Fidèle Sarrassoro, Directeur général de l'Autorité du désarmement, la démobilisation et de la réintégration des ex-combattants (ADDR) étaient hier l'invité spécial d'ONUCI FM. Dans cet entretien, il fait le bilan partiel de ses activités et rassure les ex-combattants qui seront tous, selon lui, pris en compte.
Q : ADDR, l'acronyme est connue, mais très peu d'Ivoiriens savent ce qu'il y a derrière ces lettres de l'alphabet français, alors ADDR, pour dire quoi concrètement ?
Fidel Sarrassoro : L'ADDR est une structure qui a été créée le 08 août 2012 par décret présidentiel et qui signifie Autorité pour le Désarmement, la Démobilisation et la Réintégration des ex-combattants. Il s'agit en réalité de prendre en charge tous ceux qui ont participé aux différents conflits que notre pays a connus depuis 2002, de procéder à leur désarmement et aider à leur réintégration à travers des processus de formation et une assistance par des filets pour qu'ils puissent avoir des activités économiques ou les aider à avoir un emploi.
Q : Vous avez dit que tous ceux qui ont pris par aux hostilités ayant marqué le théâtre national depuis 2002 ?
FS : Voilà ! Exactement.
Q : Je devine que ça fait un bon petit monde à gérer ?
FS : Nous avons aujourd'hui un chiffre de planification de 64777 ex-combattants, dans notre base de données, que nous devons, comme vous dites, gérer. C'est-à-dire en réalité, inciter ceux qui ont des armes à les déposer et ceux qui souhaitent pouvoir avoir une activité génératrice de revenus, à avoir cette activité. Pour ceux qu'on peut mettre en emploi, les aider à avoir un emploi direct et ceux qui voudraient pouvoir retourner aux études, les aider à pouvoir retourner aux études.
Q : Quand vous dites ceux qui ont pris part aux différents conflits depuis 2002, est-ce des deux côtés des belligérants qui s'affrontaient ?
FS : Absolument. Il s'agit là des ex- FAFN, des ex-membres des groupes d'autodéfense et miliciens. Il y a également les associés aux FRCI, c'est-à-dire ceux qui ont rejoint les activités à la faveur de la crise postélectorale. Voilà un peu la décomposition de ceux que nous prenons en compte. Donc, tous ces groupes-là sont compris dans notre base de données et sont donc traités par l'ADDR.
Q : Environ 65000, vous avez dit ?
FS : Absolument. 64777.
Q : Combien ont pu être désarmés à ce jour, monsieur le directeur ?
FS : A ce jour, nous avons démobilisé et désarmé environ 11000. Nous sommes en processus de réinsertion et de réintégration d'un peu plus de 9000.
Q : Avez-vous les moyens de cette politique ?
FS : On n'a jamais toujours les moyens qu'on souhaiterait avoir. Mais, je voudrais vous dire qu'à la date d'aujourd'hui, nous avons eu une forte contribution de l'Etat de Côte d'Ivoire qui, en réalité, est le plus gros partenaire qui soutient financièrement l'opération. Nous avons également un gros partenaire qui est l'ONUCI qui nous aide d'un point de vue logistique, mais également d'un point de vue financier. Et nous avons de très belles perspectives. Le Président de la République a pris des contacts au plus haut niveau avec des institutions comme la Banque africaine de Développement, l'Union européenne, la Banque mondiale. Les perspectives sont très bonnes en ce moment. Puisque nous sommes en négociation pour avoir des ressources additionnelles qui nous permettront, justement, de réintégrer le maximum d'ex-combattants.
Q : Pour dire que le rythme sera accéléré ?
FS : Le rythme sera accéléré à partir de maintenant. Vous savez, lorsqu'on crée une structure, au début, il s'agit essentiellement de mettre en place les mécanismes, de recruter, d'avoir des locaux, de mobiliser les ressources. Donc le processus était relativement lent. Aujourd'hui, toute la stratégie est mise en place. D'ailleurs, cette stratégie a été élaborée avec nos partenaires, dont l'ONUCI et les autres. Nous avons aujourd'hui les locaux, nous sommes décentralisés, nous avons des bureaux régionaux un peu partout, des antennes également. Nous avons l'effectif qu'il nous faut. Nous avons, comme je l'ai dit tout à l'heure, les ressources minimum pour accélérer le processus. Je dois vous dire que nous sommes confiants que le dernier trimestre de cette année, nous allons accélérer le processus de réintégration et de réinsertion de ces ex-combattants.
