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Politique Publié le lundi 3 février 2014 | Le Patriote

Interview/ Allou Wanyou Eugene (Ancien directeur de protocole d’Etat de Laurent Gbagbo) au FPI : “Ce ne sont pas les cris qui vont libérer Laurent Gbagbo de la CPI”

L'ancien directeur de protocole de l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo a été distingué par la République de Côte d'Ivoire qui vient de lui décerner la médaille de commandeur dans l'ordre national. Il s'est prêté aux questions des journalistes après cette cérémonie de distinction qui s'est déroulée le samedi dernier à la préfecture de Gagnoa. Dans cet entretien, il répond à tout sans faux fuyant.
Le patriote : Que devient l'ambassadeur Allou Eugène après la chute du FPI du pouvoir ?
S.E.M. Allou Eugène : Vous vous trompez sur ma fonction. Je suis Ambassadeur, je sers l'Etat de Côte d'Ivoire et je continuerai à le servir. J'ai été d'abord chef de cabinet du président Gbagbo, ensuite directeur du protocole d'Etat de 2002 à 2008. J'ai été affecté au Cameroun pour servir l'Etat de Côte d'Ivoire. C'est le président Gbagbo qui m'a affecté. J'y étais pour défendre les intérêts de la République. A la suite de la crise, le président Alassane Ouattara a
rappelé certains ambassadeurs dont moi au département central, au ministère d'Etat ministère des Affaires étrangères. Je suis donc un ambassadeur mis à la disposition de ce ministère. Et j'attends une affectation.

Le Patriote : Quels sont les actes que vous posez dans le sens de la réconciliation ?
A W E : Quand le président Ouattara est venu à Gagnoa pour l'inauguration de l'hôpital général de cette cité, j'étais présent pour l'accueillir, parce qu'étant ambassadeur, c'est mon chef. C'est un acte républicain. Quand je passe dans les rues, certaines personnes disent : « Voilà l'homme de Gbagbo ». Ma présence à cette cérémonie était donc beaucoup plus significative. Ceux qui étaient habités par une peur quelconque peuvent toujours être présents à ces cérémonies sans être inquiétés, car j'y étais et j'ai quitté le lieu tel que j'y suis arrivé. Ma présence aux différentes cérémonies officielles organisées dans le département de Gagnoa est un acte de réconciliation. Quand un chef arrive dans ta région et que tu t'absentes, je ne sais pas comment on peut qualifier l'acte que tu poses à cet instant. Le Président de l'Assemblée nationale, Guillaume Soro, m'a appelé pour me dire qu'il vient à Gagnoa à l'invitation de l'association des chefs de village. Il m'a dit qu'il vient à Bougrou chez moi pour me saluer. Et vous voulez que je lui dise non. Je l'ai reçu dans une ambiance due à son rang de deuxième homme de l'Etat de Côte d'Ivoire. Il a eu les honneurs dus à son rang. Ceux qui n'avaient jamais vu Soro l'ont vu ce jour-là dans mon village. C'est un acte de réconciliation et d'apaisement. Toutes les communautés présentes à Bougrou, et il y en a plusieurs, ont fait chacune un don au président Soro. Dans mon village, quand je fais une manifestation, toutes les communautés sont associées pour l'organisation et les différentes tâches pour la réussite de cette manifestation. Le « vivre ensemble » est une réalité dans mon village à Bougrou et non un slogan creux. Je pose donc des actes de réconciliation.

