Issa Hayatou est dans une logique de confiscation du pouvoir à quelques mois de l`élection du président de la CAF prévue au mois de mars 2013. Hier lundi 3 septembre à Maya aux Seychelles, le Camerounais, à la tête du football africain depuis 1988, a réussi le tour de force d`amener les présidents des associations nationales à voter les modifications proposées par la Fédération algérienne de football, qui stipulent entre autres, que pour être candidat à la présidence de la CAF, il faudra « être ou avoir été membre du Comité Exécutif de la CAF ». Sur les 44 pays qui ont participé au vote à main levée, 6 seulement (Liberia, Côte d`Ivoire, Sénégal, Niger, Mali et Burundi) ont voté contre. Cette modification vise du coup Jacques Anouma, candidat déclaré contre Issa Hayatou, qui n`est que membre du Comité Exécutif de la CAF au titre de la FIFA dont il est membre du Comité Exécutif élu. La nouvelle disposition ne devrait permettre qu`aux 13 membres élus du Comité Exécutif d`être éligibles à la présidence de l`institution. Et l`on voit mal, dans ce cénacle, qui pourrait s`opposer à la candidature unique de Issa Hayatou. Déjà samedi dernier, les présidents de fédération ont administré la preuve de leur soumission servile au Camerounais en approuvant à 12 voix contre 1, la proposition algérienne. Depuis samedi, Hayatou n`avait pas d`adversaire au Comité Exécutif et pouvait donc guerroyer pour mettre sous l`éteignoir, Jacques Anouma. Seulement voilà, alors que les partisans du président de la CAF crient victoire et le considèrent déjà comme fini, Jacques Anouma ne s`avoue pas vaincu. L`ancien patron du football ivoirien veut tirer profit du flou manifeste du texte qui ne dit pas clairement que les membres du Comité Exécutif de la CAF issus du quota de la FIFA, ne sont pas éligibles. Un débat juridique s`annonce épique, qui pourrait conduire les deux parties devant le Tribunal arbitral du Sport. Jacques Anouma a 90 jours pour renverser la situation. La partie est donc loin d`être gagnée pour les pro-Hayatou. Pour vrai, Issa Hayatou a joué sur l`esprit des présidents de Fédération en affirmant avec fracas que le projet d`amendement a été dirigé contre Jacques Anouma. L`effet recherché était de désarçonner les soutiens de ce dernier par des propos sans rapport avec la lettre de la proposition. C`est pour cela qu`il s`est résolu à affirmer officiellement le vendredi dernier aux Seychelles, que l`amendement Raouaraoua, du nom de son initiateur, le président de la Fédération algérienne de football, était en réalité de son fait et visait à empêcher la candidature d`Anouma. « Ta candidature est un défi que tu me lances, je vais le relever », n`avait pas craint de dire le président de la CAF, lors du Comité Exécutif de l`institution qui s`est réuni le samedi 31 août dernier, deux jours avant l`Assemblée générale extraordinaire. Hier, Hayatou a cru devoir mettre son plan à exécution. Plusieurs constats s`imposent à la suite de cette modification. Le premier constat est que les présidents des associations nationales ont démissionné. Il fallait 14 voix pour dégager une minorité de blocage, qui aurait permis de retirer purement et simplement la proposition algérienne. Cette minorité de blocage n`a pas été possible de la part des présidents de fédération. Et pourtant, ce sont eux qui sont visés par cette modification. Tant qu`ils demeureront présidents de fédération, ils ne seront pas éligibles au poste de président de la CAF, ce qui va contre l`aboutissement normal de leur carrière. Pourquoi se mettent-ils dans une attitude masochiste alors qu`ils avaient l`occasion de démontrer que les vrais dépositaires du pouvoir à la CAF, c`est eux et non un monarque somnolent ? Ils s`exposent ainsi à l`infantilisation du passage obligatoire au Comité Exécutif, une véritable courroie de courtisanerie qui permet à Issa Hayatou de décider, au terme d`élections pipées, qui doit être membre du Comité Exécutif ou pas. Ils deviennent ainsi les obligés du ressortissant de Garoua, qui les tient par cette corde. Mais le plus grand tort que cet amendement fait au football africain, c`est qu`il dégage un président à vie, surtout prêt à mourir au pouvoir malgré une santé des plus précaires. Sous Hayatou, et avec cette modification, la CAF est devenue une institution personnelle, gérée personnellement par un individu à qui les autres doivent dévotion et adoration. Ce n`est pas de façon fortuite que la proposition est venue de la Fédération algérienne de football. Mohamed Raouaraoua, qui ne connaît que trop la volonté d`Issa Hayatou de rester ad vitam aeternam à la tête de la CAF, préfère être le dauphin qui attend son tour au sein du Comité Exécutif. Il pourra ainsi surveiller la santé du président. On ne sait jamais.
Litié BOAGNON
Litié BOAGNON