Q : En termes d'enveloppe financière pour gérer environ 65000 ex-combattants, combien faut-il ?
FS : Selon nos estimations, il nous faudrait environ 85 milliards de FCFA.
Q : Et combien de disponible à ce jours ?
FS : A ce jour, je dois dire que nous avons environ 25 à 30 milliards qui ont été déjà mobilisés. En perspectives, nous sommes en processus de signature des accords avec d'autres partenaires.
Q : Monsieur le directeur, Fidèle Sarrassoro, il y a çà et là, par endroit ou par moment, des agitations dans les rangs de ces ex-combattants. Quelle est la lecture que vous faites concrètement de ces sautes d'humeur ?
FS : Je pense qu'essentiellement, ce sont des sautes d'humeur dues à leur impatience. Mais je vous l'ai dit, c'est un processus. On parle d'ex-combattants qui ont été impliqués pour certains depuis 2002. Evidemment, ils s'attendent à une réintégration le plus rapidement possible. Une nouvelle structure qui a été mise en place, a suscité beaucoup d'espoir et ils souhaiteraient pouvoir être pris en compte dans les meilleurs délais. Or, comme je l'ai dit, il fallait suivre le processus d'installation de toute nouvelle structure comme la nôtre. Je peux comprendre que certains soient impatients. Mais nous avons entrepris avec nos partenaires une politique de communication. Nous espérons que maintenant, ils vont comprendre. Ils doivent comprendre et le Président de la République l'a dit, tous les ex-combattants seront pris en compte. Aucun d'entre eux ne sera laissé pour compte.
Q : Donc, assurance ?
FS : Oui. Je suis confiant. Mais, évidemment, ce que je demande, et c'est un appel, c'est de nous laisser un espace de sérénité pour pouvoir travailler, pour pouvoir développer les projets, pour pouvoir prendre les contacts nécessaires afin de pouvoir les réinsérer dans les meilleurs délais.
Q : Dans les deux camps qui s'affrontaient, monsieur le directeur, il y a eu quelques combattants venus de l'extérieur, de l'étranger précisément, quel est le sort qui leur est réservé ?
FS : En ce qui concerne les étrangers, il y a deux cas de figure : ceux des étrangers qui sont résidents, c'est-à-dire qui vivaient en Côte d'Ivoire, ils vont subir le même sort que les Ivoiriens. On va les réintégrer sur place. Ceux des étrangers qui sont venus de leur pays et qui souhaitent pouvoir retourner, on va les prendre en compte et les aider avec des filets de rapatriement, à retourner dans leur pays.
Q : Monsieur le directeur, quelle est la stratégie de traçabilité en ce qui concerne les ex-combattants qui ont été désarmés et réintégrés ?
FS : Ce que nous faisons, c'est que lorsque nous collections des armes, avec la division DDR de l'ONUCI, nous les marquons, c'est -à -dire que nous leur donnons un numéro avec les procédures de la CEDEAO. Nous avons ensuite un fichier qui est établi. Sur la base de ce fichier, le Président de la République a mis en place un comité pour la répartition de ces armes-là. Pour ce qui est des armes qui doivent retourner aux arsenaux nationaux, elles sont reparties à différentes forces. Les armes qui ne sont pas conventionnelles, c'est-à-dire qui n'existaient pas dans nos arsenaux, elles sont détruites. Il y a élégamment un fichier qui établi un procès verbal de destruction de ces armes. A ce jour, toutes les armes qui ont été collectées, nous avons leur numéro de série, nous avons leur numéro de marquage et nous savons exactement à quelles forces elles ont été remises. Ce qui fait qu'à tout moment, lorsqu'une arme de ce genre là se retrouve sur la place, on sait que c'est une arme qui a été remise aux FRCI ou à la gendarmerie ou à la police. Le fichier existe chez nous, il existe également au niveau de l'ONUCI. C'est quelque chose qu'on peut comparer.
Q : Est-ce que les ex-combattants se bousculent à vos portes pour rendre leurs armes?
