Les citoyens retourneront aux urnes l’année prochaine. Qui sera le prochain président de la République ? L’Afrique du Sud devra jouer son va-tout pour faire rentrer son poulain Marc Ravalomanana. Date-butoir : six mois avant le début du scrutin c’est-à-dire le 7 octobre !
Le 8 mai 2013 aura enfin lieu le 1er tour des élections présidentielles. Et le 3 juillet suivant, seront jumelées son 2nd tour et les élections législatives. Cette annonce a été faite par la Commission Electorale Indépendante de la Transition (CENIT) en présence de madame Fatma Samoura, le Coordonateur résident des Nations-Unies à Antananarivo, au début du mois d’août dernier. Le choix du calendrier tient compte des saisons de pluie entre novembre et mars mais surtout de l’audit et des recommandations des experts électoraux internationaux dépêchés par l’ONU. Les malgaches voulaient anticiper la date de ces élections et le plus vite serait le mieux mais c’est celui qui paie qui commande. L’organisation des scrutins coutera la bagatelle de 71 millions USD contre 320 millions pour la Côte d’Ivoire.
Depuis les soubresauts politiques de l’année 2009, ce ne sera qu’au terme de cette séquence électorale que Madagascar pourra se prévaloir d’un retour à l’ordre constitutionnel. Il signifiera également la reconnaissance internationale, la fin de la suspension des instances internationales et l’ouverture des robinets financiers des bailleurs de fonds. Oui car depuis trois ans que les sources se sont taries. Rappelons que plus de 65% du budget de fonctionnement de l’Etat émane de subventions internationales.
Le coup d’Etat de la Guinée du capitaine Moussa Dadis Camara en 2008, celui du Niger de Salou Djibo en 2010 ont depuis fort longtemps été « régularisés ». Pourquoi le peuple malgache mérite-il un tel traitement de la part de la communauté internationale pour qu’il lui faille quatre bonnes années pour régler une crise politique ? 20 millions de malgaches ont été ainsi sacrifié sur l’autel des intérêts géostratégiques des puissances étrangères : l’Afrique du Sud, 1ère puissance économique de la SADC (la communauté économique de développement régionale) ; les Etats-Unis et la France.
La société est en déliquescence : insécurité dans les zones rurales, attaques à main armée perpétrées par les voleurs de troupeau de zébus, recrudescence des cambriolages et de vols à l’arraché dans les grandes villes. La situation socioéconomique est catastrophique ! En pareille circonstance, un embargo financier sur le pays est toujours contre-productif. Il ne fait que favoriser l’émergence d’une nouvelle classe d’oligarque parmi les dirigeants de la période transitoire. La corruption et les trafics de matières premières (or, saphir, bois de rose) ont prospéré pendant que la plèbe subit les vicissitudes de la vie quotidienne.
Retour sur la pointe des pieds de l’Union Européenne
Le peu de tissu économique est parti en lambeaux. Plusieurs experts en matière de développement sont montés aux créneaux pour tirer la sonnette d’alarme afin de lever les sanctions économiques. Après des années de tergiversation, l’Union Européenne a consenti au redéploiement de son aide humanitaire c’est-à-dire dans le domaine de la santé et l’éducation, pour un montant de 54 millions USD. Le peuple malgache pourra remercier le Commissaire au développement Andris Piebalgs. Au mois d’août dernier, il a déclaré : « L'instabilité politique et la crise économique à Madagascar entraînent des conséquences dramatiques pour les populations. Avec nos nouveaux programmes, nous allons concentrer nos efforts sur la santé, l'éducation et le rôle de la société civile au bénéfice des plus démunis et permettre au pays de poser les premiers jalons d'une nouvelle dynamique de développement ». Tant que Louis Michel détenait le poste en plus de sa casquette de co-président de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE, jamais l’Union Européenne n’aurait accepté de débloquer partiellement ses subventions. L’ancien ministre belge alias « Kabilou » – du fait de son accointance avec Joseph Kabila – était aussi un grand ami de Marc Ravalomanana.
