Cela n’était plus arrivé depuis 2007. Six années que les prisonniers ivoiriens n’avaient plus bénéficié d’une grâce présidentielle. Et le gouvernement ivoirien sous l’autorité du chef de l’Etat, Alassane Ouattara, a décidé vendredi dernier de remettre au goût du jour cette générosité de l’Etat. 3000 prisonniers, jugés et condamnés de manière définitive pour vol simple, faux et usage de faux, coups et blessures volontaires, violence et voie de fait, défrichement illicite de forêt, consommation de cannabis… seront graciés dans les mois à venir. Qu’est-ce qui a motivé cette décision gouvernementale? Le Garde de Sceaux, ministre de la Justice, des Droits de l’Homme et des Libertés publiques, Gnénéma Coulibaly, a répondu sur le plateau du journal télévisé de 20 heures le même vendredi à cette interrogation. Selon lui, la mesure gouvernementale en adéquation avec la loi fondamentale qui donne au président de la République le droit de grâce en son article 49, vise dans un premier temps à éviter que des délinquants primaires se transforment en de grands bandits, après un long contact avec des caïds. « La grâce est une tradition dans l’administration de la justice. Aujourd’hui, c’est une grâce collective qui essaie de mettre en liberté des personnes qui depuis 2007 auraient pu s’attendre à bénéficier d’une grâce. Parce qu’il y a dans les prisons des délinquants primaires qu’une longue détention peut transformer en grands bandits au contact des caïds», a précisé le premier responsable de la justice ivoirienne. En effet, il s’agit de donner une autre chance à des personnes incarcérées pour des infractions qui ne portent pas de trouble substantiel à l’ordre et à la paix sociale afin qu’elles relancent leur vie en évitant les erreurs qui ont conduit à leur détention. Ensuite, la libération de 3000 prisonniers qui ont commis des délits mineurs va permettre de régler un tant soit peu le problème de surpeuplement des prisons ivoiriennes, avec sa conséquence d’insécurité dans les pénitenciers en Côte d’Ivoire. En effet, selon le ministre, les maisons d’arrêt et de correction du pays sont complètement engorgées par une pléthore de détenus. «La population carcérale en Côte d’Ivoire, c’est plus de 10.160 prisonniers, là où nos prisons sont habilitées à ne recevoir que 4 500 personnes», a-t-il constaté. Evidemment, cette réalité n’est pas sans effet. La surpopulation est, en effet, l’une des causes principales des nombreuses mutineries dans les prisons, plus précisément à la MACA. Par cette décision, les autorités ambitionnent donc de juguler ce phénomène qui commence à prendre des proportions inquiétantes. Enfin, il y a un souci de sauvegarde de la paix sociale. Pour le ministre Gnénéma, il faut veiller à un moment à réguler les relations entre les citoyens. «C’est un élément de paix sociale que d’accorder des grâces. Parce que, souvent, des personnes se plaignent contre des auteurs de faits qui leur sont préjudiciables. On les juge, on les condamne. Mais peu de temps après soit le regret soit le pardon s’installe. Mais comme on pourrait le dire, le fait est déjà commis, la décision est déjà intervenue. Il faut qu’à un moment donné les autorités chargées de l’administration pénitentiaire régulent tous ces événements», a-t-il estimé.
Lacina Ouattara
Lacina Ouattara