Les populations des régions du Guémon et du Cavally sont attendues lundi chez le président de la République. Avant cette rencontre prévue à la salle des pas perdus du Palais, le député de Guiglo clarifie ce qui pourrait être des appréhensions pour une certaine opinion.
Le 22 octobre, les populations Wê des régions du Guémon et du Cavally seront reçues par le chef de l’Etat. Que de communications, de rencontres quand on sait qu’elles avaient parlé avec lui en avril. Pourquoi un tel engouement ?
Le président de la République Alassane Ouattara a fait l’honneur à l’Ouest en lui accordant sa première visite d’Etat juste après son élection. Cette visite était une visite à un peuple martyr pour avoir beaucoup souffert de la crise. A cette occasion, nos parents l’ont reçu dans la ferveur et démontré qu’un chef reste un chef. Et qu’Alassane Ouattara est le président de tous les Ivoiriens. Après cette rencontre, des doléances ont été faites dont la plus importante est d’ordre sécuritaire. Il faut préciser que c’est le président lui-même qui a invité le peuple du Guémon et du Cavally à échanger.
Vous savez les raisons de cette invitation ?
Certainement que c’est pour faire le bilan de la visite d’Etat qu’il a effectuée à l’Ouest (fin avril, ndlr). Cette démarche nous honore, mais qui sommes nous pour que le président commence toujours par notre peuple chaque fois qu’il doit poser un acte symbolique ? Vous savez, entre la visite d’Etat et cette invitation, beaucoup d’eau a coulé sous le pont. Les attaques de Taï, de Toulepleu, la sécurité à l’Ouest, les problèmes fonciers, la création de la brigade de sécurisation du Mont Péko, le phénomène des dozos, celui des mercenaires burkinabè, les mercenaires libériens, les miliciens encore armés… En un mot, le peuple Wê souffre.
Quel bilan feriez-vous des projets présidentiels initiés dans les régions du Guémon et du Cavally ?
Avec le Programme présidentiel d’urgence, beaucoup d’actions ont été faites notamment au plan humanitaire et de construction d’infrastructures. Ce qui permet à l’Ouest d’avancer. Aujourd’hui, notre région est en chantier. Sans oublier le projet du chemin de fer devant relier Man à San-Pedro. Tous ces projets ne sont que le développement qui vient à nous. Mais le développement ne peut se faire que si les populations vivent en paix. Devant la volonté du président de la République d’aller à la paix, d’amener les populations de l’Ouest au développement, il y a une réalité qui est que tout le monde utilise cette zone au point où elle est devenue un champ de bataille. Je dirais même que l’Ouest est devenue la ‘’Palestine de Côte d’Ivoire‘’, un territoire occupé où tout le monde se retrouve pour en faire le point faible du pays. Nous, cadres de l’Ouest, sommes gênés de savoir que notre région est le talon d’Achille de la Côte d’Ivoire. Le président nous invite certainement à en tirer les conséquences et à dire ensemble : voilà ce qu’il y a lieu de faire. Parce qu’au-delà de la situation, la question des refugiés concerne aussi notre région. Car, la plupart des refugiés sont des cadres de l’Ouest. Le président est conscient de cette situation.
Que savez-vous du mode de déroulement de cette audience ?
Selon les consignes qui nous ont été données, l’audience sera une rencontre sans tabou. Tous les sujets peuvent et/ou doivent être abordés. Parce qu’en réalité, si nous n’arrivons pas à retracer réellement les situations de l’Ouest au-delà de l’aspect développement, des avancées que nous avons eues avec les projets et les récriminations de nos parents, nous n’aurons pas aidé le président de la République.
Voudriez-vous résumer ces récriminations ?
D’abord, je tiens à dire que l’Ouest ne grogne pas contre le président. Il y a de la grogne parce que les populations souffrent. La sécurité de la population doit être, par exemple, assurée par l’armée républicaine. A l’Ouest, nous ne voulons plus de miliciens, de mercenaires libériens, de mercenaires burkinabè, et de dozos. Si aujourd’hui on dit qu’aucun civil ne doit détenir une arme, cela doit être valable pour Oulaï, Cissé, Ouédraogo, etc. Les populations se disent spoliées de leurs forêts. On dit même que les populations de l’Ouest vendent leurs terres. Mais quand elles sont confrontées à des situations où dans la brousse des gens en armes occupent leurs forêts, que sont-elles obligées de faire ? A un certain moment, elles sont obligées de brader ces terres pour avoir à manger.
La réconciliation est-elle possible dans ces conditions ?