Quant à la Banque Mondiale, elle a aussi décidé d’emboîter le pas à l’UE. Elle voulait reprendre ses financements à destination de la Grande Ile. 150 millions USD ont été mis sous l’éteignoir depuis l’accession au pouvoir de Andry Rajoelina (TGV) en 2009. Mais le veto des Etats-Unis au sein de cette institution est passé par là. Les américains ne souhaitent pas collaborer directement ni reconnaître un gouvernement illégitime et inconstitutionnel.
Les limites de la médiation de la SADC
Dans la crise malgache, l’Afrique du Sud, via la SADC, s’est arrogé le monopole de la médiation de la crise malgache. Et lorsque madame Nkosazana Dlamini-Zuma a été élue présidente de la Commission de l’UA au dernier sommet d’Addis-Abeba le 15 juillet dernier, tous les leviers étaient entre les mains de la première puissance économique du continent pour faire fléchir les deux principaux protagonistes : Marc Ravalomanana et Andry Rajaolina.
Dès le 17 août un ultimatum a été lancé à l’actuel Président de la Transition et son prédécesseur pour parvenir à un accord avant le 31 juillet ! Faute de quoi celui qui sera jugé être un facteur de blocage subira la foudre de la SADC. Une rencontre fut aussitôt organisée le 25 juillet sur une île isolée parmi les dizaines que compte l’archipel des Seychelles. Elle a été placée sous l’égide de leur hôte le président seychellois James Michel et son homologue Jacob Zuma. Une nuit de discussion et la promesse de se revoir mais après la date butoir. Donc pas d’accord et pas de sanction non plus !
Quels sont les facteurs de blocage ? Le retour du l’ancien chef de l’Etat de son exil sud-africain et sa candidature pour les futures élections.
Il a été condamné par contumace sur quelques abus de biens sociaux dont l’achat d’un Boeing 737 de 60 millions USD et jugé responsable de la mort d’une trentaine de manifestants devant la grille de son palais en 2009.
Le 9 août, un second face-à-face a eu lieu, toujours aux Seychelles mais cette fois-ci à Mahé. Les médiateurs ont changé de mode opératoire : que chacun écrive ses propositions et ils se chargeront de faire la navette entre les intéressés avant la signature d’un accord. L’échange a été bref, moins de 20 mn mais les deux protagonistes se sont campés sur leur position.
Deux jours après, l’Afrique du Sud dépêche son vice-ministre des Affaires Etrangères Marius Fransman à Antananarivo pour une recherche de solution « malgacho-malgache » et qui devra être présentée au prochain Sommet des chefs d’Etat de la SADC censée se tenir à Maputo le 17 août. Outre la consultation de partis politiques, l’émissaire de Jacob Zuma s’est surtout entretenu avec les chefs militaires qui jugent que le retour anticipé de Marc Ravalomanana est un facteur d’instabilité pour le pays.
Andry Rajaoelina et les trois généraux furent ainsi « invités » à Maputo pour plancher devant les chefs d’Etat. Mais toute affaire cessante, le président Jacob Zuma a dû précipitamment rentrer pour faire face au drame des mineurs de Marikana.
Le communiqué final du Sommet de la SADC était à l’avenant et comme à chaque fois depuis 3 ans ; il est resté très vague: « intensifier le dialogue avec les principaux partis malgaches afin de (…) prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre entièrement et urgemment la feuille de route ».
Pour les résolutions, la SADC va envoyer des officiers pour une mission d’évaluation de deux mois. Au terme duquel, ils jugeront de concert avec les militaires malgaches des conditions du retour au bercail de Marc Ravalomanana.
Qui va se présenter aux présidentielles ou le « ni-ni » ?
Et si les deux protagonistes ne peuvent pas se présenter aux élections présidentielles ? Elle fait écho aux déclarations de la mission d’experts aux élections des Nations-Unies du mois d’avril. Elle fût ensuite reprise par le Secrétaire Général de la Commission de l’Océan Indien (COI) et ex-ministre des Affaires Etrangères de l’île Maurice Jean-Claude de l’Estrac. Et maintenant, Cette suggestion fait son chemin parmi l’équipe de médiation. Le ministre seychellois des Affaires Etrangères Jean-Paul Adam ainsi que la troïka de la SADC l’ont ouvertement évoqué.
