Coupures fréquentes d’électricité A Abidjan : Les populations en colère contre la Cie

“Ce n’est pas possible. Qu’est-ce qu’on nous veut encore ! La Compagnie ivoirienne d’électricité a commencé à couper le courant encore. Et on ne prend même pas la peine de nous prévenir ». Ces propos sont de Martin Konan, coiffeur de son état à Abobo. Ce jeune homme d’environ 30 ans n’a pas été tendre avec la Cie qui selon lui, ‘‘ fait fuir ses clients’’. « Le vendredi dernier, pendant que je coiffais un client, ils ont coupé le courant. J’étais à la moitié de sa tête et cela s’est passé. Imaginez un peu la tête du monsieur. Lui qui n’avait jamais été coiffé par une lame a dû l’accepter à son corps défendant. J’ai dû utiliser une lame et un peigne pour terminer la coiffe. Les autres clients qui attendaient ont carrément décidé d’aller se faire couper les cheveux ailleurs. Je ne sais pas ce cette compagnie fait de l’argent qu’on lui reverse », a indique Martin Konan. Quant à Bodoua Anasthase, cadre dans une banque et habitant la commune d’Abobo, il fait savoir que la Cie ‘‘ se fout des gens’’ avec ces coupures qui interviennent au moment où l’on s’y attend le moins. « On en souffre. Ces deux derniers jours, c’est un véritable calvaire que nous vivons. Le samedi dernier, c’était toute la nuit. Le dimanche, c’était entrecoupé. Cela nous est préjudiciable. Nos appareils électroménagers prennent un coup. Tout comme les aliments. En plus, lorsqu’il y a coupure d’électricité et que tu te retrouve hors de ton quartier, à une tardive, seul le bon Dieu peut te permettre d’arriver à la maison. Tout cela favorise l’insécurité. J’ai un frère qui en a fait les frais du côté de ‘‘Avocatier’’.», indique Bodoua Anasthase. Si certains habitants de la commune d’Abobo semblent modérés, ce n’est pas le cas pour d’autres. « Moi, pour le moment je ne dis rien. J’attends ma facture d’électricité seulement. On ne peut pas nous donner convenablement le courant mais vous allez voir ce qu’on va nous dire de payer. En tout cas, j’attends seulement », prévient Maho Charles, mécanicien de son état. Herman H., étudiant, lui est plus incisif : « Dès qu’un de mes appareils se gâtent je ne cherche pas midi à 14h. Direction, la Cie du quartier. Et si je n’ai pas gain de cause sur place, cela sera vraiment dramatique pour les agents de la Cie. Comment peut-on faire deux à trois jours sans électricité. C’est inhumain. Je crois qu’il est temps d’utiliser certaines pratiques estudiantines pour rappeler à l’ordre les responsables de la Cie», avertit Herman. Mais la commune d’Abobo n’est pas la seule cité à subir les coupures d’électricité. Adjamé n’échappe pas non plus à la règle. « Ici aux 220 logements, on ne comprend plus rien. Si ce n’est pas l’éclairage public, c’est l’éclairage domestique. Aujourd’hui, c’est plus l’éclairage domestique. Nos activités ne marchent plus, nous qui avons des maquis. Regardez-vous-même, la Cité Thaudjô est dans le noir (Ndlr : jeudi dernier). Quel client accepterait de venir manger dans le noir ! », s’indigne M.K., tenancière de maquis. Ce ras-le bol gagne aussi les habitants des environs. « On a remarqué que maintenant, chaque 20h, il y a coupure d’électricité. Même quand tu dois te rendre au niveau de l’ex-cinéma Liberté, tu essaies de finir tes courses avant 20h. Ces coupures d’électricité qui ressemblent à des délestages créent l’insécurité », explique Konan C., opérateur économique de son état, habitant les 220 logements. A Koumassi, même spectacle. La lumière fait place à l’obscurité. En fin de semaine dernière, les coupures d’électricité se sont intensifiées. « Chaque jour de la semaine, on coupe le courant. Le vendredi dernier, à partir de 20h, ils ont interrompu l’électricité. Son retour n’est intervenu que le samedi à 20h. Le dimanche, ils ont encore coupé le courant de 19h30mn à 20h30mn. On s’amuse avec la population. On est obligé de s’asseoir dehors pour lutter contre la chaleur. Il n’y a aucune information. Les responsables de la Cie ne nous disent rien. Qu’on fasse au moins un communiqué pour nous dire ce qui se passe. Si c’est un délestage qu’on nous le dise et qu’on nous communique le programme. Que l’on arrête de ruser avec les Ivoiriens et qu’on nous dise la vérité au lieu de nous la cacher. Franchement, nous en avons marre ! J’ai même du poisson que j’ai dû jeter car avarié », dit en colère, Solange Kouassi, enseignante de son état. Et Traoré Lacina de renchérir : « C’est parce que nous ne voulons pas pour le moment gêner le travail du président Ouattara. Mais notre patience a des limites. Que la Cie sache que notre réaction sera à la hauteur des préjudices subis ». Aujourd’hui, tous les regards sont tournés vers la Cie où des coupures sont également signalées à l’intérieur du pays.

A quand les éclairages ?

Il importe à la Compagnie ivoirienne d’électricité d’expliquer à la population ce qui ne va pas. Aujourd’hui, les supputations vont bon train et la grogne gagne de plus en plus les habitants des quartiers délestés en électricité. Il suffit de faire un tour à Abobo, Adjamé, Koumassi et autres pour s’en rendre compte. Cette situation dure et perdure sans qu’une réaction n’émane de la Direction générale de la Cie. Qu’elle n’attende pas que l’irréparable se produise avant d’ameuter l’opinion ou la population qui n’a pas été informée de cette coupure d’électricité à relent de délestage. En tout cas, la Cie doit nous éclairer en communiquant sur ce sujet, au lieu de nous maintenir dans l’obscurité…

JEA