FS : Evidemment, ce sont des êtres humains. Leur préoccupation aujourd'hui est ceci : « En déposant mon arme, est-ce que je serais effectivement pris en compte ? ». Lorsqu'ils ont le sentiment que la réintégration est effective, je peux vous dire qu'ils viennent. Donc, à chaque fois que nous avons un processus de désarmement qui est lié à un processus de réintégration, ils se bousculent. Je suis confiant que maintenant que nous avons toutes les procédures en place, ils viendront. Nous avons des cas, par exemple, à Bouaké sur le site de l'ONUCI. A un moment donné, on disait qu'on faisait un processus de désarmement, nos collègues de l'ONUCI nous ont dit qu'ils n'avaient jamais vu cela. C'était ahurissant.
Q : Une fois désarmés et réintégrés, quelle est la stratégie avez-vous mis en œuvre pour suivre les projets sur lesquels ils ont été mis ?
FS : Nous avons recruté un certain nombre de cabinets, d'ONG, de consultants qui leur apportent un encadrement technique et un encadrement financier ou en matière de gestion. Donc, ces ONG ont sous leur coupe un certain nombre d'ex-combattants qu'elles suivent. Elles nous rendent des rapports quant à la gestion, aux activités de ces ex-combattants. Ils sont donc suivis pendant un certain nombre de temps, de mois. A notre niveau, nous avons des chargés de projets qui font également la supervision pour voir s'il y a des difficultés. Ils nous rendent compte et nous pouvons les corriger éventuellement.
Q : Monsieur le directeur, à tort ou à raison, les ex-combattants, sont pointés du doigt dans le phénomène des coupeurs de route. Qu'est-ce que vous dites ?
FS : J'entends cela également. On dit qu'ils sont impliqués souvent dans les braquages, ils sont ceux là même qui font des opérations de banditisme sur nos routes. Je n'exclue pas cela. C'est fort possible. C'est pour cela que pour nous, il est important de faire de la sensibilisation auprès de ces ex-combattants et d'accélérer le processus de désarmement et de réintégration. Il faut dire également qu'il y a beaucoup d'amalgames. Avant le phénomène des ex-combattants, il y avait quand même le phénomène des coupeurs de route. Il y avait des bandits. Il faudra peut être faire également la différence. Mais dans tous les cas, je suis persuadé qu'il y a certainement des ex-combattants qui se livrent à ce genre de phénomène.
Q : Mercredi 28 août 2013, vous étiez sur le terrain, visitant des sites et au terme de cette visite qu'avez-vous vu, qu'avez-vous entendu, que retenez-vous ?
FS : Avec un certain nombre de partenaires et de journalistes, nous avons visité un certain nombre de projets mis à la disposition d'ex-combattants à Bingerville. Nous avons vu des projets d'élevage : l'élevage de poulets, de porcs. Nous sommes allés également à Yopougon où nous avons des ex-combattants qui ont décidé d'entreprendre des activités génératrices de revenus. Certains étaient devenus bijoutiers, d'autres menuisiers, ferronniers, etc. Mon sentiment personnel est que, premièrement, j'étais extrêmement heureux de voir des ex-combattants qui, il y a un mois ou deux, étaient totalement angoissés, dans le doute, se posaient beaucoup de questions. Aujourd'hui, ils sont épanouis, ils se prennent en charge. Ils se disent transformés, c'est le mot qu'on a retenu. Ils ont lancé des appels à l'endroit de leurs camarades, de les rejoindre. Parce qu'il y a une autre vie en dehors de celle d'ex-combattants. Une autre vie où ils peuvent être épanouis, se prendre en charge, prendre en charge leur famille. Je dois dire que ce sont des modèles. Je voudrais que les autres ex-combattants suivent leur voie, désarment et que l'ADDR puisse effectivement les réintégrer.
Q : Avez-vous parfois le sentiment de faire face à une mission impossible ?
FS : Mission impossible, non. Mission très certainement difficile, exaltante, c'est sûr. Pour moi, c'est une mission que je fais avec beaucoup de plaisir, parce que j'ai le sentiment de contribuer un tant soit peu au développement de mon pays.
Q : Confiant que vous réussirez ?
FS : Il n'y a aucun doute. Il faut qu'on réussisse. Il faut qu'on réussisse pour ce pays, il faut qu'on réussisse pour la Côte d'Ivoire et je suis certain que les ex-combattants, dans leur grande majorité, veulent sortir de cette condition d'ex-combattant et retrouver une vie paisible.