Sur ce point, TGV a fait un pas en avant : « j’accepte de ne pas me présenter à condition que Marc Ravalomanana ne sème plus le trouble et ne revienne au pays qu’après les élections ». Mais l’ex-chef d’Etat ne l’entend pas de cette oreille et a rejeté cette proposition. Et pourtant le rapport de force n’est pas en sa faveur. Mais l’homme n’a pas froid aux yeux maintient ses ambitions : d’abord, exiger une amnistie alors même qu’une nouvelle enquête a été ouverte pour crimes de guerre présumés contre lui auprès de la justice sud-africaine ; ensuite, il veut absolument se représenter aux présidentielles. De surcroît, le temps joue contre lui. Passé la date du 7 octobre, il sera de facto exclu de la course à la magistrature suprême car la loi électorale stipule qu’un candidat doit résider au moins 6 mois avant la date des scrutins.
Ses supporters ne désespèrent pas de voir leur poulain rentré d’exil. Marc Ravalomanana vient d’être réélu vice-président de la Fédération des Eglises Chrétiennes de Madagascar (FFKM). Au cours de leur conclave annuel, les pasteurs ont choisi de le reconduire malgré une longue absence. Est-ce encore une affaire de gros sous ? L’ancien président de la République s’est déjà servi entre autres de son influence au sein des fédérations chrétiennes pour son accession au pouvoir en 2002. Quant on sait le poids de l’église (5 millions de chrétiens donc au bas mot 2 millions de voix potentiels dans une élection nationale) et l’ingérence de celle-ci dans les affaires politiques depuis 40 ans, cette victoire pourrait lui servir de tremplin pour justifier son retour.
La malédiction du pétrole
L’agence américaine de recherche minière et géologique, l’US Geological Survey a remis en avril dernier au président Barack Obama l’état d’évaluation des réserves de pétrole et de gaz du Canal de Mozambique. Il englobe géographiquement les côtes mozambicaine, tanzanienne – rive gauche – et la côte ouest malgache et les Seychelles – rive droite. En termes de gaz, ses gisements off-shore équivaudraient au potentiel de la mer du Nord et en matière de pétrole, il serait aussi prometteur que le golfe de Guinée !
Rien que sur la partie malgache, selon toujours l’US Geological Survey, les réserves sont estimées à 17 milliards de barils de pétrole et 167.000 milliards de pieds cubes de gaz c’est-à-dire tout simplement le niveau de l’Angola.
La grille de lecture géostratégique « colle » parfaitement avec l’évolution de la crise politique malgache depuis au moins 7 ans. Il s’agit d’une lutte entre les grandes puissances pour leurs intérêts vitaux en matière d’approvisionnement en énergie.
Lorsque qu’en juillet 2005, le président Chirac a fait une brève escale à Madagascar avant de passer ses vacances à l’île Maurice ce n’est pas uniquement pour faire acte de repentance sur le mouvement insurrectionnel de 1947 réprimé dans le sang (80.000 morts au moins). Il a ainsi tourné une page noire de la colonisation mais avait aussi souhaité que la France soit désormais traitée « d’égal à égal comme tous les partenaires économiques de Madagascar ». Et quand Nicolas Sarkozy demande à son amie, la chancelière Angela Merkel de lui arranger une audience expresse avec le président Marc Ravalomanana de passage en Allemagne, en 2008 ? Motif de l’entretien : la tenue du Sommet de la Francophonie à Antananarivo en 2010.
Ses deux chefs d’Etat étaient des VRP de la compagnie Total qui semble avoir perdu beaucoup de terrain face à ces concurrents (EXXON, Shell, BP…). Et que Total avait « une nécessité urgente de rattraper son retard sur l’offshore de l’Afrique de l’Est ».
De même que Juan de Nova, une petite île à moins de 200 miles nautiques de la côte Ouest de Madagascar n’a jamais été restituée par la France depuis l’indépendance de la Grande Ile en 1960. Elle détient même le statut de Zone d’Exclusivité Economique (ZEE) qui autorise le pays à contrôler les ressources de cet espace.
La France joue ainsi sa partition en sourdine. Elle préfère aujourd’hui soutenir discrètement Andry Rajoelina plus francophile. Alors que l’Afrique du Sud et les américains en coulisses manœuvrent pour que leur poulain Marc Ravalomanana, anglophile et businessman, puissent revenir au pouvoir.
