Il m’arrive très souvent d’imaginer des joueurs ivoiriens d’hier dans les grandes équipes du monde d’aujourd’hui. Un Jérôme Lébry Manahoua, en pointe, au Milan AC. Un Léon Gbizié, associé à Van Persie, à Arsenal. Un Serge Alain Maguy, entre Iniesta et Xavi, dans le « moteur » du Barça. Un Didier Otokoré, au Real Madrid, en numéro 10, derrière Higuain et Benzema. Un Sékou Bamba de Karamoko, comme créateur de brèches pour les Balotelli, Agüero, Dzeko, à Manchester City…Et je peux continuer de citer comme ça, un nombre impressionnant de joueurs de chez nous, de l’époque post-coloniale, jusqu’au coup d’Etat de Noël 99. Avec la certitude qu’ils auraient fait un malheur, si, à l’époque ils étaient mieux assistés, mieux conseillés, moins dépaysés.Tous, de Kallet et Pokou, à Amani Yao et Tiéhi, en passant par Bawa, Zahui ou Beugré, possédaient, en plus d’un talent exceptionnel, un immense potentiel. Oui, le footballeur ivoirien, pour nous, chauvins (avec mille raisons de l’être), est au-dessus du lot continental, et parmi le meilleur du monde. Et cela ne date pas d’aujourd’hui. Quand on voit ce que les Jean Tokpa, Sékou Touré, Konan Yobouet, Laurent Pokou, Mama Ouattara, Youssouf Fofana ont provoqué comme tremblements et secousses, et suscité comme passion partout où ils se sont produits en France ou ailleurs, on se dit que, «vraiment nos joueurs sont forts ».On n’oublie pas cette génération « d’exilés », trop méconnue, des Désiré Sikely, Michel Goba, François Zahoui, Olivier Tebily,Boris Diecket, Lassina Diabaté, Ibrahim Bakayoko, Didier Angan, Patrice Zéré, Hamed Modibo Diallo, adulés dans leurs clubs et régions d’accueils, et qui se caractérisaient par des qualités physiques, techniques et humaines exceptionnelles. Ceci, pour rappeler aux jeunes joueurs actuels qu’ils sont loin d’être intrinsèquement aussi forts que leurs aînés. Ils bénéficient de plus de business, plus d’ouvertures, moins de barrières, c’est tout. Le monde n’était pas le village planétaire et télévisuel d’aujourd’hui, à la recherche « d’acteurs » pour scènes de théâtres publicitaires. Il fallait avoir vu un Laurent Pokou perforer les défenses du championnat français, un Didier Otokoré dribbler cinq adversaires sur toute la longueur du terrain en coupe d’Europe, un François Zahoui distiller le jeu du SC Toulon, pour comprendre combien la valeur et le potentiel du footballeur ivoirien sont trop longtemps restés… à l’état brut.
nasserelfadel@yahoo.fr
nasserelfadel@yahoo.fr