La campagne de sensibilisation sur le Recensement général de la Population et de l’Habitat, dénommée RGPH 2013 s’est ouverte en novembre dernier à Man. Le Front populaire ivoirien analyse cette opération de Recensement Général de la Population dans une déclaration.
Les faits :
A la demande du Ministère du Plan et du Développement, le Directeur Général de l’Institut National de la Statistique (INS), Directeur Exécutif du Projet RGPH-2013, a entretenu le FPI, le jeudi 21 novembre 2013, au cours d’une séance de travail, sur l’imminence, la nécessité stratégique et la pertinence technico-méthodologique d’un RGPH, le 4ème du genre en Côte d’Ivoire, prévu pour fin 2013.
De l’exposé, le FPI a retenu quatre éléments clés :
- Premièrement, ce recensement qui fait partie de la génération des années 2010, n’a pu avoir lieu à cause de la crise qu’a connue le pays de 2002 à 2011.
- Deuxièmement, ce recensement numérique fournira des informations fiables sur la structure et la dynamique de la population ivoirienne ; il mettra à jour la base de données géo-référencée permettant de localiser avec précision les populations (INS), les infrastructures dans les 108 départements et 509 sous-préfectures totalisant plus de 10.000 villages et de 40.000 campements ;
- Troisièmement, le recrutement d’au moins 30.000 agents recenseurs a été confié aux municipalités, tandis que la formation et le déploiement desdits agents incombent à la Direction Exécutive du 4ème RGPH ;
-Enfin, quatrièmement, le coût global s’élève à 12,013 milliards de francs CFA ; l’Etat de Côte d’Ivoire a prévu une contribution d’un montant de 7,200 milliards, soit 60% ; il s’emploie à mobiliser les moyens complémentaires correspondant aux charges des 30.000 Agents, soit 4,813 milliards.
L’Analyse :
Si le FPI salue la démarche du Gouvernement [qui a consisté à dialoguer avec lui], le Parti tient cependant à faire remarquer que ce projet est inopportun et illégitime, en raison notamment du contexte d’insécurité et de désordre que l’on constate sur l’ensemble du territoire national et qui ne permettent pas de conduire sérieusement une opération aussi délicate que stratégique.
En effet, selon les Experts en la matière, le RGPH est une photographie de la population, ayant pour objectifs la collecte systématique, l’analyse, la publication et la diffusion de données démographiques, économiques, sociales et culturelles se rapportant aux habitants d’un pays à un moment donné. Les données recueillies aident les planificateurs et décideurs tant nationaux qu’internationaux, à définir ou à soutenir les politiques économiques, sociales et culturelles nécessaires, à court, moyen et long termes. Ces résultats sont aussi d’une grande utilité pour les acteurs privés désireux d’implanter des entreprises ou des commerces et services. De sorte que si l’image ainsi obtenue est floue ou trouble, il est évident que tous les efforts de mise en œuvre desdites politiques porteront la marque des distorsions et autres dégradations enregistrées. Par exemple, la structure démographique de la Côte d’Ivoire étant à l’heure à actuelle des plus brouillée sociologiquement du fait de la guerre et de l’insécurité notamment dans l’ouest du pays, une opération de recensement va nécessairement enregistrer et faire entériner les troubles du moment.
Les mêmes Experts soutiennent que depuis 1946, les recensements de la population européenne n’ont pas eu lieu à intervalles réguliers en raison de l’extrême sensibilité des problèmes et des enjeux consécutifs à la Deuxième Guerre mondiale. En France et en Grande-Bretagne , par exemple, la Guerre a empêché les opérations de recensement de 1941; toujours en France, le recensement qui devait avoir lieu en 1970, s’est déroulé en 1968 pour « prendre la mesure du rapatriement d’un million de Français d’Afrique du Nord postérieurement au recensement de mars 1962 » ; en raison de l’histoire particulière de leur pays, les Allemands se montrent hostiles au recensement, à telle enseigne que les autorités de la RFA n’ont pas fait de recensement de leurs populations au cours de la décennie 1980 ; fait non moins illustratif de l’extrême délicatesse du dénombrement, aucun recensement officiel n’a été effectué au Liban de 1932 jusqu’aux dernières années, de peur d’ « alimenter les tensions politiques et religieuses ». Il en est de même s’agissant du Continent africain où la politisation de l’ethnie, notamment l’exacerbation des rivalités Nord-Sud, impose un consensus démocratique minimal au sujet du rôle de l’Etat.
