ABIDJAN (Région des Lagunes), Il y a le trublion, le "sphinx" et le président-candidat: la crise de nerfs qui secoue le principal parti allié au chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara marque le début des manoeuvres en vue de la présidentielle de 2015.
Cela faisait longtemps qu’une telle fièvre ne s’était emparée du vénérable Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), ex-parti unique créé par Félix Houphouët-Boigny, "père de la Nation" au pouvoir de l’indépendance en 1960 jusqu’à sa mort en 1993.
Le responsable: Kouadio Konan Bertin, connu par ses initiales "KKB", leader de la jeunesse du parti et député. Petite taille mais verbe haut, ce "jeune" de 44 ans multiplie depuis quelques semaines les sorties fracassantes.
Son credo: il sera candidat à la présidence du parti, qui doit renouveler ses instances lors d’un congrès en octobre, et le PDCI doit "sans hésitation" aligner un candidat face à M. Ouattara en 2015. "KKB" ne va pas jusqu’à dire s’il sera candidat à la présidentielle.
Sa cible numéro un est l’actuel président du PDCI, Henri Konan Bédié, qui à 79 ans paraît sur la voie d’une réélection. Surnommé le "sphinx de Daoukro" (son fief du centre-est) en raison de son naturel taiseux, il dirigea le pays de 1993 jusqu’au putsch de 1999, et a été un allié décisif dans l’élection du président Ouattara en 2010.
S’il ne manque jamais de présenter M. Bédié comme son "père", "KKB" ne l’épargne pas quand il évoque ses propres ambitions: "on ne construira pas le PDCI de demain avec les dirigeants d’hier et on ne fera pas du neuf avec du vieux", déclare-t-il à l’AFP.
M. Bédié fait mine de ne pas s’inquiéter des agissements de celui qu’il traitait récemment de "soldat perdu". Et laisse à ses lieutenants le soin de répliquer à l’insolent.
L’ex-chef de l’Etat est aujourd’hui "celui qu’il faut pour fédérer toutes les énergies" au PDCI, assure Kobenan Kouassi Adjoumani, haut responsable du parti et ministre.
Quid de la limite d’âge de 75 ans fixée par les statuts du parti, en vertu desquels M. Bédié devrait être hors course? "Les textes sont faits pour être amendés", répond M. Adjoumani.
Les pro-Gbagbo en embuscade
Les pro-Bédié s’activent pour préparer la reconduction de leur champion qui, sans faire acte de candidature, se dit "à la disposition du parti".
Une réunion d’instances du PDCI prévue mi-août devrait, sauf surprise, tourner à la démonstration de force du camp Bédié, avant le moment de vérité que sera le congrès d’octobre.
Vu le branle-bas de combat contre le chef de la jeunesse du PDCI, "je ne suis pas sûr que +KKB+ ait accès à la salle le jour du congrès", glisse un proche de M. Ouattara. L’enjeu des actuelles secousses au PDCI est capital pour le chef de l’Etat: au pouvoir depuis la fin de la crise postélectorale de 2010-2011 ayant fait quelque 3.000 morts, il est d’ores et déjà candidat à sa succession en 2015.
M. Ouattara a besoin d’un allié solide, et de préférence rangé derrière lui dès le premier tour. Dans son entourage, on se dit confiant que le PDCI "ne présentera pas de candidat" à la présidentielle.
La perspective que le PDCI ne se lance pas dans la bataille en 2015 semble en effet de plus en plus plausible au vu des déclarations des pro-Bédié, au grand dam de "KKB" pour qui "on n’est jamais mieux servi que par soi-même".
Mais ce choix pourrait renforcer les frustrations parmi militants et électeurs du PDCI, souvent sensibles au discours de Kouadio Konan Bertin.
Au sein de la communauté baoulé (l’une des principales ethnies, historiquement ancrée dans le centre du pays et base électorale du PDCI), beaucoup considèrent que l’alliance avec le président Ouattara profite d’abord à ses fidèles et aux Nordistes comme lui.
"Le malaise est réel", souligne un familier des arcanes du PDCI.
"+KKB+ cherche seulement à se positionner pour l’après-Bédié mais, ce faisant, il attise les tensions", juge un diplomate.
Pendant ce temps, le Front populaire ivoirien (FPI), parti de l’ex-président Laurent Gbagbo, tombé en avril 2011, multiplie les appels du pied au PDCI et rêve d’une alliance en 2015 contre M. Ouattara avec ce parti jadis honni.
