C’est le 19 février que l’ancien président Laurent Gbagbo sera appelé à la barre de la Chambre préliminaire 3 de la Cpi pour l’audience de confirmation des charges. En attendant cette date, nous revenons sur les crimes que la procureure de la CPI, Fatou Bensouda a retenus contre l’ancien chef d’Etat extraits du document qui a été déposé sur le bureau du juge le 25 janvier 2013. 20.
Entre le 27 novembre 2010 et le 8 mai 2011, les forces pro?Gbagbo ont dirigé contre des civils pris pour des partisans de Ouattara des attaques durant lesquelles elles ont tué plus de 700 personnes, en ont violé plus de 40, en ont arbitrairement arrêté au moins 520 et ont infligé à plus de 140 personnes de grandes souffrances et des atteintes graves à l’intégrité physique. Ces attaques comprennent les quatre événements visés dans le présent document ainsi que d’autres énoncés dans la présente partie. 21. Les forces pro-Gbagbo ont pris pour cible les habitants des quartiers d’Abidjan considérés comme des bastions de Ouattara (notamment Abobo, Adjamé, Koumassi et Treichville), ainsi que ceux des nombreuses communautés de l’Ouest de la Côte d’Ivoire traditionnellement acquises à la cause de ce dernier. A Abobo, quand les forces pro?Gbagbo sortaient du Camp Commando, elles tiraient n’importe où et des civils étaient tués ou blessés. Partout où le Rdr faisait des manifestations, des civils étaient tués. Par ailleurs, les cibles étaient souvent choisies pour des motifs ethniques (Baoulé, Dioula, Mossi, Malinké, Sénofo), religieux (musulmans) ou nationaux (des citoyens d’États Ouest africains tels que le Mali, le Burkina Faso ou le Nigéria ainsi que des Ivoiriens d’ascendance ouest-africaine), car les membres de ces groupes étaient considérés comme des partisans de Ouattara. Les maisons de ces derniers étaient souvent marquées, soit avec les lettres D (Dioula) ou B (Baoulé) à la craie blanche, soit avec une croix peinte en noir, pour que les assaillants puissent les identifier.
De même, les forces pro-Gbagbo et, en particulier, les jeunes miliciens identifiaient souvent les cibles de ces attaques en procédant à des contrôles d’identité aux barrages routiers installés illicitement et attaquaient les quartiers ou les institutions religieuses généralement fréquentés par les partisans de Ouattara (…) 23. Ces attaques ont commencé au second tour de l’élection. Le 27 novembre 2010, vers 9 heures du matin, des forces pro-Gbagbo ont ouvert le feu à la mairie d’Abobo et fait 5 victimes civiles.
Du 27 au 29 novembre 2010, les Fds ont violemment réprimé des manifestations menées à Abobo par les jeunes du Rhdp pour protester contre le couvre?feu, faisant 12 morts. Durant la même période, les jeunes miliciens ont tué un malien à un barrage routier après avoir accusé les maliens d’avoir voté pour Ouattara. 24. Dans la nuit du 1er au 2 décembre 2010, des éléments du CeCOS ont fait irruption au quartier général du Rdr à Wassakara (Yopougon) et ouvert le feu sur des partisans du Rhdp réunis dans le bâtiment, faisant au moins six morts et au moins 14 blessés. Sept autres personnes ont été arrêtées et détenues. Le 3 décembre 2010, des éléments des Fds, dont des membres de la police, ont ouvert le feu sur des personnes dans le quartier d’Abobo, faisant trois morts. Le lendemain, les Fds ont abattu deux civils à Port?Bouët. Entre le 16 et le 19 décembre 2010, les forces pro-Gbagbo ont tué au moins 54 personnes et ont blessé au moins 50 personnes à Abidjan pendant et après la manifestation des partisans de Ouattara qui se rendaient au siège de la Rti. Le 25 décembre 2010, des jeunes miliciens, aidés par des éléments des Fds, ont mené une opération contre le quartier général du Pdci – allié politique de Ouattara – blessant 11 personnes, dont trois par balle. 25. Durant tout le mois de janvier 2011, les forces pro?Gbagbo ont violemment attaqué les partisans de Ouattara à Abidjan ainsi que dans d’autres parties du pays, dont Gagnoa, Divo et Daoukro.
