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International Publié le mercredi 22 mai 2013 | Le Temps

Michel Djotodia, Président de la République centrafricaine : «Nous pensons que l’Ua reviendra à de meilleurs sentiments…»

Plus de deux mois après sa prise du Pouvoir, Michel Djotodia, souffle le chaud et froid. De la situation sécuritaire à Bangui, à ses relations avec les pays voisins, le Président centrafricain s’est confié à Le Temps.

Quel point faites-vous de la situation sécuritaire ?
Tout d’abord, je tiens à exprimer ma reconnaissance au Président de la Guinée Equatoriale et par la même occasion, lui exprimer notre reconnaissance. Concernant la question relative à la sécurité, je tiens à préciser que la situation se normalise progressivement dans la capitale depuis plus de deux semaines, il n’y a plus de sommation, de vols, de coups de feu et braquages par-ci et par-là. Ce qui voudrait dire que la paix revient. Dans l’arrière-pays effectivement, il y a un calme absolu à part la Lrla qui est en train de sévir à l’extrême nord est du pays. S’agissant du cantonnement, il porte sur les 16 préfectures; la seizième, étant l’extrême-est. Dans le Wouboumou, nous frères ougandais et les troupes américaines y sont. Nous nous sommes dit que nous n’allons pas cantonner les hommes dans cette préfecture là. Donc, il en reste quinze plus la capitale. Ce qui voudrait dire que nous avons 16 Points de regroupements. Avant de quitter Bangui (lundi dernier), nous avions déjà commencé le premier cantonnement. Cette opération a été lancée en présence de tout le monde. Nous avons choisi comme point de départ, le cantonnement dans la préfecture de la Haute Poto. Parce que dans cette zone très éloignée de la capitale, la Lrla sévit en maître. Donc, il faut déjà cantonner en nombre nos hommes là-bas. Pour pouvoir cantonner et combattre cette rébellion de la Lra. Nous n’allons pas encore attendre la communauté internationale. Nous sommes en mesure de les déloger. C’est ce que nous ferons d’ici peu. Nous leur avons donné un délai de trois mois et eux-mêmes, ils le savent. Car, nous savons où ils se trouvent; ces bandits. Nous avons décidé de les combattre jusque dans leur dernier retranchement. N’eut été cette tournée que nous sommes en train d’effectuer, nous devions déjà lancer la deuxième opération à Waka, qui est la grande préfecture.