Rétranscrit par Thiery Latt
Q : ADDR, l'acronyme est connue, mais très peu d'Ivoiriens savent ce qu'il y a derrière ces lettres de l'alphabet français, alors ADDR, pour dire quoi concrètement ?
Fidel Sarrassoro : L'ADDR est une structure qui a été créée le 08 août 2012 par décret présidentiel et qui signifie Autorité pour le Désarmement, la Démobilisation et la Réintégration des ex-combattants. Il s'agit en réalité de prendre en charge tous ceux qui ont participé aux différents conflits que notre pays a connus depuis 2002, de procéder à leur désarmement et aider à leur réintégration à travers des processus de formation et une assistance par des filets pour qu'ils puissent avoir des activités économiques ou les aider à avoir un emploi.
Q : Vous avez dit que tous ceux qui ont pris par aux hostilités ayant marqué le théâtre national depuis 2002 ?
FS : Voilà ! Exactement.
Q : Je devine que ça fait un bon petit monde à gérer ?
FS : Nous avons aujourd'hui un chiffre de planification de 64777 ex-combattants, dans notre base de données, que nous devons, comme vous dites, gérer. C'est-à-dire en réalité, inciter ceux qui ont des armes à les déposer et ceux qui souhaitent pouvoir avoir une activité génératrice de revenus, à avoir cette activité. Pour ceux qu'on peut mettre en emploi, les aider à avoir un emploi direct et ceux qui voudraient pouvoir retourner aux études, les aider à pouvoir retourner aux études.
Q : Quand vous dites ceux qui ont pris part aux différents conflits depuis 2002, est-ce des deux côtés des belligérants qui s'affrontaient ?
FS : Absolument. Il s'agit là des ex- FAFN, des ex-membres des groupes d'autodéfense et miliciens. Il y a également les associés aux FRCI, c'est-à-dire ceux qui ont rejoint les activités à la faveur de la crise postélectorale. Voilà un peu la décomposition de ceux que nous prenons en compte. Donc, tous ces groupes-là sont compris dans notre base de données et sont donc traités par l'ADDR.
Q : Environ 65000, vous avez dit ?
FS : Absolument. 64777.
Q : Combien ont pu être désarmés à ce jour, monsieur le directeur ?
FS : A ce jour, nous avons démobilisé et désarmé environ 11000. Nous sommes en processus de réinsertion et de réintégration d'un peu plus de 9000.
Q : Avez-vous les moyens de cette politique ?
FS : On n'a jamais toujours les moyens qu'on souhaiterait avoir. Mais, je voudrais vous dire qu'à la date d'aujourd'hui, nous avons eu une forte contribution de l'Etat de Côte d'Ivoire qui, en réalité, est le plus gros partenaire qui soutient financièrement l'opération. Nous avons également un gros partenaire qui est l'ONUCI qui nous aide d'un point de vue logistique, mais également d'un point de vue financier. Et nous avons de très belles perspectives. Le Président de la République a pris des contacts au plus haut niveau avec des institutions comme la Banque africaine de Développement, l'Union européenne, la Banque mondiale. Les perspectives sont très bonnes en ce moment. Puisque nous sommes en négociation pour avoir des ressources additionnelles qui nous permettront, justement, de réintégrer le maximum d'ex-combattants.
Q : Pour dire que le rythme sera accéléré ?
FS : Le rythme sera accéléré à partir de maintenant. Vous savez, lorsqu'on crée une structure, au début, il s'agit essentiellement de mettre en place les mécanismes, de recruter, d'avoir des locaux, de mobiliser les ressources. Donc le processus était relativement lent. Aujourd'hui, toute la stratégie est mise en place. D'ailleurs, cette stratégie a été élaborée avec nos partenaires, dont l'ONUCI et les autres. Nous avons aujourd'hui les locaux, nous sommes décentralisés, nous avons des bureaux régionaux un peu partout, des antennes également. Nous avons l'effectif qu'il nous faut. Nous avons, comme je l'ai dit tout à l'heure, les ressources minimum pour accélérer le processus. Je dois vous dire que nous sommes confiants que le dernier trimestre de cette année, nous allons accélérer le processus de réintégration et de réinsertion de ces ex-combattants.