Le 4 janvier 2011, par exemple, la police et les gendarmes ont utilisé des balles réelles et des gaz lacrymogènes contre des personnes non armées qui se trouvaient à l’intérieur des bureaux du Pdci à Abidjan. Ils ont alors tué un militant de ce parti et en ont blessé grièvement quatre autres. Ils ont également arrêté 136 partisans du Rhdp, dont 19 femmes et plusieurs enfants. Entre les 11 et 12 janvier, des éléments des Fds ont attaqué le quartier connu sous le nom de PK18, à Abobo, à bord de véhicules de la police et du CeCOS, faisant au moins neuf morts. Le 12 janvier, un groupe de jeunes patriotes (cf. par. 64) a battu à mort trois ressortissants maliens à Abobo. Le 13 janvier, de jeunes patriotes qui tenaient un poste de contrôle ont tué deux jeunes partisans du Rhdp. Le 20 janvier, des soldats des Fds ont ouvert le feu, sans faire preuve de discernement, sur des civils non armés dans la ville de Gagnoa, dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, tuant et blessant de nombreuses personnes. Du 18 au 20 janvier 2011, en réaction à un appel du Rhdp à la désobéissance civile dans tout le pays, les forces pro-Gbagbo ont brutalement réprimé des manifestations. Le 19 janvier 2011, par exemple, des gardes républicains ont tué deux partisans du RHDP et en ont blessé 17 dans la commune d’Attécoubé. Le 19 février 2011, au rond?point près de la mairie d’Abobo, alors que des membres du Rdr préparaient un meeting, les forces pro-Gbagbo ont tué deux personnes et brûlé leur matériel. Le même jour à Koumassi, les forces de Laurent Gbagbo ont attaqué un meeting du Rdr, faisant des morts. Toujours en février 2011, à la Riviera, les forces de l’ordre ont appelé des miliciens pour attaquer des femmes du Rhdp qui devaient protester contre le blocus de l’hôtel du Golf. Le 25 février, à Abobo, des forces pro-Gbagbo ont violé neuf femmes politiquement engagées en faveur de Ouattara. Ce même jour, des Jeunes Miliciens soutenus par la police ont attaqué les personnes qui avaient trouvé refuge autour et dans les prémisses d’une mosquée à Yopougon, faisant au moins deux morts, dont le gardien de la mosquée, et au moins cinq blessés. 26. Le 3 mars 2011, les forces pro?Gbagbo ont tué sept femmes qui avaient pris part à une manifestation de partisanes de Ouattara à Abobo. Le 17 mars 2011, les forces pro-Gbagbo ont tué au moins 25 personnes et blessé au moins 40 personnes au marché d’Abobo ou dans les environs en bombardant au mortier un secteur densément peuplé. Durant la deuxième quinzaine de mars 2011, des forces pro?Gbagbo, dont des membres du CeCOS, de la Bae et de la Garde républicaine, ont continué de tirer à l’arme lourde sur les partisans de Ouattara à Yopougon, Williamsville, Attécoubé, Adjamé et Abobo. Les Fds ont alors tué au moins 40 personnes parmi lesquelles des femmes, des enfants et des personnes âgées. 27.