"En Côte d’Ivoire, avertit un observateur, toutes les alliances sont possibles".
eak-tmo/de
Cela faisait longtemps qu’une telle fièvre ne s’était emparée du vénérable Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), ex-parti unique créé par Félix Houphouët-Boigny, "père de la Nation" au pouvoir de l’indépendance en 1960 jusqu’à sa mort en 1993.
Le responsable: Kouadio Konan Bertin, connu par ses initiales "KKB", leader de la jeunesse du parti et député. Petite taille mais verbe haut, ce "jeune" de 44 ans multiplie depuis quelques semaines les sorties fracassantes.
Son credo: il sera candidat à la présidence du parti, qui doit renouveler ses instances lors d’un congrès en octobre, et le PDCI doit "sans hésitation" aligner un candidat face à M. Ouattara en 2015. "KKB" ne va pas jusqu’à dire s’il sera candidat à la présidentielle.
Sa cible numéro un est l’actuel président du PDCI, Henri Konan Bédié, qui à 79 ans paraît sur la voie d’une réélection. Surnommé le "sphinx de Daoukro" (son fief du centre-est) en raison de son naturel taiseux, il dirigea le pays de 1993 jusqu’au putsch de 1999, et a été un allié décisif dans l’élection du président Ouattara en 2010.
S’il ne manque jamais de présenter M. Bédié comme son "père", "KKB" ne l’épargne pas quand il évoque ses propres ambitions: "on ne construira pas le PDCI de demain avec les dirigeants d’hier et on ne fera pas du neuf avec du vieux", déclare-t-il à l’AFP.
M. Bédié fait mine de ne pas s’inquiéter des agissements de celui qu’il traitait récemment de "soldat perdu". Et laisse à ses lieutenants le soin de répliquer à l’insolent.
L’ex-chef de l’Etat est aujourd’hui "celui qu’il faut pour fédérer toutes les énergies" au PDCI, assure Kobenan Kouassi Adjoumani, haut responsable du parti et ministre.
Quid de la limite d’âge de 75 ans fixée par les statuts du parti, en vertu desquels M. Bédié devrait être hors course? "Les textes sont faits pour être amendés", répond M. Adjoumani.
Les pro-Gbagbo en embuscade
Les pro-Bédié s’activent pour préparer la reconduction de leur champion qui, sans faire acte de candidature, se dit "à la disposition du parti".
Une réunion d’instances du PDCI prévue mi-août devrait, sauf surprise, tourner à la démonstration de force du camp Bédié, avant le moment de vérité que sera le congrès d’octobre.
Vu le branle-bas de combat contre le chef de la jeunesse du PDCI, "je ne suis pas sûr que +KKB+ ait accès à la salle le jour du congrès", glisse un proche de M. Ouattara. L’enjeu des actuelles secousses au PDCI est capital pour le chef de l’Etat: au pouvoir depuis la fin de la crise postélectorale de 2010-2011 ayant fait quelque 3.000 morts, il est d’ores et déjà candidat à sa succession en 2015.
M. Ouattara a besoin d’un allié solide, et de préférence rangé derrière lui dès le premier tour. Dans son entourage, on se dit confiant que le PDCI "ne présentera pas de candidat" à la présidentielle.
La perspective que le PDCI ne se lance pas dans la bataille en 2015 semble en effet de plus en plus plausible au vu des déclarations des pro-Bédié, au grand dam de "KKB" pour qui "on n’est jamais mieux servi que par soi-même".
Mais ce choix pourrait renforcer les frustrations parmi militants et électeurs du PDCI, souvent sensibles au discours de Kouadio Konan Bertin.
Au sein de la communauté baoulé (l’une des principales ethnies, historiquement ancrée dans le centre du pays et base électorale du PDCI), beaucoup considèrent que l’alliance avec le président Ouattara profite d’abord à ses fidèles et aux Nordistes comme lui.
"Le malaise est réel", souligne un familier des arcanes du PDCI.
"+KKB+ cherche seulement à se positionner pour l’après-Bédié mais, ce faisant, il attise les tensions", juge un diplomate.
Pendant ce temps, le Front populaire ivoirien (FPI), parti de l’ex-président Laurent Gbagbo, tombé en avril 2011, multiplie les appels du pied au PDCI et rêve d’une alliance en 2015 contre M. Ouattara avec ce parti jadis honni.
"En Côte d’Ivoire, avertit un observateur, toutes les alliances sont possibles".
eak-tmo/de