La deuxième journée de l’audience de comparution, hier, a permis au procureur de divulguer des preuves matérielles contre l’ancien président Laurent Gbagbo.
La preuve par des images, des écrits et des témoignages. Au deuxième jour de l’audience de confirmation des charges, qui se tient à la Cour Pénale internationale (CPI) de La Haye (Pays-Bas), le bureau du procureur a vraisemblablement décidé de porter l’estocade à la défense. Mme Fatou Bensouda et ses collaborateurs ont choisi l’option de brandir des preuves irréfutables. L’audience d’hier après-midi a fourni l’occasion au substitut du procureur, Gilles Dutertre, de brandir une avalanche de pièces à conviction visant à établir formellement la responsabilité du principal accusé dans le massacre des civils entre novembre 2010 et mai 2011. Dans son violent réquisitoire contre l’ancien chef de l’Etat ivoirien, M. Dutertre s’est attelé méthodiquement à démontrer que «les attaques multiples et incessantes s’inscrivaient dans une politique soigneusement concoctée par M. Gbagbo». En clair, le principal accusé, d’après les propos de l’accusation, a organisé, fourni les moyens matériels et préparé les esprits pour le passage à l’acte. Pour étayer ces accusations graves et lourdes de conséquences, le substitut a égrené pendant de longues minutes, 45 « incidents » : un véritable inventaire à la Prévert. Il a par ailleurs divulgué des images atroces d’un individu brûlé vif «en présence d’un véhicule de la Brigade anti-émeute (Bae)», des témoignages de personnes dont les identités ont été volontairement masquées, des déclarations sans équivoque de l’accusé et de ses proches ainsi que des traces écrites. Parmi ces éléments à
Des images atroces
charge, Gilles Dutertre a cité des vidéos, des déclarations publiques incendiaires, des documents relatifs au recrutement de mercenaires en avril 2010 et retrouvés dans la chambre de Laurent Gbagbo ainsi que des reçus de financement des activités des leaders de la galaxie patriotique, sans omettre des courriers électroniques compromettants. C’est donc tout l’ensemble du système Gbagbo de l’époque qui a été dévoilé à la barre et qui reposait sur ses intimes, ses chefs militaires et ses proches nommés ministres durant les moments de tension (Alcide Djédjé aux Affaires étrangères, Alain Dogou à la Défense et l’incontournable Charles Blé Goudé à la Jeunesse). Ce plan commun, comme le qualifie le bureau du procureur a été couronné par des attaques qui se sont soldées par plus de 500 tués. Le bureau du procureur a seulement décidé de s’appuyer sur 45 « incidents » tout en justifiant le chiffre des tués (en déça du bilan officiel) par le fait de ne considérer que « la fourchette basse » pour toutes les tueries recensées. L’affaire n’est pas pliée pour autant. Le plus dur reste à venir : à savoir authentifier les pièces à conviction. La stratégie de défense clairement affichée hier après-midi par Me Emmanuel Altit et son staff est sans ambages : réfuter catégoriquement l’ensemble des éléments à charge communiqués par Mme Bensouda.
La contre-attaque de Me Altit
L’avocat français a donné un aperçu de cette stratégie, situant les scènes d’une vidéo… au Kenya. Idem pour les quatre principaux faits versés au dossier du leader du Front Populaire Ivoirien (FPI). La répression de la marche des militants du Rassemblement des Républicains sur le siège de la RTI? « Ce sont les miliciens pro Ouattara », crie Me Altit. Quid des assassinats massifs et ciblés à Yopougon, au lendemain de la chute de Laurent Gbagbo? «Ce sont les forces pro-Ouattara », lâche-t-il péremptoire. Et de conclure sans sourciller : « le récit du procureur est biaisé. Il a été construit sur la base des éléments transmis par les autorités ivoiriennes et sur les narrations des adversaires du président Gbagbo pour le délégitimer». La défense entend détruire toutes les accusations en démontrant, vendredi 22 février, qu’il n’existe aucune base factuelle aux éléments du procureur ». Enfin, Me Altit a réclamé la comparution des pro-Ouattara dont « les crimes sont connus de tous et documentés en détails par les organisations internationales des droits de l’homme », croit-il savoir. Des insinuations auxquelles le procureur et ses collaborateurs devraient vraisemblablement répondre à l’audience de ce jour. Durant ces quatre heures de comparution, c’est l’Histoire de la Côte d’Ivoire, depuis la mutinerie du 24 décembre 1999 jusqu’aux faits très récents, qui a été exhumée par les parties en présence. Notamment à travers la prose de Me Agathe Bahi Baroan et les coups de boutoir de Paolina Massida, la représente des victimes. Des faits marquants comme l’ivoirité, la tragi-comédie relative à l’introduction des conjonctions « et » et « ou » dans la constitution et même les slogans « Devant, c’est maïs!» pour ne citer que ces exemples ont refait surface. La bataille juridique ainsi engagée s’annonce très ardue et prometteuse.