En mars 2011 également, les Fds et les Forces nouvelles loyales à Ouattara se sont directement affrontées. Au cours de leurs offensives militaires, les forces pro?Gbagbo ont commis des crimes à grande échelle contre les civils assimilés à des partisans de Ouattara, et notamment lors des trois offensives suivantes lors desquelles des civils ont délibérément été pris pour cible. Le 22 mars 2011, des forces pro-Gbagbo comprenant des mercenaires venus du Libéria ont attaqué le quartier des immigrés de la ville de Bédi-Goazon, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, tuant au moins 37 immigrés ouest africains. Le 25 mars 2011, des jeunes miliciens et des mercenaires du Libéria ont attaqué des civils partisans de Ouattara à Bloléquin, dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, en représailles à la progression de forces pro-Ouattara dans la région. Les assaillants se sont livrés au massacre systématique de plus d’une centaine d’hommes, de femmes et d’enfants originaires de groupes ethniques de l’Ouest de la Côte d’Ivoire et de pays voisins de la région. Le 28 mars 2011, le même groupe des forces pro-Gbagbo a lancé une offensive contre des civils à Duékoué, tuant plusieurs partisans présumés de Ouattara parmi lesquels un imam et trois ressortissants ouest africains. 28.
En outre, les forces pro-Gbagbo menaient systématiquement des attaques contre d’autres personnes d’origine ouest-africaine, pour la plupart des burkinabè et des maliens, considérés comme favorables à Ouattara. Entre le début des violences postélectorales et le 10 avril 2011, les forces pro-Gbagbo, et plus particulièrement les Jeunes miliciens et les mercenaires, ont brûlé vifs ou exécuté 80 civils d’origine ouest-africaine à Port-Bouët et Yopougon. Entre le 24 et 28 février 2011, les Jeunes Patriotes ont roué de coups, brûlé ou abattu plusieurs étrangers et des partisans présumés de Ouattara à Yopougon, parfois en présence des forces de police. Les 28 février et 8 mars 2011, des éléments des Fds en patrouille à Yopougon et à Treichville ont tué plusieurs ressortissants ouest-africains. Le 1er mars 2011, à Abidjan, une unité du CeCOS a brûlé vifs deux Nigériens en invoquant, ce faisant, un discours enflammé de Blé Goudé tenu quelques jours auparavant.
Les 4 et 8 mars 2011, environ 150 Jeunes miliciens armés de machettes et de haches ont scandé « [Traduction] tuer, brûler, tuer, brûler, vous devez tous partir » lorsqu’ils ont fait irruption et se sont livrés au pillage dans les étalages de nombreux marchands ouest-africains de Yopougon. Le 2 avril 2011, les jeunes miliciens ont tiré sur quatre ressortissants burkinabè à Port-Bouët. Le 10 avril, des miliciens ont tué cinq personnes d’origine dioula à Yopougon parce qu’ils les prenaient pour des partisans de Ouattara. 29. Après l’arrestation de Gbagbo le 11 avril 2011, les forces qui lui étaient fidèles ont continué de commettre des crimes dans le cadre d’une attaque généralisée et systématique déclenchée par Gbagbo et son entourage immédiat contre une partie de la population civile et dans la poursuite de la Politique. Entre les 5 et 8 mai 2011, des mercenaires du Libéria à la solde de Gbagbo ont tué, alors qu’ils battaient en retraite le long de la côte, entre 120 et 220 civils pris pour des partisans de Ouattara (…)
trois questions à... Issiaka Diaby (Président du CVCI) : “Gbagbo doit être condamné pour ce qu’il a fait” Le Patriote : C’est demain mardi que se tient l’audience de confirmation des charges contre Laurent Gbagbo. Quelles sont les attentes des victimes pour cette audience ? Issiaka Diaby : Les victimes attendent que leurs droits soient respectés. Aujourd’hui, les parents des victimes souhaitent que les charges retenues contre Laurent Gbagbo soient confirmées. Car, Gbagbo doit être condamné pour ce qu’il a fait aux victimes et à leurs parents. Des veuves, des orphelins et vieilles personnes sont aujourd’hui sans assistance. Ils se sentent abandonnés. Parce que ceux qui leur apportaient le bien-être social ont été assassinés sous leurs yeux. Sans oublier les blessés et mutilés que nous continuons de soigner. LP : Pensez-vous que la Cour ira dans le sens que vous voulez ? ID : La Cour ne peut qu’aller dans le sens de la justice.