Q : En termes d'enveloppe financière pour gérer environ 65000 ex-combattants, combien faut-il ?
FS : Selon nos estimations, il nous faudrait environ 85 milliards de FCFA.
Q : Et combien de disponible à ce jours ?
FS : A ce jour, je dois dire que nous avons environ 25 à 30 milliards qui ont été déjà mobilisés. En perspectives, nous sommes en processus de signature des accords avec d'autres partenaires.
Q : Monsieur le directeur, Fidèle Sarrassoro, il y a çà et là, par endroit ou par moment, des agitations dans les rangs de ces ex-combattants. Quelle est la lecture que vous faites concrètement de ces sautes d'humeur ?
FS : Je pense qu'essentiellement, ce sont des sautes d'humeur dues à leur impatience. Mais je vous l'ai dit, c'est un processus. On parle d'ex-combattants qui ont été impliqués pour certains depuis 2002. Evidemment, ils s'attendent à une réintégration le plus rapidement possible. Une nouvelle structure qui a été mise en place, a suscité beaucoup d'espoir et ils souhaiteraient pouvoir être pris en compte dans les meilleurs délais. Or, comme je l'ai dit, il fallait suivre le processus d'installation de toute nouvelle structure comme la nôtre. Je peux comprendre que certains soient impatients. Mais nous avons entrepris avec nos partenaires une politique de communication. Nous espérons que maintenant, ils vont comprendre. Ils doivent comprendre et le Président de la République l'a dit, tous les ex-combattants seront pris en compte. Aucun d'entre eux ne sera laissé pour compte.
Q : Donc, assurance ?
FS : Oui. Je suis confiant. Mais, évidemment, ce que je demande, et c'est un appel, c'est de nous laisser un espace de sérénité pour pouvoir travailler, pour pouvoir développer les projets, pour pouvoir prendre les contacts nécessaires afin de pouvoir les réinsérer dans les meilleurs délais.
Q : Dans les deux camps qui s'affrontaient, monsieur le directeur, il y a eu quelques combattants venus de l'extérieur, de l'étranger précisément, quel est le sort qui leur est réservé ?
FS : En ce qui concerne les étrangers, il y a deux cas de figure : ceux des étrangers qui sont résidents, c'est-à-dire qui vivaient en Côte d'Ivoire, ils vont subir le même sort que les Ivoiriens. On va les réintégrer sur place. Ceux des étrangers qui sont venus de leur pays et qui souhaitent pouvoir retourner, on va les prendre en compte et les aider avec des filets de rapatriement, à retourner dans leur pays.
Q : Monsieur le directeur, quelle est la stratégie de traçabilité en ce qui concerne les ex-combattants qui ont été désarmés et réintégrés ?
FS : Ce que nous faisons, c'est que lorsque nous collections des armes, avec la division DDR de l'ONUCI, nous les marquons, c'est -à -dire que nous leur donnons un numéro avec les procédures de la CEDEAO. Nous avons ensuite un fichier qui est établi. Sur la base de ce fichier, le Président de la République a mis en place un comité pour la répartition de ces armes-là. Pour ce qui est des armes qui doivent retourner aux arsenaux nationaux, elles sont reparties à différentes forces. Les armes qui ne sont pas conventionnelles, c'est-à-dire qui n'existaient pas dans nos arsenaux, elles sont détruites. Il y a élégamment un fichier qui établi un procès verbal de destruction de ces armes. A ce jour, toutes les armes qui ont été collectées, nous avons leur numéro de série, nous avons leur numéro de marquage et nous savons exactement à quelles forces elles ont été remises. Ce qui fait qu'à tout moment, lorsqu'une arme de ce genre là se retrouve sur la place, on sait que c'est une arme qui a été remise aux FRCI ou à la gendarmerie ou à la police. Le fichier existe chez nous, il existe également au niveau de l'ONUCI. C'est quelque chose qu'on peut comparer.
Q : Est-ce que les ex-combattants se bousculent à vos portes pour rendre leurs armes?