Alex ZAKA
Le 8 mai 2013 aura enfin lieu le 1er tour des élections présidentielles. Et le 3 juillet suivant, seront jumelées son 2nd tour et les élections législatives. Cette annonce a été faite par la Commission Electorale Indépendante de la Transition (CENIT) en présence de madame Fatma Samoura, le Coordonateur résident des Nations-Unies à Antananarivo, au début du mois d’août dernier. Le choix du calendrier tient compte des saisons de pluie entre novembre et mars mais surtout de l’audit et des recommandations des experts électoraux internationaux dépêchés par l’ONU. Les malgaches voulaient anticiper la date de ces élections et le plus vite serait le mieux mais c’est celui qui paie qui commande. L’organisation des scrutins coutera la bagatelle de 71 millions USD contre 320 millions pour la Côte d’Ivoire.
Depuis les soubresauts politiques de l’année 2009, ce ne sera qu’au terme de cette séquence électorale que Madagascar pourra se prévaloir d’un retour à l’ordre constitutionnel. Il signifiera également la reconnaissance internationale, la fin de la suspension des instances internationales et l’ouverture des robinets financiers des bailleurs de fonds. Oui car depuis trois ans que les sources se sont taries. Rappelons que plus de 65% du budget de fonctionnement de l’Etat émane de subventions internationales.
Le coup d’Etat de la Guinée du capitaine Moussa Dadis Camara en 2008, celui du Niger de Salou Djibo en 2010 ont depuis fort longtemps été « régularisés ». Pourquoi le peuple malgache mérite-il un tel traitement de la part de la communauté internationale pour qu’il lui faille quatre bonnes années pour régler une crise politique ? 20 millions de malgaches ont été ainsi sacrifié sur l’autel des intérêts géostratégiques des puissances étrangères : l’Afrique du Sud, 1ère puissance économique de la SADC (la communauté économique de développement régionale) ; les Etats-Unis et la France.
La société est en déliquescence : insécurité dans les zones rurales, attaques à main armée perpétrées par les voleurs de troupeau de zébus, recrudescence des cambriolages et de vols à l’arraché dans les grandes villes. La situation socioéconomique est catastrophique ! En pareille circonstance, un embargo financier sur le pays est toujours contre-productif. Il ne fait que favoriser l’émergence d’une nouvelle classe d’oligarque parmi les dirigeants de la période transitoire. La corruption et les trafics de matières premières (or, saphir, bois de rose) ont prospéré pendant que la plèbe subit les vicissitudes de la vie quotidienne.
Retour sur la pointe des pieds de l’Union Européenne
Le peu de tissu économique est parti en lambeaux. Plusieurs experts en matière de développement sont montés aux créneaux pour tirer la sonnette d’alarme afin de lever les sanctions économiques. Après des années de tergiversation, l’Union Européenne a consenti au redéploiement de son aide humanitaire c’est-à-dire dans le domaine de la santé et l’éducation, pour un montant de 54 millions USD. Le peuple malgache pourra remercier le Commissaire au développement Andris Piebalgs. Au mois d’août dernier, il a déclaré : « L'instabilité politique et la crise économique à Madagascar entraînent des conséquences dramatiques pour les populations. Avec nos nouveaux programmes, nous allons concentrer nos efforts sur la santé, l'éducation et le rôle de la société civile au bénéfice des plus démunis et permettre au pays de poser les premiers jalons d'une nouvelle dynamique de développement ». Tant que Louis Michel détenait le poste en plus de sa casquette de co-président de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE, jamais l’Union Européenne n’aurait accepté de débloquer partiellement ses subventions. L’ancien ministre belge alias « Kabilou » – du fait de son accointance avec Joseph Kabila – était aussi un grand ami de Marc Ravalomanana.
Quant à la Banque Mondiale, elle a aussi décidé d’emboîter le pas à l’UE. Elle voulait reprendre ses financements à destination de la Grande Ile. 150 millions USD ont été mis sous l’éteignoir depuis l’accession au pouvoir de Andry Rajoelina (TGV) en 2009. Mais le veto des Etats-Unis au sein de cette institution est passé par là. Les américains ne souhaitent pas collaborer directement ni reconnaître un gouvernement illégitime et inconstitutionnel.