Et le sens de la justice, c’est la confirmation des charges contre Laurent Gbagbo. Les faits clairs. Laurent Gbagbo et ses proches ont massacré des populations civiles. Sur la base de ces preuves, le procureur va obtenir l’ouverture d’un procès contre Laurent Gbagbo au cours duquel l’ancien chef d’Etat va s’expliquer sur les actes qu’il a commandités. La Cour doit donc valider pour l’éclatement de la vérité, les preuves en la possession du procureur et confirmé la culpabilité de Laurent Gbagbo. LP : Etes-vous partie à ce procès ? ID : Les avocats des victimes nous représentent à cette audience. Cette audience ne concerne pour le moment qu’une partie infirme des victimes. Après la confirmation, le procès sera ouvert à un plus grand nombre de victimes pour le respect de leur droit et dignité afin que les graves violations des droits de l’Homme auxquelles nous avons assisté depuis 2000.
Nous profitons de l’occasion pour demander à toutes les personnes éprises de justice de soutenir les victimes et leurs parents durant les dix jours que durera l’audience. A ce sujet, le Collectif des Victimes en Côte d’Ivoire lance l’opération « brassard noir ». Nous demandons à la population de porter durant toute cette période un brassard noir en hommage des victimes et à venir nombreux aux grands rassemblements que nous organisons, en collaboration avec six associations de droit de l’Homme et de victimes, le mardi à la place FICGAYO pour les victimes de Yopougon, le samedi à Abobo pour les victimes des bombardements du marché Siaka Koné et quartier SOS Abobo. Le mardi 25 février, nous serons à Adjamé à la salle des mariages de la mairie pour un autre meeting à la mémoire des victimes des barrages civiles, des rafales et des mosquées de Williamsville et le jeudi 28 février, nous serons à la place Inchallah de Koumassi.
Jean-Claude Coulibaly
Entre le 27 novembre 2010 et le 8 mai 2011, les forces pro?Gbagbo ont dirigé contre des civils pris pour des partisans de Ouattara des attaques durant lesquelles elles ont tué plus de 700 personnes, en ont violé plus de 40, en ont arbitrairement arrêté au moins 520 et ont infligé à plus de 140 personnes de grandes souffrances et des atteintes graves à l’intégrité physique. Ces attaques comprennent les quatre événements visés dans le présent document ainsi que d’autres énoncés dans la présente partie. 21. Les forces pro-Gbagbo ont pris pour cible les habitants des quartiers d’Abidjan considérés comme des bastions de Ouattara (notamment Abobo, Adjamé, Koumassi et Treichville), ainsi que ceux des nombreuses communautés de l’Ouest de la Côte d’Ivoire traditionnellement acquises à la cause de ce dernier. A Abobo, quand les forces pro?Gbagbo sortaient du Camp Commando, elles tiraient n’importe où et des civils étaient tués ou blessés. Partout où le Rdr faisait des manifestations, des civils étaient tués. Par ailleurs, les cibles étaient souvent choisies pour des motifs ethniques (Baoulé, Dioula, Mossi, Malinké, Sénofo), religieux (musulmans) ou nationaux (des citoyens d’États Ouest africains tels que le Mali, le Burkina Faso ou le Nigéria ainsi que des Ivoiriens d’ascendance ouest-africaine), car les membres de ces groupes étaient considérés comme des partisans de Ouattara. Les maisons de ces derniers étaient souvent marquées, soit avec les lettres D (Dioula) ou B (Baoulé) à la craie blanche, soit avec une croix peinte en noir, pour que les assaillants puissent les identifier.