Le pardon est un pouvoir. C’est celui qui est au pouvoir qui tend la main. On ne doit jamais être fatigué de tendre la main. Et en cela, le président a fait tous les efforts pour que nos frères exilés puissent rentrer. Mais il n’est pas inutile qu’il fasse encore davantage d’efforts. Ce ne sont pas tous les exilés qui veulent faire un coup d’Etat. Ce ne sont pas tous qui en veulent au président. Ils veulent que la République leur pardonne. D’autres parmi eux sont rentrés et veulent bien participer à la réconciliation nationale. Maintenant, si le président tend la main et que parmi les exilés, il y a des va-t-en-guerre, on ne peut faire le bonheur de quelqu’un contre son gré. Le peuple Wê a été fidèle aux présidents Houphouet, Bédié, Gbagbo et il est prêt à être fidèle au président Alassane Ouattara. A preuve, le président a été reçu dans la plus grande ferveur du terroir wê. C’est dire que le peuple Wê adhère à la politique de réconciliation que prône le chef de l’Etat. Alors il faut qu’on évite de stigmatiser les cadres de l’Ouest.
Soyez plus précis…
Il ne faut pas qu’on dise comme vous êtes de l’Ouest, alors vous êtes prêts à aller dormir à La Haye. Ou encore, vous incarnez Gbagbo ou rien. Non, nous sommes des cadres de l’Ouest et tout comme nos parents, nous sommes dans la République. Qu’on n’identifie plus un jeune de notre région comme étant un milicien. Aussi qu’un problème aussi crucial que celui du foncier rural puisse trouver solution.
Quel message aimeriez-vous adresser à vos parents avant cette rencontre avec le chef de l’Etat ?
Il est vrai que le président fait l’honneur à notre peuple de l’inviter ou de le recevoir en premier mais derrière cet honneur, il faut se poser des questions. C’est par exemple, quelle est notre contribution à la démarche du président ? Qu’est-ce que nous apportons ? Et c’est pour cela que nous avons besoin d’être unis sur des valeurs constructives qui vont apporter le développement. Ces valeurs-là vont nous éviter de souffrir. Elles doivent nous permettre d’accepter le pardon de l’autre et de savoir pardonner. Ces valeurs sont tellement importantes que nous devons savoir que les armes ne peuvent pas déboulonner la Côte d’Ivoire. A mes frères, je voudrais dire qu’on est tous obligés d’être derrière le président Alassane Ouattara, on n’est pas tous obligés de partager la même idéologie politique. Mais nous sommes obligés d’avoir la même vision du développement. Et sans paix, il ne peut y avoir de développement.
Entretien réalisé par Bidi Ignace
Le 22 octobre, les populations Wê des régions du Guémon et du Cavally seront reçues par le chef de l’Etat. Que de communications, de rencontres quand on sait qu’elles avaient parlé avec lui en avril. Pourquoi un tel engouement ?
Le président de la République Alassane Ouattara a fait l’honneur à l’Ouest en lui accordant sa première visite d’Etat juste après son élection. Cette visite était une visite à un peuple martyr pour avoir beaucoup souffert de la crise. A cette occasion, nos parents l’ont reçu dans la ferveur et démontré qu’un chef reste un chef. Et qu’Alassane Ouattara est le président de tous les Ivoiriens. Après cette rencontre, des doléances ont été faites dont la plus importante est d’ordre sécuritaire. Il faut préciser que c’est le président lui-même qui a invité le peuple du Guémon et du Cavally à échanger.
Vous savez les raisons de cette invitation ?
Certainement que c’est pour faire le bilan de la visite d’Etat qu’il a effectuée à l’Ouest (fin avril, ndlr). Cette démarche nous honore, mais qui sommes nous pour que le président commence toujours par notre peuple chaque fois qu’il doit poser un acte symbolique ? Vous savez, entre la visite d’Etat et cette invitation, beaucoup d’eau a coulé sous le pont. Les attaques de Taï, de Toulepleu, la sécurité à l’Ouest, les problèmes fonciers, la création de la brigade de sécurisation du Mont Péko, le phénomène des dozos, celui des mercenaires burkinabè, les mercenaires libériens, les miliciens encore armés… En un mot, le peuple Wê souffre.
Quel bilan feriez-vous des projets présidentiels initiés dans les régions du Guémon et du Cavally ?
