Alassane Ouattara dissout son gouvernement le mercredi 14 novembre 2012. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le Premier ministre et son équipe n’ont pas vu venir le danger. En tous cas, pas le Pdci qui croyait toujours à une coalition solide et prometteuse au sein du Rhdp. Ahoussou Jeannot n’ayant été averti qu’aux environs d’1 heure du matin, dans la nuit du mardi au mercredi. Que non. Derrière les vitres du Palais présidentiel et de la Rue Lepic, quelque chose se préparait et les dés déjà pipés pour Henri Konan Bédié. Et dans une moindre mesure, Albert Mabri Toikeusse de l’Udpci. Ces formations politiques membres du Rhdp apprennent à leur grande surprise que leur attitude durant le vote du projet de loi sur le mariage en commission est un crime. Arguant l’absence de solidarité au sein de la Majorité Rhdp, Alassane Ouattara a mis fin au gouvernement Ahoussou mis en place il y a huit mois. En effet, formé le 13 mars, le précédent gouvernement dirigé par Jeannot Kouadio Ahoussou, en vertu d'un accord attribuant le poste de Premier ministre au Pdci, n’avait jamais donné lieu à de telles dissensions. Aujourd’hui, la guerre larvée entre les têtes de pont de la coalition est apparue au grand jour. D’abord avec un communiqué signé du secrétariat du Pdci qui n’a pas manqué d’indexer le pouvoir sur la situation sécuritaire en Côte d’ivoire, notamment la détention d’armes par des personnes non autorisées, dont les dozos. A l’entame du mois d’août 2012, une vague d’attaques d’un commando mystérieux portent un coup à l’armée de Ouattara. Les positions des Frci sont attaquées par des individus non identifiés qui font des pertes en vies humaines et des disparations d’armes, de munitions. Le camp Ouattara accuse aussitôt le camp Gbagbo d’être l’instigateur de cette violence. Non sans lorgner le Pdci. Ouattara reproche à Ahoussou-Kouadio, Premier ministre, son inertie face au Fpi. Une déclaration au lendemain des attaques du mois d’août est censurée sur la Rti1. Débute alors une crise de confiance entre les deux principaux alliés du Rhdp qui se regardent désormais en chiens de faïence. Les Ivoiriens attendaient qui serait, comme dans un film western, le premier à tirer, à ouvrir le feu. Pour que les conséquences soient tirées. De méfiance en défiance, les dés sont finalement jetés, le mardi 13 novembre 2012, quand le vote du projet de loi sur le mariage s’invite dans la guéguerre. Pour avoir souhaité, sans succès, la compréhension de tous sur la nécessité d’amender ce projet de loi, le Pdci subit le courroux du Rdr, piloté par Amadou Soumahoro. «Nous allons tout faire pour que cette loi passe et elle passera», laissaient entendre dans le hall de l’hémicycle, des députés Rdr. A la pause déjeuner, qui a failli tourner à l’affrontement entre les deux camps. «En réalité voter en l’état ce projet de loi poserait plus de problème à la société ivoirienne qu’il n’en résoudrait. Dans une société organisée, il y a toujours un chef», ont pour leur part prévenu les députés Pdci, membres de la commission. Autant d’arguments qui ont fini à la grande surprise de faire passer la loi au forceps, pour satisfaire la volonté du maître. Alassane Ouattara aurait décidé ainsi. La suite est là. Non content de ce que le Pdci et l’Udpci, aient voté contre, Ouattara, sur conseil de son parti et d’Amadou Soumahoro, met fin aux activités du gouvernement. Un tour de force pour rien en fait. Puisque le mobile évoqué par Gon Coulibaly ne tient pas la route. En quoi un vote de loi en commission qui n’est pas encore passée en plénière devrait-il conduire à la dissolution d’un gouvernement ? En quoi cette loi sur le mariage, si elle est rejetée en plénière, empêcherait-elle Ouattara de tenir ses promesses de campagnes ? "Cela pose donc un problème au niveau de la solidarité à l'intérieur de l'alliance et du soutien de l'alliance" au gouvernement, a souligné M. Coulibaly. Absolument, l’argument de la dissension au sein de la Majorité semble être le prétexte tout trouvé pour Ouattara de se débarrasser d’Ahoussou Jeannot. Et surtout de régler des comptes au Pdci. Qui paie aujourd’hui de sa naïveté politique. Après s’être allié au Rdr pour faire chuter le président Gbagbo du pouvoir. 15 novembre 2010-15 novembre 2012. Deux ans après, le «pacte de Yamoussoukro» vole en éclats. Et l’Histoire donne raison à Gbagbo qui disait que Ouattara est «le candidat de l’Etranger». En clair, il ne fera que copier et coller ce que désire l’Occident. Sans tenir compte des conséquences. La dissolution du gouvernement par Ouattara le mercredi 14 novembre relève à coup sûr du dilatoire, du bricolage politique. Comme le dirait l’autre, certains ne changent pas leur manière de s’asseoir. Et Alassane Ouattara, vient de le confirmer. En restant un antidémocrate, qui se soucis peu des lois. Le Pdci, lui, se prépare à la riposte. Une réunion de crise s’est tenue le mercredi 14 novembre au siège du Pdci, à Cocody. On attend de connaître les décisions qui vont «tomber».
Toussaint N’Gotta
Toussaint N’Gotta