De même, les forces pro-Gbagbo et, en particulier, les jeunes miliciens identifiaient souvent les cibles de ces attaques en procédant à des contrôles d’identité aux barrages routiers installés illicitement et attaquaient les quartiers ou les institutions religieuses généralement fréquentés par les partisans de Ouattara (…) 23. Ces attaques ont commencé au second tour de l’élection. Le 27 novembre 2010, vers 9 heures du matin, des forces pro-Gbagbo ont ouvert le feu à la mairie d’Abobo et fait 5 victimes civiles.
Du 27 au 29 novembre 2010, les Fds ont violemment réprimé des manifestations menées à Abobo par les jeunes du Rhdp pour protester contre le couvre?feu, faisant 12 morts. Durant la même période, les jeunes miliciens ont tué un malien à un barrage routier après avoir accusé les maliens d’avoir voté pour Ouattara. 24. Dans la nuit du 1er au 2 décembre 2010, des éléments du CeCOS ont fait irruption au quartier général du Rdr à Wassakara (Yopougon) et ouvert le feu sur des partisans du Rhdp réunis dans le bâtiment, faisant au moins six morts et au moins 14 blessés. Sept autres personnes ont été arrêtées et détenues. Le 3 décembre 2010, des éléments des Fds, dont des membres de la police, ont ouvert le feu sur des personnes dans le quartier d’Abobo, faisant trois morts. Le lendemain, les Fds ont abattu deux civils à Port?Bouët. Entre le 16 et le 19 décembre 2010, les forces pro-Gbagbo ont tué au moins 54 personnes et ont blessé au moins 50 personnes à Abidjan pendant et après la manifestation des partisans de Ouattara qui se rendaient au siège de la Rti. Le 25 décembre 2010, des jeunes miliciens, aidés par des éléments des Fds, ont mené une opération contre le quartier général du Pdci – allié politique de Ouattara – blessant 11 personnes, dont trois par balle. 25. Durant tout le mois de janvier 2011, les forces pro?Gbagbo ont violemment attaqué les partisans de Ouattara à Abidjan ainsi que dans d’autres parties du pays, dont Gagnoa, Divo et Daoukro.
Le 4 janvier 2011, par exemple, la police et les gendarmes ont utilisé des balles réelles et des gaz lacrymogènes contre des personnes non armées qui se trouvaient à l’intérieur des bureaux du Pdci à Abidjan. Ils ont alors tué un militant de ce parti et en ont blessé grièvement quatre autres. Ils ont également arrêté 136 partisans du Rhdp, dont 19 femmes et plusieurs enfants. Entre les 11 et 12 janvier, des éléments des Fds ont attaqué le quartier connu sous le nom de PK18, à Abobo, à bord de véhicules de la police et du CeCOS, faisant au moins neuf morts. Le 12 janvier, un groupe de jeunes patriotes (cf. par. 64) a battu à mort trois ressortissants maliens à Abobo. Le 13 janvier, de jeunes patriotes qui tenaient un poste de contrôle ont tué deux jeunes partisans du Rhdp. Le 20 janvier, des soldats des Fds ont ouvert le feu, sans faire preuve de discernement, sur des civils non armés dans la ville de Gagnoa, dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, tuant et blessant de nombreuses personnes. Du 18 au 20 janvier 2011, en réaction à un appel du Rhdp à la désobéissance civile dans tout le pays, les forces pro-Gbagbo ont brutalement réprimé des manifestations. Le 19 janvier 2011, par exemple, des gardes républicains ont tué deux partisans du RHDP et en ont blessé 17 dans la commune d’Attécoubé. Le 19 février 2011, au rond?point près de la mairie d’Abobo, alors que des membres du Rdr préparaient un meeting, les forces pro-Gbagbo ont tué deux personnes et brûlé leur matériel. Le même jour à Koumassi, les forces de Laurent Gbagbo ont attaqué