Il y a des signes qui ne trompent pas. Le FPI aujourd’hui a l’allure d’un « bateau ivre ». Affi N’Guessan et ses camarades sont à la recherche de nouveaux repères. Comme une armée mexicaine, l’ex-parti au pouvoir va actuellement dans tous les sens. Samedi dernier au Baron, cette perte de sérénité a encore éclaté au grand jour. La question de libération de Laurent Gbagbo montre qu’au FPI, des dissensions graves subsistent. Si pour Affi N’Guessan, lui qui veut remplacer le père, la libération de l’ex-chef de l’Etat n’est pas un préalable, pour son fils Michel, c’est une question d’intérêt national. Ce télescopage pourrait paraitre anodin pour le citoyen lambda. Mais pour les habitués du marigot politique ivoirien, il est révélateur d’un drame intérieur que vivent les dirigeants actuels du parti qui a dirigé la Côte d’Ivoire pendant une décennie. Le FPI est à la croisée des chemins. Les caciques et les séides de la refondation n’ont pas prévu le scenario qui se déroule en ce moment. Dès la chute de Laurent Gbagbo, le 11 avril 2011, les stratèges de l’ancien ordre avaient prédit que le nouveau régime ne tiendrait pas trois mois. Des hommes de Dieu avaient même appuyé cette éventualité avec des soi-disant révélations venues directement de la bouche de l’Eternel des armées. A l’expiration des trois mois, la réalisation du miracle a été portée à six mois. Mais rien n’y fit. Laurent Gbagbo a plutôt été transféré à La Haye. Malgré tout, le FPI et ses relais, avec une assurance déconcertante, lançaient à la face de qui voulait les entendre, que leur champion ferait un retour triomphal en Côte d’Ivoire pour reprendre le trône duquel il avait été éjecté. A partir de juin 2012, les bruits de botte ont commencé à se faire entendre. Des attaques sporadiques ont été menés contre les positions des Forces républicaines de Côte d’Ivoire, ponctuées par des affrontements intercommunautaires dans certaines villes de l’intérieur, sous fond de contestation de la présence l’armée sur le terrain. A Arrah, à Sikensi, à Dabou et dans la région de la Mé, des tentatives de soulèvement populaire ont fait croire aux diseurs de bonne aventure qu’une révolution était en marche en Côte d’Ivoire. On a même parlé de « la révolution des 77 jours » qui viendrait balayer le régime du président Ouattara. Le pic de ces attaques a été atteint avec le guet-apens sanglant tendu par ces inconnus « trop connus » aux sept Casques bleus du contingent nigérien de l’ONUCI à Para, dans la région de Taï. Le 5 août 2012, veille de la fête nationale, les Abidjanais se réveilleront avec l’horreur d’une attaque à l’arme lourde, celle du camp d’Akouédo. Le bilan est lourd. Six morts dans les rangs des FRCI et un mort dans celui des assaillants. C’est le coup d’envoi d’une série d’attaques qui fera au total plus de dix morts chez les FRCI. Comme une épidémie, les positions des FRCI à Agboville, Grand-Bassam, Bonoua, Dabou, Toulépleu, essuieront assauts après assauts, dont l’un particulièrement violent à Noé, a même failli brouiller durablement les relations entre Abidjan et Accra. Les autorités ivoiriennes qui soupçonnaient leurs homologues ghanéens de soutenir les fauteurs de trouble pro-Gbagbo tapis au pays de Kwame Nkrumah, ont décidé de fermer la frontière commune entre les deux Etats. Finalement, un terrain d’entente a été trouvé et les relations entre les deux pays ont repris. Mieux, l’arrivée du président Dramani Mahama à la tête du Ghana a changé la donne. La collaboration des nouvelles autorités avec la Côte d’Ivoire a porté des coups durs dans le camp des pro-Gbagbo. L’arrestation du commandant Jean-Noël Abéhi et de Charles Blé Goudé, agitateurs invétérés du chiffon rouge de la vendetta anti-Ouattara, a fini par ruiner les derniers espoirs des va-t-en guerre nostalgiques de l’ancien ordre. A la fin de l’année 2012, le régime était toujours en place, solidement enraciné dans ses fondements. « Je suis indéboulonnable », avait alors lancé, quelque peu amusé, lors d’une visite en République démocratique du Congo, le chef de l’Etat à l’intention de tous ceux qui rêvaient d’un « match retour ».
Mais la sortie de prison, en aout 2013, de Pascal Affi N’Guessan allait réveiller, chez les extrémistes du FPI quelque peu rongés par le désenchantement face à cette succession d’échecs, la foi en un remake de la crise postélectorale. Il faut dire que le discours de celui qui s’était rapidement taillé un destin national, pour virulent, ordurier et on ne plus séditieux qu’il était, leur en donnait les arguments. Le désormais numéro un du FPI, comme si la seule force du verbe – même malveillant à plus d’un égard – aurait pu déchoir le pouvoir d’Abidjan, se lancera dans une véritable campagne de dénigrement systématique du gouvernement Ouattara. Une tournée nationale a même été organisée pour galvaniser et chauffer à blanc les inconditionnels de Laurent Gbagbo, pour qui le « miracle » n’était plus de l’ordre de l’impossible. Surtout qu’un nouveau concept, les « états généraux de la République », brassé à tout vent par un Affi convaincu qu’il pouvait en imposer à ses vis-à-vis, faisait rage, si ce n’est au sein de l’ensemble des populations, tout au moins chez une bonne partie des sectateurs du parti frontiste.
