Parcourez tous les grands carrefours d'Abidjan, aujourd'hui, vous vous apercevrez que la capitale économique de la Côte d'Ivoire est devenue un grand bazar en plein air. C'est donc à raison que les puristes du secteur des arts qualifient Abidjan de « galerie à ciel ouvert».
Le tout commence le vendredi 26 juillet dernier. Jean-Marcel Djimbléa, après 23 ans de vie professionnelle bien remplie dans le secteur de la Métallurgie en France, est rentré au pays en prenant le soin de s'acheter une résidence cossue, un triplex, à Cocody-Riviera- Palmeraie. A quelques jours de l'arrivée de son épouse et de ses trois enfants pour les vacances 2013, M. Djimbléa, qui est au stade d'ameublement de sa résidence, croit bon qu'il lui faut de belles œuvres d'art pour décorer les différentes pièces de sa maison. Il décide donc de se rendre au Plateau où il est persuadé de trouver une galerie pour s'approvisionner en tableaux. Chemin faisant, compte-tenu des travaux de l'échangeur du carrefour de la Riviera 2, il bifurque par les Deux-Plateaux Vallon. Au feu de la Pâtisserie " Chez Pako", agréable fut la surprise de Jean-Michel de voir placardés le long d'un mur imposant un nombre impressionnant de tableaux d'art. Il décide donc de mettre pied à terre. Le cœur enjoué, il se met à passer en revue les tableaux de toutes les formes et de toutes les couleurs. « J'avais prévu acquérir deux à trois tableaux à hauteur de cinq millions. Mais, ici, avec un million de Francs CFA, j'ai acquis dix tableaux de belle facture et qui me plaisent bien », se réjouit-il en admettant avoir évité les embouteillages et surtout un long marchandage pour négocier une baisse sur tel ou tel tableau dans une galerie au Plateau.
Des ornements embellissants
Ce qui frappe surtout tout visiteur en regardant les tableaux d'Alassane Bambara, c'est la beauté des dessins et des figures géométriques griffonnés sur les tableaux. Et il n'est pas rare de voir des passionnés de l'art éberlués devant ces tableaux qu'ils ne manquent pas de qualifier de « joyaux artistiques» exposés en plein air. Aussi faut-il remarquer la qualité du matériau utilisé pour confectionner ces œuvres. Ce qui est à noter également, c'est qu'Alassane Bambara, dans son inspiration, embrasse plusieurs genres d'écritures picturales. Du figuratif au naturalisme en passant par le "vohou-vohou", ce dernier genre typiquement ivoirien qui consiste à peindre un tableau avec toute matière de récupération. Il n'est pas non plus rare de voir parmi ces tableaux des imitations d'œuvres d'art de renom tels "la Joconde" de Leonardo De Vinci, le portrait de la célèbre Marylin Monroe réalisé par Andy Warhol etc.
Tous les jours, même les dimanches et les jours fériés, les tableaux sont exposés sur des cimaises conventionnelles à l'air libre. L'artiste, dans une maisonnette qui lui sert d'atelier, travaille avec entrain et abnégation habituelle. Mais, lorsqu'il constate qu'un client se présente, il met un bémol au travail pour s'occuper de lui, le guider tout le long du mur où sont disposés les tableaux en trois rangées.
Autre lieu, même décor. Lorsque nous arrivons en Zone 3, précisément à l'intersection de "la Rue du canal" et du Boulevard de Marseille, se trouve l'atelier de Bossoh Kokou Wolali, fait de planches rapiécées à l'aide de clous par endroits. Et c'est dans un mélange qui frise le chaos que la muse de l'artiste prospère. Lui est spécialisé dans la peinture sur toile. « Je peins la vie de tous les jours. Je m'inspire du quotidien des familles pour peindre», rapporte- il en nous indiquant sa dernière création en date. Ce jour-là, le ciel étant clément, le soleil presque d'aplomb dardait ses rayons. Et la lumière du soleil éclairait les tableaux de toutes les formes, disposés sur des cimaises, ressortait la clarté et la beauté des œuvres. « Bonjour Bossoh, je suis venu prendre ma commande», semble héler un homme qui descend d'une rutilante voiture de type 4X4 avec une Européenne. Bossoh et ses deux visiteurs s'engouffrent dans la baraque. L'un après l'autre, deux collaborateurs de l'artiste ramassent les tableaux pour les parquer à l'arrière de l'imposante voiture. Pendant ce temps, l'homme en question signe un chèque qu'il remet à Bossoh avant de prendre congé de lui. Lorsqu'il nous rejoint, le maître des lieux nous explique que l'acheteur est à la phase de décoration de son réceptif hôtelier qu'il vient d'achever à Yopougon. Ce sont, au total, vingt tableaux que le client venait d'arracher à "la galerie plein air". Malgré cela, il restait encore un nombre important de tableaux encore disposés sur des cimaises au bord de la route. Artiste pluridisciplinaire, Bossoh confectionne également des meubles en bois et en rotin.
