Bien de raisons expliquent le changement de discours du président du Front populaire ivoirien (Fpi). A part certaines plus évidentes, l’opposant justifie lui-même son ton conciliant.
Aveu d’un frontiste. « Après le meeting de Koumassi, rapporte Elo Ouégnin, un ami m’a dit ceci : vous au Fpi, vous parlez maintenant comme des pasteurs hein ! » Ces propos sont du secrétaire fédéral de Treichville. Il les a tenus publiquement, le dimanche 16 février, sur un podium à la Place Ernesto Djédjé. Un espace, terre-plein, dominé par des tours de la cité résidentielle Arrhas, à proximité de la ‘’gare de Bassam‘’ de la commune. Il est un plus de 15h, il y a foule en ce lieu qui sert d’habitude d’espace de jeux aux riverains. C’est que la direction du parti de Laurent Gbagbo y a convié ses militants à un meeting. Il s’inscrit dans le cadre de la tournée de remobilisation qu’elle a initiée, le vendredi 14 février, dans le district d’Abidjan. Comme l’« ami » de l’orateur, l’opinion nationale constate aussi qu’«Affi met balle à terre ».
Au demeurant, l’ancien Premier ministre (2000-2002) ne menace plus. Dans ses récentes sorties, en tout cas depuis l’entame de sa tournée, M. Affi a le verbe apaisé et conciliant. Morceaux choisis d’une reconversion langagière : « Le soleil de l’espoir s’est levé… La Côte d’Ivoire est en marche… Il s’agit maintenant d’organiser de la reconstruction du pays ». En somme, l’auteur de cet appel à l’ «espérance et (à) la responsabilité » semble se soucier d’amener ses camarades à « rester dans la ligne de la réconciliation et du dialogue ».
Tout observateur de la scène politique peut être amené à s’interroger sur les motivations d’un assouplissement du discours. Le leader d’opinion explique lui-même ce revirement. Il dit que sans le bon ton, le régime et la communauté internationale ne relâcheront pas son mentor, Laurent Gbagbo. Celui-ci est en détention depuis fin décembre 2012 à La Haye pour ‘’crime contre l’humanité‘’, selon la Cour pénale internationale (Cpi). « Aujourd’hui, au Fpi, nous devons faire preuve d’intelligence dans notre combat (…) Aidons-les à libérer Gbagbo par notre attitude, par notre discours », oriente-t-il. Dans son entendement, la « résistance » doit être « positive » afin qu’elle convainque les « Occidentaux » à changer d’opinion sur les partisans de l’ancien chef d’Etat (2000-2010). C’est pourquoi Affi n’appelle pas à résister au dialogue, mais à rester dans la ligne de la réconciliation. « Si nous restons dans la guerre, la division, il n’y a aura pas d’avenir pour la Côte d’Ivoire », blâme-t-il toute idée de vengeance. La moralité d’un tel enseignement est que le changement de mentalité implique la renonciation à toute parole successible d’être qualifiée d’arrogante. A la réalité, la rupture n’était pas loin avec le parti au pouvoir. En témoigne la ferme mise en garde de son secrétaire général par intérim. « Je voudrais lancer un appel à la responsabilité et au souvenir aux dirigeants du Fpi, notamment à son président qui, fraîchement sorti de prison, dans des envolées lyriques, n’a plus reconnu la Côte d’Ivoire (…) Je voudrais l’interpeller pour que la sagesse l’habite », prévenait Amadou Soumahoro, fin septembre. Pascal Affi N’guessan a pu être interpellé par la crispation d’une frange de frontistes. Ceux-là, pour avoir été échaudés par les affres de la crise postélectorale, préféreraient garder le profil bas que de s’illustrer par des actes de bravade. S’ils se tiennent longtemps à carreaux, distants de leur famille politique, il va sans dire que le Fpi perdra des électeurs ou même de la ressource humaine. Alors il était plus qu’impérieux pour la direction du Fpi de récupérer les militants résignés en allant leur dire qu’ « il n’y a plus de raison à avoir peur ». Le faisant, l’ex-parti au pouvoir garantit le succès de la politique de reconstitution de ses rangs disloqués par une crise sans merci. Cela est d’autant plus vrai que le numéro Un des frontistes s’interroge : « que sommes-nous sans vous, les militants ? ».
Il a pu mettre également un peu d’eau dans son vin pour une raison d’éthique. Le Fpi revendique la paternité du dialogue politique post-crise. Il dit être « le premier » à avoir « demandé » à discuter avec le gouvernement, en septembre 2011. Au-delà de cela, il dit se caractériser par la politique de l’ ‘’asseyons-nous et discutons‘’ chère à son mentor. Alors question, comment peut-on être demandeur du dialogue et anéantir les chances de l’obtenir par des propos outranciers? On pourrait dire à la décharge du président du Fpi qu’il s’approprie les observations faites à lui et à ses homologues politiques par les diplomates accrédités en Côte d’Ivoire. « Que l’exemple de ce grand Africain qui nous a laissés récemment, l’apôtre de la paix et des droits inaliénables, le Président Nelson Mandela, nous inspire afin d’être nous aussi animés par la force non violente de la vérité et de la justice, de l’amour et de la fraternité. Que le courage du dialogue et de la réconciliation prévale donc sur les tentations de vengeance, d’arrogance et de la corruption», recadrait le Nonce apostolique, Joseph Spiteri, le lundi 6 janvier, à la cérémonie de présentation de vœux au président de la République. En somme, le Fpi adopte une communication plus souple pour ne pas paraître comme l’obstacle au processus de paix et à la libération de Laurent Gbagbo.
