Il suffit simplement de se rendre dans les pays de la zone CÉÉAC (Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale) qui regorgent de l’or noir en abondance pour se rendre compte que le pétrole ne fait pas forcément le bonheur des populations, sauf celui des dirigeants et des multinationales occidentales qui se partagent, à satiété, les réserves d’origine fossile dans cette partie du continent.
Selon un rapport de la British Petreolum Review of World Energy, sur les dix premières réserves pétrolières en Afrique, cinq sont situées plus précisément en Afrique centrale. Le Gabon avec ses 30 champs de production, 7e réserve de pétrole en Afrique (3,7 milliards de barils) devant le Congo (1,9), la Guinée Équatoriale (1,7) et le Tchad (1,5), est toujours inscrit, malgré ses potentialités, sur la liste des pays pauvres qui continuent de tendre la main à l’Occident pour boucler ses budgets de financement.
Or, la plupart de ces pays de la CÉÉAC devrait récolter, selon les experts, chacun un peu plus de 200 milliards de dollars de revenus pétroliers pendant la prochaine décennie. Mais, en dépit de ces bons signes économiques, force est de constater que la rente pétrolière ne profite ni à leur développement encore moins aux populations qui se trouvent être d’ailleurs une des moins importantes par rapport aux autres régions d’Afrique, en terme démographique.
Il est incompréhensible qu’avec toutes ces richesses, le Gabon, avec ses 1,5 millions d’habitants, le Congo (4,3 M), la Guinée Equatoriale (720 000 hab), le Tchad (11,5 M hab) et le Cameroun (19,9 M hab), pour ne citer que ces pays, ne soient pas en mesure d’offrir une qualité de vie meilleure et décente à leurs populations. Comment comprendre alors qu’un pays comme l’Île Maurice ou encore les Seychelles, dépourvus de richesses fossile et minière qui ont pour principale ressource que la rente du tourisme, sont des modèles économiques de réussite par rapport à ces cinq pays de l’Afrique centrale, pourtant gâtés par la nature ? A mon avis, il faut aller chercher la réponse ailleurs.
Le scandale des «Biens mal acquis » qui défraie la chronique dans la région CÉÉAC pourrait donner quelques pistes sur la fuite effrénée des richesses de ces pays vers les paradis fiscaux et des destinations bien connues comme la France où les autorités judiciaires ont déjà mis sous scellé certains de ces biens. Le cas le plus édifiant est certainement celui de la saisie record de mobiliers, d’immobiliers et de véhicules de luxe chez les Obiang à Paris.
A ce jour encore, les enquêteurs français recherchent toujours des preuves pour expliquer comment Teodoro Nguema Obiang, le fils du président équato-guinéen, a pu s'offrir une villa de 35 millions de dollars à Malibu dans l'État de Californie, un jet privé de 38 millions de dollars, quatre Ferraris d'une valeur de 1 million de dollars à raison de 250.000 dollars chacune, 2 Rolls-Royce de 700.000 dollars à raison de 350.000 dollars chacune, une Bentley de 240.000 dollars, 2 Maybachs de 700.000 dollars à raison de 350.000 dollars chacune. Cette liste n’est pas exhaustive.
Il n’y a aucun doute pour les enquêteurs, l’argent qui sert à financer tous ces biens, proviendrait des rentes du pétrole. L’opacité de sa gestion et le manque de transparence seraient à l’origine des enrichissements difficiles à expliquer. Devant l’insolence des richesses acquises par une minorité de la classe dirigeante, la sonnette d’alarme a été donnée, non pas par les opposants aux régimes richissimes de l’Afrique centrale, mais par des hommes de Dieu.
« Notre pétrole est encore, dans bien des cas, la réserve financière privée des pouvoirs en place... L’Afrique centrale croupit dans la misère en dépit de la découverte croissante de puits de pétrole… Notre engagement, en tant qu’Eglise en Afrique Centrale, par rapport à la question du pétrole, ne relève pas d’une ingérence dans le domaine réservé des Etats. Nous sommes témoins de la souffrance du peuple auquel nous appartenons. Notre mission prophétique nous impose de lancer un appel du cœur à tous ceux qui participent à l’exploitation du pétrole dans notre zone ou qui détiennent une parcelle du pouvoir politique et économique.» Déclaration très révélatrice des Evêques catholiques d’Afrique Centrale (Association des Conférences Episcopales de la Région de l’Afrique Centrale), publiée en 2002. Plus de dix ans après la diatribe religieuse, rien n’a vraiment changé.
« L’Afrique sub-saharienne connaît une période de boom pétrolier sans précédent. Ce nouveau boom pétrolier de l’Afrique constitue à la fois une chance et un piège pour ces pays où la pauvreté reste endémique. Dans la plupart de ces pays, la présence de pétrole n’a en rien contribué à réduire la pauvreté, elle l’a plutôt exacerbée » constate à son tour Catholic Relief Services, une association humanitaire de l'église catholique américaine membre de Caritas Internationalis.
Au-delà même de ces constats, il faut bien comprendre que dans cette affaire de « Biens mal acquis », s'il n'y avait pas de corrupteurs, il n'y aurait pas sûrement de corrompus. Le clientélisme, le népotisme et la corruption, les traits caractéristiques les mieux partagés dans la région, sont encouragés par des prédateurs du profit, prêts à user de tous les moyens, même militaires par le financement de rébellions, pour arriver à leurs fins.
