BATA (Guinée équatoriale) - Comme dans toute l'Afrique,
des centaines de Chinois travaillent à Bata, capitale économique de la Guinée
équatoriale, partagés en deux populations bien distinctes: les commerçants des
bazars, et les ouvriers des grandes compagnies, qui vivent en vase clos.
Les commerçants, issus pour la plupart de la région de Shanghai, sont 650
dans la ville, selon le recensement de l'Association des Chinois de Bata créée
il y a quatre ans. Son N.2, Chen Yong Zong (38 ans), est médecin à la clinique
Peking, dans la rue Villa Udeac, une des principales artères de la ville.
"Cette rue a compté plus de vingt cliniques chinoises, se souvient-il. En
2007, les autorités équato-guinéennes ont fait des contrôles et demandé à voir
les diplômes. La plupart de ces cliniques ont alors fermé". Près de huit
consultations sur dix portent sur le paludisme.
Un badaud confie, en toisant une infirmière à la peau noire: "C'est la
première fois que je vois une employée africaine travailler pour les Chinois!"
De fait, ceux-ci travaillent en famille, sans s'enraciner. Chen fait figure
d'exception: arrivé en 2000 à Malabo, où résidait son cousin, il est resté
deux ans dans la capitale puis est venu s'installer à Bata. Et maîtrise donc
la langue locale, l'espagnol.
La plupart de ses compatriotes se limitent aux rudiments du vocabulaire
commercial, et ne cherchent pas spécialement à s'intégrer. Pas d'enfants
chinois à Bata: ils restent au pays "pour bénéficier de l'éducation, qui est
meilleure chez nous", relève le médecin. Et "très peu" de Chinois prennent des
cours d'espagnol, "ils sont moins de 5% de nos élèves", estime la directrice
du Centre culturel espagnol, Miriam Martinez Elcoro.
C'est en 2007 que les Chinois ont commencé à affluer en masse. "Le pays
s'est ouvert cette année-là", explique Chen. Le grand marché au coeur de Bata
s'est ainsi étoffé d'une kyrielle de boutiques asiatiques de toutes sortes, la
plupart étant des "factorias", bazars où l'on trouve de tout. Les prix y sont
bon marché.
"Mieux qu'en Espagne"
Fait nouveau, l'immigration chinoise vient désormais aussi d'Europe. C'est
le cas de Ji Xiao Hua (29 ans), employé depuis deux ans chez son cousin dans
un magasin de meubles, dans le grand marché de Bata, après avoir vécu vingt
ans à Séville. "La vie d'ici me plaît, c'est mieux qu'en Espagne où il y a la
crise économique", explique-t-il. Combien gagne-t-il ? "Ca se passe bien",
lâche-t-il, sourire malicieux.
Il dit que commerçants et ouvriers chinois ne se mélangent pas. On aperçoit
parfois un de ces employés de compagnies publiques chinoises en bleu de
travail ou en combinaison orange façon Guantanamo dans les rues de Bata. Mais
c'est rare, car leur quotidien se cantonne aux chantiers et à leurs
baraquements.
L'un de ceux-ci, dans le quartier périphérique d'Alep, abrite une vingtaine
d'ouvriers de l'entreprise Sinohydro, qui rénove depuis deux ans le réseau
électrique de Bata. Une meute de chiens errent dans ce campement de fortune
écrasé par la chaleur, à l'écart des habitations autochtones. Deux jeunes
Burkinabés servent d'appoint pour la maçonnerie.
Dans le quartier voisin de Bikuy, d'autres ouvriers installent des câbles
électriques, sous la supervision de l'entreprise équato-guinéenne IMSEG SA,
représentée par Teo Peralta, de nationalité équatorienne. Petite
incompréhension: il leur explique que le seul symbole de l'éclair apposé sur
des bornes ne peut suffire.
"Les Equato-Guinéens ne connaissent pas ce symbole, prévient le
Sud-Américain. Il faut écrire +Attention, ligne à haute tension+". "En Chine
tout le monde comprend ce symbole, répond Qi Jin Xuan, l'interprête. Nous
allons demander à notre direction en Chine ce qu'on doit faire".
