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Politique Publié le mercredi 24 avril 2013 | Nord-Sud

Contestation des résultats : Quand la Cei encourage les fauteurs de troubles

La proclamation au compte-gouttes des résultats des élections locales de dimanche, n’est pas faite pour calmer les candidats et leurs partisans qui redoutent qu’on leur vole leur victoire.


L’attente devient intenable ! Et, plus les jours passeront à attendre les résultats, plus le nombre de contestataires s’accroitra, avec le risque que la violence s’invite dans le débat. En effet, alors que les forces de l’ordre s’affairent à éteindre le feu à Adjamé et à Treichville, d’autres foyers de tensions commencent à apparaître, notamment à Yopougon, à Marcory… Si dans la plus grande commune du pays, Yopougon, les résultats sont connus, ce n’est pas le cas à Marcory où six candidats en lice pour les municipales dans cette commune sont montés au créneau pour en appeler à l’invalidation du scrutin. C’est que, de bonne ou de mauvaise foi, sur fond de montée de l’adrénaline dans les différents états-majors de candidats, on soupçonne la Commission électorale indépendante (Cei), l’organe en charge du processus électoral, de manipuler les résultats. « On veut nous voler notre victoire, sinon pourquoi traîne-t-on aussi longtemps pour proclamer les résultats », se plaignent invariablement les candidats et leurs staffs. Ce qui est en cause, c’est donc le mode de collecte et de transmission des résultats par la Cei. « Elle a montré ses limites, mais rien n’a été fait pour améliorer les choses », déplore un commissaire de l’organe électoral. « Avant même le vote, certains candidats ont fait croire qu’ils partaient en roue libre ou qu’ils seraient plébiscités, sans que cela n’émeuve personne. Dans ces conditions, quand ils attendent deux ou trois jours pour avoir les résultats de la Cei, ils sont persuadés qu’il y a manipulation des chiffres, surtout que le porte-parole est venu annoncer un taux de participation de 60%, après que le président, Youssouf Bakayoko a annoncé 30% comme taux de participation », admet-il. A cette allure, l’agitation ira en s’amplifiant puisque des localités de l’intérieur du pays pourraient être gagnées par la fièvre postélectorale. Aujourd’hui, la ministre de la Famille, candidate aux municipales dans la Cavally, a prévu se prononcer. Il faut craindre que sa sortie ouvre un autre foyer de tension, dans cette région déjà instable. « Plus vite on tranche en donnant les vrais résultats, mieux l’opinion se fait son idée sur les mauvais perdants qui veulent créer les troubles.

Ces mauvais perdants qui méritent…

Car en l’absence des résultats de la Cei, chacun se proclame victorieux, parce que la nature a horreur du vide », analyse encore l’agent de la Cei. Manifestement, le chemin à parcourir reste encore parsemé d’embûches. Alors qu’on croyait définitivement tournée la page des violences postélectorales de la présidentielle, voilà que les acteurs politiques transforment encore la scène politique en champ de bataille. Laissant de côté, les voies usitées pour contester les résultats des scrutins de dimanche dernier, ils ont recours à la rue, pour se faire entendre. Toute chose pourtant punissable, ne serait-ce qu’au regard du code pénal ivoirien, sur la base du trouble à l’ordre public. « Si les gens optent pour la violence, c’est parce qu’on n’a pas la culture de la sanction dans ce pays. Au nom de la paix et de la réconciliation, on fait le lit de l’impunité ; c’est très grave. C’est un mauvais signal pour la construction de la démocratie », fait remarquer un acteur de la société civile ivoirienne qui dit avoir observé le déroulement des élections municipales et régionales pour le compte d’un organisme international. « Il y a eu des violences, lors des législatives de décembre 2011 et personne n’a été sanctionné. La Cei a décidé de la reprise du vote dans les circonscriptions où il y a eu des troubles, sans sanctionner ceux qui étaient à la base de ces violences. Le résultat s’est vite senti lors des partielles. On a même enregistré cette fois-ci cinq morts dans une localité (cinq morts à Bonon, lors des partielles de février 2012, ndlr).

Les enquêtes qui ont été ouvertes n’ont pu clairement situer les responsabilités, de sorte que les sanctions appropriées soient prises. Dans un tel contexte, les gens peuvent penser que tout est permis. Et, c’est ce à quoi nous assistons », regrette cet activiste des droits de l’Homme. Pour lui, il faut marquer les esprits, pour que la scène politique soit débarrassée de la violence, notamment en période d’élection. « Depuis la réintroduction du multipartisme dans notre pays, toutes les élections ont été émaillées de violences. Pour que cela s’arrête, il importe de prendre des mesures drastiques. Si on avait par exemple sanctionné ceux qui sont à la base des morts enregistrés à Bonon, les gens allaient réfléchir par deux fois, avant d’appeler leurs partisans à descendre dans la rue, en lançant notamment des messages à caractère insurrectionnel sur les réseaux sociaux. Malheureusement, il n’y a pas eu de courageux pour le faire. Si on rate le coche cette fois-ci encore, ce ne sera plus la peine », prévient-il.

Marc Dossa
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