans cette affaire. Il y a aussi l'aspect cupidité qui est entré dans le milieu et qui a gangréné l'Eglise. L'Eglise, à un certain moment, devait effectivement parler, mais dans son ensemble, elle était fragilisée. Mais, ce qu'il faut retenir aussi, c'est que l'Eglise n'est pas exclusivement comptable de ce qui est arrivé à la Nation.
LP : Elle a tout de même sa part de responsabilité !
RM : Il faut que l'on comprenne. L'Eglise, en tant qu'institution divine, n'a pas de part de responsabilité. Ce sont des individus, certains serviteurs de Dieu qui ont eu une part de responsabilité dans l'exacerbation de la crise. Ces derniers ne se sont pas engagés dans ces actes au nom de l'Eglise ! Personnellement, nous déplorons toutes ces actions de ces serviteurs de Dieu.
LP : L'Eglise catholique a fait une déclaration demandant « le respect des institutions… », ce qui sous entend le maintien de Gbagbo au pouvoir, alors que Ouattara, le président élu, est astreint à un blocus. Comment percevez- vous cela ?
RM : Je bénis Dieu pour la Conférence épiscopale qui a eu à produire une déclaration. Je ne veux pas m'immiscer dans les motivations d'une telle déclaration de l'Eglise sœur Catholique romaine de Côte d'Ivoire. Ce qui les a motivés à produire une telle déclaration n'engage qu'eux. Ce sont des frères en Christ, je ne peux pas argumenter là-dessus. Eux au moins, étant dans une position de cohésion en leur sein, ont pu produire une déclaration. Mais, au niveau de l'Eglise protestante évangélique, nous n'avons pas pu le faire parce que notre corps était dans la tourmente, parce qu'il y a eu un problème de cohésion et de leadership.
LP : Mon Révérend, Ouattara a été déclaré vainqueur après le scrutin, donc c'est lui qui incarnait désormais les institutions !
RM : Il y avait une institution établie de fait et une autre qui était dans une position de retranchement. Effectivement, après le scrutin du 28 novembre dernier, il fallait comprendre que les avis étaient partagés. L'opinion attendait aussi que certaines institutions telles que l'Eglise se prononcent en faveur d'un camp. Mais, ça ce n'est pas le rôle de l'Eglise ! L'Eglise devait, dans son ensemble, jouer un rôle de médiation. Elle ne devait pas prendre partie puisqu'elle est non partisane. L'Eglise devait prier, pour la nation. Elle devait surtout entamer sa médiation au niveau des deux parties. Mais face à toute cette impasse, la position la plus idoine était d'attendre l'Intervention de Dieu pour restaurer la Côte d'Ivoire.
LP : Quelle place compte prendre l'Eglise protestante et Evangélique dans le processus de réconciliation ?
RM : Dans toute sa cohésion, l'Eglise protestante évangélique représente plus de quatre millions de fidèles. En tant qu'institution de cohésion spirituelle et morale, elle accompagnera le processus en prônant l'apaisement des cœurs, le pardon, la réconciliation vraie en amenant toutes les parties à tourner la page, à taire les querelles. L'Eglise doit amener les Ivoiriens à regarder l'intérêt général et non l'intérêt personnel. Nous avons entrepris des démarches dans ce sens. C'est pour quoi, nous avons rencontré le président de la Cour suprême, l'ONUCI récemment. Nous irons voir Charles Konan Banny, le Premier ministre et d'autres institutions. Nous saisirons l'occasion pour faire comprendre le silence de l'Eglise à un moment donné, expliquer pourquoi certaines prophéties, certaines actions ont été imputées à l'Eglise, alors qu'elles devraient être imputées à des individus. Les cœurs sont en train de s'apaiser, tout le monde doit se mobiliser pour accompagner le président Ouattara et son gouvernement. Dieu est en train de relever la Côte d'Ivoire. Il est souhaitable que les nouvelles autorités aident aussi l'Eglise à jouer son rôle de caution morale et spirituelle. L'heure est à l'amour, mais, chacun doit assumer sa part de responsabilité à tous les niveaux et chacun doit répondre de ses actes devant la justice de Dieu.
Jean- Antoine Doudou.
Le Patriote: Après la crise post-électorale pendant laquelle les agissements de certains pasteurs et hommes de Dieu ont été décriés, comment se porte aujourd'hui l'Eglise en général en Côte d'Ivoire ?
Révérend Melchisédek : Je ne peux m'adresser aux Ivoiriens et à vos lecteurs sans, d'entrée, m'incliner sur la mémoire de toutes les personnes qui ont perdu la vie pendant la crise post-électorale et bien même au-delà. Ma pensée va également à l'endroit de toutes les familles éplorées, des dignitaires religieux bafoués dans leur dignité et qui ont perdu la vie. Une pensée également pour tous ces lieux de culte: Mosquées, Eglises, Temples profanés. Je crois et je suis convaincu que Dieu permettra que toutes ces plaies se cicatrisent pour la gloire de son nom. En vérité, le corps du Christ se porte très mal en ce moment en Côte d'Ivoire. Parlant du corps du Christ, je fais allusion à l'Eglise catholique romaine, l'Eglise protestante évangélique, à toutes les églises. Et je suis fondé à dire que le Corps de Christ est meurtri et blessé. Vous avez dû le constater, sur le terrain. Des prophéties, des paroles de connaissance ont été tenues par des Serviteurs de Dieu, qui ont été réutilisées par une partie de l'opinion publique et qui ont surtout cristallisé certaines positions. Ce qui fait que l'Eglise est aujourd'hui pointée du doigt comme ayant contribué à envenimer les positions figées d'une partie de la classe politique ivoirienne.