un meeting du Rdr, faisant des morts. Toujours en février 2011, à la Riviera, les forces de l’ordre ont appelé des miliciens pour attaquer des femmes du Rhdp qui devaient protester contre le blocus de l’hôtel du Golf. Le 25 février, à Abobo, des forces pro-Gbagbo ont violé neuf femmes politiquement engagées en faveur de Ouattara. Ce même jour, des Jeunes Miliciens soutenus par la police ont attaqué les personnes qui avaient trouvé refuge autour et dans les prémisses d’une mosquée à Yopougon, faisant au moins deux morts, dont le gardien de la mosquée, et au moins cinq blessés. 26. Le 3 mars 2011, les forces pro?Gbagbo ont tué sept femmes qui avaient pris part à une manifestation de partisanes de Ouattara à Abobo. Le 17 mars 2011, les forces pro-Gbagbo ont tué au moins 25 personnes et blessé au moins 40 personnes au marché d’Abobo ou dans les environs en bombardant au mortier un secteur densément peuplé. Durant la deuxième quinzaine de mars 2011, des forces pro?Gbagbo, dont des membres du CeCOS, de la Bae et de la Garde républicaine, ont continué de tirer à l’arme lourde sur les partisans de Ouattara à Yopougon, Williamsville, Attécoubé, Adjamé et Abobo. Les Fds ont alors tué au moins 40 personnes parmi lesquelles des femmes, des enfants et des personnes âgées. 27.
En mars 2011 également, les Fds et les Forces nouvelles loyales à Ouattara se sont directement affrontées. Au cours de leurs offensives militaires, les forces pro?Gbagbo ont commis des crimes à grande échelle contre les civils assimilés à des partisans de Ouattara, et notamment lors des trois offensives suivantes lors desquelles des civils ont délibérément été pris pour cible. Le 22 mars 2011, des forces pro-Gbagbo comprenant des mercenaires venus du Libéria ont attaqué le quartier des immigrés de la ville de Bédi-Goazon, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, tuant au moins 37 immigrés ouest africains. Le 25 mars 2011, des jeunes miliciens et des mercenaires du Libéria ont attaqué des civils partisans de Ouattara à Bloléquin, dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, en représailles à la progression de forces pro-Ouattara dans la région. Les assaillants se sont livrés au massacre systématique de plus d’une centaine d’hommes, de femmes et d’enfants originaires de groupes ethniques de l’Ouest de la Côte d’Ivoire et de pays voisins de la région. Le 28 mars 2011, le même groupe des forces pro-Gbagbo a lancé une offensive contre des civils à Duékoué, tuant plusieurs partisans présumés de Ouattara parmi lesquels un imam et trois ressortissants ouest africains. 28.
En outre, les forces pro-Gbagbo menaient systématiquement des attaques contre d’autres personnes d’origine ouest-africaine, pour la plupart des burkinabè et des maliens, considérés comme favorables à Ouattara. Entre le début des violences postélectorales et le 10 avril 2011, les forces pro-Gbagbo, et plus particulièrement les Jeunes miliciens et les mercenaires, ont brûlé vifs ou exécuté 80 civils d’origine ouest-africaine à Port-Bouët et Yopougon. Entre le 24 et 28 février 2011, les Jeunes Patriotes ont roué de coups, brûlé ou abattu plusieurs étrangers et des partisans présumés de Ouattara à Yopougon, parfois en présence des forces de police. Les 28 février et 8 mars 2011, des éléments des Fds en patrouille à Yopougon et à Treichville ont tué plusieurs ressortissants ouest-africains. Le 1er mars 2011, à Abidjan, une unité du CeCOS a brûlé vifs deux Nigériens en invoquant, ce faisant, un discours enflammé de Blé Goudé tenu quelques jours auparavant.