Karim Wally, envoyé spécial à La Haye (Pays Bas)
La preuve par des images, des écrits et des témoignages. Au deuxième jour de l’audience de confirmation des charges, qui se tient à la Cour Pénale internationale (CPI) de La Haye (Pays-Bas), le bureau du procureur a vraisemblablement décidé de porter l’estocade à la défense. Mme Fatou Bensouda et ses collaborateurs ont choisi l’option de brandir des preuves irréfutables. L’audience d’hier après-midi a fourni l’occasion au substitut du procureur, Gilles Dutertre, de brandir une avalanche de pièces à conviction visant à établir formellement la responsabilité du principal accusé dans le massacre des civils entre novembre 2010 et mai 2011. Dans son violent réquisitoire contre l’ancien chef de l’Etat ivoirien, M. Dutertre s’est attelé méthodiquement à démontrer que «les attaques multiples et incessantes s’inscrivaient dans une politique soigneusement concoctée par M. Gbagbo». En clair, le principal accusé, d’après les propos de l’accusation, a organisé, fourni les moyens matériels et préparé les esprits pour le passage à l’acte. Pour étayer ces accusations graves et lourdes de conséquences, le substitut a égrené pendant de longues minutes, 45 « incidents » : un véritable inventaire à la Prévert. Il a par ailleurs divulgué des images atroces d’un individu brûlé vif «en présence d’un véhicule de la Brigade anti-émeute (Bae)», des témoignages de personnes dont les identités ont été volontairement masquées, des déclarations sans équivoque de l’accusé et de ses proches ainsi que des traces écrites. Parmi ces éléments à
Des images atroces
charge, Gilles Dutertre a cité des vidéos, des déclarations publiques incendiaires, des documents relatifs au recrutement de mercenaires en avril 2010 et retrouvés dans la chambre de Laurent Gbagbo ainsi que des reçus de financement des activités des leaders de la galaxie patriotique, sans omettre des courriers électroniques compromettants. C’est donc tout l’ensemble du système Gbagbo de l’époque qui a été dévoilé à la barre et qui reposait sur ses intimes, ses chefs militaires et ses proches nommés ministres durant les moments de tension (Alcide Djédjé aux Affaires étrangères, Alain Dogou à la Défense et l’incontournable Charles Blé Goudé à la Jeunesse). Ce plan commun, comme le qualifie le bureau du procureur a été couronné par des attaques qui se sont soldées par plus de 500 tués. Le bureau du procureur a seulement décidé de s’appuyer sur 45 « incidents » tout en justifiant le chiffre des tués (en déça du bilan officiel) par le fait de ne considérer que « la fourchette basse » pour toutes les tueries recensées. L’affaire n’est pas pliée pour autant. Le plus dur reste à venir : à savoir authentifier les pièces à conviction. La stratégie de défense clairement affichée hier après-midi par Me Emmanuel Altit et son staff est sans ambages : réfuter catégoriquement l’ensemble des éléments à charge communiqués par Mme Bensouda.
La contre-attaque de Me Altit
L’avocat français a donné un aperçu de cette stratégie, situant les scènes d’une vidéo… au Kenya. Idem pour les quatre principaux faits versés au dossier du leader du Front Populaire Ivoirien (FPI). La répression de la marche des militants du Rassemblement des Républicains sur le siège de la RTI? « Ce sont les miliciens pro Ouattara », crie Me Altit. Quid des assassinats massifs et ciblés à Yopougon, au lendemain de la chute de Laurent Gbagbo? «Ce sont les forces pro-Ouattara », lâche-t-il péremptoire. Et de conclure sans sourciller : « le récit du procureur est biaisé. Il a été construit sur la base des éléments transmis par les autorités ivoiriennes et sur les narrations des adversaires du président Gbagbo pour le délégitimer». La défense entend détruire toutes les accusations en démontrant, vendredi 22 février, qu’il n’existe aucune base factuelle aux éléments du procureur ». Enfin, Me Altit a réclamé la comparution des pro-Ouattara dont « les crimes sont connus de tous et documentés en détails par les organisations internationales des droits de l’homme », croit-il savoir. Des insinuations auxquelles le procureur et ses collaborateurs devraient vraisemblablement répondre à l’audience de ce jour. Durant ces quatre heures de comparution, c’est l’Histoire de la Côte d’Ivoire, depuis la mutinerie du 24 décembre 1999 jusqu’aux faits très récents, qui a été exhumée par les parties en présence. Notamment à travers la prose de Me Agathe Bahi Baroan et les coups de boutoir de Paolina Massida, la représente des victimes. Des faits marquants comme l’ivoirité, la tragi-comédie relative à l’introduction des conjonctions « et » et « ou » dans la constitution et même les slogans « Devant, c’est maïs!» pour ne citer que ces exemples ont refait surface. La bataille juridique ainsi engagée s’annonce très ardue et prometteuse.
Karim Wally, envoyé spécial à La Haye (Pays Bas)