La stratégie ne manque pas de cynisme. A l’approche d’échéances électorales, le PDCI ne rate aucune occasion pour jeter des pierres dans le jardin de son allié du RHDP, à savoir le parti du Président de la République. Après les législatives, on a remis le couvert depuis l’annonce des élections municipales et régionales prévues pour le dimanche 21 avril prochain. Le samedi dernier, on accusait le RDR d’avoir déposé des « dossiers hors délai » à la CEI. Plus qu’une interrogation, il s’agissait de façon pernicieuse de dire à l’opinion que le parti au pouvoir manipule les élections. Ce qui n’est pas la vérité. IL y a moins d’une semaine, des cadres du PDCI accusaient à nouveau le parti domicilié à la rue Lepic de Cocody d’être « hégémonique » et d’être à la base de la rupture du consensus au sein du RHDP, concernant les régionales. A l’analyse, le débat est vraiment ailleurs. En regardant les listes où les formations Houphouétistes vont en RHDP, on remarque que les têtes de listes sont conduites par le PDCI. Il s’agit des régions du Gontougo, du Moronou, de l’Indénié Djuablin, de la ME. Le RDR ayant décidé de ne pas gêner les hauts cadres du vieux parti. En retour, le PDCI n’a pas tenu compte de cette donne dans la région de la Cavally en opposant un des leurs à la ministre Anne Désirée Ouloto. Qui est donc « hégémonique » ? Auparavant, on a constaté que bien qu’étant membre de la coalition au pouvoir, des membres du PDCI ne se font aucun scrupule à critiquer ouvertement et vertement le pouvoir. Alors qu’il participe à la gestion du pouvoir, à travers des hauts postes dans le gouvernement et dans l’administration, le vieux parti se comporte comme un parti d’opposition. C’est d’ailleurs ce manque de solidarité qui est à la base de la dernière dissolution du gouvernement. Dans les bases du RDR, les militants ne se font plus d’illusion devant ces piques et philippiques. Pour eux, le PDCI a un calendrier et un agenda secrets, dans la perspective de la présidentielle de 2015. Ils ont encore en travers de la gorge, la déclaration fracassante du bureau politique du parti dirigé par Henri Konan Bédié, en date de quelques mois. Les cadres du PDCI avaient accusé le RDR de gestion solitaire du pays, de donner dans le « rattrapage » et de prendre tous « les postes juteux ». On eût dit un pamphlet en provenance de la refondation. Et pourtant, ces critiques ne tiennent pas la route, rien qu’à regarder la configuration du gouvernement et des directions de l’administration. On aura compris le sens de la diatribe. Le PDCI bien qu’à la tête du gouvernement refuse d’assumer le bilan collectif de la gestion du pouvoir. C’est assurément ce jeu pernicieux qui prend corps aux échéances importantes qui engagent l’avenir de la nation. On aura remarqué aussi que même si le FPI a décidé de ne pas prendre part aux prochains scrutins, nombre de ses fédéraux font partie des listes du PDCI. De là à y voir une possible reconstitution du Front patriotique en 2015 est un pas que certains franchissent allégrement. Au nom de la morale et de l’éthique A Quel jeu le PDCI invite-il le RDR ? Veut-il le prendre en otage, pour la simple raison qu’il a voté pour son candidat au second tour de l’élection présidentielle ? Le vieux parti veut –il jouer à « l’enfant gâté » à qui l’on ne doit rien refuser ? On doit à la vérité de dire que les termes de l’alliance étaient très clairs. Le RHDP portait ses voix sur le membre arrivé en tête au premier tour. C’est la logique qui a été respectée. Dire que c’est le PDCI qui a fait gagner Alassane Ouattara est aussi une contrevérité. Il a joué sa partition. Avait-il le choix ? Il s’agissait d’opérer le choix entre un enfant d’Houphouët Boigny et un pourfendeur du père de la nation ? Si par extraordinaire, Laurent Gbagbo gagnait, c’était quasiment la mort du PDCI qui, on l’oublie souvent, a perdu le pouvoir depuis décembre 99. Il aurait été une proie facile à phagocyter et à abattre par le FPI. En votant pour Ouattara, le PDCI s’est sauvé lui-même ! A notre sens, les cris d’orfraie doivent cesser, tant il est clair qu’on ne peut pas vouloir une chose et son contraire. Le président de la République a tenu toutes ses promesses électorales vis-à-vis du PDCI. Au point même de frustrer ses cadres et ses militants. L’allié doit éviter de lui donner des coups, au nom de sa collaboration dans la gestion du pouvoir. Car en toute chose, il faut savoir raison garder… La morale et l’éthique doivent primer, même en politique
BAKARY NIMAGA
BAKARY NIMAGA