LP : Le serviteur de Dieu est supposé être un visionnaire, avez- vous vu cette crise poindre à l'horizon, qu'avez- vous fait pour la juguler ?
RM : La Bible, elle-même, est une prophétie. Il y a des signes qui ne trompent pas. Sans entrer dans le prophétique, on voyait les choses venir. Les germes du conflit avaient déjà été semés. Nous étions dans l'impasse sur tous les plans, mais on faisait confiance à Dieu. On se disait que tôt ou tard tout le monde se ressaisirait. Mais, l'être humain est ce qu'il est. Quelqu'un peut porter une charge ecclésiastique, mais dominé par son côté humain qui prend le dessus. Comme toute la nation ivoirienne, en tant que serviteur de Dieu, nous avons vu venir la crise. Dans le cadre de certains regroupements, nous avons donné de la voix, tiré la sonnette d'alarme. Mais, si vous êtes l'une des seules voix qui prêche dans le désert, à un certain moment, on commence à vous prendre pour un illuminé. Face à toutes les déviations qu'on observait, sur le plan spirituel, culturel, social, politique, on savait qu'on allait arriver à une impasse qui conduirait, inévitablement, à une implosion.
LP : Certains de vos pairs ont été clairement cités dans des cas d'achat d'armes pour le régime Gbagbo, d'autres en ont dissimulé dans leurs lieux de culte, d'autres encore ont fait des prophéties qui ont conforté Laurent Gbagbo dans son entêtement à confisquer le pouvoir, alors qu'il a perdu les élections. N'est-ce pas un aveu d'échec de l'Eglise et de ses serviteurs que vous êtes ?
RM : Je voudrais partager cette interrogation avec vous. Est-ce à dire que parce qu'un chirurgien a raté une intervention qu'il est un mauvais chirurgien ? Cela signifie-t-il aussi que tous les chirurgiens ne sont pas bons ? Non ! Ce n'est pas un postulat. Il y a eu des serviteurs de Dieu qui ont donné des prophéties. Une partie de l'opinion a adhéré à ces prophéties. Ce qui n'est pas le cas d'une autre partie d'Ivoiriens. Au nombre de cette frange de l'opinion, moi, en toute responsabilité, j'ai demandé aux serviteurs de Dieu de faire attention, car la Bible recommande d'éprouver toutes les prophéties. L'Eglise est dans son essence apostolique et catholique, c'est-à-dire universelle. Donc l'Eglise doit être dans une position non partisane et apolitique. Même si une prophétie s'avère vraie, avant que l'Eglise ne l'autorise, elle doit être éprouvée. L'Eglise ne doit pas faire d'elle un sujet d'allégeance à qui que ce soit. J'ai aussi fait savoir que l'Eglise ne doit pas s'engager, elle ne doit pas être partisane. Ce qui a été la fausse note, c'est que le régime qui vient de perdre le pouvoir, dans sa grande majorité était d'obédience protestante évangélique. Pour eux, puisque leur communauté regroupait près de quatre millions de fidèles, les serviteurs de Dieu, au sein de celle- ci pensaient qu'il fallait soutenir leurs frères engagés politiquement. Il revenait à l'Eglise de dire que cela ne devrait pas se passer ainsi.
LP : L'opinion pense que l'Eglise a fermé les yeux sur les dérives de certains Pasteurs ?
RM : Le Livre de Jérémie (chapitre 29- Verset 7) dit que « l'un des rôles de l'Eglise est de rechercher le bien de la ville, de la nation où je vous ai menés ». Ces textes expliquent que s'il y a du bien dans la nation, notre bonheur en dépend, puisque nous sommes membres de cette nation. Au-delà de cela, si de manière individuelle, certains serviteurs de Dieu se sont engagés dans les actes que vous avez énumérés : achats d'armes, prophéties, ce n'est pas l'Eglise de Côte d'Ivoire qui en est comptable. Mais Je suis chrétien, et ma Bible me dit que « je ne dois point juger les autres ». Je dois plutôt me mettre dans la position de celui qui constate une erreur et qui dois ramener les frères à la raison. C'est ce qui a été fait à plusieurs niveaux. Dans le Corps de Christ, des actions ont été menées pour faire savoir à des serviteurs de Dieu que leurs actions risquent de ternir l'image de l'Eglise. Maintenant, est-ce vrai ou faux que certains serviteurs de Dieu ont eu mandat d'acheter des armes, nous ne saurons affirmer avec exactitude cela, puisque nous avons lu cela seulement dans la presse. Mais, même si on avait la preuve, ce n'est pas l'Eglise, qui les a mandatés. Ils l'ont fait en leur nom personnel et en celui de leurs mandants. En tout cas, pour moi, le rôle d'un serviteur de Dieu est de prêcher l'Evangile, d'être Ministre du Culte.