Pourquoi cette préfecture ?
Parce que c’est une région industrielle avec les usines qu’il faut protéger. Afin de redémarrer les activités économiques, pour le bien-être des populations de cette région. Après le cantonnement, nous allons affecter des instructeurs qui auront pour missions de former les éléments de l’ex-Seleka qui n’existe plus. Désormais, on parle de Force armée centrafricaine (Faca). Ces instructeurs recrutés auront pour missions de former les éléments de l’ex-Seleka. Ensuite, nous affecterons un secrétaire qui sera chargé de répertorier tous ceux qui peuvent faire l’objet de désarmement. Ce n’est qu’après, que nous ferons un recrutement général et ensuite avec les ex-éléments de Seleka et ceux qui seront nouvellement recrutés, pourront constituer une armée vraiment républicaine.
Monsieur le Président, vous venez de N’djamena après Libreville, aujourd’hui vous êtes à Malabo. Est-ce que vous êtes à la recherche d’argent pour éponger une partie des arriérés de salaires des Fonctionnaires centrafricains?
Nous sommes de la même communauté. La Guinée Equatoriale fait partie de la Cemac et de la Ceac. Il est de notre devoir de passer de capitale en capitale, pour dire merci à nos frères et voisins. Hier, ils étaient avec nous, ils seront obligés d’être encore avec nous pour nous accompagner dans la gestion de la transition. Il serait égoïste de notre part, de ne pas venir leur dire merci. Ce n’est pas une honte, nous ne cherchons rien. Nous sommes des Africains, ce sont nos frères et nous venons leur expliquer nos problèmes. Il va de soit que nous leur expliquons nos problèmes et ils sont prêts à nous accompagner(…)
Est-ce qu’il ya un problème entre le gouvernement camerounais et vous, étant donné que Bozizé séjourne au Cameroun ?
Il n’y a aucun problème entre la Rca et le Cameroun. Ce pays est notre voisin immédiat et nous avons une histoire commune. C’est une question de calendrier. Ces derniers temps, le calendrier de mon frère Paul Biya est beaucoup chargé. Il n’y a pas de raison que pour des problèmes concernant une personne, nous en fassions une affaire d’Etat. Il est là-bas, peut-être qu’il y a encore des démarches à entreprendre mais au moment opportun, M. Bozizé partira du Cameroun. Il n’a pas dit qu’il restera éternellement là-bas. En principe, c’est hier jeudi 16 mai, que je devrais me rendre à Yaoundé mais compte tenu de son calendrier, je suis obligé de partir deux jours à Libreville, au Gabon.
Le cinquantenaire de l’Union africaine, c’est pour bientôt. Est-ce que vous prendrez part à cette cérémonie et quels sont vos rapports avec la communauté internationale ?
Je n’ai rien contre l’Ua qui est notre organisation commune. Puisqu’ il y a eu des sanctions qui ont été prises à l’encontre de la Rca, nous ne pouvons pas y participer. Toutefois, nous pensons que d’Ici là, cette organisation qui est la nôtre, reviendra à de meilleurs sentiments et lèvera la suspension.
On apprend que la frontière Est d’avec le Cameroun est le théâtre de quelques échauffourées entre la Seleka et l’armée Régulière Camerounaise. Votre commentaire ?
C’est un pays frère et voisin immédiat et nous n’avons aucune intention de déstabiliser ce pays. Idem pour le Cameroun qui n’a aucun intérêt à nous déstabiliser. Ça été simplement un incident. Nous prenons sportivement cet incident, sinon, il n’y a rien.
Quelles dispositions prenez-vous pour le rapatriement des refugiés centrafricains qui sont au nord de la Rdc ?
La situation dans laquelle nous vivons, il est tout à fait normal que des frères se retrouvent de l’autre côté. Le Premier ministre et moi-même sommes en train de voir, dans quelles mesures rapatrier nos frères dans les jours à venir. Les démarches sont en cours au niveau des deux Etats. S’agissant de nos rapports avec le Président Kabila, je voudrais également dire que mon homologue est un frère de la Ceac. Bozizé est un individu. Les hommes passent et le pays demeure. Nous aussi, nous allons partir et la Rca restera la Rca. Nous avons eu de très bons rapports par le passé et il n’y a pas de raison qu’on remette en cause ces relations. Le même peuple qui est de l’autres côté, c’est le même chez nous. Nous sommes tous des Bantou. Il y a peut-être des malentendus entre individus. Nous pensons qu’il n y a rien de grave entre la Rdc et notre pays. En ce qui concerne nos rapports avec la Rdc, elles sont bonnes, nous avons eu par le passé de très bonnes relations et il n’y a pas de raison qu’on les remettent en cause.
Comment allez-vous faire, vous qui êtes arrivé au Pouvoir dans les mêmes conditions que votre prédécesseur, pourqu’on n’accède plus au Pouvoir par la voie des armes ?
Il est bien vrai que nous sommes arrivés au Pouvoir par les mêmes méthodes et les mêmes moyens que notre prédécesseur, mais les réalités ne sont pas les mêmes dans tous les pays. En ce qui concerne notre pays, il était dans une situation difficile. Je ne sais pas si vous avez suivi tout ce qui s’est passé depuis Libreville jusqu’à ce jour. C’est clair, nous avons tendu la main à Bozizé. Quand les Nations unies nous ont demandés, quels étaient nos préalables que nous posons avant d’aller à la table de négociation, nous leur avons dit aucun. Parce que nous voulions la paix. Lorsque nous sommes arrivés à Libreville, nous n’avons pas posé de conditions drastiques pour qu’il n’y ait pas d’aboutissement malheureux à cette rencontre. Nous lui avons toujours tendu la main car nous sommes à la recherche de la paix. Ce n’est pas parce que nous voulions le Pouvoir. Sinon, on fonçait directement à Bangui et nous en avons les capacités et les armes qu’il faut avec plus de 10 mille hommes qui pouvaient monter sur Bangui. Nous ne l’avons pas fait parce que nous voulions amener Bozizé à coopérer et à nous écouter et à faire redémarrer l’économie de notre pays. Malheureusement, il n’a jamais voulu nous écouter encore moins ses homologues de la Cemac et de la Ceac. Il n’a jamais voulu entendre raison. Quand je suis rentré j’étais vice-Premier ministre en charge de la défense. Il y avait un ministre qui était choisi de façon consensuelle en la personne de Me Kamga, mais ce dernier n’avait pas les mains libres. Bozizé en fin de compte avait l’intention de se présenter en 2016 (…) Vous à notre place, qu’alliez-vous faire ?
Il se dit que depuis votre arrivée au Pouvoir, les dirigeants de l’Eglise Catholique se disent persécutés dans votre pays. Qu’en est–il exactement ?
Ceux qui nous accusent d’attiser la fibre religieuse, je voudrais vous dire qu’en Rca, il n’y a jamais eu de conflit interethnique encore moins, un conflit religieux. Il n’y a jamais eu de bagarre, entre chrétiens et musulmans. Le défunt régime, pour s’agripper au Pouvoir avait distribué des armes blanches et armes à feu au vu et au su de tout le monde. Bref, c’était un génocide qui se préparait. Nous avons perdu des parents, en tout cas, beaucoup sont morts sous Bozizé. Nos compatriotes sont là et ils peuvent témoigner (…) La Rca est un Etat laïc et lorsque nous sommes rentrés, nous n’avons pas brandit la Religion musulmane. Certes, nous sommes des musulmans mais des musulmans modérés. Nous nous sommes engagés à ramener la paix en République Centrafricaine (Rca).

Par Bamba Mafoumgbé, bamaf2000@yahoo.fr, envoyé spécial à Malabo (Guinée
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