Avec le Programme présidentiel d’urgence, beaucoup d’actions ont été faites notamment au plan humanitaire et de construction d’infrastructures. Ce qui permet à l’Ouest d’avancer. Aujourd’hui, notre région est en chantier. Sans oublier le projet du chemin de fer devant relier Man à San-Pedro. Tous ces projets ne sont que le développement qui vient à nous. Mais le développement ne peut se faire que si les populations vivent en paix. Devant la volonté du président de la République d’aller à la paix, d’amener les populations de l’Ouest au développement, il y a une réalité qui est que tout le monde utilise cette zone au point où elle est devenue un champ de bataille. Je dirais même que l’Ouest est devenue la ‘’Palestine de Côte d’Ivoire‘’, un territoire occupé où tout le monde se retrouve pour en faire le point faible du pays. Nous, cadres de l’Ouest, sommes gênés de savoir que notre région est le talon d’Achille de la Côte d’Ivoire. Le président nous invite certainement à en tirer les conséquences et à dire ensemble : voilà ce qu’il y a lieu de faire. Parce qu’au-delà de la situation, la question des refugiés concerne aussi notre région. Car, la plupart des refugiés sont des cadres de l’Ouest. Le président est conscient de cette situation.
Que savez-vous du mode de déroulement de cette audience ?
Selon les consignes qui nous ont été données, l’audience sera une rencontre sans tabou. Tous les sujets peuvent et/ou doivent être abordés. Parce qu’en réalité, si nous n’arrivons pas à retracer réellement les situations de l’Ouest au-delà de l’aspect développement, des avancées que nous avons eues avec les projets et les récriminations de nos parents, nous n’aurons pas aidé le président de la République.
Voudriez-vous résumer ces récriminations ?
D’abord, je tiens à dire que l’Ouest ne grogne pas contre le président. Il y a de la grogne parce que les populations souffrent. La sécurité de la population doit être, par exemple, assurée par l’armée républicaine. A l’Ouest, nous ne voulons plus de miliciens, de mercenaires libériens, de mercenaires burkinabè, et de dozos. Si aujourd’hui on dit qu’aucun civil ne doit détenir une arme, cela doit être valable pour Oulaï, Cissé, Ouédraogo, etc. Les populations se disent spoliées de leurs forêts. On dit même que les populations de l’Ouest vendent leurs terres. Mais quand elles sont confrontées à des situations où dans la brousse des gens en armes occupent leurs forêts, que sont-elles obligées de faire ? A un certain moment, elles sont obligées de brader ces terres pour avoir à manger.
La réconciliation est-elle possible dans ces conditions ?
Le pardon est un pouvoir. C’est celui qui est au pouvoir qui tend la main. On ne doit jamais être fatigué de tendre la main. Et en cela, le président a fait tous les efforts pour que nos frères exilés puissent rentrer. Mais il n’est pas inutile qu’il fasse encore davantage d’efforts. Ce ne sont pas tous les exilés qui veulent faire un coup d’Etat. Ce ne sont pas tous qui en veulent au président. Ils veulent que la République leur pardonne. D’autres parmi eux sont rentrés et veulent bien participer à la réconciliation nationale. Maintenant, si le président tend la main et que parmi les exilés, il y a des va-t-en-guerre, on ne peut faire le bonheur de quelqu’un contre son gré. Le peuple Wê a été fidèle aux présidents Houphouet, Bédié, Gbagbo et il est prêt à être fidèle au président Alassane Ouattara. A preuve, le président a été reçu dans la plus grande ferveur du terroir wê. C’est dire que le peuple Wê adhère à la politique de réconciliation que prône le chef de l’Etat. Alors il faut qu’on évite de stigmatiser les cadres de l’Ouest.
Soyez plus précis…
Il ne faut pas qu’on dise comme vous êtes de l’Ouest, alors vous êtes prêts à aller dormir à La Haye. Ou encore, vous incarnez Gbagbo ou rien. Non, nous sommes des cadres de l’Ouest et tout comme nos parents, nous sommes dans la République. Qu’on n’identifie plus un jeune de notre région comme étant un milicien. Aussi qu’un problème aussi crucial que celui du foncier rural puisse trouver solution.
Quel message aimeriez-vous adresser à vos parents avant cette rencontre avec le chef de l’Etat ?
Il est vrai que le président fait l’honneur à notre peuple de l’inviter ou de le recevoir en premier mais derrière cet honneur, il faut se poser des questions. C’est par exemple, quelle est notre contribution à la démarche du président ? Qu’est-ce que nous apportons ? Et c’est pour cela que nous avons besoin d’être unis sur des valeurs constructives qui vont apporter le développement. Ces valeurs-là vont nous éviter de souffrir. Elles doivent nous permettre d’accepter le pardon de l’autre et de savoir pardonner. Ces valeurs sont tellement importantes que nous devons savoir que les armes ne peuvent pas déboulonner la Côte d’Ivoire. A mes frères, je voudrais dire qu’on est tous obligés d’être derrière le président Alassane Ouattara, on n’est pas tous obligés de partager la même idéologie politique. Mais nous sommes obligés d’avoir la même vision du développement. Et sans paix, il ne peut y avoir de développement.
Entretien réalisé par Bidi Ignace