Bamako, capitale du Mali, vit depuis le 1er novembre dernier au rythme de sa célèbre biennale africaine de la photographie. Pendant deux mois (elle s’achèvera le 1er janvier 2012), cette 9ème édition des Rencontres de Bamako met en lumière près de 500 photographies et plus d’une vingtaine de vidéos, autour du thème, « Pour un monde durable». Dans cet entretien, M. Samuel Sidibé, délégué général de ces Rencontres de Bamako, analyse la semaine professionnelle de l’événement, rythmée par des vernissages, des ateliers, des tables-rondes et surtout des échanges entre les participants.
Le Patriote : Quel bilan faîtes-vous de la 9ème édition des Rencontres de Bamako ?
Samuel Sidibé : Même si je pense qu’il est encore trop tôt pour faire un bilan raisonné, j’ai quelques sentiments. Je rencontre et parle avec beaucoup de personnes et les gens sont très heureux. La qualité des expositions est reconnue par tous et d’une certaine manière celle de l’organisation. Ce qui est surtout intéressant, c’est que j’ai l’impression qu’il y a une ambiance extraordinaire entre les participants. Et c’est cela l’objectif essentiel de la biennale.
Le fait que les gens se rencontrent et se parlent. C’est ici le début et la naissance d’un vrai réseau. Les rencontres sont une opportunité pour les photographes de se rencontrer et de bâtir des réseaux. Cette dimension a manifestement réussi. La seconde chose, dont je peux être fier, c’est la très forte participation internationale. Il y a des Américains, des Européens.
Même quelqu’un est venu du Bangladesh. Cela veut dire que les Rencontres de Bamako sont devenues un événement internationalement reconnu. Les ateliers et les tables-rondes ont également bien fonctionné. Je me réjouis aussi de la multiplication des activités off. Il y a deux ans, on n’avait pas beaucoup d’activités en off. Cette année, on en a une vingtaine.
Des expositions et des projections se déroulent dans plusieurs endroits de la ville. C’est vraiment une satisfaction pour moi. Cela veut dire que la biennale a suscité des envies autant chez des opérateurs privés que des partenaires internationaux qui profitent de la biennale pour montrer ce qu’ils savent faire. Si le développement des Off se poursuit sur cette lancée, cela va nous obliger à nous réorganiser autrement pour que ça fonctionne mieux. On ne s’attendait pas à autant d’activités. Les Off évoquent le succès de la biennale et l’intérêt que les professionnels portent à la biennale. C’est deux choses qui me paraissent essentielles.
L.P : Mais, on ne sent pas encore l’engouement des Bamakois autour de l’événement…
SS : Sur la question du public, il faut rester modeste. Cette année, nous avons mis de grandes photos en extérieur, en particulier dans le parc. On souhaite qu’il y ait effectivement une visibilité plus forte de la biennale, cela pouvait déjà donner au public un goût de l’événement. Mais entre les photos à l’extérieur et la multiplication des off, on peut penser que les Bamakois sont au courant de la biennale. Maintenant entre être au courant de la biennale et venir voir les photos, il y a un pas qui n’est pas complètement franchi. Pour le franchir, il y a un travail à faire.
L.P : Justement que faut-il faire pour que le public adhère plus aux photos proposées par la biennale ?
SS : La biennale présente la photographie comme un mode d’expression artistique qui n’est pas encore installée dans la sensibilité du public malien. On peut mettre des photos partout et les gens peuvent les voir mais de là à être partie prenante du jeu, il y a un travail considérable à faire. Tant qu’on ne donnera pas aux gens une clé pour rentrer dans les photos, pour qu’ils voient la photographie comme un moyen de créer un discours, on n’arrivera pas à attirer le grand public. Donc cela veut dire qu’il y a un travail d’éducation artistique à faire. Cela passe par une sensibilisation. Et le tout le monde, y compris les médias, a son rôle à jouer là-dedans. Evidemment, nous allons continuer à faire des approches en direction du public. Des photographes maliens font des ateliers dans les lycées et on va présenter les photographies aux lycéens. Cela va être déjà un moyen de sensibiliser les lycées sur cette question. Puis, petit à petit, on va faire un parcours pour amener les lycées à visiter les expositions. Nous allons voir comment créer un public pour la photo. J’avoue que je reste fondamentalement modeste en disant que c’est un travail de long terme.