Au regard de qui précède, le FPI soutient que tous les ingrédients sont réunis pour que l’opération [qui s’annonce] n’atteigne pas les objectifs de fiabilité visés dans la fourniture des informations, dans la localisation des populations, dans la structure et la dynamique desdites populations et dans la précision de leur localisation. Et cela pour plusieurs raisons:
1°/ Il sied de rappeler que l’invasion de certaines régions du pays, en particulier du Grand Ouest et du Sud par les FRCI et leurs supplétifs Dozos, a provoqué des déplacements massifs de populations à l’intérieur et à l’extérieur. Les Organisations Internationales ont dénombré plus d’un million de personnes. Et même si l’on reconnaît que certaines d’entre elles sont rentrées, il n’en demeure pas moins que des dizaines de milliers d’autres vivent toujours hors du pays. Même les gens retournés en Côte d’Ivoire traversent une tragédie sans nom, leurs maisons, villages et/ou plantations étant occupées par les envahisseurs d’avril 2011. Est-il sain et correct d’un double point de vue éthique et politique, de vouloir mener une opération de recensement fiable dans un pays où des milliers de nationaux ont été contraints à l’exil, avec d’autres milliers confrontés à une situation de déplacés intérieurs ou de flottaison sociale ? Au nom de quelle valeur ?
2°/ L’insécurité généralisée, la crise de confiance et la traque orchestrée contre les pro-Gbagbo se poursuivent ; il n’est donc pas rare que cette catégorie de citoyens ostracisées fuient l’Administration, notamment l’Administration judiciaire et les services chargés de la Sécurité intérieure ; ceux qui ne les fuient pas observent à leur égard une attitude de méfiance. Ces populations traquées en permanence auront-elles une interprétation objective de l’opération de recensement ? Ces Ivoiriens à peine tolérés chez eux peuvent-ils deviner autre chose qu’un subterfuge destiné soit à les arrêter, soit à les déposséder de leurs biens ? Comment dans ces conditions peut-on espérer réaliser un recensement digne de ce nom ?
3°/ La gouvernance judiciaire en place n’est pas de nature à favoriser le déroulement d’une opération aussi déterminante quant à la planification du développement durable d’un pays qui sort de dix années de guerre civile, ou à régler dans la transparence et l’équité les fausses déclarations éventuelles et autres problèmes découlant de cette opération. En tout état de cause, nul ne peut nier que les pro-Gbagbo sont confrontés à une justice à sens unique, c’est-à-dire, une justice à pour laquelle seuls les pro-Gbagbo sont a priori coupables et les pro-Ouattara, innocents.
4°/ De manière générale, le régime en place est un régime exclusionniste dont la logique est perceptible à travers non seulement cette justice des vainqueurs, mais aussi dans la volonté de rattrapage ethnique telle qu’énoncée par le Chef de l’Etat lui-même. Le Président Alassane Dramane Ouattara, a effectué une visite d’Etat en France du 25 au 28 janvier 2012. Le 25 janvier 2012, répondant à une question du journaliste Vincent Hugeux de l’Express, relative à la promotion des cadres du Nord de la Côte d’Ivoire, sa région d’origine, Monsieur Ouattara assure : « il s’agit d’un simple rattrapage. Sous Gbagbo, les communautés du Nord, soit 40% de la population, étaient exclues des postes de responsabilité. S’agissant des hauts grades de l’armée, j’ai eu à négocier avec les officiers des ex-Forces nouvelles (FN, ancienne rébellion nordiste), qui voulaient tous les postes. Et j’ai eu à imposer cet équilibre dans la hiérarchie militaire jusqu’au niveau de commandement : le n°1 des FN, flanqué d’un n°2 de l’armée régulière tous grades confondus, il y a 12% de nordistes, dans la police, 15% dans la gendarmerie et 40% environ dans l’armée… Sur ce terrain-là, on ne peut rien me reprocher »
La position du FPI
C’est pourquoi,
Le FPI marque son opposition à ce projet dont les conditions de réussite sont loin d’être réunies.
Le FPI considère cette opération de dénombrement comme une occasion de gaspillage ou de détournement de deniers publics devant permettre au RDR de rétribuer allègrement ses partisans pour autant que ces derniers seront les seuls à être recrutés, au nom précisément de la politique de rattrapage à l’œuvre dans le pays.
Par voie de conséquence, le FPI demande :
- Au Gouvernement de différer la réalisation du RGPH-2013 ;
- Aux Organisations Internationales, notamment à la Commission de Statistique de l’ONU, à l’Union Européenne ainsi qu’aux Etats-Unis et à la France, de ne pas accorder leur soutien aussi longtemps que la Côte d’Ivoire n’aura pas retrouvé la normalité républicaine et démocratique, conditions sine qua non de tout processus de recensement fiable.