Les limites de la médiation de la SADC
Dans la crise malgache, l’Afrique du Sud, via la SADC, s’est arrogé le monopole de la médiation de la crise malgache. Et lorsque madame Nkosazana Dlamini-Zuma a été élue présidente de la Commission de l’UA au dernier sommet d’Addis-Abeba le 15 juillet dernier, tous les leviers étaient entre les mains de la première puissance économique du continent pour faire fléchir les deux principaux protagonistes : Marc Ravalomanana et Andry Rajaolina.
Dès le 17 août un ultimatum a été lancé à l’actuel Président de la Transition et son prédécesseur pour parvenir à un accord avant le 31 juillet ! Faute de quoi celui qui sera jugé être un facteur de blocage subira la foudre de la SADC. Une rencontre fut aussitôt organisée le 25 juillet sur une île isolée parmi les dizaines que compte l’archipel des Seychelles. Elle a été placée sous l’égide de leur hôte le président seychellois James Michel et son homologue Jacob Zuma. Une nuit de discussion et la promesse de se revoir mais après la date butoir. Donc pas d’accord et pas de sanction non plus !
Quels sont les facteurs de blocage ? Le retour du l’ancien chef de l’Etat de son exil sud-africain et sa candidature pour les futures élections.
Il a été condamné par contumace sur quelques abus de biens sociaux dont l’achat d’un Boeing 737 de 60 millions USD et jugé responsable de la mort d’une trentaine de manifestants devant la grille de son palais en 2009.
Le 9 août, un second face-à-face a eu lieu, toujours aux Seychelles mais cette fois-ci à Mahé. Les médiateurs ont changé de mode opératoire : que chacun écrive ses propositions et ils se chargeront de faire la navette entre les intéressés avant la signature d’un accord. L’échange a été bref, moins de 20 mn mais les deux protagonistes se sont campés sur leur position.
Deux jours après, l’Afrique du Sud dépêche son vice-ministre des Affaires Etrangères Marius Fransman à Antananarivo pour une recherche de solution « malgacho-malgache » et qui devra être présentée au prochain Sommet des chefs d’Etat de la SADC censée se tenir à Maputo le 17 août. Outre la consultation de partis politiques, l’émissaire de Jacob Zuma s’est surtout entretenu avec les chefs militaires qui jugent que le retour anticipé de Marc Ravalomanana est un facteur d’instabilité pour le pays.
Andry Rajaoelina et les trois généraux furent ainsi « invités » à Maputo pour plancher devant les chefs d’Etat. Mais toute affaire cessante, le président Jacob Zuma a dû précipitamment rentrer pour faire face au drame des mineurs de Marikana.
Le communiqué final du Sommet de la SADC était à l’avenant et comme à chaque fois depuis 3 ans ; il est resté très vague: « intensifier le dialogue avec les principaux partis malgaches afin de (…) prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre entièrement et urgemment la feuille de route ».
Pour les résolutions, la SADC va envoyer des officiers pour une mission d’évaluation de deux mois. Au terme duquel, ils jugeront de concert avec les militaires malgaches des conditions du retour au bercail de Marc Ravalomanana.
Qui va se présenter aux présidentielles ou le « ni-ni » ?
Et si les deux protagonistes ne peuvent pas se présenter aux élections présidentielles ? Elle fait écho aux déclarations de la mission d’experts aux élections des Nations-Unies du mois d’avril. Elle fût ensuite reprise par le Secrétaire Général de la Commission de l’Océan Indien (COI) et ex-ministre des Affaires Etrangères de l’île Maurice Jean-Claude de l’Estrac. Et maintenant, Cette suggestion fait son chemin parmi l’équipe de médiation. Le ministre seychellois des Affaires Etrangères Jean-Paul Adam ainsi que la troïka de la SADC l’ont ouvertement évoqué.