Le Patriote : Vous dites que vous ne faites plus de politique, alors que vous êtes toujours au FPI. Comment expliquez-vous cela ?
A W E : Il est important de relever ce que les gens ne savent pas de la République. Je proviens du FPI. Je ne peux pas le nier. Rassurez-vous, le jour que le président de la République Alassane Ouattara ne sera plus au pouvoir, après les services qu'il aura rendu à la Côte d'Ivoire toute entière et les mandats que le peuple lui accordera, pensez-vous qu'Ahmed Bakayoko dira qu'il n'est pas du RDR ? Et pourtant, alors qu'il est au RDR, Gbagbo l'avait nommé ministre. L’appartenance à un parti politique d'un homme ne doit pas et ne peut pas justifier le service qu'il doit accomplir au niveau de l'Etat. J'ai travaillé en son temps avec des gens du RDR dans le cadre du Front républicain. Quand j'ai été nommé ambassadeur, j'ai adressé des correspondances au président Affi N'Guessan du FPI pour lui dire qu’Allou Eugène que je suis ne faisais plus partie de la direction du FPI. Ceci pour respecter le statut du corps diplomatique. Un Ambassadeur en poste ne peut pas prétendre être dans une direction d'un parti politique, même si ce parti est au pouvoir. J'ai donc rendu ma démission au moment où Gbagbo Laurent était Président de la République. J'en ai fait de même avec le quotidien « Notre Voie », dont j'étais le directeur de publication, pour lui dire qu'il y avait incompatibilité avec mes nouvelles fonctions. Un Ambassadeur en poste ne peut pas être directeur de publication d'un journal. Je suis à la lettre ce qu'il faut faire et ce qu'il ne faut pas faire sans emprunter des méandres. C'est d'ailleurs pour cette raison que l'Etat de Côte d'Ivoire vient de me décerner une médaille de commandeur dans l'ordre national, ce 1er février 2014. Voila ce qui explique mon comportement. Tout Ambassadeur doit être fidèle, loyal aux institutions de la République. Je ne peux ni être présent ni prendre la parole aux meetings du FPI, parce que ma fonction ne m'y autorise pas. Si je suis à la retraite, alors je peux prendre librement la carte d'un parti politique de mon choix. Pour certains, je suis au RDR. Ce qui est faux. Mais une fois encore, je le répète, tous les ambassadeurs nommés par le président de la République n'ont aucun droit d'assister à une réunion politique, fussent-ils du RDR, qui est en ce moment au pouvoir. Parce que tout ambassadeur ivoirien représente l'Etat de Côte d'Ivoire là où il est en poste. Le travail d'un ambassadeur, c'est de servir l'Etat. C'est l'une des fonctions qui exige honnêteté, loyauté au président de la République du moment.

Le Patriote : Quelles sont les démarches que vous menez pour la libération de Laurent Gbagbo et qu'elles sont les sentiments qui vous animent en recevant cette décoration ?
A W E : Je n'ai rien à faire concernant la libération de Gbagbo. Là où il se trouve, il est confronté à un procès. Il y a des avocats pour le défendre et lui-même, il se défend. La CPI est une institution qui n'existe pas en Côte d'Ivoire. Justement, c’est mon comportement vis-à-vis de la République qui peut amener les gens à dire que la Côte d'Ivoire est apaisée. Ce qui est passé est passé et ce sont les autorités qui, ayant constaté notre comportement, peuvent faire quelque chose. Il n'y a que le président Alassane Ouattara qui peut plaider le cas de Laurent Gbagbo. Ceux qui crient : « Libérez Gbagbo », peuvent toujours crier. Car, ce ne sont leurs cris qui peuvent le libérer. Où étaient-ils au moment de son transfert à La Haye ? Pourquoi n'ont-ils pas empêché l'avion de décoller ? Il y a donc à notre niveau ce qu'on peut faire et ce qu'on ne peut pas faire. Ce que nous pouvons faire, c'est notre comportement vis-à-vis des autorités actuelles, qui doit être républicain. Cela est à mon sens un aspect fondamental et primordial. Il suffit que le président de la République dise : « Libérez les prisonniers qui sont ici ». Et ce sera fait aussitôt en prenant une loi d'amnistie. Je suis respectueux du statut du corps diplomatique. Concernant mes sentiments par rapport à la décoration, sachez que c'est avec fierté que je porte cette médaille qui est la reconnaissance de l'Etat pour service accompli. Le président de la République a posé des actes en facilitant le retour des exilés. C'est son rôle en tant que notre père à tous, de ramener tous les fils de Côte d'Ivoire dans leur pays. Si mon comportement est différent de celui des autres qui sont encore au FPI, c'est parce que je ne souhaite plus ni aujourd'hui ni demain que ce qui s’est passé, se répète encore dans notre pays. Il nous faut aller de l'avant. On ne peut pas vivre dans un pays avec de la haine. Celui qui se sent victime doit pardonner. Même les actes graves doivent être pardonnés. Pour ma part, j'ai déjà pardonné. Je vous rappelle que, dans cette crise, mon petit frère a été tué. Mes enfants ont été traumatisés comme beaucoup d'autres, mais il faut pardonner. Et j'invite les Ivoiriens à se pardonner pour construire une nation forte, résolument engagée sur les sentiers du développement.

Réalisée par Coulibaly Zoumana et Gervais Amany
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