L'accès facile pour
un achat rapide
Au "Grand carrefour de Koumassi", c'est l'ancienne station d'essence de la société "Texaco" qui sert de lieu d'exposition. Ici, nous sommes dans l'antre du portraitiste Théophile Kangah. Sur des contre- plaqués et des trépieds, le jeune artiste dispose ses créations. Lui- même, assis à l'ombre d'un parasol qui lui sert d'atelier, il réalise à l'aide de crayon à papier, de fusain comprimé, de pierre noire et de peinture, le portrait d'une dame dont il tient dans la main gauche la photo. « Je peux vous observer et réaliser votre portrait robot », lance Théophile en expliquant que son plus gros marché lui a rapporté cinq cent mille francs, car étant encore étudiant, ce sont à ses heures perdues qu'il peint. Mais déjà, il a un nombre impressionnant d'œuvres exposées à l'air libre.
Le constat est clair. Aujourd'hui, presque tous les carrefours d'Abidjan, sont devenus de véritables lieux de prédilection, pour les artistes qui n'ont pas de galerie, pour exposer le fruit de leurs créations artistiques. Que ce soit au carrefour "Chez Pako", " grand carrefour de Koumassi", " Carrefour Zone 3", "Carrefour Sébroko" etc, les artistes y créent et y exposent leurs objets d'art. A cela, il faut ajouter ceux qui vous brandissent, à presque tous les feux tricolores, des tableaux et bien d'autres objets d'art. Avec la mesure de déguerpissement des carrefours, qu'en sera-t-il pour eux ?
Réalisée par Jean- Antoine Doudou
Le tout commence le vendredi 26 juillet dernier. Jean-Marcel Djimbléa, après 23 ans de vie professionnelle bien remplie dans le secteur de la Métallurgie en France, est rentré au pays en prenant le soin de s'acheter une résidence cossue, un triplex, à Cocody-Riviera- Palmeraie. A quelques jours de l'arrivée de son épouse et de ses trois enfants pour les vacances 2013, M. Djimbléa, qui est au stade d'ameublement de sa résidence, croit bon qu'il lui faut de belles œuvres d'art pour décorer les différentes pièces de sa maison. Il décide donc de se rendre au Plateau où il est persuadé de trouver une galerie pour s'approvisionner en tableaux. Chemin faisant, compte-tenu des travaux de l'échangeur du carrefour de la Riviera 2, il bifurque par les Deux-Plateaux Vallon. Au feu de la Pâtisserie " Chez Pako", agréable fut la surprise de Jean-Michel de voir placardés le long d'un mur imposant un nombre impressionnant de tableaux d'art. Il décide donc de mettre pied à terre. Le cœur enjoué, il se met à passer en revue les tableaux de toutes les formes et de toutes les couleurs. « J'avais prévu acquérir deux à trois tableaux à hauteur de cinq millions. Mais, ici, avec un million de Francs CFA, j'ai acquis dix tableaux de belle facture et qui me plaisent bien », se réjouit-il en admettant avoir évité les embouteillages et surtout un long marchandage pour négocier une baisse sur tel ou tel tableau dans une galerie au Plateau.