Sur ce point, TGV a fait un pas en avant : « j’accepte de ne pas me présenter à condition que Marc Ravalomanana ne sème plus le trouble et ne revienne au pays qu’après les élections ». Mais l’ex-chef d’Etat ne l’entend pas de cette oreille et a rejeté cette proposition. Et pourtant le rapport de force n’est pas en sa faveur. Mais l’homme n’a pas froid aux yeux maintient ses ambitions : d’abord, exiger une amnistie alors même qu’une nouvelle enquête a été ouverte pour crimes de guerre présumés contre lui auprès de la justice sud-africaine ; ensuite, il veut absolument se représenter aux présidentielles. De surcroît, le temps joue contre lui. Passé la date du 7 octobre, il sera de facto exclu de la course à la magistrature suprême car la loi électorale stipule qu’un candidat doit résider au moins 6 mois avant la date des scrutins.
Ses supporters ne désespèrent pas de voir leur poulain rentré d’exil. Marc Ravalomanana vient d’être réélu vice-président de la Fédération des Eglises Chrétiennes de Madagascar (FFKM). Au cours de leur conclave annuel, les pasteurs ont choisi de le reconduire malgré une longue absence. Est-ce encore une affaire de gros sous ? L’ancien président de la République s’est déjà servi entre autres de son influence au sein des fédérations chrétiennes pour son accession au pouvoir en 2002. Quant on sait le poids de l’église (5 millions de chrétiens donc au bas mot 2 millions de voix potentiels dans une élection nationale) et l’ingérence de celle-ci dans les affaires politiques depuis 40 ans, cette victoire pourrait lui servir de tremplin pour justifier son retour.
La malédiction du pétrole
L’agence américaine de recherche minière et géologique, l’US Geological Survey a remis en avril dernier au président Barack Obama l’état d’évaluation des réserves de pétrole et de gaz du Canal de Mozambique. Il englobe géographiquement les côtes mozambicaine, tanzanienne – rive gauche – et la côte ouest malgache et les Seychelles – rive droite. En termes de gaz, ses gisements off-shore équivaudraient au potentiel de la mer du Nord et en matière de pétrole, il serait aussi prometteur que le golfe de Guinée !
Rien que sur la partie malgache, selon toujours l’US Geological Survey, les réserves sont estimées à 17 milliards de barils de pétrole et 167.000 milliards de pieds cubes de gaz c’est-à-dire tout simplement le niveau de l’Angola.
La grille de lecture géostratégique « colle » parfaitement avec l’évolution de la crise politique malgache depuis au moins 7 ans. Il s’agit d’une lutte entre les grandes puissances pour leurs intérêts vitaux en matière d’approvisionnement en énergie.
Lorsque qu’en juillet 2005, le président Chirac a fait une brève escale à Madagascar avant de passer ses vacances à l’île Maurice ce n’est pas uniquement pour faire acte de repentance sur le mouvement insurrectionnel de 1947 réprimé dans le sang (80.000 morts au moins). Il a ainsi tourné une page noire de la colonisation mais avait aussi souhaité que la France soit désormais traitée « d’égal à égal comme tous les partenaires économiques de Madagascar ». Et quand Nicolas Sarkozy demande à son amie, la chancelière Angela Merkel de lui arranger une audience expresse avec le président Marc Ravalomanana de passage en Allemagne, en 2008 ? Motif de l’entretien : la tenue du Sommet de la Francophonie à Antananarivo en 2010.
Ses deux chefs d’Etat étaient des VRP de la compagnie Total qui semble avoir perdu beaucoup de terrain face à ces concurrents (EXXON, Shell, BP…). Et que Total avait « une nécessité urgente de rattraper son retard sur l’offshore de l’Afrique de l’Est ».
De même que Juan de Nova, une petite île à moins de 200 miles nautiques de la côte Ouest de Madagascar n’a jamais été restituée par la France depuis l’indépendance de la Grande Ile en 1960. Elle détient même le statut de Zone d’Exclusivité Economique (ZEE) qui autorise le pays à contrôler les ressources de cet espace.
La France joue ainsi sa partition en sourdine. Elle préfère aujourd’hui soutenir discrètement Andry Rajoelina plus francophile. Alors que l’Afrique du Sud et les américains en coulisses manœuvrent pour que leur poulain Marc Ravalomanana, anglophile et businessman, puissent revenir au pouvoir.
Alex ZAKA