Fait à Abidjan, le 27 décembre 2013
Le Secrétaire Général & Porte-parole
Laurent AKOUN
Les faits :
A la demande du Ministère du Plan et du Développement, le Directeur Général de l’Institut National de la Statistique (INS), Directeur Exécutif du Projet RGPH-2013, a entretenu le FPI, le jeudi 21 novembre 2013, au cours d’une séance de travail, sur l’imminence, la nécessité stratégique et la pertinence technico-méthodologique d’un RGPH, le 4ème du genre en Côte d’Ivoire, prévu pour fin 2013.
De l’exposé, le FPI a retenu quatre éléments clés :
- Premièrement, ce recensement qui fait partie de la génération des années 2010, n’a pu avoir lieu à cause de la crise qu’a connue le pays de 2002 à 2011.
- Deuxièmement, ce recensement numérique fournira des informations fiables sur la structure et la dynamique de la population ivoirienne ; il mettra à jour la base de données géo-référencée permettant de localiser avec précision les populations (INS), les infrastructures dans les 108 départements et 509 sous-préfectures totalisant plus de 10.000 villages et de 40.000 campements ;
- Troisièmement, le recrutement d’au moins 30.000 agents recenseurs a été confié aux municipalités, tandis que la formation et le déploiement desdits agents incombent à la Direction Exécutive du 4ème RGPH ;
-Enfin, quatrièmement, le coût global s’élève à 12,013 milliards de francs CFA ; l’Etat de Côte d’Ivoire a prévu une contribution d’un montant de 7,200 milliards, soit 60% ; il s’emploie à mobiliser les moyens complémentaires correspondant aux charges des 30.000 Agents, soit 4,813 milliards.
L’Analyse :
Si le FPI salue la démarche du Gouvernement [qui a consisté à dialoguer avec lui], le Parti tient cependant à faire remarquer que ce projet est inopportun et illégitime, en raison notamment du contexte d’insécurité et de désordre que l’on constate sur l’ensemble du territoire national et qui ne permettent pas de conduire sérieusement une opération aussi délicate que stratégique.
En effet, selon les Experts en la matière, le RGPH est une photographie de la population, ayant pour objectifs la collecte systématique, l’analyse, la publication et la diffusion de données démographiques, économiques, sociales et culturelles se rapportant aux habitants d’un pays à un moment donné. Les données recueillies aident les planificateurs et décideurs tant nationaux qu’internationaux, à définir ou à soutenir les politiques économiques, sociales et culturelles nécessaires, à court, moyen et long termes. Ces résultats sont aussi d’une grande utilité pour les acteurs privés désireux d’implanter des entreprises ou des commerces et services. De sorte que si l’image ainsi obtenue est floue ou trouble, il est évident que tous les efforts de mise en œuvre desdites politiques porteront la marque des distorsions et autres dégradations enregistrées. Par exemple, la structure démographique de la Côte d’Ivoire étant à l’heure à actuelle des plus brouillée sociologiquement du fait de la guerre et de l’insécurité notamment dans l’ouest du pays, une opération de recensement va nécessairement enregistrer et faire entériner les troubles du moment.
Les mêmes Experts soutiennent que depuis 1946, les recensements de la population européenne n’ont pas eu lieu à intervalles réguliers en raison de l’extrême sensibilité des problèmes et des enjeux consécutifs à la Deuxième Guerre mondiale. En France et en Grande-Bretagne , par exemple, la Guerre a empêché les opérations de recensement de 1941; toujours en France, le recensement qui devait avoir lieu en 1970, s’est déroulé en 1968 pour « prendre la mesure du rapatriement d’un million de Français d’Afrique du Nord postérieurement au recensement de mars 1962 » ; en raison de l’histoire particulière de leur pays, les Allemands se montrent hostiles au recensement, à telle enseigne que les autorités de la RFA n’ont pas fait de recensement de leurs populations au cours de la décennie 1980 ; fait non moins illustratif de l’extrême délicatesse du dénombrement, aucun recensement officiel n’a été effectué au Liban de 1932 jusqu’aux dernières années, de peur d’ « alimenter les tensions politiques et religieuses ». Il en est de même s’agissant du Continent africain où la politisation de l’ethnie, notamment l’exacerbation des rivalités Nord-Sud, impose un consensus démocratique minimal au sujet du rôle de l’Etat.