Bidi Ignace
Aveu d’un frontiste. « Après le meeting de Koumassi, rapporte Elo Ouégnin, un ami m’a dit ceci : vous au Fpi, vous parlez maintenant comme des pasteurs hein ! » Ces propos sont du secrétaire fédéral de Treichville. Il les a tenus publiquement, le dimanche 16 février, sur un podium à la Place Ernesto Djédjé. Un espace, terre-plein, dominé par des tours de la cité résidentielle Arrhas, à proximité de la ‘’gare de Bassam‘’ de la commune. Il est un plus de 15h, il y a foule en ce lieu qui sert d’habitude d’espace de jeux aux riverains. C’est que la direction du parti de Laurent Gbagbo y a convié ses militants à un meeting. Il s’inscrit dans le cadre de la tournée de remobilisation qu’elle a initiée, le vendredi 14 février, dans le district d’Abidjan. Comme l’« ami » de l’orateur, l’opinion nationale constate aussi qu’«Affi met balle à terre ».
Au demeurant, l’ancien Premier ministre (2000-2002) ne menace plus. Dans ses récentes sorties, en tout cas depuis l’entame de sa tournée, M. Affi a le verbe apaisé et conciliant. Morceaux choisis d’une reconversion langagière : « Le soleil de l’espoir s’est levé… La Côte d’Ivoire est en marche… Il s’agit maintenant d’organiser de la reconstruction du pays ». En somme, l’auteur de cet appel à l’ «espérance et (à) la responsabilité » semble se soucier d’amener ses camarades à « rester dans la ligne de la réconciliation et du dialogue ».
Tout observateur de la scène politique peut être amené à s’interroger sur les motivations d’un assouplissement du discours. Le leader d’opinion explique lui-même ce revirement. Il dit que sans le bon ton, le régime et la communauté internationale ne relâcheront pas son mentor, Laurent Gbagbo. Celui-ci est en détention depuis fin décembre 2012 à La Haye pour ‘’crime contre l’humanité‘’, selon la Cour pénale internationale (Cpi). « Aujourd’hui, au Fpi, nous devons faire preuve d’intelligence dans notre combat (…) Aidons-les à libérer Gbagbo par notre attitude, par notre discours », oriente-t-il. Dans son entendement, la « résistance » doit être « positive » afin qu’elle convainque les « Occidentaux » à changer d’opinion sur les partisans de l’ancien chef d’Etat (2000-2010). C’est pourquoi Affi n’appelle pas à résister au dialogue, mais à rester dans la ligne de la réconciliation. « Si nous restons dans la guerre, la division, il n’y a aura pas d’avenir pour la Côte d’Ivoire », blâme-t-il toute idée de vengeance. La moralité d’un tel enseignement est que le changement de mentalité implique la renonciation à toute parole successible d’être qualifiée d’arrogante. A la réalité, la rupture n’était pas loin avec le parti au pouvoir. En témoigne la ferme mise en garde de son secrétaire général par intérim. « Je voudrais lancer un appel à la responsabilité et au souvenir aux dirigeants du Fpi, notamment à son président qui, fraîchement sorti de prison, dans des envolées lyriques, n’a plus reconnu la Côte d’Ivoire (…) Je voudrais l’interpeller pour que la sagesse l’habite », prévenait Amadou Soumahoro, fin septembre. Pascal Affi N’guessan a pu être interpellé par la crispation d’une frange de frontistes. Ceux-là, pour avoir été échaudés par les affres de la crise postélectorale, préféreraient garder le profil bas que de s’illustrer par des actes de bravade. S’ils se tiennent longtemps à carreaux, distants de leur famille politique, il va sans dire que le Fpi perdra des électeurs ou même de la ressource humaine. Alors il était plus qu’impérieux pour la direction du Fpi de récupérer les militants résignés en allant leur dire qu’ « il n’y a plus de raison à avoir peur ». Le faisant, l’ex-parti au pouvoir garantit le succès de la politique de reconstitution de ses rangs disloqués par une crise sans merci. Cela est d’autant plus vrai que le numéro Un des frontistes s’interroge : « que sommes-nous sans vous, les militants ? ».
Il a pu mettre également un peu d’eau dans son vin pour une raison d’éthique. Le Fpi revendique la paternité du dialogue politique post-crise. Il dit être « le premier » à avoir « demandé » à discuter avec le gouvernement, en septembre 2011. Au-delà de cela, il dit se caractériser par la politique de l’ ‘’asseyons-nous et discutons‘’ chère à son mentor. Alors question, comment peut-on être demandeur du dialogue et anéantir les chances de l’obtenir par des propos outranciers? On pourrait dire à la décharge du président du Fpi qu’il s’approprie les observations faites à lui et à ses homologues politiques par les diplomates accrédités en Côte d’Ivoire. « Que l’exemple de ce grand Africain qui nous a laissés récemment, l’apôtre de la paix et des droits inaliénables, le Président Nelson Mandela, nous inspire afin d’être nous aussi animés par la force non violente de la vérité et de la justice, de l’amour et de la fraternité. Que le courage du dialogue et de la réconciliation prévale donc sur les tentations de vengeance, d’arrogance et de la corruption», recadrait le Nonce apostolique, Joseph Spiteri, le lundi 6 janvier, à la cérémonie de présentation de vœux au président de la République. En somme, le Fpi adopte une communication plus souple pour ne pas paraître comme l’obstacle au processus de paix et à la libération de Laurent Gbagbo.
Bidi Ignace