L.P : Quels sont les aspects de la biennale qui ne vous ont pas satisfait ?
SS : Je pense qu’on pourrait davantage mettre des photographies en ville. Mais, on n’a pas pu le faire pour des raisons strictement budgétaires. On avait prévu d’arroser les places publiques, de mettre un peu partout des expositions. On n’a pas pu le faire parce que les moyens ont manqué. Ce qu’on devrait améliorer encore c’est la participation effective des Africains. Les Artistes africains, on arrive à les faire venir parce qu’on a des budgets. On essaie aussi de faire venir des journalistes du continent. Mais, on devrait travailler un peu plus à faire venir tous les gens : commissaires, responsables de musées et autres. Si on veut créer une vraie dynamique, il faut que les gens qui développent un savoir, qui peuvent critiquer les photos en Afrique soient là.
L.P : Après 17 années d’existence, quelles sont aujourd’hui les perspectives de la biennale ?
SS : La biennale doit chercher à approfondir certaines choses. Elle est organisée tous les deux ans. Elle me semble aujourd’hui avoir un caractère trop ponctuel. Si on veut l’approfondir, il faut faire en sorte qu’il y ait un vrai projet photographique qui se développe.
Et il pourrait se développer par exemple à travers la problématique de la conservation des archives photo, la question de la création d’un environnement économique autour de la photo, le développement de tout un savoir autour de la photo. Cela avec l’implication des critiques d’art et des commissaires d’exposition. Il faut aujourd’hui qu’on avance vers un projet beaucoup plus large. Et la biennale pourrait être la partie émergée de l’iceberg. Il faut réfléchir à une façon de faire en sorte que la biennale pousse de véritables racines dans le cadre d’un vrai projet photographique.
Réalisée à Bamako par Y. Sangaré
Le Patriote : Quel bilan faîtes-vous de la 9ème édition des Rencontres de Bamako ?
Samuel Sidibé : Même si je pense qu’il est encore trop tôt pour faire un bilan raisonné, j’ai quelques sentiments. Je rencontre et parle avec beaucoup de personnes et les gens sont très heureux. La qualité des expositions est reconnue par tous et d’une certaine manière celle de l’organisation. Ce qui est surtout intéressant, c’est que j’ai l’impression qu’il y a une ambiance extraordinaire entre les participants. Et c’est cela l’objectif essentiel de la biennale.
Le fait que les gens se rencontrent et se parlent. C’est ici le début et la naissance d’un vrai réseau. Les rencontres sont une opportunité pour les photographes de se rencontrer et de bâtir des réseaux. Cette dimension a manifestement réussi. La seconde chose, dont je peux être fier, c’est la très forte participation internationale. Il y a des Américains, des Européens.
Même quelqu’un est venu du Bangladesh. Cela veut dire que les Rencontres de Bamako sont devenues un événement internationalement reconnu. Les ateliers et les tables-rondes ont également bien fonctionné. Je me réjouis aussi de la multiplication des activités off. Il y a deux ans, on n’avait pas beaucoup d’activités en off. Cette année, on en a une vingtaine.
Des expositions et des projections se déroulent dans plusieurs endroits de la ville. C’est vraiment une satisfaction pour moi. Cela veut dire que la biennale a suscité des envies autant chez des opérateurs privés que des partenaires internationaux qui profitent de la biennale pour montrer ce qu’ils savent faire. Si le développement des Off se poursuit sur cette lancée, cela va nous obliger à nous réorganiser autrement pour que ça fonctionne mieux. On ne s’attendait pas à autant d’activités. Les Off évoquent le succès de la biennale et l’intérêt que les professionnels portent à la biennale. C’est deux choses qui me paraissent essentielles.
