Il ne manque pas d’occasion pour se prononcer sur l’actualité en Côte d’Ivoire. Me Franck Kouyaté, agent d’affaire judiciaire, avec la verve qu’on lui connait, a dans une interview qu’il nous accordée récemment, donné de la voix. Sans détours, il assène ses vérités…Entretien. Le Premier ministre Soro quitte la Primature. Qu’est-ce que cela vous dit ? Le départ de Guillaume Soro de la Primature me gêne un peu. Mais comme lui-même l’a dit, il n y a pas de poste à l’infini. Nous sommes mortels. On part de zéro à cent ans. Mais rares sont ceux qui auront la centaine. La vie est donc éphémère. Mais il faut voir le contexte dans lequel Soro est venu comme premier ministre. Et je pense que les accords ne valent que parce qu’on applique des accords. Soro je l’ai connu quand il était secrétaire général de la Fesci et nous étions déjà au ministère de l’enseignement supérieur comme conseiller. Donc nous l’avons pratiqué à un moment donné. Il a fait du bon travail, il a redressé la Côte d’Ivoire. Son départ me gêne. Pour moi, c’est trop tôt. Parce que le pays n’est pas normalisé. Or, Soro a une armée. Monsieur Alassane n’a pas d’armée. Monsieur Bédié n’a pas d’armée. Alors je me pose la question, un premier ministre PDCI pourquoi faire ? Je ne suis pas contre la promotion de qui que ce soit. Mais ce premier ministre qui va le surveiller ? Il s’agit pour le président Ouattara, de respecter la parole donnée au PDCI-RDA lors des présidentielles. Oui ! Mais le chef de l’Etat aurait dû ajouter un alinéa pour dire si et seulement si le pays est normalisé, stabilisé. Vous voyez, les conditions ne sont pas réunies. Alassane s’est fait avoir dans un accord peut être écrit mais non extensible. Parce que Soro va partir de la primature. Il est mortel comme vous et moi. Mais il faut tenir compte de la réalité. Les Forces républicaines de Côte d’Ivoire dont j’avais été le premier, déjà depuis juin 2011, à dire que le nom FRCI me gênait. Et qu’il faillait revenir aux Forces Armées Nationales de Côte d’Ivoire (FANCI). Quelques mois après, les militaires se sont réunis à Bassam pour adopter un code de bonne conduite et revenir à l’appellation Fanci. Mais l’application pose problème. Et on continue d’appeler l’armée nationale de Côte d’Ivoire FRCI. Or FRCI pose problème parce qu’ils sont sortis du contexte républicain. Ils sont devenus, un peu tout, un four tout. Ce qui fait que le citoyen lambda ne se reconnait plus en eux. Soro va atterrir, dit-on, à l’Assemblée nationale pour en être le Président. Une belle récompense pour lui n’est-ce pas ? J’appelle ça du saupoudrage. Je ne suis contre la promotion de personne. Mais la situation du pays est trop fragile pour qu’on s’amuse à ce genre de calcul. Est-ce que les politiciens pensent à leur mort prochaine ? Qui qu’ils soient. Alassane est un mortel, Bédié est un mortel, Kouyaté est un mortel. Mais on fait des provisions, on fait des accords. Mais est-ce que dans tout ce que nous disons, nous prévoyons une place pour la mort ? Alors on se laisse surprendre par la mort et on croit que ce sont les sorciers. La vie elle est tout. Lorsqu’on nait, c’est pour vivre et mourir. C’est ça la trinité. Avez-vous des craintes pour l’ancien dirigeant de l’ex-rébellion ? Ma crainte se situe au niveau de la vanité des vanités. Tout est vanité. Parce que de mon point de vue, on est rien. Allez-y un peu à la morgue... Je n’ai peur de rien puisque je prends toujours la mort comme le vecteur final de vie. Le passage de la vie à une autre vie. Je pose un problème. Je suis inquiet pour les générations à venir. Nous sommes en train d’hypothéquer l’avenir de la Côte d’Ivoire, des jeunes par nos petits calculs politiciens. Soro à l’assemblée nationale donc de par l’article 11 de la constitution, virtuel Président de la République. Cela vous plait-il ? Je n’ai rien contre. Cependant je dis tout ceci est possible quand la situation du pays est normalisé. Quand il y a de l’emploi. Quand il y a moins de chômage. Quand les promesses politiciennes ont été tenues. Mais les autorités disent que tout va relativement bien dans le pays ? Ils peuvent le dire parce qu’ils ne vivent pas au quotidien ce que vous et moi nous vivons. Moi je suis un opérateur économique. Mon chiffre d’affaire est passé à zéro. Ceux qui disent que ça va, ça dépends d’où ils tirent cette positivité. Mais moi je ne le sens pas. Je pense qu’on a fait trop de promesses et les promesses n’ont pas été tenues. Et que par conséquent, on aurait dû avoir au moins le reflexe de revenir sur un certain nombre de promesses. Gbagbo est à la CPI et il semblerait que l’épée de Damoclès plane sur la tête de Soro. Qu’en pensez-vous ? Je pense que le fait que Gbagbo soit à la Haye n’était pas un souhait d’aucun ivoirien. Personnellement ceci me gêne. En toute chose, il vaut mieux avoir une bonne fin. Je ne peux exercer comme président d’une nation choyée, adulée, puis me retrouver dans cette situation. Même votre ennemi, le jour où on vous annonce sa mort, vous baisser la garde parce que vous n’avez plus d’objet de concurrence. Donc qu’on aime ou