LP : Il y a eu des élections transparentes qui ont consacré la victoire d'Alassane Ouattara. Mon Révérend, pourquoi l'Eglise sachant que Laurent Gbagbo a perdu ne lui a pas ouvertement demandé de passer la main de manière pacifique ?
RM : A cette équation, de manière individuelle, les positions étaient partagées et on a assisté à une fragilisation au niveau du corps de Christ. On ne voyait plus des chrétiens engagés, mais plutôt des militants chrétiens. C'est dû au fait que l'Eglise, dans son ensemble, traversait une période de confusion. Si vous observez le paysage chrétien évangélique en Côte d'Ivoire, il y a une floraison d'églises, d'organisations para- ecclésiastiques. Et chacun a eu sa position dans cette affaire. Il y a aussi l'aspect cupidité qui est entré dans le milieu et qui a gangréné l'Eglise. L'Eglise, à un certain moment, devait effectivement parler, mais dans son ensemble, elle était fragilisée. Mais, ce qu'il faut retenir aussi, c'est que l'Eglise n'est pas exclusivement comptable de ce qui est arrivé à la Nation.
LP : Elle a tout de même sa part de responsabilité !
RM : Il faut que l'on comprenne. L'Eglise, en tant qu'institution divine, n'a pas de part de responsabilité. Ce sont des individus, certains serviteurs de Dieu qui ont eu une part de responsabilité dans l'exacerbation de la crise. Ces derniers ne se sont pas engagés dans ces actes au nom de l'Eglise ! Personnellement, nous déplorons toutes ces actions de ces serviteurs de Dieu.
LP : L'Eglise catholique a fait une déclaration demandant « le respect des institutions… », ce qui sous entend le maintien de Gbagbo au pouvoir, alors que Ouattara, le président élu, est astreint à un blocus. Comment percevez- vous cela ?
RM : Je bénis Dieu pour la Conférence épiscopale qui a eu à produire une déclaration. Je ne veux pas m'immiscer dans les motivations d'une telle déclaration de l'Eglise sœur Catholique romaine de Côte d'Ivoire. Ce qui les a motivés à produire une telle déclaration n'engage qu'eux. Ce sont des frères en Christ, je ne peux pas argumenter là-dessus. Eux au moins, étant dans une position de cohésion en leur sein, ont pu produire une déclaration. Mais, au niveau de l'Eglise protestante évangélique, nous n'avons pas pu le faire parce que notre corps était dans la tourmente, parce qu'il y a eu un problème de cohésion et de leadership.
LP : Mon Révérend, Ouattara a été déclaré vainqueur après le scrutin, donc c'est lui qui incarnait désormais les institutions !
RM : Il y avait une institution établie de fait et une autre qui était dans une position de retranchement. Effectivement, après le scrutin du 28 novembre dernier, il fallait comprendre que les avis étaient partagés. L'opinion attendait aussi que certaines institutions telles que l'Eglise se prononcent en faveur d'un camp. Mais, ça ce n'est pas le rôle de l'Eglise ! L'Eglise devait, dans son ensemble, jouer un rôle de médiation. Elle ne devait pas prendre partie puisqu'elle est non partisane. L'Eglise devait prier, pour la nation. Elle devait surtout entamer sa médiation au niveau des deux parties. Mais face à toute cette impasse, la position la plus idoine était d'attendre l'Intervention de Dieu pour restaurer la Côte d'Ivoire.
LP : Quelle place compte prendre l'Eglise protestante et Evangélique dans le processus de réconciliation ?
RM : Dans toute sa cohésion, l'Eglise protestante évangélique représente plus de quatre millions de fidèles. En tant qu'institution de cohésion spirituelle et morale, elle accompagnera le processus en prônant l'apaisement des cœurs, le pardon, la réconciliation vraie en amenant toutes les parties à tourner la page, à taire les querelles. L'Eglise doit amener les Ivoiriens à regarder l'intérêt général et non l'intérêt personnel. Nous avons entrepris des démarches dans ce sens. C'est pour quoi, nous avons rencontré le président de la Cour suprême, l'ONUCI récemment. Nous irons voir Charles Konan Banny, le Premier ministre et d'autres institutions. Nous saisirons l'occasion pour faire comprendre le silence de l'Eglise à un moment donné, expliquer pourquoi certaines prophéties, certaines actions ont été imputées à l'Eglise, alors qu'elles devraient être imputées à des individus. Les cœurs sont en train de s'apaiser, tout le monde doit se mobiliser pour accompagner le président Ouattara et son gouvernement. Dieu est en train de relever la Côte d'Ivoire. Il est souhaitable que les nouvelles autorités aident aussi l'Eglise à jouer son rôle de caution morale et spirituelle. L'heure est à l'amour, mais, chacun doit assumer sa part de responsabilité à tous les niveaux et chacun doit répondre de ses actes devant la justice de Dieu.
Jean- Antoine Doudou.