Les écoles de journalisme sont souvent accusées de privilégier dans leur recrutement des profils de type "étudiants de Sciences Po" et de ne pas être assez ouvertes à la diversité sociale et ethnique. Elles contribueraient ainsi à reproduire une caste de journalistes peu en phase avec les évolutions de la société française. "Aujourd`hui, les émissions de télé-réalité veulent être un reflet du monde extérieur, constate Nordine Nabili, rédacteur en chef du Bondy Blog. On y trouve des Noirs, des Arabes, des homosexuels, des gens de milieux sociaux très divers. Par comparaison, les rédactions ne reflètent pas la même diversité..."
Les promotions qui sortent des écoles comptent encore très peu de fils d`ouvriers ou d`enfants d`immigrés. "Ceux-ci sont bloqués à tous les niveaux du processus", déplore Bernard Spitz, conseiller d`Etat et président d`une commission sur la diversité dans les médias, qui a rendu un rapport en mai 2010. "Ils pensent que ces études ne sont pas faites pour eux ; ils ne connaissent pas les filières ; à supposer qu`ils tentent les concours, les épreuves les défavorisent." Dans son rapport, la commission sur la diversité dans les médias pointait du doigt le fait que les écoles de journalisme privilégiaient les épreuves de culture générale dans leur processus de sélection. Aux Etats-Unis, la sélection se fait plutôt sur un dossier relatant le parcours du candidat. "En France, une expérience comme la création d`un journal de lycéens ou l`animation d`une émission de radio est trop peu valorisée", regrette M. Spitz.
Pour autant, depuis deux ans, les écoles de journalisme reconnues par la profession font des efforts pour s`ouvrir davantage à la diversité. Avec des méthodes très différentes selon les établissements. En 2009, le Bondy Blog a lancé, en partenariat avec l`Ecole supérieure de journalisme (ESJ) de Lille, une préparation au concours gratuite et ouverte aux boursiers. Il a reçu 250 candidatures la première année et a retenu 20 étudiants. Ceux-ci ont suivi un programme de 520 heures de formation, en parallèle de leurs études, et ont bénéficié d`un suivi personnalisé. A l`issue du cursus, treize d`entre eux ont été admis dans l`une des écoles reconnues par la profession.
"Nous touchons ce que j`appelle la "zone grise" de la société française, explique Nordine Nabili. Des enfants d`immigrés, mais aussi des fils d`agriculteurs, d`artisans... Le métier de journaliste les fait rêver, mais ils n`imaginent pas qu`il soit fait pour eux."
La voie de l`apprentissage
L`Institut pratique du journalisme (IPJ) a privilégié la voie de l`apprentissage. Cette école a été la première à mettre en place une formation de ce type pour des journalistes en janvier 2005 : les étudiants signent une convention d`apprentissage avec une entreprise de presse et touchent un salaire ; parallèlement, ils suivent une formation à l`IPJ qui débouche sur un diplôme. Le Centre de formation des journalistes (CFJ) a lui aussi développé cette filière et accueille chaque année quinze apprentis sur une promotion de 45 étudiants.
L`IPJ a signé une convention égalité des chances avec neuf lycées de Seine-Saint-Denis : chaque année, on vient présenter dans les classes le métier de journaliste et la formation afin d`inciter les élèves à s`y intéresser. D`autres écoles suppriment les frais de scolarité pour les étudiants boursiers. C`est le cas, par exemple, de l`Ecole de journalisme de Sciences Po.
Cette année, le CFJ est allé plus loin en modifiant ses modalités d`admission. "Nous avons supprimé une épreuve de synthèse d`articles de presse et avons transféré l`épreuve d`anglais de l`écrit à l`oral, explique Christophe Deloire, directeur de l`école. Cela a eu un effet immédiat sur le profil des étudiants qui ont franchi la barre de l`admissibilité." L`épreuve de langue à l`écrit est en effet considérée comme l`une des plus discriminantes du point de vue social à l`entrée des grandes écoles.
Xavier Ternisien
Les promotions qui sortent des écoles comptent encore très peu de fils d`ouvriers ou d`enfants d`immigrés. "Ceux-ci sont bloqués à tous les niveaux du processus", déplore Bernard Spitz, conseiller d`Etat et président d`une commission sur la diversité dans les médias, qui a rendu un rapport en mai 2010. "Ils pensent que ces études ne sont pas faites pour eux ; ils ne connaissent pas les filières ; à supposer qu`ils tentent les concours, les épreuves les défavorisent." Dans son rapport, la commission sur la diversité dans les médias pointait du doigt le fait que les écoles de journalisme privilégiaient les épreuves de culture générale dans leur processus de sélection. Aux Etats-Unis, la sélection se fait plutôt sur un dossier relatant le parcours du candidat. "En France, une expérience comme la création d`un journal de lycéens ou l`animation d`une émission de radio est trop peu valorisée", regrette M. Spitz.
Pour autant, depuis deux ans, les écoles de journalisme reconnues par la profession font des efforts pour s`ouvrir davantage à la diversité. Avec des méthodes très différentes selon les établissements. En 2009, le Bondy Blog a lancé, en partenariat avec l`Ecole supérieure de journalisme (ESJ) de Lille, une préparation au concours gratuite et ouverte aux boursiers. Il a reçu 250 candidatures la première année et a retenu 20 étudiants. Ceux-ci ont suivi un programme de 520 heures de formation, en parallèle de leurs études, et ont bénéficié d`un suivi personnalisé. A l`issue du cursus, treize d`entre eux ont été admis dans l`une des écoles reconnues par la profession.
"Nous touchons ce que j`appelle la "zone grise" de la société française, explique Nordine Nabili. Des enfants d`immigrés, mais aussi des fils d`agriculteurs, d`artisans... Le métier de journaliste les fait rêver, mais ils n`imaginent pas qu`il soit fait pour eux."
La voie de l`apprentissage
L`Institut pratique du journalisme (IPJ) a privilégié la voie de l`apprentissage. Cette école a été la première à mettre en place une formation de ce type pour des journalistes en janvier 2005 : les étudiants signent une convention d`apprentissage avec une entreprise de presse et touchent un salaire ; parallèlement, ils suivent une formation à l`IPJ qui débouche sur un diplôme. Le Centre de formation des journalistes (CFJ) a lui aussi développé cette filière et accueille chaque année quinze apprentis sur une promotion de 45 étudiants.
L`IPJ a signé une convention égalité des chances avec neuf lycées de Seine-Saint-Denis : chaque année, on vient présenter dans les classes le métier de journaliste et la formation afin d`inciter les élèves à s`y intéresser. D`autres écoles suppriment les frais de scolarité pour les étudiants boursiers. C`est le cas, par exemple, de l`Ecole de journalisme de Sciences Po.
Cette année, le CFJ est allé plus loin en modifiant ses modalités d`admission. "Nous avons supprimé une épreuve de synthèse d`articles de presse et avons transféré l`épreuve d`anglais de l`écrit à l`oral, explique Christophe Deloire, directeur de l`école. Cela a eu un effet immédiat sur le profil des étudiants qui ont franchi la barre de l`admissibilité." L`épreuve de langue à l`écrit est en effet considérée comme l`une des plus discriminantes du point de vue social à l`entrée des grandes écoles.
Xavier Ternisien