qu’on n’aime pas Gbagbo, il a été président de ce pays. Il rentre dans l’histoire. Même Alassane, même Bédié n’aura souhaité cela à Gbagbo. Parce qu’eux-mêmes ne l’auront pas souhaité pour eux. Par conséquent c’est relation de transitivité. En Côte d’Ivoire après Felix Houphouët Boigny, je dis et je l’assume, le meilleur politique c’est Laurent Gbagbo. Il avait la connaissance des ivoiriens, il avait la connaissance sociologique de la Côte d’Ivoire. Il était généreux, il était spontanée, il était ouvert. C’est comme ça qu’était Houphouët .Mais Dieu vous donne pas tout. A Laurent Gbagbo, Dieu lui donné des collaborateurs qui l’ont plongé. Vous voyez cette qualité-là Dieu ne lui a pas encore donné à Alassane, ni à Bédié. Parlons-en un peu. Pourquoi a-t-il échoué ? Pour quoi le coup d’Etat est –il arrivé ? Parce que toute raison gardé, il n’a pas écouté les gens. Il est reste sur son piédestal en train de remettre tout à demain. Et le coup d’Etat survint. Alors que les dés étaient déjà pipés. Pour certains, si Gbagbo se trouve à la Cour pénal internationale (CPI), c’est que l’ex-chef des Forces nouvelles doit aussi y être ? Mais alors en ce moment-là, ceux qui le disent, est ce qu’ils savent où ils seront demain. Parce que nul n’a le destin de quelqu’un si ce n’est Dieu. On peut le vouloir, on peut le souhaiter. Mais est-ce que Dieu a dit ? Ceux qui souhaite que Soro Guillaume finissent à la CPI, qu’ils attendent leur tour aussi. La crise post-electorale n’est que conjoncturelle. Mais la situation se normalise, si les Ivoiriens commencent à avoir de l’argent, vous verrez que vous et moi iront au village pour enterrer nos morts. Aujourd’hui, on ne peut même pas aller au village. On peut rien manger, la vie est chère, nous sommes tous devenus des aigris. Des méchants. Que pensez-vous du processus de réconciliation nationale dans le pays. Je pense que la réconciliation nationale n’est pas une potion magique. Avant même sa création, les Ivoiriens étaient réconciliés. Mais la réconciliation conçue et liée à la crise me pose un problème. En tout cas de mon point de vue, on va prendre du temps. On ne peut pas demander à monsieur Banny et à sa commission en deux ans de réconcilier les ivoiriens ? Le fait de donner un timing, c’est l’échec au bout. Ca ne va pas aboutir. Et puis est-ce que Banny plait aux Ivoiriens ? Est-ce que quelqu’un n’a pas un problème avec Banny ? Et donc, à partir de ce moment, si j’avais été consulté, j’aurai suggéré que la réconciliation commence d’abord par nos 19 régions. Et que le président de la république mandate les préfets de région de réunir les chefs traditionnels de chaque localité qui soient à même de connaitre les problèmes des siens. Et à partir de ce moment-là, l’Etat devra débourser de l’argent pour verser de l’eau pour demander pardon aux mânes pour le sang versé. Une fois que la réconciliation part du bas vers le sommet, c’est porteur. La mission de Mr Banny aura été facile. Parce que déjà en amont on aura réglé le problème. Et il venait en aval pour parachever. En ce moment, il aurait pu dans ce cas là, comme il l’a fait, s’adjoindre Drogba qui aurait lancé le tournoi de l’unité nationale, de la réconciliation doté de la coupe Alassane Ouattara. Selon vous, qui réconcilie-t-on en Côte d’Ivoire ? C’est la question que je me pose parce que moi je n’ai pas de problème avec quelqu’un. La meilleure façon de réconcilier les ivoiriens, et je mets le président Alassane Ouattara au défi, est d’injecter de l’argent dans le tissu économique comme il l’a promis lors de la campagne. Vous verrez que les Ivoiriens vont se réconcilier. Tant qu’il n’aura pas l’argent, il n’y aura pas de réconciliation. Les gens ont des problèmes, vous parlez de réconciliation. Ils doivent d’abord se réconcilier avec leur ventre. Le FPI de Laurent Gbagbo n’entend pas entrer au gouvernement alors que ses dirigeants ont été approchés par le pouvoir. Qu’en dites-vous ? C’est une erreur faite par le FPI. La politique se fera avec ou sans le FPI. Quel moyen de survie ils ont aujourd’hui pour tenir long. Alassane Ouattara peut faire un autre mandat. Pendant ce temps, ceux qui refusent, combien seront là pour témoigner. C’est une erreur, il faut que rapidement Akoun, Miaka arrêtent ça. En politique il n’y pas de honte. Qu’ils s’asseyent sur leur orgueil et qu’ils prennent l’argent de la Côte d’Ivoire, aller rendre visite à Laurent Gbagbo de temps en temps que de se fâcher. Vous avez été responsable au PDCI RDA, aujourd’hui vous êtes au RDR. Etes-vous favorable à un RHDP comme parti unifié ? Je l’ai dit en septembre que la mission du RHDP prenait fin avec l’élection d’Alassane Ouattara. Le RHDP été crée par trois personnes. Je crois que la mission du RHDP est terminée. Que les gens reviennent à leurs partis et qu’ils les animent. Je ne suis plus au PDCI. Je tiens aussi à vous le dire. Depuis le 28 Janvier 2012, j’ai viré au RDR. Je suis allé au RDR pour aider Monsieur Alassane Ouattara à réussir sa mission à Dimbokro. Pour apporter un sang nouveau à Dimbokro.
Réalisé par B. Taki
Réalisé par B. Taki