Las ! Tout ce mal que s’est donné Affi ne donnera rien ! Ou plutôt si : une réponse à la mesure du toupet osé par un individu qui, quoiqu’en liberté provisoire, se croyait si important pour porter un coup d’arrêt à la marche du pays. Celle du chef de l’Etat, Alassane Ouattara, qui tranchera lors d’une visite d’Etat à l’intérieur du pays en ces termes : « Les états généraux ne m’intéressent pas. C’est du bavardage inutile ». Le FPI sera plutôt appelé à la table de négociations pour régler ses problèmes avec le pouvoir, dans le cadre du dialogue républicain. Une véritable douche froide. Du coup, l’appel lancé par le chef de l’Etat à l’endroit des exilés pro-Gbagbo semble ne pas être tombé dans des oreilles de sourds. Après les 155 ex-FDS rentrés d’exil, vendredi dernier, c’est Marcel Gossio, l’ancien directeur général du Port autonome d’Abidjan, l’un des financiers de l’ancien régime qui décide de mettre fin à son exil au Maroc pour regagner Abidjan. Des grosses têtes comme Alain Dogou, l’ancien sécurocrate de Laurent Gbagbo, sont annoncés pour les prochains jours. La raison de toute cette effervescence est claire. Les inconditionnels de Laurent Gbagbo ont compris que l’agenda secret que les extrémistes du ‘’Gbagboland’’ leur faisaient miroiter pour les maintenir otage d’un exil qu’ils supportent de moins en moins, était en réalité un miroir aux alouettes. Le voyage en catastrophe effectué actuellement au Ghana et au Togo par les ministres Dano Djédjé et Amani N’Guessan auprès des réfugiés pro-Gbagbo est le signe avant-coureur d’une météo catastrophique qui risque de faire couler le « bateau ivre » qu’est devenu le FPI. Même si jusqu’ici il essaye tant bien que mal de résister à la bourrasque.
Jean-Claude Coulibaly
Mais la sortie de prison, en aout 2013, de Pascal Affi N’Guessan allait réveiller, chez les extrémistes du FPI quelque peu rongés par le désenchantement face à cette succession d’échecs, la foi en un remake de la crise postélectorale. Il faut dire que le discours de celui qui s’était rapidement taillé un destin national, pour virulent, ordurier et on ne plus séditieux qu’il était, leur en donnait les arguments. Le désormais numéro un du FPI, comme si la seule force du verbe – même malveillant à plus d’un égard – aurait pu déchoir le pouvoir d’Abidjan, se lancera dans une véritable campagne de dénigrement systématique du gouvernement Ouattara. Une tournée nationale a même été organisée pour galvaniser et chauffer à blanc les inconditionnels de Laurent Gbagbo, pour qui le « miracle » n’était plus de l’ordre de l’impossible. Surtout qu’un nouveau concept, les « états généraux de la République », brassé à tout vent par un Affi convaincu qu’il pouvait en imposer à ses vis-à-vis, faisait rage, si ce n’est au sein de l’ensemble des populations, tout au moins chez une bonne partie des sectateurs du parti frontiste.
Las ! Tout ce mal que s’est donné Affi ne donnera rien ! Ou plutôt si : une réponse à la mesure du toupet osé par un individu qui, quoiqu’en liberté provisoire, se croyait si important pour porter un coup d’arrêt à la marche du pays. Celle du chef de l’Etat, Alassane Ouattara, qui tranchera lors d’une visite d’Etat à l’intérieur du pays en ces termes : « Les états généraux ne m’intéressent pas. C’est du bavardage inutile ». Le FPI sera plutôt appelé à la table de négociations pour régler ses problèmes avec le pouvoir, dans le cadre du dialogue républicain. Une véritable douche froide. Du coup, l’appel lancé par le chef de l’Etat à l’endroit des exilés pro-Gbagbo semble ne pas être tombé dans des oreilles de sourds. Après les 155 ex-FDS rentrés d’exil, vendredi dernier, c’est Marcel Gossio, l’ancien directeur général du Port autonome d’Abidjan, l’un des financiers de l’ancien régime qui décide de mettre fin à son exil au Maroc pour regagner Abidjan. Des grosses têtes comme Alain Dogou, l’ancien sécurocrate de Laurent Gbagbo, sont annoncés pour les prochains jours. La raison de toute cette effervescence est claire. Les inconditionnels de Laurent Gbagbo ont compris que l’agenda secret que les extrémistes du ‘’Gbagboland’’ leur faisaient miroiter pour les maintenir otage d’un exil qu’ils supportent de moins en moins, était en réalité un miroir aux alouettes. Le voyage en catastrophe effectué actuellement au Ghana et au Togo par les ministres Dano Djédjé et Amani N’Guessan auprès des réfugiés pro-Gbagbo est le signe avant-coureur d’une météo catastrophique qui risque de faire couler le « bateau ivre » qu’est devenu le FPI. Même si jusqu’ici il essaye tant bien que mal de résister à la bourrasque.
Jean-Claude Coulibaly