La guerre et la violence prenant corps dans l'esprit des hommes, les déboires de Justin Koua avec les grandes oreilles ivoiriennes peuvent servir de prétexte pour inviter les uns et les autres à tenir un discours politique et public plus responsable. Miaka Oureto, Dano Djédjé, Amani N’guesan, Richard Kodjo, Marie-Odette Lorougnon et d'autres cadres dirigeants du Fpi, à la conviction inébranlable, auteurs et acteurs d'un militantisme sans suspicion ni concession, parlent librement dans le pays et circulent sans être inquiétés. En plus du souci d'apaiser le discours public contenu dans cette interpellation et au-delà des liens allégués avec les attaques d'Abengourou et les manifestants de Bouaké, certaines informations auraient établi un lien entre les propos jugés séditieux et insurrectionnels de Koua Justin, d'une part et les entreprises en cours, de forces extrémistes civiles et militaires isolés qui, trouvant longue la période de recherche de preuves contre Laurent Gbagbo et son maintien en prison, rêvent de passer à l'action contre le pouvoir en place à Abidjan...Le discours guerrier et révolutionnaire que tenait Justin Koua, la défiance permanente et l'irrévérence envers les actuels dépositaires de l'autorité publique avaient fini par donner une fâcheuse impression d'invulnérabilité, d'invincibilité et d'intouchabilité à celui qui avait pris une posture de héros et avait fini par donner le sentiment qu'il voulait et pouvait réussir là où son mentor, Laurent Gbagbo, a échoué pour le moment : empêcher Ouattara d’acceder au pouvoir et de gouverner . Cela dit, cette analyse sur Justin Koua serait incomplète si elle ne soulevait pas les critiques formulées par ceux qui désapprouvent aussi bien le fond, que la forme de cette arrestation. Sur le fond, les uns se demandent : Koua, combien de divisions ? Pour eux, avec les Simone Gbagbo, Affi, Blé Goudé, Lida, Dogbo Blé, etc, déjà en prison, qu'est-ce que le pouvoir gagne à arrêter Justin Koua ? Sinon à en faire un martyr ? Ils ne sont pas Fpi, ni pro-Gbagbo mais n'approuvent pas cette arrestation et mettent en doute les raisons avancées par le gouvernement. Au sujet de la forme, ils déplorent la présence du CCDO, qui court le risque de se faire détester comme le Cecos et souhaitent qu'en l'absence de flagrant délit, les arrestations et interpellations des acteurs politiques se fassent désormais dans les règles de l'art. Enfin, comme pour souffler le chaud et le froid, la cérémonie du Fpi à Yopougon que préparait Justin Koua lorsqu'il a été arrêté, a eu lieu sans violence, de même que l'hommage du Fpi aux femmes, à son siège provisoire. La tenue de ces deux événements le samedi dernier, est appréciée de part et d'autre et semble atténuer un peu, les critiques au sujet de l'interpellation de Justin Koua qui, avec cette interpellation obtient une légitimation supplémentaire dans la galaxie pro-Gbagbo, pour avoir fait les geôles, par rapport à ceux qui sont en liberté, ou en exil. Ceux-ci vivent leur part de douleur et de sacrifices certes, mais Justin Koua gagne davantage de légitimité. Ce qui fait dire en riant, à certains, qu'au fond le pouvoir d'Abidjan rend service au prédécesseur de Douhouré Dahi Nestor, nouveau secrétaire national par intérim de la Jfpi, qui a déjà annoncé les couleurs à son niveau.
Charlotte Tapé et Ismaël Dembélé.
Charlotte Tapé et Ismaël Dembélé.