Direction absente, Secrétariat général démissionnaire, Comité central inexistant, organisations de jeunes et de femmes fantômes, bref, des instances invisibles. Le tableau de bord du Rdr, parti au pouvoir, montre une formation politique malade, ou presque. Chez les militants de base, l’exaspération est à son comble, quasiment. Réunis samedi dernier, à la Rue Lépic, des dizaines de militants ont crié leur colère contre l’entourage du président de la République Alassane Ouattara, sans l’épargner lui-même. C’était à l’occasion, justement, de la mise en place d’une «plateforme d’écoute» des militants, initiée par l’ancien patron des jeunes, Joseph Odjé Tiacoré aujourd’hui à la tête de l’Association des anciens du Rjr et par Haïdara Mamadou, leader du mouvement, le Cercle libéral. A en croire les déçus de la case républicaine, le mal vient de leurs ministres. Hier, grands charmeurs des militants, ils seraient aujourd’hui oublieux de la base. Et ont, pour certains, changé leurs numéros téléphoniques pour se rendre inaccessibles. «Au Rdr, c’est la sorcellerie. Quand ils ne sont pas nommés, ils aiment tout le monde. Quand ils sont nommés, ils oublient tout le monde», s’est indigné Camara Ibrahim, alias «Le Mannois», militant réputé engagé et franc. «Aujourd’hui, on délègue quelqu’un pour faire l’état des lieux de la santé du parti. Ça veut dire qu’au niveau du parti, il n’y a aucune cellule de veille», a renchéri Dramane Ouattara, un autre militant qui, lui, a mis en cause le chef du parti, le président de la République. Cerné, reclus sur «un lopin de terre de l’hôtel du golf», Alassane Ouattara avait, selon lui, su s’attirer l’apport de ses militants, quand il en avait besoin, hier. Aujourd’hui, il sait à peine où ils se trouvent. «Quand on avait besoin d’informations, on connaissait où les gens se trouvent. Moi je dis : ce n’est pas la faute de l’entourage du président. C’est le président lui-même», a-t-il dit. Soro Salifou, autre militant issu d’une section de Korhogo, a estimé que la base comporte plusieurs catégories de «victimes», laissées-pour-compte, après l’ascession au pouvoir des Républicains. Comme pour permettre à ces militants de vider la besace, la plateforme envisage ce qu’elle appelle «des forums référendaires» ou «des Journées nationales d’écoute des militants», à partir du 8 juin prochain. «Nous considérons que la Direction actuelle ne fait pas son travail. En tout cas, pas pour que le président de la République soit réélu en 2015», a reconnu Haïdara Mamadou. Ces journées annoncées seront, a-t-il dit, une sorte de «dialogue direct entre le président de la République et les militants». Pour Joseph Odjé Tiacoré, «il faut redonner une nouvelle âme au parti», par «une restructuration du parti» qui fait émerger «des hommes nouveaux». Lors d’une conférence de presse qui a clos ce débat interne au parti, Joseph Odjé Tiacoré a répondu à Konan Kouadio Bertin du Pdci et Blé Guirao de l’Udpci, qui ont récemment constaté «la mort» du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp), la coalition au pouvoir. Il y a vu «des taupes» qui roulent pour le Fpi de l’ancien président Laurent Gbagbo. Mais on le voit, le Rdr a, avant tout, besoin de balayer dans sa propre case.
BENOIT HILI
BENOIT HILI