Au regard de qui précède, le FPI soutient que tous les ingrédients sont réunis pour que l’opération [qui s’annonce] n’atteigne pas les objectifs de fiabilité visés dans la fourniture des informations, dans la localisation des populations, dans la structure et la dynamique desdites populations et dans la précision de leur localisation. Et cela pour plusieurs raisons:
1°/ Il sied de rappeler que l’invasion de certaines régions du pays, en particulier du Grand Ouest et du Sud par les FRCI et leurs supplétifs Dozos, a provoqué des déplacements massifs de populations à l’intérieur et à l’extérieur. Les Organisations Internationales ont dénombré plus d’un million de personnes. Et même si l’on reconnaît que certaines d’entre elles sont rentrées, il n’en demeure pas moins que des dizaines de milliers d’autres vivent toujours hors du pays. Même les gens retournés en Côte d’Ivoire traversent une tragédie sans nom, leurs maisons, villages et/ou plantations étant occupées par les envahisseurs d’avril 2011. Est-il sain et correct d’un double point de vue éthique et politique, de vouloir mener une opération de recensement fiable dans un pays où des milliers de nationaux ont été contraints à l’exil, avec d’autres milliers confrontés à une situation de déplacés intérieurs ou de flottaison sociale ? Au nom de quelle valeur ?
2°/ L’insécurité généralisée, la crise de confiance et la traque orchestrée contre les pro-Gbagbo se poursuivent ; il n’est donc pas rare que cette catégorie de citoyens ostracisées fuient l’Administration, notamment l’Administration judiciaire et les services chargés de la Sécurité intérieure ; ceux qui ne les fuient pas observent à leur égard une attitude de méfiance. Ces populations traquées en permanence auront-elles une interprétation objective de l’opération de recensement ? Ces Ivoiriens à peine tolérés chez eux peuvent-ils deviner autre chose qu’un subterfuge destiné soit à les arrêter, soit à les déposséder de leurs biens ? Comment dans ces conditions peut-on espérer réaliser un recensement digne de ce nom ?
3°/ La gouvernance judiciaire en place n’est pas de nature à favoriser le déroulement d’une opération aussi déterminante quant à la planification du développement durable d’un pays qui sort de dix années de guerre civile, ou à régler dans la transparence et l’équité les fausses déclarations éventuelles et autres problèmes découlant de cette opération. En tout état de cause, nul ne peut nier que les pro-Gbagbo sont confrontés à une justice à sens unique, c’est-à-dire, une justice à pour laquelle seuls les pro-Gbagbo sont a priori coupables et les pro-Ouattara, innocents.
4°/ De manière générale, le régime en place est un régime exclusionniste dont la logique est perceptible à travers non seulement cette justice des vainqueurs, mais aussi dans la volonté de rattrapage ethnique telle qu’énoncée par le Chef de l’Etat lui-même. Le Président Alassane Dramane Ouattara, a effectué une visite d’Etat en France du 25 au 28 janvier 2012. Le 25 janvier 2012, répondant à une question du journaliste Vincent Hugeux de l’Express, relative à la promotion des cadres du Nord de la Côte d’Ivoire, sa région d’origine, Monsieur Ouattara assure : « il s’agit d’un simple rattrapage. Sous Gbagbo, les communautés du Nord, soit 40% de la population, étaient exclues des postes de responsabilité. S’agissant des hauts grades de l’armée, j’ai eu à négocier avec les officiers des ex-Forces nouvelles (FN, ancienne rébellion nordiste), qui voulaient tous les postes. Et j’ai eu à imposer cet équilibre dans la hiérarchie militaire jusqu’au niveau de commandement : le n°1 des FN, flanqué d’un n°2 de l’armée régulière tous grades confondus, il y a 12% de nordistes, dans la police, 15% dans la gendarmerie et 40% environ dans l’armée… Sur ce terrain-là, on ne peut rien me reprocher »
La position du FPI
C’est pourquoi,
Le FPI marque son opposition à ce projet dont les conditions de réussite sont loin d’être réunies.
Le FPI considère cette opération de dénombrement comme une occasion de gaspillage ou de détournement de deniers publics devant permettre au RDR de rétribuer allègrement ses partisans pour autant que ces derniers seront les seuls à être recrutés, au nom précisément de la politique de rattrapage à l’œuvre dans le pays.
Par voie de conséquence, le FPI demande :
- Au Gouvernement de différer la réalisation du RGPH-2013 ;
- Aux Organisations Internationales, notamment à la Commission de Statistique de l’ONU, à l’Union Européenne ainsi qu’aux Etats-Unis et à la France, de ne pas accorder leur soutien aussi longtemps que la Côte d’Ivoire n’aura pas retrouvé la normalité républicaine et démocratique, conditions sine qua non de tout processus de recensement fiable.
Fait à Abidjan, le 27 décembre 2013
Le Secrétaire Général & Porte-parole
Laurent AKOUN