Les 4 et 8 mars 2011, environ 150 Jeunes miliciens armés de machettes et de haches ont scandé « [Traduction] tuer, brûler, tuer, brûler, vous devez tous partir » lorsqu’ils ont fait irruption et se sont livrés au pillage dans les étalages de nombreux marchands ouest-africains de Yopougon. Le 2 avril 2011, les jeunes miliciens ont tiré sur quatre ressortissants burkinabè à Port-Bouët. Le 10 avril, des miliciens ont tué cinq personnes d’origine dioula à Yopougon parce qu’ils les prenaient pour des partisans de Ouattara. 29. Après l’arrestation de Gbagbo le 11 avril 2011, les forces qui lui étaient fidèles ont continué de commettre des crimes dans le cadre d’une attaque généralisée et systématique déclenchée par Gbagbo et son entourage immédiat contre une partie de la population civile et dans la poursuite de la Politique. Entre les 5 et 8 mai 2011, des mercenaires du Libéria à la solde de Gbagbo ont tué, alors qu’ils battaient en retraite le long de la côte, entre 120 et 220 civils pris pour des partisans de Ouattara (…)
trois questions à... Issiaka Diaby (Président du CVCI) : “Gbagbo doit être condamné pour ce qu’il a fait” Le Patriote : C’est demain mardi que se tient l’audience de confirmation des charges contre Laurent Gbagbo. Quelles sont les attentes des victimes pour cette audience ? Issiaka Diaby : Les victimes attendent que leurs droits soient respectés. Aujourd’hui, les parents des victimes souhaitent que les charges retenues contre Laurent Gbagbo soient confirmées. Car, Gbagbo doit être condamné pour ce qu’il a fait aux victimes et à leurs parents. Des veuves, des orphelins et vieilles personnes sont aujourd’hui sans assistance. Ils se sentent abandonnés. Parce que ceux qui leur apportaient le bien-être social ont été assassinés sous leurs yeux. Sans oublier les blessés et mutilés que nous continuons de soigner. LP : Pensez-vous que la Cour ira dans le sens que vous voulez ? ID : La Cour ne peut qu’aller dans le sens de la justice.
Et le sens de la justice, c’est la confirmation des charges contre Laurent Gbagbo. Les faits clairs. Laurent Gbagbo et ses proches ont massacré des populations civiles. Sur la base de ces preuves, le procureur va obtenir l’ouverture d’un procès contre Laurent Gbagbo au cours duquel l’ancien chef d’Etat va s’expliquer sur les actes qu’il a commandités. La Cour doit donc valider pour l’éclatement de la vérité, les preuves en la possession du procureur et confirmé la culpabilité de Laurent Gbagbo. LP : Etes-vous partie à ce procès ? ID : Les avocats des victimes nous représentent à cette audience. Cette audience ne concerne pour le moment qu’une partie infirme des victimes. Après la confirmation, le procès sera ouvert à un plus grand nombre de victimes pour le respect de leur droit et dignité afin que les graves violations des droits de l’Homme auxquelles nous avons assisté depuis 2000.
Nous profitons de l’occasion pour demander à toutes les personnes éprises de justice de soutenir les victimes et leurs parents durant les dix jours que durera l’audience. A ce sujet, le Collectif des Victimes en Côte d’Ivoire lance l’opération « brassard noir ». Nous demandons à la population de porter durant toute cette période un brassard noir en hommage des victimes et à venir nombreux aux grands rassemblements que nous organisons, en collaboration avec six associations de droit de l’Homme et de victimes, le mardi à la place FICGAYO pour les victimes de Yopougon, le samedi à Abobo pour les victimes des bombardements du marché Siaka Koné et quartier SOS Abobo. Le mardi 25 février, nous serons à Adjamé à la salle des mariages de la mairie pour un autre meeting à la mémoire des victimes des barrages civiles, des rafales et des mosquées de Williamsville et le jeudi 28 février, nous serons à la place Inchallah de Koumassi.
Jean-Claude Coulibaly