Qi Jin Xuan ne cache pas qu'il est venu pour l'argent. "En Chine, je
gagnais 3000 yuans (360 euros) par mois, contre un million de francs CFA (1500
euros) ici. A mon retour en Chine, je pourrai m'acheter une maison".
ybl/gd
des centaines de Chinois travaillent à Bata, capitale économique de la Guinée
équatoriale, partagés en deux populations bien distinctes: les commerçants des
bazars, et les ouvriers des grandes compagnies, qui vivent en vase clos.
Les commerçants, issus pour la plupart de la région de Shanghai, sont 650
dans la ville, selon le recensement de l'Association des Chinois de Bata créée
il y a quatre ans. Son N.2, Chen Yong Zong (38 ans), est médecin à la clinique
Peking, dans la rue Villa Udeac, une des principales artères de la ville.
"Cette rue a compté plus de vingt cliniques chinoises, se souvient-il. En
2007, les autorités équato-guinéennes ont fait des contrôles et demandé à voir
les diplômes. La plupart de ces cliniques ont alors fermé". Près de huit
consultations sur dix portent sur le paludisme.
Un badaud confie, en toisant une infirmière à la peau noire: "C'est la
première fois que je vois une employée africaine travailler pour les Chinois!"
De fait, ceux-ci travaillent en famille, sans s'enraciner. Chen fait figure
d'exception: arrivé en 2000 à Malabo, où résidait son cousin, il est resté
deux ans dans la capitale puis est venu s'installer à Bata. Et maîtrise donc
la langue locale, l'espagnol.
La plupart de ses compatriotes se limitent aux rudiments du vocabulaire
commercial, et ne cherchent pas spécialement à s'intégrer. Pas d'enfants
chinois à Bata: ils restent au pays "pour bénéficier de l'éducation, qui est
meilleure chez nous", relève le médecin. Et "très peu" de Chinois prennent des
cours d'espagnol, "ils sont moins de 5% de nos élèves", estime la directrice
du Centre culturel espagnol, Miriam Martinez Elcoro.
C'est en 2007 que les Chinois ont commencé à affluer en masse. "Le pays
s'est ouvert cette année-là", explique Chen. Le grand marché au coeur de Bata
s'est ainsi étoffé d'une kyrielle de boutiques asiatiques de toutes sortes, la
plupart étant des "factorias", bazars où l'on trouve de tout. Les prix y sont
bon marché.
"Mieux qu'en Espagne"
Fait nouveau, l'immigration chinoise vient désormais aussi d'Europe. C'est
le cas de Ji Xiao Hua (29 ans), employé depuis deux ans chez son cousin dans
un magasin de meubles, dans le grand marché de Bata, après avoir vécu vingt
ans à Séville. "La vie d'ici me plaît, c'est mieux qu'en Espagne où il y a la
crise économique", explique-t-il. Combien gagne-t-il ? "Ca se passe bien",
lâche-t-il, sourire malicieux.
Il dit que commerçants et ouvriers chinois ne se mélangent pas. On aperçoit
parfois un de ces employés de compagnies publiques chinoises en bleu de
travail ou en combinaison orange façon Guantanamo dans les rues de Bata. Mais
c'est rare, car leur quotidien se cantonne aux chantiers et à leurs
baraquements.
L'un de ceux-ci, dans le quartier périphérique d'Alep, abrite une vingtaine
d'ouvriers de l'entreprise Sinohydro, qui rénove depuis deux ans le réseau
électrique de Bata. Une meute de chiens errent dans ce campement de fortune
écrasé par la chaleur, à l'écart des habitations autochtones. Deux jeunes
Burkinabés servent d'appoint pour la maçonnerie.
Dans le quartier voisin de Bikuy, d'autres ouvriers installent des câbles
électriques, sous la supervision de l'entreprise équato-guinéenne IMSEG SA,
représentée par Teo Peralta, de nationalité équatorienne. Petite
incompréhension: il leur explique que le seul symbole de l'éclair apposé sur
des bornes ne peut suffire.
"Les Equato-Guinéens ne connaissent pas ce symbole, prévient le
Sud-Américain. Il faut écrire +Attention, ligne à haute tension+". "En Chine
tout le monde comprend ce symbole, répond Qi Jin Xuan, l'interprête. Nous
allons demander à notre direction en Chine ce qu'on doit faire".
Qi Jin Xuan ne cache pas qu'il est venu pour l'argent. "En Chine, je
gagnais 3000 yuans (360 euros) par mois, contre un million de francs CFA (1500
euros) ici. A mon retour en Chine, je pourrai m'acheter une maison".
ybl/gd