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Société Publié le mardi 8 novembre 2011 | Soir Info

Obsèques de Désiré Tagro à Gabia / Colère à Saïoua : Ce que le président Ouattara a fait

© Soir Info Par DR
Gouvernement ivoirien - Désiré Tagro, ministre de l`Intérieur
Il était 14 h 23 mn, ce samedi 05 novembre 2011, sous un soleil de plomb, quand Tagro Assignini Désiré Gnahoré Dago Zézé Kada a été porté en terre, dans un concert de pleurs, de lamentations, dans un caveau juxtaposé à celui de son père et qui l’hébergera pour toujours dans l’arrière cour d’une cossue résidence qu’il s’est fait construire à Gabia. Les yeux hagards pour les uns, les visages froissés et ruisselant de larmes pour les autres, on a atteint, à cet ultime moment de la séparation, le paroxysme de la douleur. Les pleurs à tue-tête, les éclats de voix, les profonds soupirs de désespoir, les regards vides et interrogateurs perdus dans le néant, les enfants inconsolables, des vieilles femmes qui tiennent à peines sur leurs jambes, l’indignation était à son point culminant, la douleur à son comble… Certains, dans l’abîme de leur cœur, dans le supplice de la douleur, tentaient, tant bien que mal, de puiser en eux, un courage pour calmer les autres. Le spectacle était tout simplement insoutenable, l’émotion était palpable. La nouvelle de la mort de Désiré Tagro, personne dans le village n’y a vraiment cru, jusqu’à ce que, selon Liacthé Claude, cadre du village, qu’un cortège « bizarre fasse son entrée à Gabia, avec à son bord, le corps de Tagro ». Une mêlée de personnes, son épouse Awa Cissoko, ses 9 enfants en tête, et tous ceux qui sont venus des cantons Yokolo, Nogogo, Haut-Sassandra, Issia ont accompagné le cortège funèbre devant sa résidence totalement pillée et incendiée. Tout ce monde a été stoppé à la porte d’entrée. L’inhumation devant se faire dans l’intimité familiale. Mais très vite, la cour est noire de monde, chacun tenant à être témoin du dernier voyage de ce fils qui fait le bonheur de tous à Gabia. Il n’empêche, la colère et la douleur étaient les sentiments dominants à ces obsèques. Cette colère, se décline en quatre raisons majeures. D’abord, ce que les populations assimilent à « un boycott du gouvernement de ces obsèques ». Aucun officiel n’a fait le déplacement de Gabia. Ni la présidence la République, ni le gouvernement, encore moins une institution n’était représentée à ces obsèques. Deuxième raison liée, intrinsèquement à la première « est l’absence totale, du moins officielle d’une explication des circonstances de la mort de Tagro ». « Nous savons vaguement comment il est mort. C’était l’occasion pour le gouvernement de nous éclairer aujourd’hui. Ils ne sont pas venus pour des raisons qui leur sont propres » a dit, en maugréant, un cadre du village. La troisième raison de la colère est plutôt endogène. Elle a plutôt un lien avec les organisateurs de ces obsèques qui « ont tenu à l’écart touts les autres cantons d’Issia », nous confie M. Guédé Sahiri Désiré, chef de la tribu Digbeubouo, chef du village de Saïoua. « Nous n’avons pas été associés. Aucun autre canton n’a été associé. Le frère de Tagro a tenu tout le monde à l’écart. Même Alphonse Djédjé Mady, qui a tout fait pour obtenir l’inhumation de son frère Tagro, n’a pas été associé. C’est ce qui explique son absence », s’est-il emporté. Quatrième raison et qui reste de loin la plus frustrante, c’est que le ‘’corps’’ de Tagro, très attendu à Saïoua pour une cérémonie d’hommage, a brûlé la politesse à tous les chefs réunis au carrefour, à l’entrée de la ville. « Nous voulions lui rendre un hommage. Les préfets, sous-préfet des départements de Daloa, Issia, Zoukougbeu, tous étaient-là. Le corps préfectoral a formé une haie d’honneur pour leur ancien ministre. Mais, l’ordre a été donné au corbillard de ne pas marquer d’escale à Saïoua. Nous avons été profondément frustrés fâchés, nous sommes affectés. C’est une foutaise. Aucun cadre n’a été associé, y compris son ami Mady Bouabré. La famille de Tagro s’est opposé à l’organisation des obsèques à Saïoua », s’est encore exclamé le chef du village de Saïoua. En tout état de cause, ces cérémonies funéraires se sont déroulées dans une ambiance à la limite de la réjouissance populaire, comme cela est de coutume dans ce terroir, malgré le poids de la douleur. Mais, à Gabia, avec la disparition de Tagro, il s’est opéré une cassure, une rupture en chacun des ressortissants de ce village et par-delà, le département.