L.P : Mais, on ne sent pas encore l’engouement des Bamakois autour de l’événement…
SS : Sur la question du public, il faut rester modeste. Cette année, nous avons mis de grandes photos en extérieur, en particulier dans le parc. On souhaite qu’il y ait effectivement une visibilité plus forte de la biennale, cela pouvait déjà donner au public un goût de l’événement. Mais entre les photos à l’extérieur et la multiplication des off, on peut penser que les Bamakois sont au courant de la biennale. Maintenant entre être au courant de la biennale et venir voir les photos, il y a un pas qui n’est pas complètement franchi. Pour le franchir, il y a un travail à faire.
L.P : Justement que faut-il faire pour que le public adhère plus aux photos proposées par la biennale ?
SS : La biennale présente la photographie comme un mode d’expression artistique qui n’est pas encore installée dans la sensibilité du public malien. On peut mettre des photos partout et les gens peuvent les voir mais de là à être partie prenante du jeu, il y a un travail considérable à faire. Tant qu’on ne donnera pas aux gens une clé pour rentrer dans les photos, pour qu’ils voient la photographie comme un moyen de créer un discours, on n’arrivera pas à attirer le grand public. Donc cela veut dire qu’il y a un travail d’éducation artistique à faire. Cela passe par une sensibilisation. Et le tout le monde, y compris les médias, a son rôle à jouer là-dedans. Evidemment, nous allons continuer à faire des approches en direction du public. Des photographes maliens font des ateliers dans les lycées et on va présenter les photographies aux lycéens. Cela va être déjà un moyen de sensibiliser les lycées sur cette question. Puis, petit à petit, on va faire un parcours pour amener les lycées à visiter les expositions. Nous allons voir comment créer un public pour la photo. J’avoue que je reste fondamentalement modeste en disant que c’est un travail de long terme.
L.P : Quels sont les aspects de la biennale qui ne vous ont pas satisfait ?
SS : Je pense qu’on pourrait davantage mettre des photographies en ville. Mais, on n’a pas pu le faire pour des raisons strictement budgétaires. On avait prévu d’arroser les places publiques, de mettre un peu partout des expositions. On n’a pas pu le faire parce que les moyens ont manqué. Ce qu’on devrait améliorer encore c’est la participation effective des Africains. Les Artistes africains, on arrive à les faire venir parce qu’on a des budgets. On essaie aussi de faire venir des journalistes du continent. Mais, on devrait travailler un peu plus à faire venir tous les gens : commissaires, responsables de musées et autres. Si on veut créer une vraie dynamique, il faut que les gens qui développent un savoir, qui peuvent critiquer les photos en Afrique soient là.
L.P : Après 17 années d’existence, quelles sont aujourd’hui les perspectives de la biennale ?
SS : La biennale doit chercher à approfondir certaines choses. Elle est organisée tous les deux ans. Elle me semble aujourd’hui avoir un caractère trop ponctuel. Si on veut l’approfondir, il faut faire en sorte qu’il y ait un vrai projet photographique qui se développe.
Et il pourrait se développer par exemple à travers la problématique de la conservation des archives photo, la question de la création d’un environnement économique autour de la photo, le développement de tout un savoir autour de la photo. Cela avec l’implication des critiques d’art et des commissaires d’exposition. Il faut aujourd’hui qu’on avance vers un projet beaucoup plus large. Et la biennale pourrait être la partie émergée de l’iceberg. Il faut réfléchir à une façon de faire en sorte que la biennale pousse de véritables racines dans le cadre d’un vrai projet photographique.
Réalisée à Bamako par Y. Sangaré