On voit bien que la compétition qui fait rage entre les multinationales occidentales (Shell, BP-Amoco, Chevron, Texaco, Exxon, ou Total Fina Elf) pour la conquête des réserves pétrolières de l’Afrique centrale expliquerait en partie le contexte de conflictualité permanente de la région.
Clément Yao
Selon un rapport de la British Petreolum Review of World Energy, sur les dix premières réserves pétrolières en Afrique, cinq sont situées plus précisément en Afrique centrale. Le Gabon avec ses 30 champs de production, 7e réserve de pétrole en Afrique (3,7 milliards de barils) devant le Congo (1,9), la Guinée Équatoriale (1,7) et le Tchad (1,5), est toujours inscrit, malgré ses potentialités, sur la liste des pays pauvres qui continuent de tendre la main à l’Occident pour boucler ses budgets de financement.
Or, la plupart de ces pays de la CÉÉAC devrait récolter, selon les experts, chacun un peu plus de 200 milliards de dollars de revenus pétroliers pendant la prochaine décennie. Mais, en dépit de ces bons signes économiques, force est de constater que la rente pétrolière ne profite ni à leur développement encore moins aux populations qui se trouvent être d’ailleurs une des moins importantes par rapport aux autres régions d’Afrique, en terme démographique.
Il est incompréhensible qu’avec toutes ces richesses, le Gabon, avec ses 1,5 millions d’habitants, le Congo (4,3 M), la Guinée Equatoriale (720 000 hab), le Tchad (11,5 M hab) et le Cameroun (19,9 M hab), pour ne citer que ces pays, ne soient pas en mesure d’offrir une qualité de vie meilleure et décente à leurs populations. Comment comprendre alors qu’un pays comme l’Île Maurice ou encore les Seychelles, dépourvus de richesses fossile et minière qui ont pour principale ressource que la rente du tourisme, sont des modèles économiques de réussite par rapport à ces cinq pays de l’Afrique centrale, pourtant gâtés par la nature ? A mon avis, il faut aller chercher la réponse ailleurs.
Le scandale des «Biens mal acquis » qui défraie la chronique dans la région CÉÉAC pourrait donner quelques pistes sur la fuite effrénée des richesses de ces pays vers les paradis fiscaux et des destinations bien connues comme la France où les autorités judiciaires ont déjà mis sous scellé certains de ces biens. Le cas le plus édifiant est certainement celui de la saisie record de mobiliers, d’immobiliers et de véhicules de luxe chez les Obiang à Paris.
A ce jour encore, les enquêteurs français recherchent toujours des preuves pour expliquer comment Teodoro Nguema Obiang, le fils du président équato-guinéen, a pu s'offrir une villa de 35 millions de dollars à Malibu dans l'État de Californie, un jet privé de 38 millions de dollars, quatre Ferraris d'une valeur de 1 million de dollars à raison de 250.000 dollars chacune, 2 Rolls-Royce de 700.000 dollars à raison de 350.000 dollars chacune, une Bentley de 240.000 dollars, 2 Maybachs de 700.000 dollars à raison de 350.000 dollars chacune. Cette liste n’est pas exhaustive.
Il n’y a aucun doute pour les enquêteurs, l’argent qui sert à financer tous ces biens, proviendrait des rentes du pétrole. L’opacité de sa gestion et le manque de transparence seraient à l’origine des enrichissements difficiles à expliquer. Devant l’insolence des richesses acquises par une minorité de la classe dirigeante, la sonnette d’alarme a été donnée, non pas par les opposants aux régimes richissimes de l’Afrique centrale, mais par des hommes de Dieu.
« Notre pétrole est encore, dans bien des cas, la réserve financière privée des pouvoirs en place... L’Afrique centrale croupit dans la misère en dépit de la découverte croissante de puits de pétrole… Notre engagement, en tant qu’Eglise en Afrique Centrale, par rapport à la question du pétrole, ne relève pas d’une ingérence dans le domaine réservé des Etats. Nous sommes témoins de la souffrance du peuple auquel nous appartenons. Notre mission prophétique nous impose de lancer un appel du cœur à tous ceux qui participent à l’exploitation du pétrole dans notre zone ou qui détiennent une parcelle du pouvoir politique et économique.» Déclaration très révélatrice des Evêques catholiques d’Afrique Centrale (Association des Conférences Episcopales de la Région de l’Afrique Centrale), publiée en 2002. Plus de dix ans après la diatribe religieuse, rien n’a vraiment changé.
« L’Afrique sub-saharienne connaît une période de boom pétrolier sans précédent. Ce nouveau boom pétrolier de l’Afrique constitue à la fois une chance et un piège pour ces pays où la pauvreté reste endémique. Dans la plupart de ces pays, la présence de pétrole n’a en rien contribué à réduire la pauvreté, elle l’a plutôt exacerbée » constate à son tour Catholic Relief Services, une association humanitaire de l'église catholique américaine membre de Caritas Internationalis.
Au-delà même de ces constats, il faut bien comprendre que dans cette affaire de « Biens mal acquis », s'il n'y avait pas de corrupteurs, il n'y aurait pas sûrement de corrompus. Le clientélisme, le népotisme et la corruption, les traits caractéristiques les mieux partagés dans la région, sont encouragés par des prédateurs du profit, prêts à user de tous les moyens, même militaires par le financement de rébellions, pour arriver à leurs fins.
On voit bien que la compétition qui fait rage entre les multinationales occidentales (Shell, BP-Amoco, Chevron, Texaco, Exxon, ou Total Fina Elf) pour la conquête des réserves pétrolières de l’Afrique centrale expliquerait en partie le contexte de conflictualité permanente de la région.
Clément Yao