Armand B. DEPEYLA
( Envoyé Spécial à Gabia)





Obsèques de Désiré Tagro / Professeur Zigui Koléa Paulin : « Tagro est mort pour la paix »

Une oraison funèbre du professeur Zigui Koléa Paulin qui met en relief les grandes qualités morales et professionnelles de Désiré Tagro, une messe de requiem dite par
Ange Thomas Agoussi, Vicaire général du diocèse de Daloa qui se veut une psychothérapie contre la douleur intense ressentie par les populations, un discours témoignage prononcé par le professeur Dédy Sery , soulignant le militantisme de Désiré Tagro et une adresse de témoignage de la famille faite par Honorine Tagro, sa sœur cadette, ont marqué ces obsèques. Ainsi, pour Liacthé Claude, au nom du comité d’organisation, « Gabia est debout. L’ordinateur s’est brisé, mais nous avons gardé le disque dur », invitant les uns et les autres à militer pour la paix, le Vicaire général dira que « tout ce qui a été vécu avec Tagro ne peut pas mourir », ajoutant que « l’amour ne peut pas mourir ». C’est pourquoi il a demandé à Dieu de ne pas tenir compte des péchés de Désiré, mais de ne prendre en compte que ce qui est positif dans sa vie. Pour le Fpi, par la voix de Dédy Seri, avec la disparition de Tagro « il n’y a plus de couchette dans l’ouest et nulle part dans le pays », soulignant la part active qu’il a pris dans l’accord de paix à Ouagadougou. La perte de Tagro, à ses yeux, ne frappe pas seulement le Fpi, mais toute la classe politique ivoirienne. Le Fpi a demandé à tous ses militants de sécher leurs larmes, a dit Dédy Séri, insistant sur le fait que « la roue de l’histoire ne tournera pas à l’envers. Votre destin va se redresser » a-t-il ajouté. Pour Honorine Tagro « c’est un jour terrible pour sa famille, car Tagro servait de refuge et de dortoir pour tous ». Dans une oraison d’inspiration philosophique, Zigui Koléa a abouti à la conclusion que Désiré Tagro est mort pour la paix. Une paix pour laquelle il s’est battu de tout temps. « Désiré Tagro s’est battu pour la paix. Il est mort pour la paix. Que la paix revienne enfin », a-t-il plaidé. Dans cette dynamique, il a invité ceux qui vivent encore, dans le cadre de la réconciliation, de revoir et d’accepter leur positionnement, d’accepter de reconsidérer leurs opinions auxquelles il faut, selon lui, « trouver un dénominateur commun qui est la paix ». Une paix qui passe « par la nécessaire et indispensable réconciliation, qui, elle-même, passe par le pardon », a fait valoir le professeur Zigui. Gabia, le village de Désiré Tagro, situé à une trentaine de kilomètres de Saïoua, sur l’axe Issia-Sinfra, se veut un village moderne, avec notamment, un château d’eau et de l’électricité. Désiré Tagro, fils aîné d’une famille de 15 enfants, y dispose un peu plus de 1.500 ha d’hévéa et une résidence d’au moins une quinzaine de pièces. C’est au fond de ce domaine que trône le caveau dans lequel il a été inhumé, ce samedi 5 novembre 2011, laissant derrière lui 9 enfants et une veuve, Awa Cissoko.

Armand B. DEPEYLA


Vu et entendu

Dons à la famille

Les obsèques de Tagro ont été marquées par de nombreux et d’importants dons, aussi bien en numéraires qu’en matériels. Le président de la République, Alassane Ouattara a fait don de la somme de 5 millions de Fcfa repartie comme suit : 2 millions pour l’épouse Tagro, née Awa Cissoko et 3 millions aux enfants et à la famille Tagro Désiré. Charles Konan Banny, le président de la Cdvr (350.000 Fcfa), le Front populaire Ivoirien (550.000 Fcfa), Ahoussou Kouadio Jeannot, ministre de la justice, Garde des sceaux (2 millions).

Le corps préfectoral massivement représenté

Plusieurs préfets et sous-préfets issus des départements d’Issia et de Daloa sont venus honorer de leur présence, ces obsèques de l’ancien ministre de l’Intérieur. On notait, entre autres, les présences de Brou Kouamé, préfet de région, préfet de Daloa, Ossey Achi, préfet d’Issia, Kouaho Bilé Mariame, préfet de Zoukougbeu, Tagaud Sessegnon, sous-préfet de Sïoua, chef de délégation, Kragbé Léopoldinne, sous-préfet Nahio, Banto Florentine sous-préfet Gregbeu…

Cercueil d’une durée de vie de 300 ans

Le gouvernement a mis les moyens afin que repose, dans l’honneur, la dignité et la paix éternelle, l’ancien ministre d’Etat, Désiré Tagro. Tenez, l’ancien porte-parole de Laurent Gbagbo a eu droit à un cercueil tout blanc, de marque « Boston », personnalisé, commandé par Ivosep chez une entreprise de pompe funèbre aux Etats-Unis. Conçu en tôle 15 millimètres, il ne sera partialement dégradé qu’au bout de 300 ans. Le prix est de 6 millions de FCfa , selon un agent de l’Ivosep rencontré sur place.

Le Fpi fortement représenté

Le Front populaire Ivoirien ( Fpi) était représenté, au plus haut niveau à Gabia. Amani N’Guessan Michel, Laurent Akoun, Tcheidé Jean Gervais, Professeur Dédy Seri, Alphonse Douaty et bien d’autres militants anonymes de l’ex-parti au pouvoir composaient la délégation.

Refus gênant des corps habillés

Les policiers, gendarmes et autres militaires fortement déployés à Gabia ont opposé un refus, pour le moins gênant à la demande du Vicaire, de venir déplacer le corps de Tagro pour le déposer sous la chapelle ardente afin que la messe de requiem ne soit dite. « Je demande aux forces de l’ordre de venir déposer le corps du défunt pour la prière ». Pendant une dizaine de minutes, aucun d’entre eux n’a bougé. Au dernier moment, devant la longue attente, se sont les agents d’Ivosep qui se sont acquittés de cette tâche…pour sauver la face…

Armand B. DEPEYLA
( Envoyé spécial)
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