Des ornements embellissants
Ce qui frappe surtout tout visiteur en regardant les tableaux d'Alassane Bambara, c'est la beauté des dessins et des figures géométriques griffonnés sur les tableaux. Et il n'est pas rare de voir des passionnés de l'art éberlués devant ces tableaux qu'ils ne manquent pas de qualifier de « joyaux artistiques» exposés en plein air. Aussi faut-il remarquer la qualité du matériau utilisé pour confectionner ces œuvres. Ce qui est à noter également, c'est qu'Alassane Bambara, dans son inspiration, embrasse plusieurs genres d'écritures picturales. Du figuratif au naturalisme en passant par le "vohou-vohou", ce dernier genre typiquement ivoirien qui consiste à peindre un tableau avec toute matière de récupération. Il n'est pas non plus rare de voir parmi ces tableaux des imitations d'œuvres d'art de renom tels "la Joconde" de Leonardo De Vinci, le portrait de la célèbre Marylin Monroe réalisé par Andy Warhol etc.
Tous les jours, même les dimanches et les jours fériés, les tableaux sont exposés sur des cimaises conventionnelles à l'air libre. L'artiste, dans une maisonnette qui lui sert d'atelier, travaille avec entrain et abnégation habituelle. Mais, lorsqu'il constate qu'un client se présente, il met un bémol au travail pour s'occuper de lui, le guider tout le long du mur où sont disposés les tableaux en trois rangées.
Autre lieu, même décor. Lorsque nous arrivons en Zone 3, précisément à l'intersection de "la Rue du canal" et du Boulevard de Marseille, se trouve l'atelier de Bossoh Kokou Wolali, fait de planches rapiécées à l'aide de clous par endroits. Et c'est dans un mélange qui frise le chaos que la muse de l'artiste prospère. Lui est spécialisé dans la peinture sur toile. « Je peins la vie de tous les jours. Je m'inspire du quotidien des familles pour peindre», rapporte- il en nous indiquant sa dernière création en date. Ce jour-là, le ciel étant clément, le soleil presque d'aplomb dardait ses rayons. Et la lumière du soleil éclairait les tableaux de toutes les formes, disposés sur des cimaises, ressortait la clarté et la beauté des œuvres. « Bonjour Bossoh, je suis venu prendre ma commande», semble héler un homme qui descend d'une rutilante voiture de type 4X4 avec une Européenne. Bossoh et ses deux visiteurs s'engouffrent dans la baraque. L'un après l'autre, deux collaborateurs de l'artiste ramassent les tableaux pour les parquer à l'arrière de l'imposante voiture. Pendant ce temps, l'homme en question signe un chèque qu'il remet à Bossoh avant de prendre congé de lui. Lorsqu'il nous rejoint, le maître des lieux nous explique que l'acheteur est à la phase de décoration de son réceptif hôtelier qu'il vient d'achever à Yopougon. Ce sont, au total, vingt tableaux que le client venait d'arracher à "la galerie plein air". Malgré cela, il restait encore un nombre important de tableaux encore disposés sur des cimaises au bord de la route. Artiste pluridisciplinaire, Bossoh confectionne également des meubles en bois et en rotin.
L'accès facile pour
un achat rapide
Au "Grand carrefour de Koumassi", c'est l'ancienne station d'essence de la société "Texaco" qui sert de lieu d'exposition. Ici, nous sommes dans l'antre du portraitiste Théophile Kangah. Sur des contre- plaqués et des trépieds, le jeune artiste dispose ses créations. Lui- même, assis à l'ombre d'un parasol qui lui sert d'atelier, il réalise à l'aide de crayon à papier, de fusain comprimé, de pierre noire et de peinture, le portrait d'une dame dont il tient dans la main gauche la photo. « Je peux vous observer et réaliser votre portrait robot », lance Théophile en expliquant que son plus gros marché lui a rapporté cinq cent mille francs, car étant encore étudiant, ce sont à ses heures perdues qu'il peint. Mais déjà, il a un nombre impressionnant d'œuvres exposées à l'air libre.
Le constat est clair. Aujourd'hui, presque tous les carrefours d'Abidjan, sont devenus de véritables lieux de prédilection, pour les artistes qui n'ont pas de galerie, pour exposer le fruit de leurs créations artistiques. Que ce soit au carrefour "Chez Pako", " grand carrefour de Koumassi", " Carrefour Zone 3", "Carrefour Sébroko" etc, les artistes y créent et y exposent leurs objets d'art. A cela, il faut ajouter ceux qui vous brandissent, à presque tous les feux tricolores, des tableaux et bien d'autres objets d'art. Avec la mesure de déguerpissement des carrefours, qu'en sera-t-il pour eux ?
Réalisée par Jean- Antoine Doudou