FS : Evidemment, ce sont des êtres humains. Leur préoccupation aujourd'hui est ceci : « En déposant mon arme, est-ce que je serais effectivement pris en compte ? ». Lorsqu'ils ont le sentiment que la réintégration est effective, je peux vous dire qu'ils viennent. Donc, à chaque fois que nous avons un processus de désarmement qui est lié à un processus de réintégration, ils se bousculent. Je suis confiant que maintenant que nous avons toutes les procédures en place, ils viendront. Nous avons des cas, par exemple, à Bouaké sur le site de l'ONUCI. A un moment donné, on disait qu'on faisait un processus de désarmement, nos collègues de l'ONUCI nous ont dit qu'ils n'avaient jamais vu cela. C'était ahurissant.
Q : Une fois désarmés et réintégrés, quelle est la stratégie avez-vous mis en œuvre pour suivre les projets sur lesquels ils ont été mis ?
FS : Nous avons recruté un certain nombre de cabinets, d'ONG, de consultants qui leur apportent un encadrement technique et un encadrement financier ou en matière de gestion. Donc, ces ONG ont sous leur coupe un certain nombre d'ex-combattants qu'elles suivent. Elles nous rendent des rapports quant à la gestion, aux activités de ces ex-combattants. Ils sont donc suivis pendant un certain nombre de temps, de mois. A notre niveau, nous avons des chargés de projets qui font également la supervision pour voir s'il y a des difficultés. Ils nous rendent compte et nous pouvons les corriger éventuellement.
Q : Monsieur le directeur, à tort ou à raison, les ex-combattants, sont pointés du doigt dans le phénomène des coupeurs de route. Qu'est-ce que vous dites ?
FS : J'entends cela également. On dit qu'ils sont impliqués souvent dans les braquages, ils sont ceux là même qui font des opérations de banditisme sur nos routes. Je n'exclue pas cela. C'est fort possible. C'est pour cela que pour nous, il est important de faire de la sensibilisation auprès de ces ex-combattants et d'accélérer le processus de désarmement et de réintégration. Il faut dire également qu'il y a beaucoup d'amalgames. Avant le phénomène des ex-combattants, il y avait quand même le phénomène des coupeurs de route. Il y avait des bandits. Il faudra peut être faire également la différence. Mais dans tous les cas, je suis persuadé qu'il y a certainement des ex-combattants qui se livrent à ce genre de phénomène.
Q : Mercredi 28 août 2013, vous étiez sur le terrain, visitant des sites et au terme de cette visite qu'avez-vous vu, qu'avez-vous entendu, que retenez-vous ?
FS : Avec un certain nombre de partenaires et de journalistes, nous avons visité un certain nombre de projets mis à la disposition d'ex-combattants à Bingerville. Nous avons vu des projets d'élevage : l'élevage de poulets, de porcs. Nous sommes allés également à Yopougon où nous avons des ex-combattants qui ont décidé d'entreprendre des activités génératrices de revenus. Certains étaient devenus bijoutiers, d'autres menuisiers, ferronniers, etc. Mon sentiment personnel est que, premièrement, j'étais extrêmement heureux de voir des ex-combattants qui, il y a un mois ou deux, étaient totalement angoissés, dans le doute, se posaient beaucoup de questions. Aujourd'hui, ils sont épanouis, ils se prennent en charge. Ils se disent transformés, c'est le mot qu'on a retenu. Ils ont lancé des appels à l'endroit de leurs camarades, de les rejoindre. Parce qu'il y a une autre vie en dehors de celle d'ex-combattants. Une autre vie où ils peuvent être épanouis, se prendre en charge, prendre en charge leur famille. Je dois dire que ce sont des modèles. Je voudrais que les autres ex-combattants suivent leur voie, désarment et que l'ADDR puisse effectivement les réintégrer.
Q : Avez-vous parfois le sentiment de faire face à une mission impossible ?
FS : Mission impossible, non. Mission très certainement difficile, exaltante, c'est sûr. Pour moi, c'est une mission que je fais avec beaucoup de plaisir, parce que j'ai le sentiment de contribuer un tant soit peu au développement de mon pays.
Q : Confiant que vous réussirez ?
FS : Il n'y a aucun doute. Il faut qu'on réussisse. Il faut qu'on réussisse pour ce pays, il faut qu'on réussisse pour la Côte d'Ivoire et je suis certain que les ex-combattants, dans leur grande majorité, veulent sortir de cette condition d'ex-combattant et retrouver une vie paisible.
Rétranscrit par Thiery Latt